MISE EN ÉVIDENCE D’UNE RELATION CAUSALE ENTRE LE CPF ET LE MAINTIEN DE L’EFFORT

MISE EN ÉVIDENCE D’UNE RELATION CAUSALE ENTRE LE CPF ET LE MAINTIEN DE L’EFFORT

Premièrement, nos travaux n’ont pas permis de mettre en évidence de relation causale entre l’activité du CPF et le maintien de l’exercice puisque la stimulation atDCS-HD n’a pas entrainé d’amélioration sur le temps d’endurance. Ce résultat peut être attribué en partie à la forte variabilité inter-individuelle face aux effets de la tDCS. L’utilisation de cette technique sur des participants ayant été préalablement identifiés comme répondeurs à la stimulation pourrait être pertinent. Un premier travail serait de discriminer les individus répondeurs des non répondeurs à la tDCS en investiguant l’effet de la neuromodulation induite au niveau du CPF (via la stimulation réelle) sur la modulation de l’excitabilité corticale à l’aide des techniques de neuroimagerie telles que l’EEG, l’IRM ou la NIRS (Gbadeyan, Steinhauser, McMahon & Meinzer, 2016 ; Wörsching et al., 2016).

Cette approche permettrait d’explorer plus efficacement le rôle des régions préfrontales dans le maintien de l’effort physique. La création de cette population de « répondeurs » tDCS permettrait de tester l’implication des régions ventrolatérales du CPF dans le maintien de l’effort, qui, au regard de nos éléments de discussion abordés en section 2.1., pourraient implémenter l’activité de processus inhibiteurs susceptibles de limiter les coûts de l’effort et de favoriser la poursuite de l’exercice. Au cours des différentes conditions expérimentales (stimulation réelle anodique vs. SHAM), l’enregistrement par neuroimagerie de la réponse neurophysiologique induite par les conditions de stimulation sur les sites d’intérêts permettrait de renforcer le lien de causalité entre l’activité de la région ciblée et la modulation des performances d’endurance.

Une autre perspective intéressante, en lien avec nos hypothèses de recherche (études 2 et 3) concerne l’implication des régions orbitofrontales dans le maintien de l’effort via leur capacité à contrôler la motivation au travers d’une comparaison coûts/bénéfices déterminant la décision de poursuivre l’exercice (McMorris et al., 2018 ; Robertson & Marino, 2016). À notre connaissance, aucun élément n’a jusqu’ici permis d’établir de lien de cause à effet entre l’activité du CPF orbitofrontal et la performance d’endurance. Dans ce but, il serait intéressant de déterminer si la stimulation atDCS focale de cette région permettrait de repousser la décision d’arrêter l’exercice (vs. condition SHAM) au cours d’un effort récompensé de type « corps entier » conduit jusqu’à épuisement.

CLARIFIER L’IMPLICATION DU CPF ET DE L’ATTENTION DANS L’INTÉGRATION ET LE TRAITEMENT DES BÉNÉFICES FAVORISANT LE MAINTIEN DE L’EFFORT

D’autres études s’avérent aussi nécessaires afin de mettre en évidence l’implication du CPF et de l’orientation de l’attention dans la régulation de l’effort via leur rôle dans l’intégration et le traitement des informations récompensantes (bénéfices). Pour cela, il serait par exemple intéressant d’explorer si l’inhibition du CPF orbitofrontal (vs. condition SHAM) pourrait moduler les effets des bénéfices monétaires conscients sur le maintien de l’effort lors de contractions isométriques répétées conduites jusqu’à épuisement. Le fonctionnement de cette région semble en effet décisif dans l’intégration d’informations motivantes afin 280 d’évaluer le caractère récompensant de l’action et de moduler la tolérance des signaux physiologiques d’effort (McMorris et al., 2018 ; Robertson & Marino, 2016). L’inhibition de cette structure corticale pourrait être réalisée par stimulation cathodale tDCS-HD ou au moyen d’une stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) à basse fréquence (1-Hz) (Feffer et al., 2018 ; Mondino, Haesebaert, Poulet, Saoud, & Brunelin, 2015). De manière similaire à ce qui a été envisagé ci-dessus, seuls les individus « répondeurs » à ces stimulations seraient séléctionnés.

Après avoir débuté la contraction en condition de neuromodulation réelle ou fictive selon la session expérimentale, une récompense plus ou moins avantageuse (e.g., 1 centime vs. 10 centimes gagnés toutes les secondes de contraction), indiquant le gain attribué à l’essai en cours serait présentée (de manière supraliminale) sur un écran placé en face du participant. Il serait alors intéressant d’observer si l’inhibition du CPF orbitofrontal permettrait de moduler (minimiser) l’effet des incitations monétaires sur le maintien de l’effort et d’impacter la capacité des individus à réguler consciemment l’effort physique.

La tolérance des signaux physiologiques de fatigue serait aussi investiguée en fonction des conditions de neuromodulation via une mesure post-tâche du niveau de douleur perçu. On peut également concevoir que ces conditions de neuromodulation soit remplacées par des conditions attentionnelles (e.g., distraction vs. focalisation sur les coûts ou contrôle) afin de mettre en évidence l’implication de l’attention dans l’intégration des bénéfices monétaires et la régulation de l’effort. Afin d’explorer l’idée selon laquelle les effets des manipulations seraient associés à une modulation de l’intégration des informations récompensantes, investiguer leur impact sur des marqueurs d’intégration neuronale associés au traitement des stimuli récompensants serait intéressant. Dans ce cadre, l’analyse EEG de potentiels évoqués par la présentation visuelle des récompenses en fonction des différentes conditions attentionnelles semble opportun. Lors de notre étude 2, les conditions attentionnelles n’avaient pas été induites avant la présentation des incitations monétaires. 

Comme abordé au sein de la section 2.2.3 du chapitre 2, certains ERP tardifs (>300 ms post stimulus) consécutifs à la présentation de stimuli visuels récompensants (e.g., feedback negativity) refléteraient les propriétés motivationnelles associées à l’intégration neuronale de ces stimuli. Les manipulations destinées à perturber l’intégration des bénéfices pourraient ainsi moduler la réponse électrophysiologique associée au traitement de ces stimuli et être à l’origine des effets comportementaux observés. 

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