Missions de prévention et mandats de l’armateur hors couverture P&I

Mission dans un cadre contentieux

C’est dans un contexte contentieux sinon litigieux que la plupart des sinistres vont intervenir mettant en cause la responsabilité contractuelle du transporteur (section 1), mais aussi lors d’évènements et dommages causés à des tiers non liés contractuellement au navire ou à son armateur (section 2), comme les dommages aux installations portuaires, aux navires tiers, remorqueurs etc.., ou encore dommages aux tierces personnes susceptibles d’intervenir à bord ou à proximité.

Contentieux dans un cadre contractuel

L’armateur est le plus souvent aussi un transporteur émetteur de connaissements au titre des marchandises transportées, et les dommages ou manquants éventuellement subis par ces dernières vont générer des situations contentieuses ou litigieuses entrainant l’intervention du Correspondant.
Celui-ci sera alors sollicité, soit par le Capitaine soit par l’armateur ou bien souvent par les Clubs de Protection, directement au travers d’un message ou d’un appel téléphonique. Des instructions plus ou moins précises lui seront données selon les informations dont disposent le Capitaine ou ses armateurs sur la nature et l’étendue du sinistre.
Le Correspondant devra rapidement apprécier ces éléments et les premières mesures vont consister à prendre contact avec l’agent consignataire qui généralement sera le premier informé, au travers de ses agents portuaires ou encore des manutentionnaires. Le Capitaine sera appelé afin d’obtenir ses propres informations sinon fera l’objet d’une visite à bord d’un représentant.
Une fois les informations sur la nature et l’étendue du sinistre connues, le Correspondant devra, dans la plupart des cas, nommer un expert dont la compétence et l’expérience seront appropriées et adaptées à la catégorie de marchandiseconcernée.
Le contexte contractuel de l’évènement va nécessiter une étude aussi rapide que possible des conséquences pour le transporteur, dans le cadre du contrat concerné. D’où l’importance pour le Correspondant d’obtenir au plus tôt les éléments nécessaires, à commencer par l’examen attentif du ou des connaissements ou encore du manifeste, éléments que l’agent consignataire détient la plupart du temps.

Missions liées aux marins et aux personnes

La responsabilité de l’armateur vis-à-vis des personnes fait partie des risques couverts par les Clubs de Protection.
Elle peut être en rapport d’une part avec les Membres de l’équipage (section 1) et d’autre part avec des tierces personnes ou des passagers (section 2). L’on qualifie les tierces personnes comme étant des individus se trouvant à bord pour divers motifs en commençant par le personnel de manutention et les dockers, mais aussi les visiteurs comme les agents consignataires, douaniers, etc…. Lorsqu’ils se produisent en escale, le Correspondant sera toujours concerné par ce type de sinistres dont les conséquences peuvent être considérables. Enfin, il n’est pas rare que le Correspondant soit confronté au cas particulier des clandestins (stowaways) dont il devra assurer la prise en charge et le rapatriement pour le compte de l’armateur et/ouopérateur membre (section 3).

