Électronique de mesure
Électroniques de contrôle
L’électronique de contrôle réalise les opérations suivantes :
– acquisition du signal du courant tunnel,
– génération de la tension de polarisation de la jonction,
– génération des cinq signaux haute tension {x + , x − , y + , y − , z } pour le tube,
– génération des signaux haute tension pour les moteurs piézoélectriques,
– et régulation du courant tunnel.
Durant cette thèse, nous avons travaillé avec deux électroniques de contrôle dont l’une d’elle est arrivée au milieu de la thèse.
Ancienne électronique Fabriquée par WA-Technologies en 1997, l’électronique TopSystem II est construite autour d’une régulation numérique. Le contrôle du tube se fait par quatre convertisseurs numérique-analogique (CNA) 14 bits amplifiés sur ±130 V . Le signal de contre-réaction appliqué sur l’électrode interne du tube est, quant à lui, codé sur 20 bits et amplifié sur ±130 V , soit une résolution de 0.25 mV ⇔ 0.02.
La tension de polarisation
De la jonction V b comprise entre ±10 V est générée par un CNA 12 bits. Pour la spectroscopie cette tension est divisée par 500, soit une résolution de 10 µV . Piloté par un PC 486, l’électronique TopSystem II ne permet d’acquérir que 256 courbes I (V ) ce qui limite fortement les études de spectroscopie. Par ailleurs, l’acquisition d’un signal supplémentaire, tel que la sortie d’une détection synchrone par exemple, n’est pas possible. Les spectres sont par conséquent enregistrés par une carte d’acquisition synchronisée avec l’électronique via un port TTL.
Nouvelle électronique Fabriquée par Omicron NanoTechnology, l’électronique Matrix est entièrement numérique. Elle est composée de nombreux modules à tâche dédiée équipés de DSP permettant l’évolution vers des systèmes hybrides STM/AFM. La communication entre chaque module se fait par liaison Fast-Ethernet. Les cinq signaux haute tension {x + , x − , y + , y − , z } sont codés sur 20 bits. Toutes les entrées et sorties analogiques sont codées en 16 bits, et contrairement à l’électronique TopSystem II, l’acquisition de signaux analogiques extérieurs supplémentaires est possible. L’évolution majeure par rapport à l’ancienne électronique réside dans la possibilité d’acquérir une matrice de spectre sans limitation de mémoire (cf. §2.2). Malgré le potentiel impressionnant de cette électronique, le logiciel la pilotant n’est malheureusement pas au point et nous a fait perdre de nombreuses données expérimentales. Les versions de mise à jour n’ont permis d’améliorer que la stabilité laissant les fonctionnalités au niveau le plus basique et le lancemen t des acquisitions particulièrement lent.
Cryogénie
Durant cette thèse, la quasi totalité des mesures STM ont été effectuées en dilution sauf quelques unes dans le cryostat à bain d’He pompé atteignant 1.6 K. Par conséquent, nous ne décrirons dans cette section que le cryostat à dilution.
