L’Europe a une balance énergétique déficitaire, elle consomme plus d’énergie qu’elle en produit. En 2009, elle a produit 812 Mtep couvrant 43 % de ses besoins, alors que ses productions recouvraient 53 % en 2000. Cette diminution s’explique par une augmentation de la consommation et par une diminution de la production de 13,5 %, notamment à cause de l’épuisement des gisements de pétrole en Mer du Nord (2). L’Europe doit donc importer de l’énergie à hauteur de 57 % de sa consommation. La France, quant à elle, a due importer 51,3 % de son énergie consommée. Les importations européennes sont principalement du pétrole et du gaz en provenance de la Russie, de la Norvège, de l’Algérie, du Qatar et de la Lybie (4). D’après l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), si les pays européens ne réagissent pas, leur dépendance vis-à-vis de l’étranger pourrait atteindre 62 % d’ici 20 ans.
De plus, en 2008, les vingt-sept pays de l’Union Européenne ont signé le paquet « énergieclimat » prévoyant d’ici 2020 une augmentation de 20 % de l’efficacité énergétique, de 20 % de la part des énergies renouvelables et de 10 % de l’utilisation de biocarburant afin d’atteindre une réduction de 20 % des émissions de dioxyde de carbone (CO2) (4).
Enfin, l’épuisement des ressources naturelles joue un rôle majeur dans les politiques énergétiques des états puisqu’en l’état actuel des connaissances, les réserves de pétrole sont estimées à 47 ans, 60 ans pour le gaz et 167 ans pour le charbon .). Outre les problèmes d’approvisionnement, la raréfaction des ressources provoque une forte hausse des prix. Par exemple, le Brent est passé de 20 USD/baril en 2000 à 110 USD/baril en 2011 (1).
C’est pourquoi, dans ce contexte, les pays cherchent de nouvelles sources d’énergie afin de diversifier leur bouquet énergétique. Ils veulent passer des énergies de stocks (pétrole, gaz, charbon, nucléaire) à des énergies de flux, renouvelables (hydraulique, éolien, solaire, biomasse, géothermie, etc.). Parmi celles-ci, le solaire photovoltaïque apparait comme une solution prometteuse pour la production d’électricité. Ses principaux avantages sont la production directe d’électricité sans passer par une turbine et son large potentiel d’installation sur les toits des bâtiments. Néanmoins, c’est une technologie complexe, relativement chère et souffrant d’un faible rendement. De plus, nous ne savons pas aujourd’hui stocker efficacement l’électricité produite en excès afin d’y avoir accès dans les périodes de faibles production (mauvais temps, nuit, hiver, etc.).
Aujourd’hui, la production d’électricité photovoltaïque est largement dominée par le silicium avec 95 % des panneaux photovoltaïques installés (monocristallin, polycristallin et couche mince) (6). Cependant, ces panneaux commerciaux souffrent d’un faible rendement moyen, environ 13 % (entre 12 et 18 % pour le monocristallin, entre 12 et 15 % pour le polycristallin et entre 6 et 9 % pour les couches minces (7)). C’est pourquoi de nombreuses recherches se tournent sur l’augmentation de l’efficacité des panneaux en silicium (nanostructures, couches minces, plasmonique, etc.) et sur des matériaux alternatifs possédant un meilleur rendement (CdTe, CIGS, GaAs, etc.). Généralement, ces nouveaux matériaux sont déposés en couches minces (quelques centaines de nanomètres), mais présentent toujours des rendements intéressants, réduisant ainsi les coûts de production.
Parmi les nouveaux matériaux en couche mince considérés pour le photovoltaïque, l’alliage InGaN fait figure d’outsider. Il fut étudié dans un premier temps pour des applications de diodes électroluminescentes (LED) et de capteurs UV (8). Depuis le début des années 2000, il est étudié pour le photovoltaïque (9) (10) (11) (12) grâce à son large et modulable gap d’énergie interdite (énergie à partir de laquelle le matériau répond le plus efficacement à la lumière incidente). En effet, l’InN absorbant dans l’infrarouge avec un gap de 0,7 eV (1771 nm) (13) et le GaN absorbant dans l’ultra-violet avec un gap de 3,39 eV (366 nm) (13), l’InGaN peut couvrir une grande partie du spectre solaire. On peut donc, par exemple, facilement concevoir des cellules solaires multi-jonctions à base d’InGaN simplement en changeant la concentration d’indium dans le GaN. De telles structures simplifieraient ainsi les procédés de fabrication des cellules et en diminueraient ainsi les coûts, tout en produisant de hauts rendements de conversion photovoltaïque. D’après les calculs théoriques, une cellule triple-jonctions pourrait atteindre les 70 % de rendement (14) ce qui la rendrait économiquement avantageuse pour des applications terrestres.
Aujourd’hui, des cellules solaires simple ou multi-jonctions existent en laboratoire mais souffrent d’un prix trop élevé pour leur industrialisation. L’un des facteurs augmentant le coût de ces composants est le substrat. En effet, l’InGaN ne pouvant pas être fabriqué de manière massive, est déposé en film fin sur un substrat, traditionnellement le saphir. Or, ce dernier, en plus d’un coût élevé, a des paramètres structuraux assez éloignés de ceux de l’InGaN détériorant les performances des composants optoélectroniques. Ainsi, nous nous sommes intéressés au remplacement du saphir par un matériau moins coûteux. Cette thèse se déroule dans le cadre du projet ANR NewPVonGlass qui a pour objectif d’étudier la faisabilité de substrats en silicium et en verre pour des cellules solaires à base d’InGaN. Ces matériaux ont l’avantage d’ouvrir tous les deux sur un champ d’applications très vaste. Un substrat en silicium permettrait une intégration de composants en GaN dans des circuits intégrés à base de silicium. De plus, ce matériau bénéficie d’une profonde connaissance grâce à l’industrie électronique ainsi qu’un faible coût. Le verre, quant à lui, est économiquement très intéressant et il a des utilisations très variées dans le bâtiment, les transports, et dans bien d’autres applications. Néanmoins, ces deux matériaux ont des caractéristiques très éloignées de celles de l’InGaN risquant de dégrader fortement ses propriétés. Pour palier à ce problème, nous proposons l’introduction d’une couche tampon entre le substrat et la couche d’InGaN à base d’oxyde de zinc (ZnO). Ce matériau présente l’avantage d’avoir des caractéristiques proches de celles du GaN et surtout de limiter la propagation de défauts structuraux.
Le projet NewPVonGlass est un projet ANR HABISOL qui a débuté en 2009 et qui regroupe quatre partenaires. Le premier est la start-up Nanovation, spécialiste du ZnO, qui a en charge la croissance de couches de ZnO sur saphir, sur silicium et sur verre. Le deuxième est l’UMI GeorgiaTech de Metz qui s’occupe de la croissance de la cellule solaire en InGaN. Le troisième est le Laboratoire de Photonique et Nanostructures (LPN) en charge de la découpe des cellules et des contacts. Enfin, le Laboratoire de Génie Electrique de Paris (LGEP) effectue les caractérisations électriques des structures réalisées. Par ailleurs, des simulations de cellules solaires à base d’InGaN seront effectuées en partenariat entre GeorgiaTech Metz et le LGEP.
Plus précisément, ma contribution dans ce projet fut la caractérisation optique et électrique de l’alliage InGaN et des cellules solaires réalisées à partir de ce matériau. Ce travail avait pour but de mieux décrire les structures et de trouver les paramètres clés permettant l’amélioration les cellules. Nous avons également participé aux simulations de cellules solaires afin d’optimiser les structures et de déterminer certains paramètres critiques.
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