Mesures de la croissance des entreprises

MESURES DE LA CROISSANCE DES ENTREPRISES 

Cette section est divisée en deux parties. Dans la première partie, nous parlons sur les différentes mesures de la croissance, leur pertinence, leur avantage et leur inconvénient dans les études portant sur la croissance de l’ entreprise. Dans la deuxième partie, nous discutons sur l’hétérogénéité des mesures de la croissance.

Les différentes mesures de la croissance de l’entreprise 

Selon Janssen (2016, p.240), « la croissance de l’entreprise est le développement de son activité qui peut se mesurer de manière quantitative ». Quantitativement, elle se mesure par plusieurs indicateurs tels que le chiffre d’affaires, l’emploi, la valeur ajoutée, le profit et les actifs (Wiklund, 2009 ; Dobbs et Hamilton, 2007 ; Janssen, 2016).

Dans notre revue, 75% des articles empiriques recensés ont utilisé le chiffre d’affaires et l’ emploi pour mesurer la croissance. Ce constat est conforme à la conclusion de Janssen (2004), qui montre dans son étude que le chiffre d’ affaires et l’ emploi sont les deux indicateurs les plus utilisés dans le cadre des recherches sur les déterminants de la croissance de l’entreprise, tant en économie qu’ en gestion. Gruenwald (2016), soutient également que le chiffre d’ affaires et l’ emploi sont les deux principales mesures de la croissance de l’ entreprise. Selon cet auteur, ces deux mesures sont plus pragmatiques et plus objectives que d’ autres mesures non-quantifiables.

Il existe un réel débat entre les chercheurs concernant la pertinence, les avantages et les inconvénients du chiffre d’ affaires et l’emploi comme mesures de la croissance de l’entreprise. Théoriquement, la croissance du chiffre d’affaires précède à celle de l’emploi d’autant plus que c’ est l’augmentation du chiffre d’ affaires qui permet à l’entreprise d’investir dans des facteurs de production supplémentaires pour s’adapter à la demande (Janssen, 2016). Voelker (2011) constate que la croissance est fréquemment axée sur le changement du Chiffre d’affaires. Davidsson et al (2003) estiment que le chiffre d’ affaires est la mesure la plus pertinente car il est facilement accessible, il s’ applique à toutes sortes d’entreprises et il est insensible à l’intensité du capital.

Cependant, selon ces mêmes auteurs, l’inconvénient majeur du chiffre d’ affaires comme indicateur de croissance se situe au niveau de sa sensibilité à l’inflation et au taux de change. En effet, si un chercheur utilise un indicateur affecté par l’inflation tel que le chiffre d’affaires, le taux de croissance non ajusté serait artificiellement élevé (Weinzimmer et al, 2003). Par ailleurs, le critère de l’emploi comme mesure de la croissance n’ est pas sensible à l’ inflation (Moati, 2000 ; Davidsson et al, 2003).

Selon Moati (2000), la croissance de l’ emploi met en avant un critère de performance particulièrement important en période de chômage de masse. Parallèlement, Chi Id (1973) juge que l’ emploi est l’indicateur approprié pour mesurer la taille de l’entreprise. L’ inconvénient évident de l’ emploi en tant que qu’indicateur de croissance est que cette mesure est affectée par l’ amélioration de la productivité, la substitution des travailleurs par du capital, la sous-traitance et le degré d’intégration (Davidsson et al, 2003 ; Janssen, 2004).

Globalement, les chercheurs en économie ont tendance à utiliser l’ emploi pour mesurer la croissance car il est une variable clé pour les décideurs politiques et ceux en finance ont tendance à utiliser le chiffre d’affaires car cela est cohérent avec les activités dont ils sont principalement concernés (Barkham et al, 2012).

L’hétérogénéité des mesures de la croissance

Plusieurs études démontrent l’hétérogénéité des mesures de la croissance de l’entreprise et ne soutiennent pas l’interchangeabilité de celles-ci. Chandler et al (2009) montrent que le chiffre d’ affaires et l’emploi ne sont pas des mesures interchangeables. De même, Janssen (2004) conclut que le chiffre d’ affaires et l’emploi ne peuvent pas être considérés comme des mesures interchangeables d’un même phénomène. Lentz et Mortensen (2008) n’ont trouvé aucune corrélation entre la croissance de l’ emploi et celle de la productivité du travail.

