Sommaire: Faut il envisager un traitement symptomatique de la fatigue
Quelques définitions de la fatigue
1. Introduction
2. Matériel et méthode La fatigue, un signe inquiétant
3. Résultats de l’enquête d’opinion
3.1. L‟échantillon
3.2. Résultats des questions n°13 et n°30
3.3. Réponses aux questions principales
4. Résultats de la recherche bibliographique
4.1. Le coût énergétique
4.1.1. Le coût énergétique mécanique
4.1.2. Le coût énergétique cognitif
4.1.3. Le coût énergétique central ; niveau d‟act ivat ion centrale
4.1.4. Ergothérapie, mesures ergonomiques
4.2. Fatigue et maladies cardiovasculaires
4.2.1. La baisse du débit cardiaque
4.2.2. Le réseau artério-veineux
4.2.3. Le recondit ionnement à l‟effort : les effets cardiovasculaires
4.3. Fatigue et affections pulmonaires
4.3.1. Distinguer entre fatigue et dyspnée
4.3.2. Fatigue des muscles respiratoires
4.3.3. Hypoxémie et fatigue
4.3.4. Conclusion
4.4. Fatigue musculaire
4.4.1. Fatigue musculaire à l‟effort
4.4.2. Asthénie per et post infectieuse
4.4.3. Myopathies
4.4.4. Bénéfices de l‟exercice physique
4 .5 . Fatigue et affections neuromusculaires
4.5.1. La sclérose latérale amyotrophique : atteinte du motoneurone central
4.5.2. Le syndrome post poliomyélitique (SPP)
4.5.3. Les neuropathies périphériques dysimmunes
4.5.4. La neuropathie sensitivomotrice de Charcot-Marie-Tooth (CMT)
4.5.5. Les maladies de la jonction neuromusculaire
4.5.6. La sclérose en plaques (SEP)
4.6. Les fatigues psychique, psychologique et centrale
4.6.1. La fatigue centrale
4.6.2. Théorie des neurotransmetteurs
4.6.3. La fatigue mentale : modèle du traumatisme crânien
4.6.4. Fatigue et sommeil
4.6.5. La dépression
4.6.6. La fatigue affective
4.6.7. Approche neuropsychologique du sentiment de fatigue
4.6.8. La fatigue psychosensorielle
4.7. Fatigue et immunologie, endocrinologie, cancérologie
4.7.1. Le rôle de la sérotonine
4.7.2. L‟axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS)
4.7.3. L‟axe hypothalamo-hypophyso-gonadien
4.7.4. Fatigue sympathique ou parasympathique
4.7.5. Cytokines et fatigue
4.7.6. Hormone thyroïdienne ou hormone de croissance
4.8. Mesurer la fatigue
4.8.1. Méthodes biomécaniques
4.8.2. Les questionnaires
4.8.3. Évaluer l‟autonomie, la qualité de vie et les facteurs contributifs
4.9. Traitements non spécifiques de la fatigue
4.9.1. Thérapeutique médicamenteuse
4.9.2. Thérapeutique non médicamenteuse
4.9.3. Traitement des facteurs favorisants
5. Discussion
5.1. Qu‟est-ce qu‟une bonne ou une mauvaise fatigue ?
5.1.1. Historique
5.1.2. Relation entre fatigue normale, bonne fatigue et fatigue physique
5.1.3. Relation entre fatigue psychique et mauvaise fat igue
5.1.4. Quand la fat igue psychique fait l‟objet d‟une plaint e
5.1.5. Quand la fat igue physique est recevable
5.1.6. Le paradoxe de Sartre
5.1.7. La fat igue n‟est jamais neutre
5.2. Traiter la fatigue : approche biopsychosociale
5.2.1. La fatigue est plurifactorielle : Syndromes Overlappés
5.2.2. A quoi sert la fatigue ?.
5.2.3. Le cercle vicieux de la fatigue
5.2.4. Il faut préciser le symptôme fatigue
5.2.5. Justification du modèle de Damasio
5.2.6. Existe-t-il une fatigue normale ou pathologique ?.
5.2.7. Quel traitement symptomatique envisager pour la fatigue ?
5.3. Le problème de l‟automédication
5.3.1. Historique du café, des amphétamines et autres stimulants
5.3.2. Automédication et paradoxe du dopage
5.3.3. Le risque pharmaceutique : exemple des compléments alimentaires
5.3.4. Le rôle du médecin
5.3.5. Quelle est l‟attente des patients ?
5.4. Une réflexion éthique obligatoire
5.4.1. Nos conditions de vie se sont modifiées.
5.4.2. La solitude dans notre organisation sociale
5.4.3. L‟invent ion de l‟individualité, la fat igue d‟être soi.
5.4.4. Quelle place réserver à la fatigue ?.
5.4.5. Quest ions éthiques
6. Conclusion
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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1. Introduction
