Mise en place d’un protocole d’étude prospective sur la gestion per- et post-opératoire des patients traites par anticoagulants oraux directs lors d’un geste de chirurgie orale 

Signes Cliniques de la maladie thrombo-embolique veineuse

Le diagnostic de la maladie thrombo-embolique peut être évoqué dans deux situations : suspicion de thrombose veineuse profonde ou suspicion d’embolie pulmonaire.
Suspicion de Thrombose veineuse profonde:
Douleur : il s’agit du signe d’appel le plus fréquent (60 %). Elle relève de plusieurs mécanismes : la stase, le spasme et l’inflammation de la veine et peut être spontanée, minime ou absente. Elle doit être exagérée ou provoquée par la palpation le long des trajets veineux, par le ballottement ou la compression manuelle du mollet ou par la dorsiflexion du pied, c’est le signe de Homans qui n’est pas spécifique et peut aussi s’observer dans certaines atteintes musculotendineuses ou articulaires.
Œdème : il est dur, résistant et ne prend pas le godet. La peau est de couleur blanche luisante avec une augmentation de la température locale et une dilatation des veines superficielles. Selon la topographie de l’obstruction, il est limité à la jambe (thrombose poplitée) ou s’étend à tout le membre pelvien (thrombose fémoro-iliaque).
Signes inflammatoires : une élévation de la température cutanée, un aspect érythémateux ou luisant de la jambe, un fébricule aux alentours de 39°C peuvent être observés.
Forme Clinique : Parmi les différentes formes cliniques il faut retenir en particulier la phlébite bleue. Son caractère très obstructif est responsable d’un retentissement artériel avec ischémie du membre. Appelée aussi thrombose veineuse ischémiante, il s’agit d’une urgence médico-chirurgicale.
Suspicion d’une embolie pulmonaire :
La dyspnée est le signe clinique le plus fréquent et le plus évocateur, il peut également être retrouvé une douleur thoracique de type pleurale, une hyperthermie modérée ainsi qu’une tachycardie.
Tout diagnostic doit être confirmé avec des examens complémentaires tels qu’une échographie de Doppler, un examen biologique (les D-dimères) et un angioscanner.

Sur le plan artériel : accident vasculaire cérébral ischémique

La maladie thrombo-embolique artérielle correspond à la formation d’un thrombus au niveau des artères ou du cœur. Il s’agit d’une pathologie évolutive diffuse touchant plusieurs territoires artériels:
Au niveau des artères coronaires : l’infarctus du myocarde ; Au niveau des artères qui vascularisent les membres inférieurs : artériopathies périphériques ; Au niveau des artères qui vascularisent le cerveau (carotides internes et artères vertébrales) : accident vasculaire cérébral.
L’accident vasculaire cérébral (AVC) est un déficit neurologique focal de survenue soudaine (apparition en moins de 2 minutes) en relation avec une lésion du parenchyme cérébral par ischémie ou par hémorragie. Les AVC ischémiques sont les plus fréquents (80 à 85%). Il s’agit d’événements aigus principalement dus au blocage d’une artère empêchant le sang de parvenir au cerveau et représentent donc une urgence médicale absolue.
Les AVC ischémiques :L’interruption de la circulation du sang est due à un caillot (sang coagulé) qui bouche une artère à destination du cerveau. La cause principale est l’athérosclérose : c’est une accumulation de dépôts de cholestérol sur les parois des artères. Ces dépôts se durcissent progressivement et forment des plaques d’athérome qui rétrécissent les artères et favorisent la formation du caillot.
Dans certains cas, un fragment de plaque peut aussi se détacher et aller obstruer une des artères à l’intérieur du cerveau. Parfois, l’origine de l’accident vasculaire cérébral provient de la formation d’un caillot sanguin à distance du cerveau, par exemple dans le cœur. Ce caillot est ensuite véhiculé par le sang jusqu’au cerveau. Cela peut arriver notamment lorsque le cœur bat rapidement et de manière irrégulière (fibrillation auriculaire).
Les AVC hémorragiques :Ils sont plus rares. L’arrêt de la circulation du sang est dû à la rupture d’une artère du cerveau. La cause principale des AVC hémorragiques est une tension artérielle élevée. Dans certains cas, la rupture peut survenir sur une anomalie préexistante de l’artère : un anévrisme ou une malformation artério-veineuse.

