Méthodes de synthèse d’oxindoles
Le noyau oxindole
Présentation & applications
Le noyau indolone est un noyau hétéro-aromatique bicyclique, composé d’un benzène accolé à un lactame à 5 chaînons. L’indol-2-one, ou « oxindole », est le dérivé du noyau indole oxydé en position 2, ce qui revient au cas où l’azote du lactame est directement en alpha du benzène. L’oxindole est un noyau présent dans de très nombreuses structures, aussi bien dans des composés pharmaceutiques que dans des produits naturels. C’est entre autre le cas de molécules comme les spirotryprostatines A et B, dont la synthèse totale a été réalisée par Danishefsky et al. en 1999, la (-)-horsfiline et la (+)-alstonisine pour n’en citer que quelques-unes parmi les plus connues.En chimie médicinale, le noyau oxindole est présent dans des composés ayant des propriétés biologiques de type inhibiteur de protéine kinase, inhibiteur de phosphodiesterase, d’agent antirhumatismal116 (comme le Tenidap® de Pfizer qui a été un « lead », finalement abandonné), de type antagoniste des récepteurs 5-HT2A et 5-HT2C de la dopamine (comme le Ziprasidone® de Pfizer117 qui a une activité antipsychotique), et d’agent inhibiteur de l’angiokinase118 (comme le composé BIBF 1120 de Boehringer actuellement en essais cliniques) (cf. schéma III-2).
Voies de synthèse
De part l’importance de ce noyau, de très nombreuses voies de synthèse ont été proposées. Six grandes possibilités existent, et nous allons les présenter plus en détail dans les paragraphes qui suivent : • Synthèse à partir d’un noyau hétéro-aromatique préformé • Synthèse par formation de la liaison azote – carbonyl (liaison a) • Synthèse par formation simultanée des liaisons azote-carbonyle (liaison a) et carbone C3 – carbone C3a (liaison c) • Synthèse par formation de la liaison azote – carbone C7a (liaison b) • Synthèse par formation de la liaison carbone C3 – carbone C3a (liaison c) • Synthèse par formation de la liaison carbone C3 – carbonyl (liaison d)
Synthèse à partir d’un noyau hétéro-aromatique préformé
Il existe principalement trois noyaux à partir desquels on peut obtenir un oxindole par interconversion : il s’agit des indoles, des isatines et des indol-3-ones (cf. schéma III-4).
À partir d’une isatine
Le noyau oxindole peut être obtenu à partir d’une isatine via une réaction de réduction, par exemple par une hydrogénation catalytique119 ou par une réaction de wolf-kishner120-122 (cf. schéma III-5).
À partir d’une indol-3-one
Une autre possibilité est de partir d’indol-3-ones. Ces composés sont facilement accessibles, via l’oxydation d’indoles ou d’indolines. Ils sont par la suite convertibles en oxindoles via une réaction domino « OIC » d’Olefination/Isomerisation/Réarrangement de Claisen. Ainsi Kawasaki et al.123 ont utilisé cette approche dans la synthèse totale des (-)-flustramines A/B et (-)-flustramides A/B (cf. schéma III-6). L’indol-3-one TK1 est bromée puis substituée par un alcool portant une oléfine pour donner TK2. La cétone est alors transformée en oléfine par une réaction d’Horner-Wadsworth-Emmons avec du cyanomethylphosphonate pour donner 1. La base présente pour l’oléfination permet du même coup l’isomérisation de l’indolone 1 en indole 2 suivie d’un réarrangement stéréosélectif de Claisen conduisant à l’oxindole TK3 avec un bon rendement de 70% et un excellent excès énantiomérique de 98%.
À partir d’un indole
Un oxindole peut aussi être obtenu par oxydation d’un indole, mais via une procédure en plusieurs étapes, car l’oxydation directe se fait généralement en position 3, riche en électrons, et conduit à l’isatine et non à l’oxindole124. Un exemple est la préparation « one-pot » de l’oxindole protégé EV2 par Vazquez et al.124 , réutilisée par la suite dans la synthèse du noyau de la welwitindolinone par Shea et al.125 (cf. schéma III-7). L’indole EV1 est d’abord converti en borate, puis hydrolysé en acide boronique et enfin oxydé en alcool par de l’oxone, conduisant au carbonyle EV2 par tautomérie.