L’assistance liée aux Marins et Equipages

Le Correspondant va être sollicité de façon systématique dès lors qu’un membre de l’équipage subit un problème de santé ou est victime de blessure.
L’intervention est généralement menée de concert avec l’agent consignataire dont l’assistance peut être également demandée par l’armateur. Il est d’ailleurs assez fréquent que le marin souffrant ou blessé soit d’abord débarqué et transporté vers un médecin ou un hôpital par les soins du consignataire, souvent dans une situation d’urgence.
Les Clubs de Protection sont particulièrement concernés en raison des conséquences possibles de la responsabilité de l’armateur vis-à-vis des Membres de l’équipage, celle-ci souvent présumée, et où la notion de négligence est souvent érigée en principe, notamment pour manquement à l’obligation de soins (« cure ») et de « maintenance » que l’on pourrait traduire par le terme conservation.
Le mandant donné au Correspondant sera d’abord de suivre le parcours du marin et de lui rendre visite de façon régulière, car outre l’assistance psychologique qu’il est susceptible d’apporter (et qui n’est pas véritablement une obligation), il devra aussi vérifier et contrôler tous les frais engagés au titre des soins puisque leur règlement incombera à l’armateur et au Club de Protection dans un second temps. A cet effet, il se fera communiquer les factures afin de les viser après contrôle.
Le rôle du Correspondant sera aussi de constituer un réseau local spécifique regroupant médecins, spécialistes et établissements hospitaliers ou cliniques de hautniveau, aspect particulièrement important dans certains pays.
La mission d’assistance aux marins malades ou blessés est souvent suivie d’un rapatriement que le Correspondant va devoir organiser en accord avec les responsables médicaux en charge, la règle étant que tout rapatriement devra faire l’objet d’un accord écrit du médecin précisant les conditions et préconisations adaptées à l’état du malade, l’accompagnement si nécessaire, le mode de transport etc… Un Club de protection ne donnera jamais son accord sans avoir par écrit l’avis et les conseils du médecin. Dans les cas les plus graves, le Correspondant pourra être amené à conseiller un rapatriement sanitaire lourd pouvant aller jusqu’à l’affrètement d’un avion privé adapté. Les engagements financiers sont alors importants et le rôle du Correspondant est fondamental dans la gestion des questions de logistique.
Dans une certaine mesure, le Correspondant représentera pour le membre d’équipage en souffrance une garantie de suivi que les agents consignataires ne donneront pas de la même façon. L’on assiste par ailleurs dans certains cas à des situations où les marins sont en réalité sous le contrôle de sociétés spécialisées dans la gestion et l’emploi des équipages (crewing agents). Il s’ensuit parfois un certain désintérêt des armateurs dans la gestion du dossier, le rôle du Correspondant étant alors de pallier les inconvénients de ces formes de sous-traitance pour apporter une certaine humanité dans la gestion de la situation.
La connaissance des termes du contrat d’engagement du marin ne sera généralement pas nécessaire mais il pourra arriver que le Correspondant soit, malgré lui, impliqué dans un possible conflit existant ou susceptible d’apparaitre entre le dit marin et l’armateur ou le gestionnaire d’équipage. Du fait des relations personnelles qu’il aura nouées au cours des visites, le Correspondant pourra être parfois tenté de conseiller utilement le marin tout en accomplissant sa mission d’assistance.
L’assistance en matière de décès de marin et de rapatriement de la dépouille est toujours une intervention sensible au cours de laquelle le Correspondant devra agir avec le maximum de célérité en raison des attentes de la famille. Les formalités de rapatriement sont toujours complexes sinon rendues difficiles par des représentations consulaires locales (lorsqu’elles existent), particulièrement en matière documentaire et en ce qui concerne l’exigence de traductions certifiées. Il n’est pas rare de devoir présenter plusieurs fois à un agent consulaire des traductions pourtant certifiées irréprochables à chaque fois, pour un motif différent ou simplement insoluble.

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Intervention au titre de tierces personnes et passagers

