Microbiote et naissance : Quelles perspectives pour les sages-femmes ?

Depuis le début des années 2000, l’étude du microbiome est au cœur de l’intérêt des microbiologistes. En effet, les interrogations sur l’impact du microbiome sur notre santé sont considérables. Ainsi, en 2007 a été initié aux Etats-Unis le Human Microbiome Project visant la compréhension des interactions entre notre corps et notre flore microbienne (Tortora, Funke, & Case, 2012). Afin de mieux connaître ces microorganismes, les techniques ont évoluées au fil du temps et la mise en culture des bactéries a été remplacée par une technique de pointe appelée métagénomique qui permet le séquençage des génomes microbiens (Tortora et al., 2012). Très vite, l’ampleur considérable du travail a mené à la création en 2008 du Consortium international sur le microbiome humain, unissant dans les recherches plusieurs pays notamment l’Australie, le Canada, la Chine, les Etats-Unis et la France ; le but étant de faciliter le partage des résultats et de générer données et protocoles (International Human Microbiome Consortium, 2015).

L’être humain et les microorganismes, ou microbiote, vivent en association pour leur survie réciproque. Ce phénomène est appelé la symbiose et peut être de plusieurs types : commensalisme, mutualisme et parasitisme. Dans le commensalisme, l’un des organismes tire avantage de l’autre sans lui nuire. Le mutualisme est une forme de relation dans laquelle chacun profite de l’autre. En revanche, lorsque l’un des organismes vit aux dépens de l’autre, il s’agit de parasitisme (Tortora et al., 2012). L’ensemble des microorganismes constitue le microbiote et leurs interactions avec l’humain est appelé le microbiome. Notons que ces termes sont récents et sont venus peu à peu remplacer celui de « flore microbienne ».

Lors de notre première année de formation en voie seconde sage-femme, nous avons visionné un film documentaire intitulé « Microbirth » qui amène des pistes de réflexion quant au microbiote (Harman & Wakeford, 2014). Ce film, se basant sur de récentes recherches tend à montrer un réel impact de la voie d’accouchement, voie basse ou césarienne, sur la colonisation bactérienne du nouveau-né et met en évidence une relation fondamentale entre l’acquisition de ce microbiote et la santé de l’Homme tout au long de sa vie. Cette colonisation bactérienne commence dès l’accouchement, par le passage du fœtus dans la filière génitale maternelle et se poursuit les premiers jours de vie par le contact avec la mère et l’environnement présent autour de l’enfant (Campeotto et al., 2007). Les auteurs du film « Microbirth » affirment que la colonisation bactérienne est grandement amoindrie lors d’une césarienne et cela pourrait avoir une incidence sur l’apparition ultérieure de certaines maladies (Harman & Wakeford, 2014).

Le microbiome 

Nous avons fait le choix de définir brièvement le terme de microbiome afin d’étayer sa compréhension et sa différenciation du microbiote. Le microbiome se définit par l’« ensemble de communautés microbiennes vivant sur et dans l’humain et leurs interactions fonctionnelles avec l’organisme humain ; désigne aussi l’ensemble des génomes appartenant aux microorganismes présents sur et dans l’humain » (Tortora et al., 2012, p. G-10). Il constitue donc un écosystème complexe qui joue un rôle dans l’homéostasie et le maintien de la santé. Nous avons pu constater que la frontière entre les termes microbiome et microbiote est parfois mal définie et que de nombreux auteurs utilisent régulièrement l’un indifféremment de l’autre. Il semblerait donc que le microbiome corresponde à l’ensemble des génomes du microbiote.

Le microbiote 

Selon Filleron et Jumas-Bilak (2015) :
Le microbiote (du grec mikros : petit et bios : vie) désigne les espèces microscopiques qui prédominent et/ou sont durablement adaptées à la surface et à l’intérieur d’un organisme vivant. Microbiote dérive de l’anglais microbiota et remplace aujourd’hui les termes désuets de flore microbienne ou de microflore (p. 27).

On estime à 10¹³ les cellules somatiques présentes sur le corps d’un adulte et 10¹⁴ ses cellules microbiennes. Il est donc intéressant de constater qu’il y aurait dix fois plus de cellules microbiennes que de cellules humaines. Cette flore s’adapte aux conditions de vie des différentes parties de notre corps (peau, nez, bouche, oreilles, voies respiratoires, voies uro-génitales et tube digestif) (Tortora et al., 2012). Selon Mokni et Abdelhak (2014), le fœtus et son environnement sont stériles et la colonisation bactérienne commence seulement après la naissance. Cette théorie est très souvent retrouvée. Néanmoins, certains auteurs suggèrent que le méconium des enfants nés à terme ne serait pas stérile et que la colonisation du tractus digestif pourrait déjà débuter in utéro (Hansen et al., 2015 ; Jiménez et al., 2008).

