MESURE DES CHAMPS DE DEFORMATION PAR EBSD HAUTE RESOLUTION

MESURE DES CHAMPS DE DEFORMATION PAR EBSD HAUTE RESOLUTION

Ce chapitre met en œuvre une méthode de détermination de l’état mécanique local autour des bulles de gaz de fission, à l’aide de la technique EBSD (Electron Back Scatter Diffraction). Une première étude bibliographique décrit et confronte les différentes techniques expérimentales pour la mesure de la déformation élastique afin de comparer les performances et limitations de chacune d’entre elles. Dans un second temps, un modèle mécanique par éléments finis, représentatif de la microstructure du combustible irradié, a été mis en place afin d’évaluer les niveaux attendus de déformation engendrés par la présence de bulles de gaz de fission pressurisées dans le combustible. Cette étape permet de comparer ces niveaux de déformation à la limite de détection de la méthode EBSD de Haute Résolution (HR-EBSD), suivant les zones de la pastille (périphérie, centre, zone intermédiaire). De plus, ce modèle a pour second objectif de permettre d’évaluer les pressions dans les bulles de gaz de fission, connaissant la microstructure et les niveaux de déformation autour des bulles mesurés par la méthode HR-EBSD. La méthode HR-EBSD est ensuite décrite depuis l’acquisition des diagrammes de diffraction, leur exploitation jusqu’au calcul des déformations et des contraintes. Une calibration du logiciel (CrossCourt3) de corrélation d’images et de calcul des déformations, est menée sur des cartographies tests et sur du silicium monocristallin. Les paramètres d’acquisition et de post-traitement sont définis par des tests sur matériaux non contraints et sur un essai mécanique de flexion 4 points. La méthode est ensuite appliquée sur des céramiques implantées aux ions, telles que de l’UO2. Les échantillons sont analysés en parallèle en diffraction des rayons X par rayonnement synchrotron afin de comparer les résultats.

La méthode de diffraction X est une technique non destructive, locale et sélective [79] [80]. Elle est largement utilisée pour caractériser la structure cristallographique des matériaux cristallins, ainsi que la texture et la microstructure associée. La diffraction des rayons X permet aussi d’analyser l’état mécanique d’un matériau par la détermination des contraintes résiduelles à l’échelle macroscopique (déformations et contraintes résiduelles de la pièce mécanique), à l’échelle mésoscopique (contraintes moyennes sur plusieurs grains de même orientation). Les diffractomètres de laboratoire classiques permettent d’analyser une surface de l’ordre du mm2 et une profondeur jusqu’à quelques µm. Seules les déformations liées à une modification de la distance interréticulaire (déformations élastiques liées aux contraintes mésoscopiques, dilatations thermiques, changement de volume par défauts d’irradiation à l’échelle de la maille) engendrent un déplacement du pic de diffraction, contrairement à la déformation plastique et aux hétérogénéités microscopiques de déformation qui engendrent un élargissement du pic de diffraction. Mesure des déformations élastiques : La mesure de déformations élastiques par diffraction des rayons X est réalisée à partir de l’analysedu diffractogramme en mode -2. Elle se base sur la mesure de la variation de la distance interréticulaire d’une famille de plans cristallins et permet de calculer les déformations avec une sensibilité de l’ordre de 5.10-4. Cette distance varie de ∆dhkl en fonction des contraintes et conduit à un déplacement ∆θhkl du pic de diffraction. Par différenciation de la loi de Bragg, on connait alors la relation fondamentale permettant de relier le déplacement du pic à la déformation normale aux plans réticulaires de la famille {hkl} sélectionnées, équation (18) :

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Il est possible de relier les contraintes aux déformations, en se basant sur les équations connues en mécanique des milieux continus isotropes et homogènes. Cette méthode s’appuie sur des modèles d’homogénéisation pour exprimer l’effet des contraintes macroscopiques subies par l’échantillon sur les déformations microscopiques à l’échelle des cristaux. Les modèles classiquement utilisés sont ceux de Voigt, de Reuss et de Kröner. La méthode est appelée loi des sin2 Ψ et elle est valable si les hypothèses suivantes sont vérifiées [78]: – la mesure est superficielle, c’est-à-dire la composante σ33, est considérée comme nulle.– le matériau polycristallin est homogène (donc monophasé), continu et macroscopiquement isotrope (non texturé). – l’état macroscopique de contraintes et de déformations est homogène dans le volume analysé. – seules les déformations élastiques sont déterminées. Les limites d’application de cette méthode sont directement liées à ces hypothèses. Mais cette approche n’offre qu’une résolution latérale de ~ 1 mm2, incompatible avec des mesures locales. Mesure des déformations plastiques : L’introduction de défauts dans les cristaux, principalement les dislocations mais aussi les défauts ponctuels (intersticiels ou subtitutions, lacunes, produits de fission…) et les défauts plans (fautes d’empilements, sous joints, joints de grains…) conduit à des variations locales de paramètres de maille et des limitations des tailles de zones de diffraction.

Ces deux effets vont ainsi contribuer à élargir les pics de diffraction. Plusieurs méthodes d’analyses de profils de diffraction X permettent de déterminer la taille de domaine cohérent et la déformation de ces domaines, telles que la méthode Warren-Averbach ou celle de Williamson-Hall. La première est assez répandue : le traitement par cette méthode est assez complexe et implique d’exprimer l’intensité du pic en sommes de Fourier. Les valeurs finales fournies par le procédé sont la taille moyenne des cristallites (ou grains), un paramètre qui est lié à la distribution de la taille des cristallites et une microdéformation moyenne, toutes données pour une direction cristallographique particulière. En ce qui concerne le combustible irradié, divers phénomènes contribuent aux contraintes internes. La mesure par DRX est ainsi influencée par la présence de bulles pressurisées, qui nous intéresse, mais aussi par les défauts d’irradiation, la présence des produits de fission et interactions entre domaines cohérents par exemple. La Figure 57 représente l’évolution du paramètre de maille du combustible UO2, obtenue par diffraction des rayons X, avec le taux de combustion et la porosité en fonction de la position radiale [81]. Le paramètre de maille augmente avec le taux de combustion. La déformation élastique associée peut atteindre 0,2 %. Au-delà de 70 GWj/tU (taux de combustion local), la variation du paramètre de maille change et ce dernier décroit. Ce phénomène est interprété par les auteurs, notamment J. Spino et al. [81], comme étant lié à la formation de la structure HBS.

 

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