Le passager est généralement sous contrat avec son transporteur et l’on se réfère ici essentiellement aux paquebots et navires de croisière. L’on sait que les incidents ou accidents dont sont l’objet les passagers peuvent avoir des conséquences financières considérables, voire démesurées, si l’on se réfère aux indemnités qui peuvent être versées aux U.S.A.
Le Correspondant appelé à intervenir sur un incident ou un accident concernant un passager devra faire preuve d’une attention particulière dans l’enquête qu’il va mener à bord du navire et dans toute la phase d’assistance à terre le cas échéant.
Le billet de passage sera consciencieusement examiné afin de connaitre la partie ayant émis le contrat qui ne sera pas forcément l’armateur mais plus généralement un opérateur, un agent de voyage, affréteur.
L’implication éventuelle d’une autre partie sera possible sachant qu’un passager pourra contracter séparément d’autres services proposés en options (excursions, transferts, commerces etc..). L’enquête devra déterminer très précisément les rapports existants entre les intervenants, le lieu de l’incident, et tous les documents existants susceptibles de renseigner sur la situation contractuelle seront récoltés (tickets, publicité, programmes, conseils, notices d’utilisation pour tous matériels etc..).
La loi applicable devra être recherchée essentiellement par examen des termes et conditions du billet de passage. L’on retrouvera très généralement l’application de « The Athens Convention Relating to the Carriage of Passengers and their Luggage by Sea 1974 » 39 (sauf U.S.A. notamment) mais pas seulement, la loi appliquée pouvant dépendre de la juridiction saisie, place du lieu de signature du contrat, place du lieu de l’incident, loi du pavillon ou encore loi du siège de la compagnie.
La notion de négligence est également très présente dans les affaires mettant en cause des passagers, y compris d’ailleurs dans l’assistance et les soins qui seront donnés à la victime après l’incident, d’où la nécessité pour le Correspondant de vérifier également lesmesures prises à bord et éventuellement pendant les périodes d’embarquement, débarquement à la suite de l’évènement sachant qu’une négligence peut aussi être invoquée pendant ces périodes.

Missions d’investigation et d’information

Le Correspondant portuaire est l’œil des Clubs de Protection non seulement dans le port concerné mais bien souvent dans le pays concerné. Il existe une sorte de dépendance des Clubs à l’égard de leurs Correspondants pour toutes les informations et évènements susceptibles de concerner les activités maritimes.
Les instructions générales Guidelines for Correspondents ( annexe 1 ) éditées par le Groupe International le rappelle dans son paragraphe 10 : « Correspondents are encouraged to advise the Clubs, by whom they are listed as P&I Correspondent, of any developments which may be relevant to ships trading within the Correspondent’s local area ».
Ce rôle est fondamental pour les Clubs de Protection mais aussi (et surtout) pour les armateurs et les Membres, afin d’informer eux-mêmes les équipages sur les mesures de précautions à envisager lors des escales ou lors des navigations dans les eaux territoriales.
L’agent maritime ou consignataire participe aussi à diffuser l’information, mais généralement la nature de ces informations est plus en relation avec les opérations portuaires, la logistique et les questions de coûts, liste des tarifs, les délais d’accostage, les cadences etc… L’agent sera moins enclin à diffuser les informations d’ordre plus juridique ou contentieux, ou en relation avec le contexte sanitaire etc…

Choix des sous-traitants

Mandataire du Club de Protection ou parfois de l’armateur, le Correspondant va être amené, dans le cadre d’une affaire donnée, à solliciter à son tour des prestataires ou sous-traitants indépendants. L’expertise ou la représentation en justice, en effet, ne font pas partie des activités de la plupart des Correspondants. Nous verrons cependant que certaines activités habituellement dévolues à des soustraitants, comme l’expertise, le sont parfois sous le couvert de filiales par le
Correspondant lui-même. Enfin, parmi les professions auxquelles le Correspondant va faire appel, il y a les activités d’avocat ou solicitor qui méritent un développement particulier dès lors que le mandataire apparent de l’avocat n’est pas le Correspondant mais généralement le Club de protection. Compte tenu de ces éléments, il convient d’étudier dans une première analyse la place occupée par l’avocat et les experts (section 1). De plus, cette étude serait incomplète sans le développement des obligations et le niveau de responsabilité engagé par ces mêmes sous-traitants (section 2).

Place de l’Avocat et des Experts

La nomination d’un expert s’imposera de par la nature même du dossier et notamment du fait de l’existence d’un dommage, d’une avarie, afin de connaitre les circonstances, les causes et l’origine du sinistre et de chiffrer les pertes ou le préjudice.
Le rapport de l’expert est d’une importance fondamentale en ce qu’il va permettre au Club de Protection ou à l’armateur d’apprécier la question des responsabilités à travers la description des circonstances ou de l’évènement, et d’estimer la conséquence financière éventuelle. Il sera aussi le document essentiel lors de discussions amiables ou de négociations.

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