Milieux poreux : définitions et grandeurs
Le terme « milieu poreux » est utilisé pour décrire un matériau constitué d’agrégats d’éléments solides entre lesquelles les vides forment l’espace poreux. La présence de fluide dans le réseau poreux, même en faibles quantités, induit de grandes différences de comportement physique du matériau. La géométrie des pores et la distribution de leurs tailles influencent directement les mouvements des fluides et conditionnent la nature des interactions fluide – solide. Généralement, on distingue trois types de pores (I.U.P.A.C, 1994) : les macropores dont le diamètre est supérieur à 50 nm ; les mésopores dont le diamètre est compris entre 2 et 50 nm ; les micropores dont le diamètre est inférieur à 2 nm. Suivant la distribution de tailles des pores, on peut diviser les matériaux poreux en deux catégories Les matériaux à porosité nanométrique pour lesquels les mécanismes de fixation et de migration des fluides sont difficiles à décrire à cette échelle. Dans cette catégorie, on trouve une grande partie des produits agro-alimentaires. Les matériaux capillaro-poreux dont les pores ont des dimensions supérieures, et pour lesquels le mouvement des fluides au niveau du réseau poreux relève des équations classiques des milieux continus, l’équilibre entre les phases liquide et gazeuse étant décrit par les lois de capillarité (Laplace – Kelvin). Ce type de matériaux est à son tour divisé en deux catégories : – les matériaux hygroscopiques caractérisés par une grande surface spécifique, traduit par une adsorption surfacique relativement importante par rapport à la saturation. – les matériaux non-hygroscopiques pour lesquelles la quantité d’eau adsorbée en surface du solide est négligeable devant l’eau fixée à son milieu par l’effet capillaire. Il est plutôt difficile de décrire la structure microscopique du pore d’une façon exacte en raison de sa géométrie complexe. La caractérisation de la porosité et la distribution de la taille des pores peut être accomplie par des méthodes expérimentales indirectes telles que l’analyse d’image 2D ou 3D (tomographie X), la porosimétrie à mercure ou encore les méthodes d’adsorption d’azote (Dullien, 1992 ; Collet, 2004). Il convient de noter que ces méthodes ne fournissent pas des résultats identiques en raison des différentes hypothèses faites pour interpréter les données expérimentales. Pour les matériaux de construction, la taille des pores peut s’étendre de quelques micromètres à quelques millimètres et la structure de pore est souvent corrélée avec la distribution de taille des granulats. Du point de vue macroscopique, trois grandeurs caractéristiques du milieu poreux sont définies : la porosité, définie par : Volume total Volume des pores (I.1) la masse volumique apparente à l’état anhydre Volume apparent Masse du solide s (I.2) et la teneur en eau massique en base sèche Masse du solide Masse d eau W ‘ (I.3) La détermination expérimentale de la masse volumique apparente et de la teneur en eau consiste à substituer la masse du solide par la masse du matériau sec.
L’adsorption et la désorption
L’adsorption est l’accumulation d’eau dans un matériau hygroscopique par contact avec l’humidité de l’air environnant. L’eau, avec son caractère mouillant, peut s’adsorber en surface de la phase solide sous l’effet de deux types de forces d’interactions donnant lieu à une adsorption chimique ou physique. L’adsorption chimique se fait par un échange d’électrons entre la surface du solide et les molécules d’eau. Comme dans le cas d’une réaction chimique, l’eau chimiquement adsorbée fait partie de la structure du milieu, son extraction peut modifier les propriétés mécaniques du solide. Dans l’adsorption physique, les interactions entre les molécules d’eau et la surface du solide sont moins fortes que celles d’une sorption chimique. Elles sont soumises à des forces de Van der Waals dues aux interactions entre les moments dipolaires électriques des deux phases (les groupements hydrophiles du solide et les molécules d’eau). Ces forces sont qualifiées de courtes, étendues et intenses mais ne peuvent conduire à un état stable. Les molécules d’eau adsorbées agissent sur leurs voisines et subissent réciproquement des forces d’interactions pour former une monocouche recouvrant la surface externe des pores accessibles du solide. Les molécules d’eau présentes dans la monocouche constituent des sites d’attraction pour de nouvelles molécules en formant de nouvelles couches qu’on appelle « adsorption en multicouche ». L’eau adsorbée physiquement peut être enlevée ou transférée sans apporter de changement dans la structure ou la composition chimique du solide. Les isothermes d’adsorption/désorption peuvent être déduites expérimentalement en mettant le matériau en équilibre thermodynamique avec une ambiance à température constante dont on sait contrôler la pression de vapeur. Cette dernière peut être imposée par l’intermédiaire des solutions salines saturées. On peut la faire varier en modifiant les solutions et, par là, l’équilibre thermodynamique entre l’eau liquide et la vapeur de l’air ambiant. Ainsi, on déduit une isotherme de sorption qui est une courbe d’évolution de la teneur en eau en fonction de l’humidité de l’air. En se basant sur les travaux de Brunauer et al. (1940), l’I.U.P.A.C. (International Union of Pure and Applied Chemistery, 1985) classe les isothermes d’adsorption en six catégories différentes (Figure I.2). Le type I correspond à une adsorption en monocouche, dite de Langmuir (1918). Les autres isothermes traduisent la sorption en multicouche. Les types II et III sont spécifiques aux solides possédant des pores de diamètres supérieurs à 500 Å (macropores), alors que les isothermes de type IV et de type V correspondent à des solides avec un diamètre de pores compris entre 20 et 500 Å (mésopores). Les isothermes de désorption de ces deux dernières présentent souvent une hystérésis liée à la condensation capillaire. Le type VI est spécifique à l’adsorption sur une surface non poreuse .
La condensation capillaire / Capillarité
Quand un matériau capillaro-poreux est exposé à une teneur en eau supérieure à la teneur en eau d’adsorption maximale, la condensation capillaire apparaît. Ce phénomène assure la transition entre le transfert de l’eau sous forme vapeur et le transfert sous forme liquide. Sa compréhension permet de mieux appréhender les relations qui existent entre la structure du réseau poreux et la présence d’eau sous une forme ou une autre, ainsi que l’hystérésis entre l’isotherme d’adsorption et l’isotherme de désorption qu’on a pu observer sur la figure I.3. Les interactions entre l’eau adsorbée et l’air rendent les molécules d’eau à l’interface plus agitées que celles qui sont à l’intérieur, ce qui implique la formation d’un ménisque. Lorsque l’épaisseur d’eau devient plus importante par rapport au rayon de courbure de ménisque, des ponts de liquide peuvent se former entre deux surfaces opposées. Les interactions entre les molécules d’eau deviennent plus importantes que l’influence qu’exercent les sites polaires du solide. L’eau est maintenue au sein du solide par des forces dites capillaires. Ce phénomène intervient pour des humidités relatives très élevées. Actuellement, il n’existe pas de moyen expérimental fiable qui permet de déterminer avec une très grande précision l’humidité relative au-delà de 95%. Il n’est donc pas possible d’avoir un suivi de l’isotherme d’adsorption sur l’intervalle d’humidité de 95% – 100%. A l’échelle d’un volume représentatif de matériau, la pression capillaire est inversement proportionnelle au degré de saturation. L’invasion capillaire est l’une des méthodes expérimentales qui permet de déterminer la courbe de pression capillaire des matériaux fortement perméables. Dans le cas des matériaux peu perméables, comme les bétons, cette méthode trouve très rapidement ses limites à mesure que la saturation en eau liquide décroît, la pression à exercer devient trop élevée.