Méthodologie d’évaluation de la flexibilité du chauffage électrique
Méthodologie d’évaluation de la flexibilité du chauffage électrique
Dans notre contexte, la flexibilité des équipements, vis‐à‐vis de la gestion de la demande électrique, peut être définie par les limites des stratégies de contrôle des appareils électriques pour répondre aux besoins du système électrique. Pour cela, il faut quantifier les effets positifs et négatifs du contrôle des équipements, au niveau local (analyse d’une maison), mais aussi les effets globaux au niveau du réseau de distribution national associés à chaque stratégie. Ainsi on peut peser les avantages et les inconvénients dus à l’application de chaque stratégie de contrôle. Les raisons de la mise en place de ces contrôles peuvent être de différentes natures. Dans notre cas, on s’intéresse à l’analyse de l’impact d’un contrôle dans différents cas : • Action en situation d’urgence • Contrôle fonction des besoins du réseau électrique (éviter les pics de consommation) à travers des signaux de prix ou des contrôles à distance Dans ces différents cas, la marge de manœuvre dépend du climat, du type de bâtiment et des critères d’acceptabilité des occupants. Dans le chapitre I, on a pu observer que l’usage ayant le plus large potentiel de gestion de la demande, en France, est le chauffage électrique. Cependant, la vraie valeur et les effets du contrôle des systèmes de chauffage restent indéfinis. L’objectif de ce chapitre est donc, de donner une méthodologie permettant de quantifier la flexibilité du chauffage électrique pour la gestion de la demande. Plusieurs stratégies de contrôle ont été repérées lors de l’analyse des systèmes de chauffage électrique classiques (convecteurs/radiateurs électriques) par la méthode ILCA dans le chapitre précédent. Toutefois, le fonctionnement de ces systèmes dépend grandement de variables externes comme le climat et des caractéristiques qui interviennent dans le comportement thermique du bâtiment. Dans ce chapitre, l’évaluation des stratégies de contrôle se fait à partir de modèles physiques, qui vont nous permettre d’étudier le comportement des équipements pendant leur fonctionnement normal et quand des stratégies de contrôle sont employées. Le chauffage électrique et le bâtiment doivent être étudiés ensemble car les caractéristiques de ce dernier vont influencer grandement le fonctionnement du chauffage. Cette caractéristique est encore plus forte lorsque les équipements de chauffage n’ont pas une inertie importante. Dans les études techniques reportées au chapitre I, on a pu voir que plusieurs modèles de simulation ont été adoptés pour réaliser des études sur le contrôle des équipements. C’est pourquoi, on commence par une analyse des différents outils de simulation existants pour déterminer s’ils répondent à nos besoins de simulation.
Méthode d’évaluation des stratégies de contrôle pour le chauffage électrique
Pour pouvoir étudier comment un système va répondre à des changements de fonctionnement, des modèles physiques sont généralement utilisés. L’utilisation de ces modèles peut se faire selon deux voies différentes : utilisation des modèles directs ou des modèles indirects. Les modèles indirects ou inverses, reposent sur la représentation du système réel à partir du comportement de ce dernier. Ce modèle est normalement basé sur la physique du système à représenter et sa paramétrisation est faite à partir de données obtenus sur site. Ainsi, on obtient un modèle permettant de décrire le comportement du système réel. Dans le chapitre I, on a pu voir plusieurs exemples d’application de cette technique de modélisation comme [Braun, 2003], [Braun & Chaturvedi, 2002] et [Braun et al., 2001]. Dans le cas des modèles directs, on utilise les valeurs théoriques pour les différentes variables comme la composition des murs, caractéristiques des fenêtres et autres. Dans nos études on a opté pour des modèles physiques directs, faute de données sur le comportement de bâtiments. D’autre part, la modélisation directe nous permet une certaine liberté en termes de cas d’étude car on peut choisir une multitude de bâtiments très différents entre eux et ne pas rester limité aux bâtiments pour lesquels on a des données. A notre avis, les méthodes inverses sont plus utiles pour l’analyse de la gestion de la demande d’un bâtiment précis. La détermination du modèle de simulation du bâtiment devient très importante dans le cas d’étude du chauffage électrique, car les caractéristiques du bâtiment vont influencer grandement la consommation du chauffage et les évolutions de température. Pour l’étude de la gestion du chauffage électrique, il va falloir que le modèle thermique du bâtiment choisi permette de répondre à différents besoins. On