Les infrastructures civiles et industrielles sont de plus en plus présentes dans notre société. Elles sont toujours plus grandes et complexes et sont mises à rude épreuve lors de leur utilisation. Tout au long de leur durée de vie, qui est définie en fonction de la qualité de construction, elles seront exploitées au maximum de leurs capacités. Malgré les avancées technologiques en termes de modélisation mécanique, de topographie et de moyens de construction, elles ne sont pas à l’abri de défauts ou d’événements extérieurs pouvant les endommager.
Les dommages portés aux structures peuvent avoir des conséquences importantes sur leur efficacité d’utilisation et sur la sécurité des personnes les exploitant ; il est donc nécessaire de prendre certaines précautions et de les gérer dès leur construction et pendant toute leur durée de vie. Cette gestion passe alors par ce que l’on appelle la surveillance de la santé des installations (Structure Health Monitoring ou SHM, en anglais). Il s’agit d’un processus complet visant à apporter des informations précises et actualisées concernant leur condition de santé et de vieillissement ainsi que leur performance. L’analyse des informations extraites de l’ensemble du système de surveillance doit confirmer ou infirmer les modèles mécaniques et les prédictions faites lors de leurs constructions concernant leurs réactions selon leur utilisation, et ainsi servir à améliorer leur gestion. Elle peut se faire de manière continue ou périodique et durant toute les phases de leur vie (construction, production ou réhabilitation). De plus, les résultats obtenus peuvent servir à améliorer ou affiner les modèles de construction.
L’instrumentation dédiée à une structure doit répondre à ces objectifs. La périodicité, la précision et les zones de mesures sont étudiées afin de définir ces outils de surveillance. S’agit-il du suivi de l’évolution ou de la détection de défauts, de l’optimisation de production, du suivi de l’état d’une partie de la structure ? Dans quelles conditions la mesure se fera-t-elle ? Y a-t-il un enjeu environnemental ou sécuritaire ?
La métrologie est la science de la mesure et de ses applications. Elle comprend des méthodes et des processus permettant de définir de manière exacte une grandeur physique, appelée mesurande [3].
Une maîtrise de toute la chaîne de mesure, depuis le capteur jusqu’à l’élément de sortie pertinent pour la surveillance de la structure, est nécessaire pour réaliser une mesure absolue avec l’erreur la plus faible possible. Cet ensemble d’équipements – que ce soit le capteur ou l’instrument en lui-même – est soumis à des sollicitations extérieures et est source de bruit (bruit thermique, adaptation de la chaîne de mesure, environnement électromagnétique, etc.). L’influence de ce bruit doit être déterminée. Cette grandeur est souvent associée à la qualité de la chaîne de mesure.
L’incertitude de mesure est caractérisée par l’écart type sur toutes les mesures effectuées sur un mesurande. Son évaluation, faite par une estimation de la répétabilité et de la reproductibilité de mesure, est nécessaire. La répétabilité définit la fidélité de la mesure réalisée dans des conditions similaires (opérateur, instruments et environnements). La reproductibilité évalue la répétabilité, mais dans des conditions de mesure variables.
Un capteur est défini comme étant un dispositif expérimental capable de quantifier et qualifier une grandeur physique et de détecter ces variations au cours du temps. Il est au minimum composé d’un transducteur permettant de convertir cette grandeur physique en une grandeur manipulable par son utilisateur (une tension électrique ou intensité lumineuse, par exemple). Un moyen de transporter cette information est souvent couplé à ce transducteur (comme un câble électrique, une fibre optique ou par télécommunications radiofréquences). Les informations issues de ce capteur seront ensuite analysées par l’interrogateur et utilisées par les outils informatiques du gestionnaire de l’infrastructure.
Aujourd’hui, les capteurs, qui sont les plus souvent utilisés dans le milieu de l’instrumentation d’infrastructures, sont les capteurs de température de types PT100 ou thermocouple et les capteurs de déformation piézoélectrique ou à corde vibrante [4]. Ces derniers sont connus depuis les années 1940 et sont encore largement utilisés dans les infrastructures en béton pour la surveillance de leur état de santé [5]. Ils sont notamment réputés pour leur durée de vie estimée à plus d’une trentaine d’années (au minimum).
Le domaine de l’instrumentation utilise ces dispositifs et méthodes métrologiques afin de concevoir et développer un ensemble de capteurs visant à mesurer une activité, un événement ou à estimer la santé d’une infrastructure. Lorsque la mesure est répétée dans le temps, le terme de « surveillance » dans le temps (ou monitoring en anglais) est aujourd’hui couramment employé. Toute la chaîne d’acquisition ainsi que le traitement de l’information sont conçus dans cet objectif ; leur dimensionnement et leur mise en place dans un environnement industriel ou en génie civil demandent des compétences pluridisciplinaires en mécanique, physique, métrologie et en traitement du signal.
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