Les facteurs de risque de l’accident vasculaire cérébral 

Les facteurs de risque des accidents vasculaires cérébraux ischémiques recouvrent largement ceux des cardiopathies ischémiques mais l’ordre d’importance est différent :
Hypertension artérielle (HTA) : On parle d’HTA lorsque que la tension artérielle est supérieure à 140/90mmHg. Elle représente le facteur de risque modifiable le plus important. Elle augmente le risque relatif (RR) de 4 environ et plus de la moitié des accidents vasculaire cérébraux surviennent suite à une HTA chronique.
Tabac : Il augmente le risque relatif d’AVC de 1,5, c’est un important facteur de risque d’athérosclérose carotidienne. Le risque d’AVC diminue de moitié dans les deux à cinq ans suivant le sevrage, mais il reste supérieur à celui des non-fumeurs.
Diabète : Le diabète est un facteur de risque majeur et indépendant d’infarctus cérébral dont il multiplie la fréquence par un facteur de 2 à 5. Le risque d’AVC chez le diabétique est de 1 à 1,5 % par an. Chez le diabétique, les infarctus cérébraux surviennent à un âge plus jeune (en moyenne de 3 ans) et sont plus souvent mortels.
L’âge (>65 ans) et les antécédents familiaux d’AVC. Obésité, sédentarité : Le rôle de l’obésité comme facteur de risque indépendant d’infarctus cérébral a été démontré avec un risque relatif voisin de 2, majoré par les facteurs de risque associés : hypertension artérielle, diabète, hypercholestérolémie.
Contraception Orale : L’utilisation des contraceptifs oraux est associée à une augmentation du risque d’infarctus cérébral, d’autant plus importante que la dose d’œstrogène est élevée (> 50μg) : il est alors multiplié par 5. Le risque augmente en cas d’âge supérieur à 35 ans ou si la prise de contraceptifs oraux est associée à d’autres facteurs de risque. Pour les contraceptifs oraux faiblement dosés, le risque reste débattu.
Le mauvais contrôle des autres facteurs de risque (HTA et tabagisme notamment) augmente le risque de façon importante.
Hyperlipidémies : C’est le facteur de risque majeur de l’infarctus du myocarde et apparaît comme un facteur de risque accessoire des AVC. Le risque d’infarctus cérébral augmente avec le taux de triglycérides, mais cette augmentation est modérée (risque relatif [RR] < 1,5) et pour certains limitée aux accidents liés à l’athérosclérose
Alcoolisme Chronique : Une forte consommation augmente le risque de toutes les variétés d’AVC : hémorragie sous-arachnoïdienne, hémorragie cérébrale et infarctus cérébral, alors qu’une consommation faible serait potentiellement protectrice vis-à-vis de l’infarctus cérébral. En effet le risque augmente pour une consommation quotidienne au-delà de 3 verres standard d’alcool. Migraine : Augmentation du risque chez la femme jeune, surtout en cas de tabagisme et de contraception orale associés.
D’autres facteurs comme les inflammations et infections chroniques, et l’homocystéinémie (augmentation dans le plasma de l’homocystéine) ont eux aussi un rôle dans l’augmentation du risque d’accidents vasculaires cérébraux.

Etiologies de l’accident vasculaire cérébral 

Les causes sont multiples, plusieurs peuvent être présentes en même temps chez un même patient (par exemple, athérosclérose et fibrillation atriale). Dans 25 % des cas environ, l’infarctus cérébral reste d’origine indéterminée.

L’athérosclérose

L’athérosclérose représente environ 30 % de l’ensemble des infarctus cérébraux. Son diagnostic s’établit en présence d’une sténose supérieure à 50 % d’une artère en amont de l’infarctus cérébral et en présence de facteurs de risque vasculaire.
L’athérosclérose peut conduire à un infarctus cérébral par différents mécanismes: Thromboembolique (le plus fréquent) : il s’agit d’une fragmentation d’un thrombus de la plaque d’athérome entraînant l’occlusion d’une artère distale ;
Thrombotique : il s’agit d’une occlusion artérielle au contact de la plaque ; Hémodynamique (rare, sur sténose serrée).
Les localisations privilégiées de l’athérosclérose sont les suivantes : Circulation antérieure : origine des carotides internes, siphons carotidiens et artères sylviennes ; Circulation postérieure : origine des artères vertébrales, tronc basilaire ; Origine des artères perforantes.