Identification des bactéries 

Selon Cinquin, comme évoqué précédemment, de très nombreuses bactéries sont présentes chez l’homme et notamment dans le tractus intestinal. A ce jour, toutes les populations existantes n’ont pas encore pu être détectées. Avant l’apparition de nouvelles techniques il y a une trentaine d’années, les bactéries étaient analysées par mise en culture. Cette méthode présentait certaines limites. En effet, de nombreuses bactéries intestinales, par leur caractère anaérobie, ne pouvaient se développer en milieu de culture. Une partie seulement de l’écosystème digestif pouvait donc être analysée ce qui rendait difficile l’obtention de résultats probants. Puis les techniques moléculaires sont apparues et notamment le séquençage de l’Acide DésoxyriboNucléique [ADN]. Cela a permis de classer les bactéries selon la séquence d’un gène et d’établir des liens phylogénétiques entre les espèces. La macromolécule Acide RiboNucléique ribosomique 16S [ARN 16S] est généralement celle qui est étudiée avec son ADN correspondant car elle est présente dans toutes les bactéries et a le même rôle dans tous les organismes. Elle est constituée de régions conservées permettant d’établir des relations entre des groupes de bactéries, et de régions hypervariables qui informent sur le genre ou l’espèce de la bactérie. L’association de ces deux régions a permis de constituer une base de données importante et ainsi de développer les connaissances sur l’écosystème digestif (2005).

Le séquençage d’ADN consiste à déterminer une séquence de nucléotides dans un fragment d’ADN (Tortora et al., 2012).

Microbiote normal

Selon Tortora et al., c’est l’« ensemble des microorganismes qui colonisent un hôte sans provoquer de maladies; aussi (anciennement) appelé flore microbienne normale » (2012, p. G-10). Grâce à la compétition entre les microbes, la croissance de ceux nuisibles à la santé de l’hôte est limitée. Ce phénomène est appelé antagonisme microbien. Il permet donc au microbiote normal d’éviter la croissance des microbes pathogènes en influant sur les conditions ambiantes tel que le pH ou la quantité d’oxygène et en produisant des substances susceptibles de leur nuire. Lorsque ce microbiote normal est perturbé (par des antibiotiques ou une hygiène excessive par exemple), les agents pathogènes peuvent prendre le dessus (Tortora et al., 2012). Le microbiote normal a donc un rôle majeur de protection envers des agents pathogènes potentiels. Les différentes souches bactériennes sollicitent la réponse immunitaire humorale, activent la résistante de l’hôte et modulent sa réponse immunitaire (Fanaro, Chierici, Guerrini, & Vigi, 2003). L’établissement du microbiote est un processus qui se fait dans le temps même si celuici n’est pas précisément défini. Selon Wopereis, Oozeer, Knipping, Belzer et Knol (2014), les 1000 premiers jours de vie sont ceux où le corps répond et s’adapte aux premiers stimuli.

Table des matières

1 Introduction
2 Questionnement professionnel
3 Cadre de référence
3.1 Le microbiome
3.2 Le microbiote
3.2.1 Nomenclature des bactéries
3.2.2 Identification des bactéries
3.2.3 Microbiote normal
3.2.4 Microbiote intestinal
3.3 Le nouveau-né sain
3.4 Question de Recherche
3.5 Les concepts
3.5.1 Prévention et promotion de la santé
3.5.2 Knowledge Transfer
3.5.3 Santé
4 Dimension éthique
4.1 Historique de l’éthique dans la recherche scientifique
4.2 Les principes fondamentaux de l’éthique
4.3 L’éthique en regard de notre travail
5 Méthode : revue de littérature
5.1 Champs disciplinaires
5.1.1 Midwifery
5.1.2 Santé Publique
5.1.3 Microbiologie
5.2 Choix des bases de données
5.2.1 PubMed ou Medline
5.2.2 Cumulative Index to Nursing and Allied Health Literature [CINAHL]
5.2.3 Maternity infant Care: Midwives Information and Resource Service [MIDIRS]
5.3 PICO
5.4 Thésaurus, mots-clés et descripteurs
5.5 Méthodologie de la recherche
5.6 Récapitulatif du choix des articles
5.7 Choix des articles
6 Conclusion

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