Modèles à gros grains pour la dynamique et la fixation des ions

Modèles à gros grains pour la dynamique et la fixation des ions

Stratégie de « coarse-graining »

Un modèle à gros grains (coarse-grained) représente un système par des interactions effectives entre groupes d’atomes ou de particules (les gros grains). D’une certaine façon, il s’agit du prolongement de l’approche consistant à passer d’une description quantique (en termes de noyaux et de densité électronique) à une description classique (en terme de champ de force décrivant les interactions entre atomes). La procédure permettant de passer d’une description microscopique à une autre à gros grains s’appelle « gros-grainisation » (coarse-graining) ou « nivellement », même si aucun terme ne s’est encore imposé en français.

L’intérêt d’une telle approche est de simplifier la description d’un système en ne retenant que les caractéristiques pertinentes pour l’étude d’un phénomène donné. Elle s’accompagne nécessairement d’une perte d’information sur le système, et il convient de sélectionner les bonnes informations à garder dans le modèle à gros grains. Nous en avons déjà présenté un exemple au chapitre précédent avec la dynamique de Langevin, qui simplifie la description du solvant en ne gardant, dans sa forme la plus simple, qu’un terme de friction pour son action sur le soluté. Nous suivons ici cette démarche dans le cas de la dynamique interfoliaire des ions dans l’argile. 

Résultats des simulations microscopiques

La simulation moléculaire a permis d’obtenir des données précises sur la diffusion de l’eau et des ions dans les espaces interfoliaires d’argiles peu hydratées. En plus du calcul des coefficients de diffusion de chacune des espèces, il a même été possible de calculer pour l’eau les fonctions de diffusion I(q, t) et S (q, ω), introduites au chapitre 2 dans le cas des ions, pour les comparer aux données de diffusion quasi-élastique des neutrons et valider ainsi le modèle microscopique utilisé dans les simulations [33]. Trajectoires Nous rappelons ici certains résultats obtenus au laboratoire par Virginie Marry et Natalie Malikova durant leurs thèses. L’étude des trajectoires des ions révèle tout d’abord que leur mouvement dans une argile peu hydratée (voir le cas d’argiles sodiques et césiques monohydratées sur la figure 5.1) est quasi-bidimensionnel, puisque leur coordonnée z normale aux feuillets reste pratiquement constante.

De plus, le comportement diffusif le long des feuillets dépend de la nature du contre-ion : le sodium, qui reste hydraté dans l’espace interfoliaire, a un comportement « brownien » proche de la diffusion dans de l’eau bulk, tandis que le césium, qui se déshydrate partiellement pour faire entrer des oxygènes de surface dans sa première sphère de coordination, diffuse plutôt par sauts de site en site. Cette différence de comportement persiste à haute température.

Distributions ioniques

Cette différence de comportement peut également être discutée au niveau de la densité d’équilibre des cations. Les profils de densité pour les ions Li+ , Na+ , K+ et Cs+ ont été calculés par Virginie Marry pour une argile monohydratée. Les feuillets sont contraints dans une position où les cavités formées par les atomes de silicium et d’oxygène de feuillets différents se font face, afin de faciliter la comparaison. Les distances interfoliaires sont préalablement équilibrées par une simulation Monte-Carlo dans l’ensemble (N, σzz=1 bar, T=298 K), et les distances d’équilibre sont respectivement 12.25 Å, 12.3 Å, 12.4 Å et 12.7 Å pour Li+ , Na+ , K+ et Cs+ .

Ces résultats sont en accord avec les mesures de diffraction des rayons X [15, 34, 242, 243] et d’autres résultats de simulations de montmorillonites [62–65]. Pour chaque cation, deux à quatre simulations de dynamique moléculaire d’une durée de 720 ps ont été effectuées dans l’ensemble NVT. Les distributions ioniques le long des feuillets pour les quatre cations sont données sur la figure 5.2. Les gros cations (K+ et Cs+ ) sont en moyenne principalement au-dessus des atomes de silicium, et passent peu de temps hors de ces « sites ». Ils complètent leur sphère de coordination en y incluant trois atomes d’oxygène de surface. Les cations plus petits (Li+ et Na+ ) préfèrent les oxygènes de surface plutôt que d’être à l’aplomb des atomes de silicium ou dans les cavités hexagonales. Lorsque les feuillets ne sont pas contraints latéralement, les cavités hexagonale

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