Mesure de l’équation d’état de matériaux poreux

METHODE STATIQUE : CELLULE A ENCLUMES DE DIAMANT

Elle comprend une paire d’enclumes en forme de cône tronqué (taille en brillant ) serrées l’une contre l’autre et un joint (gasket) formé par exemple d’un métal comme l’inconel. Le joint peut contenir l’échantillon porté à haute pression grâce aux forces de friction entre celui-ci et l’enclume. La forme des enclumes permet une multiplication de la pression, d’autant plus importante que la pointe du diamant sera étroite par rapport à sa base, de sorte qu’une force de serrage de 10 kN est suffisante pour générer des pressions de l’ordre du Mbar sur l’échantillon à étudier lorsque les dimensions de celui-ci sont de l’ordre de la centaine de microns. Cette force est exercée par exemple à l’aide d’un levier ou d’un système pneumatique. Dans le cas d’expériences atteignant des pressions de l’ordre du Mbar, les enclumes ne peuvent généralement pas être réutilisées, en raison de l’apparition de fractures lorsque la pression est relâchée. Le coût n’est donc pas négligeable compte tenu de la qualité des diamants nécessaires (tout défaut ou inclusion étant potentiellement source de fissures à haute pression).
On utilise généralement comme jauge de pression un fragment de rubis ajouté à l’échantillon. En effet celui-ci présente une luminescence induite par la pression, que l’on peut mesurer à travers les enclumes de diamant, transparentes à cette longueur d’onde. A très haute pression, des corrections d’absorption deviennent cependant indispensables pour déterminer la pression.

METHODES DYNAMIQUES

CANON A GAZ : Le canon à gaz est un dispositif permettant d’accélérer un projectile à de hautes vélocités. C’est l’impact de ce projectile sur une cible qui y provoquera une onde de choc. Le principe d’un canon à gaz à deux étages d’accélération . Des gaz chauds, produits par exemple par la combustion de poudre noire, sont utilisés pour propulser un piston.
Celui ci comprime un gaz léger (tel que l’hydrogène) jusqu’à ce que la pression provoque la rupture d’une valve. La détente de l’hydrogène dans une conduite de plus faible section permet alors d’accélérer un impacteur (plaque métallique) qui vient frapper l’échantillon en choc plan. Le grand intérêt de cette méthode est de ne pas présenter les problèmes de préchauffage rencontrés avec les ondes de choc générées par laser et de permettre le maintien de la pression pendant des temps relativement longs (typiquement, de l’ordre de la centaine de nanosecondes). Toutefois elle est plus limitée quand aux pressions accessibles : Des vitesses maximales de l’impacteur de 13.5 km.s-1 et des pressions atteignant 13.5 Mbar ont été atteintes, ce que l’on peut considérer comme la limite technique.
GENERATION D’UN CHOC PAR LASER : Lorsqu’on éclaire une cible solide à l’aide d’un faisceau laser intense, une partie de la matière est chauffée et se détend vers le vide, c’est le mécanisme d’ablation. Par réaction, on assiste à la formation d’une onde de choc qui se propage dans la cible. Nous allons décrire les phénomènes mis en jeu dans la formation du choc, en vue de montrer leur influence sur la qualité du choc obtenu, et d’évaluer les caractéristiques de celui-ci pour une illumination laser donnée.
Afin de limiter le cadre de la discussion, on se bornera à considérer le domaine mis en jeu dans nos expériences, soit des éclairements sur cible compris entre 1012 et 1014 W/cm² , et des durées de l’ordre de la nanoseconde. On suppose que la cible est directement éclairée par le laser (configuration d’attaque directe).

POLAIRE DE CHOC, DÉTERMINATION DIRECTE D’ÉQUATION D’ÉTAT

Si on utilise l’équation d’état pour éliminer les variables de densité et d’énergie interne de l’adiabatique dynamique plutôt que les variables densité et vitesse fluide, on obtient la polaire de choc au lieu de la courbe d’Hugoniot. Il s’agit d’une courbe représentant le lieu des états finals du choc dans le plan (P,u). Comme la courbe d’Hugoniot elle dépend de l’état initial du choc. La polaire de choc découlant de l’équation d’état, sa détermination expérimentale en constitue un test. La seconde relation d’Hugoniot montre que, dans le plan (P,u), et si l’on peut négliger la pression initiale devant P, l’état final se trouve également sur une droite d’équation P=ρ0Du. La pente de cette droite Z=ρ0D est appelée impédance du choc.
Pour définir un point de la polaire, il suffit donc de connaître deux paramètres parmi pression finale, vitesse fluide et vitesse du choc.  S’il est possible par exemple de mesurer simultanément la valeur de D et u, on dit que l’on a une détermination expérimentale directe de la polaire de choc. Malheureusement, une telle détermination est rarement réalisable en pratique. On a alors recours à des méthodes dites indirectes fondées sur les relations de continuité pour un choc à l’interface de deux milieux.