Dilution inversée
Sionludi
La dilution inversée, aussi appelée Sionludi, repose sur le même principe cryogénique qu’une dilution standard, à savoir le pompage de la pression de vapeur saturante d’ He dilué dans de l’ He superfluide. Par contre, sa conception est quelque peu différente. Alors que le circuit de dilution est habituellement situé dans la partie basse du système cryogénique de manière à pouvoir tremper ce dernier dans un bain He liquide, la partie froide d’un Sionludi est au sommet du cryostat avec le calorimètre directement à température ambiante. Le sionludi compte cinq étages (100, 20, 4.2, 1, 0.05 K) maintenus les uns aux autres par des tubes en verre époxy réduisant fortement les couplages thermiques tout en garantissant une bonne rigidité mécanique. Les pertes par rayonnement thermique sont limitées par des écrans en cuivre vissés sur chaque étage. L’absence de bain à 4.2 K nécessite un circuit de pré-refroidissement spécifique. Installé directement sous la dilution, un vase d’ He liquide maintenu sous pression (typiquemennt 50 mBar), permet de faire circuler de l’ He jusqu’à l’étage à 4.2 K dans un circuit distinct du circuit de dilution. Pour refroidir les étages supérieurs de 300 K à 4.2 K, le mélange He/ He est injecté à fort débit dans un circuit d’injection rapide (i.e. sans impédance de condensation) et thermalisé à 4.2 K par un échangeur à contre-courant par lequel sont évacuées les vapeurs d’ He. Deux autres circuits d’injection permettent d’atteindre 1.5 K pour le premier (par une détente Joule-Thomson) et le régime de dilution pour le second, soit 45 mK. Cette dilution ne dispose pas de pot à 1.2 K. Le mélange arrive, par conséquent, à une température élevée, environ 4.2 K, dans l’impédance de condensation précédant le bouilleur. Pour que la détente Joule-Thomson condense le mélange dans ces conditions, l’impédance et donc la pression d’injection (typiquement 700 mbar) sont augmentées par rapport à une dilution standard. Un compresseur en aval de la pompe étanche permet d’une part de faire circuler le mélange à fort débit pendant la phase de refroidissement à 4.2 K, et d’autre part de supporter la pression d’injection en régime de dilution.
La procédure de refroidissement est assez longue :
– pompage calorimètre : une nuit,
– refroidissement 4.2 K : ∼ 18 heures (circuit d’injection rapide),
– refroidissement 1.5 K : ∼ 1 heure (circuit d’injection moyen),
– refroidissement 50 mK : ∼ 8 heures (circuit d’injection lent), soit trois jours en comptant le montage du STM dans la dilution. Pendant toutes ces étapes, une attention particulière doit être bien évidemment porté e sur le STM afin d’éviter un crash de la pointe (cf. §1.4.2).
Un problème de bouchage a fortement limité les expériences pendant une bonne moitié de la thèse. L’autonomie du cryostat était réduite à 5 jours. Le déplacement du piège à azote de l’amont à l’aval du tableau de vannes, soit au plus près du cryostat, a résolu de façon définitive ce problème. Le refroidissement le plus long a duré 21 jours sans bouchage.
Mesure de la conductance tunnel
La conductance différentielle de la jonction tunnel du STM s’obtient avec une technique standard de détection synchrone 2 . En maintenant la distance pointe-échantillon constante (régulation du microscope bloquée), une modulation sinusoïdale V acajoutée à une rampe en tension appliquée à l’échantillon permet de mesurer la caractéristique I (V ) de la jonction ainsi que sa conductance différentielle G(V ) = dI dV (cf. éq. (2.4)). On accède ainsi à la densité d’états locale (LDOS) Nech (x, eV ) au point x, convoluée avec la dérivée de la fonction de Fermi-Dirac f p (ǫ) qui décrit la distribution thermique des états d’énergie de la pointe :
Introduction
La Transition de phase quantique Supraconducteur-Isolant (TSI) abordée dans cette thèse apparaît dans des films minces de matériaux supraconducteurs lorsque ceux-ci sont soumis à un champ magnétique perpendiculaire, une diminution de l’épaisseur, ou une augmentation du désordre. La dimensionnalité de ces films est cruciale car elle détermine d’une part la nature des transitions de phase mises en jeu, que ce soit la TSI ou la transition supraconductrice thermodynamique, et d’autre part les propriétés de transport dès 300 K.
Dans ce chapitre, nous introduirons le rôle de l’épaisseur d’un film supraconducteur dans les propriétés électroniques, et notamment les effets de localisation et de fluctuations supraconductrices induits par une réduction de la dimensionnalité. Dans une deuxième partie, nous présenterons les deux types d’échantillons qui nous ont permis d’étudier le transport et la supraconductivité dans un régime quasi-bidimensionnel, à savoir les films minces de nitrure de titane polycristallins et les films d’oxyde d’indium amorphe.
Phénoménologie des systèmes quasi-bidimensionnels
Cette section introduit les effets dimensionnels propres aux systèmes désordonnés apparaissant dans les films minces supraconducteurs ainsi que les particularités de la transition de phase supraconductrice.