énumère ces besoins : • Précision de calcul ‐ La méthode de calcul dynamique du bâtiment doit être précise en termes du calcul des besoins de chauffage mais aussi des évolutions de température, car la Chapitre 3. Méthodologie d’évaluation du chauffage électrique David da Silva 82 température des murs et de l’air est un facteur déterminant pour l’évaluation de l’acceptabilité par les occupants. • Calcul avec des petits pas de temps – Pour pouvoir simuler le contrôle des systèmes de chauffage de façon réaliste un petit pas de temps est nécessaire. La simulation du fonctionnement du chauffage permet alors de suivre les appels de puissance du chauffage électrique et d’évaluer plus en détail les évolutions de température dans le bâtiment. • Temps de calcul – Si un petit pas de temps de calcul est utilisé, le temps de simulation augmente car plus d’opérations mathématiques sont réalisées. Comme on veut étudier les impacts des stratégies de contrôle sur des groupes de bâtiments, sur toute la durée de la saison de chauffage, le modèle de simulation doit permettre des simulations rapides. Différents échanges thermiques se produisent entre l’environnement et le bâtiment. D’un côté, on a la conduction à travers les parois, les vitres et de l’autre les échanges dus au renouvellement d’air (Ventilation et infiltrations). Il faut aussi prendre en compte les échanges entre les murs extérieurs et l’environnement et le rayonnement traversant les surfaces vitrées qui sera absorbé par les parois intérieures. Avec l’objectif de choisir le modèle de simulation dynamique du bâtiment le plus adapté à nos besoins, on va d’abord s’intéresser à l’étude des modèles existants.
Analyse des outils de simulation dynamique du bâtiment existants
Des modèles très simples ont été développés, basés sur des analogies électriques, pour modéliser le comportement thermique du bâtiment. Un des modèles les plus simples, appelé de « Equivalent thermal parameter (ETP)», consiste en deux résistances et deux capacités pour représenter le bâtiment (Figure 3‐1). Le grand avantage de ces modèles, c’est qu’ils sont très faciles à utiliser grâce au faible nombre de variables et équations employées. Ils sont généralement utilisés dans des modèles inverses car ces modèles ont peu de variables et sont donc faciles à identifier. Figure 31 – Circuit électrique équivalent – « ETP » D’autres modèles ont été développés dans lesquels chaque paroi est décomposée en deux ou trois résistances et capacités pour une meilleure précision comme dans [Mendes et al., 2001]. L’air est très souvent représenté par un nœud auquel une capacité est associée. Ainsi la température de ce nœud (Température d’air) est équivalente à la température moyenne d’air dans la pièce, ou du bâtiment. Pour calculer les échanges radiatifs entre les parois, ces modèles simplifiés utilisent souvent un coefficient d’échange global. Ce coefficient comprend les échanges radiatifs et convectifs, donc le Avec : Ti – Température intérieure [K] Text – Température extérieure [K] Qchauf Chaleur fournie par le chauffage électrique [W] R1 – Résistance représentant les échanges d’air – 1/Uair [W/K] R2 – Résistance représentant les échanges thermiques par conduction des murs – 1/ Umur [W/K] Cmur – Capacité des murs [J/K] Cair – Capacité de l’air [J/K] nœud d’air du modèle devient une moyenne de la température radiante des parois et de la température d’air. On peut dire dans ce cas que la température d’air correspond à la température opérative de la pièce. Comme la régulation du chauffage électrique est basée sur la mesure de la température d’air et non sur la température opérative, le contrôle du chauffage électrique ne sera pas décrit correctement si un coefficient d’échange global est pris dans nos simulations. Cependant, ces modèles ne calculent pas les évolutions de la température des murs, car ils considèrent que tout le mur est à température constante ou qu’il a deux, maximum trois, températures différentes. Des études menées par Kummert [Kummert, 2001] montrent qu’il existe une erreur de calcul non négligeable de la température de la surface des murs avec ces modèles par rapport à un modèle de référence où les parois sont construites par la méthode des différences finies. Les modèles de différences finies ont une très bonne précision, mais ils impliquent la résolution d’un grand nombre d’équations, ce qui augmente beaucoup le temps de simulation. Plusieurs auteurs proposent des réductions d’ordre pour réduire les temps de calcul. Selon Gouda [Gouda et al., 2002] on peut regrouper les méthodes de réduction d’ordre en trois catégories: • Méthodes de réduction polynomiales • Optimisation des modèles thermiques • Techniques de transformation basées sur des variables d’état.