MODELE D’AIDE A LA DECISION POUR LA CONCEPTION DE CHAINES LOGISTIQUES ROBUSTES
A ce stade du travail, nous disposons de moyens permettant de générer des scénarios réalistes de demande. Pour autant, l’objectif final de notre projet de recherche est de soutenir la démarche de conception de Chaînes Logistiques Humanitaires (CLH) qui présente des garanties en termes de résilience et d’efficience. Nous allons donc développer dans ce chapitre le cœur de notre contribution en nous intéressant à la définition d’un modèle d’aide à la décision pour la conception de CLH robustes. Cette présentation sera précédée d’un état de l’art relatif au sujet de la conception de chaînes logistiques d’une part, et des approches existantes vis-à-vis des problèmes dits de localisation dans les chaînes logistiques traditionnelles et humanitaires d’autre part. chaîne logistique concerne à la fois la structure physique de la chaîne et le système de pilotage de ses différentes activités (approvisionnement, production, stockage, distribution, etc.) et traite tout ou partie des localisations des centres de distribution, des choix des fournisseurs, des affectations des clients aux centres localisés et des centres aux fournisseurs choisis. Dans les entreprises industrielles, les chaînes logistiques sont composées de cinq types d’entités (Klibi et al, 2010b) : Quels fournisseurs doivent approvisionner chacune des installations ? La conception physique implique de prendre en premier lieu des décisions stratégiques sur le nombre, l’emplacement, la capacité des installations de production-distribution de l’entreprise ou de l’ensemble de sociétés qui collaborent, afin de fournir des biens à un ensemble de clients. La localisation des diverses unités va influencer très fortement les performances logistiques de l’entreprise et son accès au marché. Comme il est complexe et coûteux sur les plans économique et humain d’ouvrir et de fermer une unité, les décisions portant sur la localisation relèvent du niveau stratégique. A ce niveau le plus large, le problème de localisation consiste à positionner les diverses unités composant l’entreprise (sites de production, entrepôts, points de ventes, agences, etc.) au travers des territoires couverts. En second lieu, la conception de la chaine implique de prendre des décisions relatives à la sélection des fournisseurs, sous-traitants, prestataires logistiques (3PL et 4PL). La conception peut aussi porter sur la détermination de l’offre produit à mettre sur le marché. Les décisions de conception du réseau ont un impact significatif sur les performances, car elles déterminent la configuration de la chaîne logistique et elles définissent les contraintes de pilotage de la chaine, que ce soit pour diminuer le coût ou pour accroître la réactivité.
Ensuite, il faut déterminer si l’organisation de la chaîne logistique utilisée est physiquement efficace ou réactive sur le marché. Cela permettra de déterminer la nature des produits et les priorités de la chaîne. Fisher (1997) propose d’utiliser une matrice 2 x 2 (voir la figure suivante) qui croise le type de produits (fonctionnels / innovants) et le type de chaîne (efficace / réactif). En utilisant la matrice, il est possible de déterminer si le processus utilisé pour l’approvisionnement des produits est adapté au type produit/service, à savoir : Une préoccupation majeure des entreprises contemporaines lors de la conception de leur chaîne logistique est la prise en compte des risques. Nous considérons ici la définition normée du risque : un risque est caractérisé comme le produit probabilité × impact ou plus précisément comme « l’effet de l’incertitude sur l’atteinte des objectifs » (International Organization for Standardization, ISO 31000 Guide 73 : 2009, definition 1.1). Dans le contexte particulier des chaînes logistiques, le risque peut être défini comme la rencontre d’un événement – décision ou aléa – avec une situation, caractérisée par une incidence sur la performance de la chaîne (Marquès, 2010 : Lamothe, 2010). Les chaînes logistiques sont menacées par un large spectre d’événements qui sont la source de déficiences majeures sur la performance du réseau. Martha et Vratimos (2002), Semchi-Levi et al. (2002), Helferich et Cook (2002), Christopher et Lee (2004), Chopra et Sodhi (2004) et Sheffi (2005) en présentent plusieurs cas. Les catégories de risque pour les chaînes logistiques ont été identifiées par Christopher et Peck (2004), Chopra et Sodhi (2004), Kleindorfer et Saad (2005), Wagner et Bode (2006) et Tang (2006). Grossi et Kunreuther (2005) et Banks (2006) ont étudié la gravité de ces événements, ainsi que le comportement dans l’espace et le temps de l’état de crise généré. Cependant plusieurs auteurs soulignent que très peu de modèles existant considèrent les aspects incertains dans l’étude des chaînes (Goetschalckx et al., 2002 : Meixell et Gargeya, 2005 : Benyoucef, 2008). Parmi les multiples causes de perturbation, on peut mentionner : la pénurie d’approvisionnement, les grèves, les problèmes de transport, les erreurs humaines, l’évolution des goûts de la clientèle, les défaillances technologiques, les activités malveillantes, les difficultés financières voire la faillite de partenaires, les catastrophes naturelles ou d’origine humaine, etc. (Handfield et McCormack, 2008 : Deleris et Erhun, 2011). Plusieurs exemples illustrent cette réalité et démontrent que la notion de risque dans les chaînes logistiques n’est pas qu’une affaire de spécialistes humanitaires, loin s’en faut !