Systèmes diffusifs : désordre et interaction
Dans la limite de faible désordre, lorsque le libre parcours moyen élastique le est grand devant la longueur d’onde de Fermi λ F , l’évolution d’un électron dans un métal désordonné peut être décrite par un processus de diffusion. Cette condition de faible désordre que l’on peut réécrire k F le ≫ 1, où k F = 2π/λ F est le vecteur d’onde de Fermi, signifie qu’entre chaque collision redistribuant aléatoirement la direction de propagation, on peut reconstruire asymptotiquement une onde plane et retrouver localement une propagation ballistique des électrons. Dans cette limite, les effets d’interférence entre collisions successives sont négligeables, rendant les évènements de collision indépendants. En considérant les temps longs devant le temps de collision élastique τ e , (t ≫ τ e ⇔ ωτe ≪ 1) afin de garantir un nombre de collisions important, l’évolution d’un paquet d’ondes peut se décrire par une équation de diffusion :
Supraconductivité inhomogène
Granularité induite par le désordre
Expérimentalement, de nombreux efforts se sont portés sur les systèmes supraconducteurs désordonnés dits « homogènes », tels que les matériaux amorphes InO x , MoGe, Be…, qui se distinguent des systèmes granulaires pour lesquels la physique est dominée par le couplage inter-grains. Or, qualifier un désordre d’homogène est quelque peu abusif puisque la statistique d’un désordre aléatoire est, par définition, poissonienne, donc fortement inhomogène à petite échelle.
Fluctuations mésoscopiques, interaction et supraconductivité
L’apparition d’une phase supraconductice inhomogène discutée dans le chapitre précédent §4.3.2, a été démontrée par Skvortsov et Feigel’man [130] dans le cas des films supraconducteurs désordonnés. Partant du traitement de l’interaction Coulombienne de Finkel’stein (cf. §5.2.1), ces derniers ont calculé l’effet des fluctuations mésoscopiques du désordre sur l’état supraconducteur en dimension d = 2. Nous nous proposons de décrire, ici, les résultats principaux de leur théorie.
À cause du renforcement de l’interaction Coulombienne par le désordre, l’interaction effective entre électrons, λ, acquiert une contribution négative proportionnelle à la probabilité de retour à l’origine ∼ g −1 ln(1/ǫτ e ) (cf. éq. 5.1). Proche de la conductance critique g cF où λ est fortement réduite, les fluctuations mésoscopiques de la conductance génèrent alors des fluctuations locales de λ. Le problème des fluctuations de la constante de couplage a déjà été étudié par Ioffe et Larkin [73] dans un modèle phénoménologique tridimensionnel conduisant à une phase supraconductrice inhomogène et une transition supraconductrice percolative.
Table des matières
Introduction
I Microscopie et spectroscopie tunnel à basse température
1 Microscope à effet tunnel à basse température
1.1 Principe de fonctionnement
1.2 Description du microscope
1.2.1 Scanner : tube piezoélectrique
1.2.2 Moteurs de positionnement
1.2.3 Pointes
1.3 Électronique de mesure
1.3.1 Électroniques de contrôle
1.3.2 Convertisseur courant-tension
1.4 Cryogénie
1.4.1 Dilution inversée
1.4.2 Refroidissement du STM : mode contrôle
2 Spectroscopie tunnel à balayage
2.1 Spectroscopie tunnel
2.1.1 Courant tunnel à travers une jonction
2.1.2 Cas d’une jonction métal-isolant-métal
2.1.3 Cas d’une jonction métal-isolant-supraconducteur
2.2 Mesure de la conductance tunnel
2.3 Résolution énergétique
2.4 Imagerie de Vortex
II Désordre, localisation et interaction
3 Films minces supraconducteurs
3.1 Phénoménologie des systèmes quasi-bidimensionnels