D’autres auteurs reconnaissent également l’hétérogénéité des mesures de la croissance compte tenu d’une très faible corrélation entre celles-ci (Davidsson et al, 2003 ; Daunfeldt et al, 2014). Cette hétérogénéité des mesures de la croissance explique en partie les incohérences qui existent dans la littérature et cela constitue une barrière au développement d’un corpus théorique homogène (Janssen, 2004). Dans ce sens, Weinzimmer et al (1998) montrent que les incohérences dans les approches de mesures ont contribué à un manque de consensus dans la littérature sur la croissance de l’entreprise .

Face à cette problématique, Davidsson et al (2003) suggèrent d’explorer l’utilisation de plusieurs mesures dans une recherche sur la croissance de l’entreprise. Selon ces auteurs, cette approche fournirait probablement une image plus complète de toutes les relations empiriques et permettrait de tester la rigidité de tout le modèle théorique.

Par ailleurs, certaines études tendent toutefois à démontrer que ces diverses mesures de la croissance seraient corrélées entre elles. Achtenhagen et al (2010) montrent que la croissance absolue des employés et celle du chiffre d’affaires sont corrélées. De même, Chrisman et Mc Mullan (2000) observent une forte corrélation entre la croissance du chiffre d’affaires et celle de l’emploi. Morrison et Roth (1992) constatent également une corrélation entre le retour sur investissement, le rendement des actifs et la croissance du chiffre d’affaires.

APPROCHES THÉORIQUES DE LA CROISSANCE

De nombreuses approches théoriques ont tenté de saisir les aspects de la croissance des entreprises. Selon Dobbs et Hamilton (2007), ces approches peuvent être divisés en 6 grands groupes: l’approche stochastique, l’ approche descriptif, l’approche évolutionniste, l’approche des ressources, l’ approche d’apprentissage et l’approche déterministe. Dans cette section, nous développons ces approches tout en soulignant les théories ou les modèles dominants de chacune d’ entre elles. Par la suite, nous présentons un tableau récapitulatif des approches théoriques .

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Approche stochastique

L’approche stochastique explique plusieurs aspects clés de la taille et la croissance des entreprises (Weiss,1998). Elle découle de la loi de Gibrat (1931), qui est la base de nombreux modèles mathématiques conçus pour expliquer la répartition de la taille des entreprises (Mansfield, 1962 ; Dobbs et Hamilton,2007). Cette loi, appelée loi de l’effet proportionnel indique que la probabilité de croissance d’une entreprise à une certaine période est indépendante de sa taille durant la période précédente (Janssen, 2011). En d’autres termes, elle prédit que la croissance d’une entreprise est indépendante de sa taille (Janssen, 20 Il ; Feizpour et al, 2010).

Plusieurs études empiriques ont testé la validité de cette loi. Ces études ont porté sur trois populations: toutes les entreprises, uniquement les entreprises survivantes et les entreprises dont le niveau de production est supérieur à l’ échelle minimale d’ efficacité (Petrunia, 2008). Majoritairement, elles tendent à rejeter la loi de Gibrat. À cet effet, Almus (2000), rejette la loi de Gibrat pour les entreprises à forte et faible intensité technologique. En utilisant la méthode des matrices de transition, Feizpour et al (2010) rejettent la loi de Gibrat pour les entreprises manufacturières en Iran. Ces auteurs soutiennent que les petites entreprises ont un potentiel de croissance plus importante que les grandes. Evans (1987a) rejette également la loi de Gibrat en trouvant que la croissance de l’ entreprise diminue avec sa taille.

Cependant, d’ autres études empiriques valident cette loi (Monte et Papagni, 2003 ; Hardwick et Adams, 2002 ; Hymer et Pashigan, 1962). Mansfield (1962) souligne que ces résultats contradictoires pourraient être dûs aux échantillons choisis. Audretsch et al (2004) soutiennent que la dynamique de l’organisation industrielle des services ne reflète pas celle de la manufacture. Selon ces auteurs, cela explique pourquoi la loi de Gibrat pourrait être rejetée dans certaines industries mais pas dans d’ autres.

Approche descriptive 

L’ approche descriptive met l’ accent sur la théorie des stades de développement de l’entreprise (Dobbs et Hamilton, 2007 ; Janssen, 20 Il). En effet, durant plusieurs décennies la théorie des stades de développement était l’ approche dominante pour comprendre la croissance des entreprises (Levie et Lichtenstein, 2010 ; Stanworth et Curran 1976).