LA SOURCE LASER ET LES DIAGNOSTICS

La chaîne nanoseconde du LULI : Cette expérience a été réalisée sur la chaîne nanoseconde du LULI, à l’Ecole Polytechnique. L’oscillateur utilisé est un cristal YLF dopé au néodyme, excité par une lampe flash hélicoïdale. La longueur d’onde du rayonnement infrarouge émis vaut 1.053 µm, avec une largeur spectrale de ≈ 0.5 Å. L’oscillateur peut délivrer une impulsion longue (2 ns ou 30 ns), une impulsion carrée (600 ps), ou une impulsion courte gaussienne (600 ps). Par la suite, le recours à l’impulsion carrée s’est imposé pour des raisons de synchronisation. A la sortie de la cavité, après passage par un filtre spatial de diamètre 700 µm, le faisceau a une divergence de 2.10-4 rad. Un diaphragme permettant de faire une sélection transverse et longitudinale de modes et un modulateur acousto-optique, fixent ses caractéristiques spatiales et temporelles.
Lissage optique : La grande cohérence de la lumière laser a des effets néfastes dans le cadre de la génération d’ondes de choc par illumination laser directe. Elle provoque l’apparition de tavelures (speckle) qui modulent la tache focale. On a des surintensités locales qui sont à l’origine d’instabilités, nuisent à la planéité du choc et peuvent causer l’apparition d’électrons suprathermiques, donc de préchauffage. Il est donc nécessaire d’avoir recours à un procédé de lissage.
Le lissage optique de la tache focale est généralement effectué à l’aide de lames de phases, qui sont des composants optiques fabriqués par photolithographie sur une lame de verre, destinés à casser la cohérence spatiale du faisceau.

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CAMÉRAS À BALAYAGE DE FENTE

Le principe de fonctionnement d’une caméra à balayage de fente (ou streak camera en VO), est le suivant : La photocathode de la caméra convertit le rayonnement incident en électrons par effet photoélectrique. Le pinceau de photoélectrons est ensuite accéléré et collimaté par une optique électronique, puis dévié par application d’une rampe de tension dont la pente définit la vitesse de balayage. Ces photoélectrons sont finalement convertis en photons visibles par impact sur un écran plat phosphorescent. L’image de la fente est ainsi balayée sur l’écran en fonction du temps, et on obtient une image comportant une dimension spatiale et une dimension temporelle. On peut l’enregistrer, par exemple à l’aide d’une caméra CCD montée en contact avec l’écran phosphorescent. La caméra utilisée dans notre cas était une caméra 12 bits d’une résolution de 512 x 512 points.
La résolution spatiale de la caméra est d’environ 100 µm. La résolution spatiale du système total s’en déduit si l’on connaît le grandissement du système de reprise d’image entre cible et fente de la streak. La résolution temporelle dépend de la vitesse de balayage de la caméra. Cette vitesse de balayage peut être étalonnée à l’aide d’un laser femtoseconde. Celui-ci délivre une impulsion d’une durée très inférieure à la résolution de la caméra. L’usage d’un interféromètre de Fabry-Perot permet alors d’obtenir un train d’impulsions d’intensités comparables séparées par un intervalle temporel fixé avec précision (+/- 0.3 ps) par la distance entre ses miroirs.

Table des matières

Introduction
I. METHODES DE COMPRESSION
I.1 Méthode statique : Enclume à diamant
I.2 Méthodes dynamiques
I.2.1 Canon à gaz
I.2.2 Génération d’un choc par laser
I.2.2.1 Introduction
I.2.2.2 Mécanisme d’interaction laser-matière, transport d’énergie
I.2.2.3 Estimation des paramètres du choc produit par un laser intense
I.3 Lois des chocs
I.3.1 Qu’est ce qu’une onde de choc
I.3.2 Le choc en milieu homogène
I.3.2.1 Relations de Rankine-Hugoniot
I.3.2.2 Courbe d’Hugoniot, irréversibilité et chocs multiples
I.3.2.3 Polaire de choc, détermination directe d’équation d’état
I.3.3 Traversée d’une interface par un choc
I.3.3.1 Désadaptation d’impédance
I.3.3.2 Détermination indirecte d’équation d’état
II. EQUATIONS D’ETAT
II.1 Généralités
II.2 Equations d’états électroniques : TF, TFD
II.3 Equations d’états ioniques
II.4 Modèle QEOS
II.5Tables SESAME
Bibliographie
III. MESURE D’EQUATION D’ETAT PAR DESADAPTATION D’IMPEDANCE
III.1 Principe et objectif de l’expérience
III.2 La source laser et les diagnostics standards
III.2.1 La chaîne nanoseconde du LULI
III.2.2 Lissage optique
III.2.3 Caméras à balayage de fente
III.3 Montage expérimental
III.4 Cibles
III.4.1 Choix
III.4.1.1 Choix de l’ablateur
III.4.1.2 Choix du matériau de référence
III.4.1.3 Structure « bi-marche » pour un matériau transparent
III.4.2 Simulations numériques correspondantes
III.4.3 Technique de fabrication
III.5 Résultats et confrontation aux modèles existants
III.5.1 Précision des mesures
III.5.2 Comparaison avec SESAME et QEOS
III.5.3 Présentation des résultats
III.5.4 Interprétation
III.6 Effets de densité
III.7 Evaluation du préchauffage et de ses effets
III.8 Accélération du choc dans la cible
Bibliographie
IV. Mesure d’équation d’état par VISAR
IV.1 Principe et objectif de l’expérience
IV.2 Le VISAR : Description, principe physique et mode d’emploi.
IV.2.1 Principe de fonctionnement
IV.2.1.1 Interféromètre de Mach-Zehnder
IV.2.1.2 Schéma et réglage du VISAR
IV.2.1.3 Relation fondamentale
IV.2.2 Limite de résolution
IV.2.3 Implémentation
IV.3 Montage expérimental
IV.4 Résultats expérimentaux
IV.4.1 Vitesses mesurées, Identification
IV.4.2 Informations sur l’équation d’état
IV.5 Mesure de conductivité
IV.5.1 Lien entre conductivité et réflectivité
IV.5.2 Résultats expérimentaux
IV.6 Conclusions
Bibliographie
CONCLUSION
ANNEXES
Le code MULTI
Calibration en énergie de la caméra à balayage de fente

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