3.1.1 Systèmes diffusifs : localisation et interaction
3.1.2 Supraconductivité quasi-bidimensionnelle
3.2 Films minces de T iN et InOx
3.2.1 Films minces polycristallins de T iN
3.2.2 Films minces amorphes d’InOx
4 Localisation
4.1 Localisation faible
4.2 Localisation forte
4.2.1 Transition d’Anderson
4.2.2 Critère de Thouless
4.2.3 Théorie d’échelle de la localisation
4.2.4 Conséquences pour les films minces à température non nulle
4.2.5 Conduction activée thermiquement dans les films minces
4.3 Localisation et supraconductivité
4.3.1 Extension du théorème d’Anderson
4.3.2 Supraconductivité inhomogène
4.3.3 Paires de Cooper localisées
5 Interaction électron-électron
5.1 Interaction et désordre
5.1.1 Correction à la densité d’états
5.1.2 Correction à la conductivité
5.1.3 Longueur de localisation en dimension 2 en présence d’interaction
5.2 Interaction Coulombienne et supraconductivité
5.2.1 Suppression de la température critique
5.2.2 Suppression du paramètre d’ordre supraconducteur
5.3 Fluctuations mésoscopiques et interaction Coulombienne
6 Localisation et supraconductivité dans T iN
6.1 Transport et corrections quantiques
6.2 Inhomogénéités spatiales du gap supraconducteur
6.2.1 Gap supraconducteur
6.2.2 Inhomogénéités spatiales
6.2.3 Suppression coulombienne de Tc et fluctuations mésoscopiques
6.3 Localisation et supraconductivité
6.4 Paires de Cooper localisées
6.4.1 Loi d’activation
6.4.2 Nuances sur l’interprétation des lois d’activation
6.4.3 Gap isolant dans la DOS
6.5 Diagramme de phase
7 Supraconductivité granulaire dans InO xamorphe
7.1 Transport
7.2 Inhomogénéités spatiales du gap supraconducteur
7.3 Paires de Cooper localisées
7.3.1 Absence de pic de cohérence
7.3.2 Évolution en température de la DOS
7.3.3 Pseudogap
III Fluctuations supraconductrices
8 Fluctuations supraconductrices thermodynamiques
8.1 Fluctuations supraconductrices
8.1.1 Fonctionnelle de Ginzburg-Landau
8.1.2 Régime gaussien et paramètre de Ginzburg-Levanyuk
8.2 Pseudogap de fluctuations
8.2.1 Renormalisation de la densité d’états
8.2.2 Renormalisation de la conductance tunnel différentielle
8.3 Paraconductivité
8.3.1 Contribution d’Aslamasov-Larkin
8.3.2 Contribution de la densité d’états
8.3.3 Contribution de Maki-Thompson
8.4 Fluctuations de phase dans les systèmes bidimensionnels
8.4.1 Quasi-ordre à longue distance
8.4.2 Transition de Berezinskii-Kosterlitz-Thouless
8.4.3 Conséquences sur les films minces supraconducteurs
8.5 Renormalisation de la température critique
9 Fluctuations supraconductrices dans T iN
9.1 Fluctuations supraconductrices dans T iN
9.1.1 Paraconductivité
9.1.2 Transition de Beresinskii-Kosterlitz-Thouless
9.2 Pseudogap de fluctuations dans les films de T iN
9.2.1 Anomalie de la densité d’états au-dessus de Tc
9.2.2 Pseudogap de fluctuations supraconductrices
10 Transition de phase quantique
10.1 Théorie quantique de M. Fisher
10.1.1 Introduction : les transitions de phase quantiques
10.1.2 Modèle de fluctuations de phase
10.1.3 Discussion
10.2 Fluctuations supraconductrices au-dessus de Hc2(0)
11 Transition Supraconducteur-Isolant induite par le champ
11.1 Echantillon peu résistif de T iN
11.1.1 Magnétorésistance
11.1.2 Correction quantique de Galitski-Larkin
11.1.3 Transport non-linéaire
11.2 Échantillon de T iN proche du désordre critique
11.2.1 Magnétorésistance géante
11.2.2 Transport non-linéaire
11.3 TSI induite par le champ dans InOx
11.3.1 Magnétorésistance géante
11.3.2 Sur la dualité « paires de Cooper-vortex »
11.3.3 Loi d’échelle
– ix – Transition Supraconducteur-Isolant
Conclusion
A Méthodes de mesure de résistances hautes impédances