Les cardiopathies emboligènes

Elles représentent environ 20 % des infarctus cérébraux qui résultent de la conséquence d’une atteinte morphologique ou fonctionnelle du myocarde. La liste des cardiopathies emboligènes est longue. La fibrillation atriale est la plus fréquente des cardiopathies emboligènes (50 % des cas) et des troubles du rythme.
La fibrillation atriale ou «auriculaire» est une tachycardie irrégulière (arythmie) d’origine supraventriculaire (cœur rapide et irrégulier). Elle est à l’origine de contractions anarchiques et désynchronisées au sein des deux oreillettes avec une perte de leur efficacité hémodynamique. De ce fait, on obtient une réponse ventriculaire sous dépendance du nœud auriculo-ventriculaire. Cette arythmie dure en principe plus de 30 secondes.
La prévalence de la fibrillation atriale, de l’ordre de 0,4 % à 1 % dans la population générale, augmente rapidement avec l’âge (1 à 2 % de la population adulte soit entre 600 000 et 1 000 000) et elle est responsable d’un sixième de tous les accidents vasculaires cérébraux.
Survenant chez moins de 1 % des sujets de moins de 60 ans, sa prévalence est supérieure à 8 % chez ceux de 80 ans et plus . Durant les 20 dernières années, les hospitalisations pour fibrillation atriale ont augmenté de 66 % du fait du vieillissement de la population, de l’accroissement de la prévalence des cardiopathies chroniques et du diagnostic plus fréquent par enregistrement ambulatoire.

Signes cliniques de l’accident vasculaire cérébral ischémique

Les signes cliniques de l’AVC surviennent de façon soudaine, c’est pour cela que l’on parle parfois «d’attaque cérébrale». Ils sont à début brutal et peuvent secondairement évoluer en fonction de l’œdème cérébral ou de l’extension de l’hémorragie. Les signes cliniques les plus fréquemment retrouvés sont : Une faiblesse musculaire, une paralysie d’un ou plusieurs membres ou du visage, le plus souvent d’un seul côté du corps (hémiplégie),
Une perte de sensibilité ou un engourdissement d’un ou plusieurs membres ou du visage, Une perte de la vision d’un œil (cécité unilatérale) ou de la moitié du champ visuel pour chaque œil (hémianopsie), ou encore une vue double (diplopie), Des difficultés à parler, soit en raison d’une difficulté à articuler (dysarthrie) et/ou à trouver ses mots, soit en raison de l’utilisation de mots inintelligibles et/ou de difficultés à comprendre ce que l’on entend (aphasie), Des troubles de l’équilibre ou de la coordination des membres, Des troubles de la vigilance pouvant aller jusqu’au coma, Un mal de tête brutal, intense et inhabituel.
La régression de ces signes au bout de quelques minutes ne doit en aucun cas rassurer : les déficits neurologiques soudains régressant rapidement portent le nom d’accident ischémique transitoire (ou AIT). Ils doivent eux aussi conduire à être prise en charge immédiatement. Une imagerie cérébrale par IRM est l’examen de référence pour confirmer le diagnostic d’AVC.

Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE 1 : RAPPELS MEDICAUX-PHARMACOLOGIQUES SUR LA MALADIE THROMBO-EMBOLIQUE, LES AOD ET LEURS PRISES CHARGES EN CHIRURGIE ORALE
1. La maladie thrombo-embolique 
1.1. Sur le plan veineux : thrombose veineuse profonde et embolie pulmonaire
1.1.1. Généralités
1.1.2. Epidémiologie
1.1.3. Les facteurs étiologiques de la maladie thrombo-embolique veineuse
1.1.4. Signes Cliniques de la maladie thrombo-embolique veineuse
1.2. Sur le plan artériel : accident vasculaire cérébral ischémique
1.2.1. Généralités
1.2.2. Epidémiologie
1.2.3. Les facteurs de risque de l’accident vasculaire cérébral
1.2.4. Etiologies de l’accident vasculaire cérébral
1.2.4.1 L’athérosclérose
1.2.4.2 Les cardiopathies emboligènes
1.2.4.3 Autres causes rares
1.2.5. Signes cliniques de l’accident vasculaire cérébral ischémique
1.3. Evaluation des risques thromboemboliques et hémorragiques avant un traitement
anticoagulant
1.3.1. Le score CHA2DS2-VASc
1.3.2. Le score HAS-BLED
2. Les Anticoagulants Oraux Directs (AOD) 
2.1. Contexte
2.2. Pharmacocinétique et mode d’action
2.3. Indications et posologies des anticoagulants oraux directs
2.4. Contre-indications des anticoagulants oraux directs
2.5. Effets indésirables des AOD
2.6. Interactions médicamenteuses
2.6.1. Interactions communes à tous les anticoagulants oraux directs
2.6.2. Interaction spécifique à chaque médicament
2.7. Contrôle de l’activité des AOD en médecine
2.7.1. Les différents tests et leurs effets
2.7.1.1. Le temps de céphaline activé (TCA)
2.7.1.2. Temps de Quick (TQ) ou taux de prothrombine (TP)
2.7.1.3. Le temps de thrombine (TT)
2.7.1.4. Le temps d’écarine (ECT)
2.7.1.5. La mesure spécifique de l’activité anti-Xa et de l’activité de l’anti- IIa
2.7.2. Pourquoi pas d’INR ?
2.7.3. Prise en charge des AOD en cas de chirurgie
3. Anticoagulants oraux directs et chirurgie orale
3.1. Evaluation du risque hémorragique en chirurgie orale
3.1.1. L’interrogatoire médical
3.1.2. L’examen clinique pré-opératoire
3.2. Prise en charge du patient sous AOD
3.2.1. Arrêt ou Maintient des AOD
3.2.2. Tests biologiques pour évaluer le risque hémorragique
3.2.3. Anesthésie
3.2.4. Phase chirurgicale
3.2.5. Méthodes d’hémostases locales pour contrôler le risque hémorragique
3.2.5.1. Sutures
3.2.5.2. Technique d’hémostase par compression
3.2.5.3. Technique d’hémostase avec les colles chirurgicales
3.2.5.4. Acide tranexamique
3.2.6. Le suivi et les conseils post-opératoires
3.2.7. Traitement curatif des complications hémorragiques
PARTIE 2 : MISE EN PLACE D’UN PROTOCOLE D’ETUDE PROPESPECTIVE SUR LA GESTION PER- ET POST-OPERATOIRE DES PATIENTS TRAITES PAR ANTICOAGULANTS ORAUX DIRECTS LORS D’UN GESTE DE CHIRURGIE ORALE 
4. Intérêts et justification de l’étude
5. Type d’étude 
5.1. Population
5.2. Objectif principal
5.3. Objectifs secondaires
5.4. Critères d’inclusion
5.5. Critères de non inclusion
5.6. Critères d’exclusions
5.7. Déroulement de l’étude
5.8. Schéma de l’étude
5.9. Standardisation et reproductibilité des protocoles chirurgicaux
5.10. Durée de participation à l’étude de chaque patient
5.11. Durée de l’étude et nombre de cas prévisionnel
5.12. Critères d’évaluation
5.13. Évaluation de l’hémorragie peri-opératoire
5.14. Procédures d’hémostases
5.15. Évaluation de l’hémorragie postopératoire
5.16. Prise en charge du saignement post-opératoire par le praticien en cas de visite supplémentaire
6. Statistiques, limites et data management 
6.1. Analyse statistique
6.2. Limites de l’étude
6.3. Modifications possibles du protocole avant sa mise en application
6.4. Résultats attendus
6.5. Data management
7. Ethique et aspects administratifs 
7.1. Sécurité
7.2. Aspects administratifs, réglementaires et éthiques
7.3. Faisabilité du protocole de recherche
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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