Comment éviter la transition à l’arc ?
Afin d’éviter la transition en régime d’arc, plusieurs solutions sont généralement employées à pression atmosphérique. Les principales consistent à :
− diminuer le produit p.d afin de se ramener à des valeurs similaires à celles obtenues à basse pression. En effet, nous avons vu précédemment que pour des valeurs du produit p.d inférieures à quelques Torr.cm le claquage obtenu est de type Townsend et non plus de type streamer. Ainsi typiquement, il faut utiliser des distances interdiélectriques de l’ordre de la centaine de µm. Ceci peut être réalisé par exemple en utilisant des micro-hollow cathode (MHCD) [23].
− localiser la décharge en utilisant une répartition non uniforme du champ électrique afin d’éviter de court-circuiter les électrodes par un canal de décharge : il s’agit des décharges couronnes [33].
− limiter le courant fourni par l’alimentation en plaçant en série avec la cellule de décharge un ballast selfique qui limitera la vitesse de variation du courant [30] ou bien un ballast résistif qui entraîne une chute de la tension appliquée sur le gaz lors de l’augmentation du courant de décharge [30].
− insérer un diélectrique entre les deux électrodes, on parlera dans ce cas de Décharge contrôlée par Barrière Diélectrique (DBD) [24].
− préioniser le gaz et utiliser une source de tension impulsionnelle, outre le fait d’éviter la transition à l’arc, cela permet surtout d’homogénéiser la décharge. Ce type de technique est notamment utilisé dans les lasers [25]. Nous reviendrons sur cette technique lors de la description des décharges homogènes.
Nous décrirons successivement chacune de ces configurations de décharge en nous focalisant sur le cas des décharges contrôlées par barrière diélectrique qui font l’objet de cette thèse.
Micro-hollow cathode (MHCD)
Dans le cas de micro-hollow cathode, le rapport p.d est similaire à ceux généralement utilisés* à basse pression et le claquage ainsi obtenu est de type Townsend. La Figure 5 présente le schéma d’une cellule MHCD. Les électrodes métalliques recouvrent entièrement un diélectrique d’environ quelques dizaines de µm d’épaisseur. La structure est percée de trous, de diamètre inférieur à 100 µm, dans lesquels la décharge se développe.
Ce type de cellule a permis l’obtention de décharges homogènes dans l’argon, l’hélium, le néon, le xénon et l’air sous des tensions continues. Cependant, à cause de leurs petites tailles, il faut multiplier le nombre de cellules afin d’obtenir une surface conséquente de décharge relativement homogène [27]. Pour augmenter le volume de décharge, les cellules peuvent également être utilisées comme cathode tandis qu’une anode est placée en vis-à-vis à une distance pouvant atteindre 10 mm (Figure 6) [28,29].
Figure 6 : Utilisation d’une cellule MHCD comme cathode avec une anode placée en vis à vis [28]
Les MHCD peuvent fonctionner aussi bien avec une alimentation en tension continue que pulsée. Comme le montre la Figure 7, ce type de décharge est très adapté au « patterning » et
à des traitements sur de petites échelles. En effet, de par leurs petites tailles les MHCD ne sont pas adaptées au traitement de grandes surfaces. Dans le cadre d’un traitement de surface par MHCD, la température du gaz peut s’avérer être un inconvénient. En effet, bien qu’elle soit environ égale à 400 K dans le néon, elle peut atteindre 2000 K dans l’air [30].
Décharges couronnes
Les décharges couronnes sont caractérisées par le fait qu’une des deux électrodes a un rayon de courbure faible comparé à la distance inter-électrodes [32]. La dissymétrie des électrodes entraîne une répartition non homogène du champ électrique appliqué sur le gaz : la Figure 8 présente l’exemple d’une décharge couronne cylindrique. Si la tension d’alimentation n’est pas trop élevée, il est possible de localiser la décharge près de l’électrode de faible rayon de courbure, dans la zone où le champ électrique, E, est supérieur au champ de rupture du gaz, E0. Ainsi, la localisation de la décharge autour d’une électrode permet d’éviter la formation d’un canal conducteur entre les deux électrodes et par conséquent la transition à l’arc. Ce type de décharge a également été largement étudié dans des configurations de type pointe – plan [33].
Limitation du courant fourni par l’alimentation
Une autre solution pour éviter le passage à l’arc est de limiter le courant fourni par l’alimentation. Pour cela, il est par exemple possible d’insérer en série avec la cellule de décharge un ballast résistif (Figure 9-a) qui induit une chute de la tension appliquée sur le gaz (Eq. 2) ou bien un ballast selfique (Figure 9-b) qui entraîne une limitation de la vitesse de variation du courant (Eq. 3).
Dans le cas de l’utilisation d’un « ballast » résistif, la puissance perdue par effet Joule dans la résistance peut être très importante, ce qui entraîne une forte baisse du rendement énergétique. Bien que ces configurations empêchent le passage à l’arc, elles ne permettent pas de contrôler la répartition des streamers et donc l’uniformité de la décharge. Il est également délicat de déterminer les valeurs de R ou de L quand la surface des électrodes augmente et que plusieurs streamers peuvent se développer simultanément.
Pour pallier ce problème, Laroussi et al ont développé une décharge appelée Resistive Barrier Discharge (RBD) [35]. La Figure 10 présente le schéma de principe d’une RBD. Entre les deux électrodes se trouve un matériau à haute résistivité qui permet de limiter localement la tension appliquée sur le gaz. Nous verrons par la suite qu’en fait cette configuration est dérivée de celle des Décharges contrôlées par Barrière Diélectrique (DBD), le diélectrique étant simplement remplacé par un matériau résistif. Ce type de décharge permet d’obtenir de grands volumes de plasma à pression atmosphérique, la distance inter-électrodes pouvant atteindre plusieurs centimètres. Cependant, comme dans le cas de l’utilisation d’un ballast résistif, ce type de décharge présente un piètre rendement énergétique : de l’ordre de 50 %.
Décharges contrôlées par barrières diélectriques
Il faut remonter à 1857 pour trouver les premiers travaux sur les Décharges contrôlées par Barrières Diélectriques (DBD) pour la synthèse de l’ozone dans l’entreprise Siemens [36]. Une DBD est une source de plasma froid hors d’équilibre caractérisée par la présence d’au moins un diélectrique entre les deux électrodes métalliques (Figure 11). La présence du diélectrique permet de limiter l’énergie qui passe dans chaque canal de décharge et ainsi d’éviter le passage à l’arc ; en contre partie, cela impose l’utilisation d’une excitation électrique alternative.
Après avoir décrit le principe de fonctionnement d’une DBD, nous présenterons les principales configurations de DBD habituellement rencontrées ainsi qu’une des principales applications pour les traitements de surface : le procédé Corona.