Le numérique en bibliothèque, nouveau média
Depuis une dizaine d’années, le monde des bibliothèques est confronté à de nouveaux enjeux et de nouvelles perspectives, probablement aussi importants que lors de l’invention de l’imprimerie : l’avènement d’une nouvelle culture, celle du numérique. En effet, l’arrivée d’internet et des médias numériques en général, ont changé radicalement les habitudes de lecture et d’accès à l’information. Face à ce changement, les bibliothèques, qu’elles soient publiques ou académiques, doivent faire preuve d’un esprit d’adaptation important et constant afin de remplir leurs missions. Pour les bibliothèques publiques, nous nous référerons au Manifeste de l’Unesco sur la bibliothèque publique . La difficulté majeure que rencontrent les bibliothèques n’est pas particulièrement liée aux contenus en format numérique. En effet, ceux-ci ne changent guère des contenus traditionnels offerts par les bibliothèques, on y trouve des livres, des bases de données bibliographiques, des périodiques, de la musique, des films ou encore des méthodes d’apprentissage. La grande différence est l’absence de support physique, qui nécessite d’élaborer de nouveaux processus de signalement de ces données, de revoir nos procédés de médiation (on parlera d’ailleurs ici de « médiation numérique ») et enfin de pouvoir gérer et entretenir une masse croissante d’informations dématérialisées. De plus, à l’ère d’Internet, les bibliothèques doivent répondre à cette problématique : « pourquoi venir dans une bibliothèque me proposant du contenu numérique puisque tout est sur le web ? » Il s’agit à présent de considérer la bibliothèque non plus sous l’angle d’un lieu, mais davantage de son lectorat, de ses besoins et de ses attentes, et d’orienter sa politique documentaire en conséquence. En effet, pour pouvoir opérer ce nouveau virage et se rendre indispensables, les bibliothèques se doivent de connaître leurs publics potentiels (l’ensemble de la population) et réels (les usagers inscrits), et leur environnement. Nous pouvons en effet noter actuellement une culture de l’écran qui se généralise dans la plupart des classes sociales et même générationnelles . La France par exemple, constate un recul de la lecture en même temps qu’une culture de l’écran en nette expansion. La Suisse, comme le reste de l’Europe, n’échappe pas non plus à cette règle . Par ailleurs, nous constatons que la fréquentation des établissements culturels (cinémas, théâtres, salles de concert, etc.) reste équilibrée et que celle des bibliothèques conserve une certaine stabilité.
Etat des lieux de l’offre bibliobus en Europe et aux Etats-Unis
Dans ce même esprit, qu’en est-il des services de bibliobus qui se doivent de répondre aux mêmes exigences que les bibliothèques publiques en termes d’adaptation et aux mêmes missions (Manifeste de l’UNESCO pour les bibliothèques publiques), avec en plus la particularité d’être un service mobile et de proximité ? Comme nous allons le voir, le terme de «bibliobus» est devenu un générique et ne représente plus forcément la réalité d’aujourd’hui, du moins en Europe et aux EtatsUnis.
Il existe en effet aujourd’hui différents types de « bibliobus » et ces diverses catégories marquent les étapes du changement qui s’opère actuellement. Afin de faire la synthèse de ces différents types je m’appuierai notamment sur l’article du dictionnaire de l’enssib concernant les bibliobus.
◆ Les bibliobus caisses ou de dépôt, sont un service de navettes alimentant en documents des bibliothèques, des écoles, mairies ou encore des maisons de retraites.
◆ Les bibliobus rayons ou de prêt direct sont, si l’on peut dire, le service de bibliobus classique. Il s’agit de véhicules poids lourd équipés de rayonnages, à la façon d’une bibliothèque en dur, stationnant à des emplacements précis (place de village, de quartier ou cour d’école) et offrant au public le libre accès à leurs collections.
◆ Les bibliobus rayons pour prêt aux bibliothèques sont des bibliobus équipés de rayonnages, mais n’offrant le libre accès qu’aux bibliothécaires d’écoles, de villages ou de petites villes qui peuvent venir sélectionner les ouvrages qui alimenteront leurs bibliothèques. Au passage suivant, ils effectuent une nouvelle sélection et rendent les ouvrages sélectionnés précédemment, assurant ainsi le renouvellement de leurs collections.