Selon cette approche toutes les entreprises passent par des étapes distinctes au fur et à mesure de leur développement (Scott et Bruce 1987). La littérature sur le stade de développement ou le cycle de vie d’une entreprise montre que celles-ci basculent entre la phase de naissance et celle de la maturité, en passant par une phase de survie et par une phase de croissance (Janssen, 2011 ; Miller et Friesen, 1984). Chaque phase est caractérisée par un changement du style de gestion, du rôle du management, de la stratégie et de la structure de l’ organisation (Janssen, 2011). Cette approche a engendré la naissance de plusieurs modèles théoriques variant le nombre de stades (Janssen, 2016). La majorité de ces modèles comporte 3, 4 ou 5 étapes et les autres varient entre 6 et Il étapes (Levie et Lichtenstein 2010). Les modèles théoriques développés par Oreiner (1972) ; Lippit et Schmidt (1967), Scott et Bruce (1987), et Churchill et Lewis (1983) sont très évoqués dans la littérature relative aux stades de développement de l’ entreprise.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIER CHAPITRE
1. FORMULATION DE LA PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE
1.1. CONTEXTE HISTORIQUE ET ÉCONOMIQUE DU MALI
1.2. PROBLÉMATIQUE
1.3. L’OBJECTIF DE LA RECHERCHE
l.4. PERTINENCE DE LA RECHERCHE
DEUXIÈME CHAPITRE
2. REVUE DE LA LITTÉRATURE
2.1. MESURES DE LA CROISSANCE DES ENTREPRISES
2.1.1. Les différentes mesures de la croissance de l’entreprise
2.1.2. L’hétérogénéité des mesures de la croissance
2.2. APPROCHES THÉORIQUES DE LA CROISSANCE
2.2.1. Approche stochastique
2.2.2. Approche descriptive
2.2.3. Approche évolutionniste
2.2.4. Approches des ressources
2.2.5. Approche de l’apprentissage
2.2.6. Approche déterministe
2.3. MODELES DES DÉTERMINANTS DE LA CROISSANCE DES ENTREPRISES
2.3.1. Modèle de Davidsson (1991)
2.3.2. Modèle de Storey (1994)
2.3.3. Modèle de Wiklund et al (2009)
2.3.4. Modèle de Janssen (2011)
2.4. LES DÉTERMINANTS DE LA CROISSANCE DES ENTREPRISES
2.4.1. Les caractéristiques du dirigeant
2.4.1.1. L’âge du dirigeant
2.4.1.2. Le sexe du dirigeant
2.4.1.3. Le niveau d’éducation du dirigeant
2.4.1.4. L’expérience du dirigeant
2.4.1.5. La motivation de croissance du dirigeant
2.4.2. Les caractéristiques de l’entreprise
2.4.2.1. La taille de l’entreprise
2.4.2.2. Age de l’entreprise
2.4.2.3. Le statut juridique de l’entreprise
2.4.2.4. Le secteur d’activité de l’entreprise
2.4.2.5. L’accès à diverses ressources
2.4.3. Les déterminants stratégiques
2.4.3.1. La diversification
2.4.3.2. L’innovation et la R&D
2.4.3.3. L’ exportation
2.4.3.4. Les partenariats
2.4.3.5. Les publicités
2.4.4. Les déterminants environnementaux
2.4.4.1. La localisation
2.4.4.2. La concurrence
2.4.4.3. Les aides publiques
2.4.4.4 . Le dynamisme de l’environnement
2.4.4.5. La complexité de l’environnement
2.4.4.6. La criminalité et l’ insécurité dans l’environnement
TROISIÈME CHAPITRE
3. LA MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
3.1. CHOIX DE LA MÉTHODE DE RECHERCHE
3.2. SOURCE DES DONNÉES
3.3. POPULATION ET ÉCHANTILLONNAGE
3.4. DESCRIPTION DES VARIABLES
3.4.1. Variable dépendante
3.4.2. Variables indépendantes
3.5. MÉTHODE D’ANALYSE
QUATRIÈME CHAPITRE
4. RÉSULTATS
4.1. ANALYSE CORRÉLATIONNELLE
4.1.1. Test de colinéarité
4.2. RÉSULTATS DE L’ANALYSE DE RÉGRESSION DE LINEAIRE
4.2.1. Présentation des résultats
4.2.2. Test d’hétéroscédasticité
CINQUIÈME CHAPITRE
5. LA DISCUSSION
5.1. INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS
5.2. LIMITES DE LA RECHERCHE
5.3. CHAMP DE RECHERCHES FUTURES
CONCLUSION

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