Pour toute personne en bonne santé, la sensation de fatigue s‟accompagne d‟une envie irrésistible de se reposer. Cette réaction est probablement une précaution devant l‟excès d‟exercice pouvant provoquer des dommages physiques ou psychologiques, ou peut-être le moment de réparer et compenser ces mêmes dommages. Quand cette fatigue, expérimentée par la plupart des personnes, s‟accompagne en effet d‟un repos réparateur et quand elle se dissipe avec l‟arrivée d‟une énergie nouvelle, elle est considérée comme normale. Le problème se pose quand la fatigue arrive disproportionnée par rapport au travail fourni, quand elle ne cède pas avec le repos, et quand accompagnant l‟individu toute la journée, elle interfère avec ses activités.
Ce symptôme tient une place particulière dans la médecine moderne. C‟est une expérience intime, universelle et extrêmement fréquente qui est difficilement mesurable objectivement. Il est également non spécifique. La ressemblance avec la « douleur » est frappante. La douleur qui annonce comme une alarme la maladie, initie le raisonnement médical, il faut comprendre pour guérir ce qui fait mal. Mais le traitement symptomatique avec l‟utilisation en particulier de la morphine n‟a été l‟objet de long débats, que très tardivement. En 1847, à l‟occasion d‟une séance de l‟Académie des sciences, Magendie déclare : « Que les gens souffrent plus ou moins, en quoi cela peut-il intéresser l‟Académie des sciences ? » [46] Ceci semble actuellement inexplicable, à tel point qu‟il nous est tous arrivé de considérer nos anciennes pratiques comme inacceptables. Le traitement de la douleur aussi bien aiguë que chronique est aujourd‟hui acquis.
L‟analogie avec la fatigue est-elle possible ? C‟est notre première hypothèse. Ne faut-il pas initier le débat au plus tôt ?
La quest ion de la fat igue bénéficie d‟un intérêt croissant. Les publicat ions scientifiques ont abondé en 2006 puis 2007, bien plus encore en 2008. Les points de départ de ces réflexions sont variés et sans aucun doute secondaires à une demande des patients. Il n‟y a pas pour le moment de consensus sur la définit ion de la fat igue ce qui complique terriblement la discussion entre spécialités, acteurs de santé et chercheurs. Elle a été particulièrement étudiée en médecine du travail afin d‟élaborer le code du travail.
Elle fait l‟objet d‟une recherche approfondie en médecine du sport depuis de nombreuses années. Elle est une étape indispensable à franchir pour les patients de rééducation. Elle accompagne inexorablement le malade atteint de sclérose en plaques ou de polyarthrite rhumatoïde. Elle devient la principale plainte des patients de cancérologie. Il existe bien quelques traitements contre la fatigue, mais les études évaluant ces traitements sont rares : les traitements les plus prometteurs sont avant tout des psychotropes. Il est certain que l‟approche du problème à travers plusieurs modèles enrichit la compréhension du phénomène « fatigue », mais il n‟existe pas ou très peu de coordination pour ce sujet. Il est possible aussi que sous le terme « fatigue » se cachent en réalité des phénomènes tout à fait distincts.
En médecine générale la fatigue est un motif de consultation dans 1.3 % des cas (soit 65000 consultations par jour en France [63]) et est présente chez 41% des patients [12], et ce chiffre risque d‟augmenter en raison de la chronicisat ion de nombreuses affections. En pédiatrie, le motif de fatigue représente entre 10 et 25% des consultations [11]. Le généraliste se sent actuellement trop souvent démuni alors que cette consultation relève entièrement du rôle du médecin traitant [87]. Etant en première ligne, il est de son devoir de savoir réagir devant une telle plainte. Cette mission est d‟autant plus difficile que la question de la fat igue soulève le problème du coût pour la collectivité, un problème majeur d‟éthique et de société, le problème de l‟automédication, de la drogue et du dopage. Où s‟arrête la fat igue normale, où commence la fatigue pathologique ? «Commander à la maladie c‟est en connaître les rapports avec l‟état normal que l‟homme vivant et aimant la vie-souhaite de restaurer».
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