◆ Les médiabus deviennent quant à eux très courants en Europe. Il s’agit d’une nouvelle appellation du « bibliobus » adaptée aux collections proposées. Nous trouverons en effet dans un médiabus, des livres imprimés mais aussi des CD, des DVD et de la presse. Certains se sont équipés en tablettes et ordinateurs et proposent ainsi également des contenus numériques. Le médiabus est en fait la version mobile des bibliothèques hybrides que l’on connaît actuellement.
◆ Les numéribus ou digital bookmobile ou encore bibliobus numériques, qui, à l’inverse des bibliobus traditionnels, ne proposent pas de support matériel comme des livres, cd ou dvd, mais des ordinateurs et des tablettes. Ce sont des bibliothécaires/ formateurs qui enseignent alors aux usagers comment télécharger à partir des serveurs de leurs bibliothèques des Ebooks, des vidéos et de la musique sur leurs propres ordinateurs. En 2008, le premier digital bookmobile a été inauguré au Texas. Il s’agit là de la dernière étape de transformation des bibliobus : 100% de numérique.
Le numérique a-t-il sa place dans un service de bibliobus/médiabus?
Comme dit précédemment, un service de bibliobus a les mêmes préoccupations que les bibliothèques fixes. Tous deux ont la même mission, évoluent dans le même environnement et sont donc au contact d’un même public, à la différence près qu’une part de celui-ci ne peut (ou ne veut pas) se déplacer dans une bibliothèque fixe. Néanmoins, nous pouvons poser le postulat que les besoins de tous ces lecteurs sont les mêmes. Une autre différence notoire entre ces deux types de service consiste en l’exiguïté des bibliobus. Il est de ce fait difficile, voire impossible, de proposer aux lecteurs une collection exhaustive. De ce point de vue, une offre de contenus numériques, donc dématérialisés, est clairement avantageuse dans ce cas de figure. Tout comme les bibliothèques fixes, les services de bibliobus doivent adopter le prisme des besoins et des attentes de leurs lecteurs. Un service qui n’y répondrait plus serait vite conduit à perdre des lecteurs, voire à disparaître purement et simplement. L’évolution de nos médias étant ce qu’elle est, si les bibliobus ne proposent qu’une partie de l’information, ils ne répondront évidemment plus à l’une de leurs missions de base qui est d’assurer l’accès à l’information à toute personne, mission d’autant plus importante puisque, encore une fois, ces services s’adressent essentiellement à des individus n’ayant pas d’accès facilité aux bibliothèques fixes.
Etat des lieux du secteur Bibliobus des Bibliothèques municipales de la Ville de Genève et de son environnement
Le Bibliobus
Le Bibliobus dépend des Bibliothèques municipales de Genève (BM). Il s’agit d’un service de bibliobus de prêt direct. Nous desservons 29 communes du canton de Genève, avec près de 36 points de stationnement. Ce service est très apprécié des habitants du canton et affiche un niveau de prêt important. Il s’adresse en particulier à des lecteurs n’ayant pas la possibilité de se déplacer en ville. Bien que faisant partie des BM, cette prestation a la particularité d’être en grande partie financée par les communes desservies et l’Association des communes genevoises (ACG).
Avec un peu plus de 40’000 documents, dont 4000 par bus environ, le secteur du Bibliobus peut se prévaloir d’une belle collection alliant richesse et nouveauté. En effet, le soin apporté aux acquisitions permet d’offrir aux lecteurs un fonds très diversifié tant dans les collections adulte que jeunesse. Le fait de bénéficier d’un même espace pour ces deux collections permet au lecteur un accès facilité à ces fonds complémentaires, mais également aux professionnels que nous sommes, une très bonne connaissance de ces collections. Pourtant cette richesse est toute relative. Actuellement, les collections du Bibliobus se composent exclusivement de livres imprimés. Nous ne proposons malheureusement pas de périodique ni de multimédia. Jusqu’à présent, nous avons mis l’accent sur la nouveauté tant en matière de fiction que de documentaire. En effet, les ouvrages proposés dans nos bibliobus ne sont pas antérieurs à 2012. Il est donc intéressant pour nous d’élargir nos collections au numérique, mais aussi de développer notre visibilité et ainsi attirer de nouveaux publics.
1. Introduction |