Sommaire: Complexité interprétative et stratégies relationnelles dans des entretiens éducatifs au tribunal pour enfants
Volume 1
Avant propos
Remerciements
Table des matières
Table des illustrations
Liste des sigles et abréviations
Conventions de transcription
1. Introduction
1.1. Ce qui a donné lieu à cette thèse
1.2. Premiers questionnements et première définition du sujet
2. Les étapes d’une problématisation
2.1. Une brève contextualisation théorique
2.2. Une première orientation du sujet
2.3. Une première mise en perspective sociologique
2.4. La mise en perspective de la sociolinguistique interactionnelle
2.5. Une mise en perspective interactionniste et intégrative
2.6. Une reformulation de la problématisation, au carrefour de questions linguistiques et de questions professionnelles
3. Dialogisme et choix des perspectives : le cadrage théorique
3.1. Sociologie et linguistique
3.2. Anthropologie et linguistique
3.3. Philosophie et linguistique
3.4. Psychologie développementale, psychologie sociale, et linguistique
3.5. Linguistiques de l’énonciation et intersubjectivité
3.6. L’argumentation dans le discours
3.7. L’interactionnisme : une démarche intégrative
3.8. Pour une approche relationnelle des discours : statuts, rôles et rapports de places
3.9. Resserrement de la problématisation et démarche générale
4. Questions méthodologiques : le chercheur intégré à sa recherche
4.1. Les données : une construction du chercheur
4.2. L’approche du terrain
4.3. Les données retenues
4.4. Quelques questions méthodologiques dans le traitement des données
4.5. Quelques définitions complémentaires
5. La rencontre entre jeune déféré et éducateur au tribunal : une situation inscrite marquée par les inégalités, le paradoxe et la complexité
5.1. Un cadre interactif judiciaire contraignant, qui cumule les inégalités
5.2. La place de l’entretien éducatif dans une procédure judiciaire : un genre discursif complexe, inscrit dans des contraintes doubles d’ordres divers
5.3. Un dialogisme institutionnel
6. Co-construction thématique et premières stratégies relationnelles
6.1. Seat 1 : entretien entre C, éducatrice, et A, jeune déféré
6.2. Seat 4 : entretien entre M, éducateur et B, jeune déféré
6.3. Seat 5 : entretien entre M, éducateur et H, jeune déféré
6.4. Seat 6 : entretien entre M, éducateur, et T, jeune déféré
6.5. Premières stratégies adaptatives communes et diversifiées
7. Prise de parole, engagement dans la parole et stratégies relationnelles
7.1. Comment la parole se prend-elle ? Types d’enchaînements discursifs et stratégies relationnelles
7.2. Invariabilité et variabilités dans la prise de parole : une première approche quantitative
7.3. Qui prend en charge le discours ? Types d’interventions
et stratégies relationnelles
7.4. Variabilité et invariabilité dans la prise en charge de la parole : une première approche quantitative
Volume 2
8. Prise de parole, prise en charge énonciative, actes illocutoires et rapports de places entre A et C: analyse qualitative
8.1. Le thème de la procédure et l’évolution des places dialogiques
8.2. Relations éducatives 1 : une négociation des places et des contenus autour d’une question, qui fait autorité ?
8.3. Scolarité : des contradictions multiples pour A
8.4. Défèrement : un conflit dans l’interprétation des places dialogiques
8.5. Relations éducatives 2 : un jeu subtil sur les implicites linguistiques
et la prise en charge énonciative entre A et C
8.6. Variabilité des rapports de places et stratégies relationnelles repérables
9. Prise de parole, prise en charge énonciative, actes illocutoires et rapports de places entre B et M : analyse qualitative
9.1. Etat civil et judiciaire, famille : premiers rapports de places marqués par des arrière-plans très inégalement partagés
9.2. Relations éducatives 1 : la formation d’un malentendu
9.3. Scolarité : un malentendu qui se renforce
9.4. Relations éducatives 2 : une importante protection de B
9.5. Défèrement : un changement notable des rapports de places
9.6. Défèrement 2 : des rapports de places répétés et plus tendus
9.7. Relations éducatives 3 : une dernière discussion autour de l’exercice de l’autorité parentale
9.8. Coda : une clôture sur la dominance des places institutionnelles
9.9. Variabilité des rapports de places et stratégies relationnelles repérables
10. Prise de parole, prise en charge énonciative, actes illocutoires et rapports de places entre H et M : analyse qualitative
10.1. Etat civil et judiciaire : une difficile installation des premiers rapports de places
10.2. Famille : des questions factuelles qui laissent entr’apercevoir des zones de difficultés
10.3. Scolarité 1 : l’émergence d’une stratégie de la part de M pour traiter la réserve de H
10.4. Relations éducatives 1 : une importante protection de H
10.5. Scolarité 2 : la poursuite d’une stratégie de protection de H
10.6. Relations éducatives 2 : une réserve toujours maintenue de la part de H
10.7. Défèrement : un autre engagement de H dans le discours
10.8. Variabilité des rapports de places et stratégies relationnelles repérables
11. Prise de parole, prise en charge énonciative, actes illocutoires et rapports de places entre T et M : analyse qualitative
11.1. État civil et judiciaire : une installation de rapports de places complexe
11.2. Famille : une gestion argumentative et relationnelle subtile entre les deux interactants à propos d’un sujet sensible
11.3. Scolarité : un thème marqué par des divergences d’appréciation sur les rapports école-élève en difficulté
11.4. Défèrement 1 : un thème plus complexe que prévu, où T prend place activement de manière diversifiée
11.5. Procédure 1, défèrement 2 et procédure 2 : un changement net des rapports de places
11.6. Relations éducatives : M, entre investigation et respect, et T, entre sincérité et protection
11.7. Coda/procédure : des rapports de places plus asymétriques, où M se fait médiateur, et où T se met dans l’écoute
11.8. Variabilité des rapports de places et stratégies relationnelles repérables
12. Stratégies relationnelles, imbrication des contextes communicationnels et continuité discursive
12.1. Les conditions de la construction thématique : continuité discursive et ordres du discours
12.2. Les conditions du possible à dire et de l’impossible à dire : imbrications des contextes communicationnels, continuité discursive, et ordres du discours
12.3. Indices et sources de malentendus dans l’entretien avec B
13. Conclusions générales
13.1. Processus interprétatifs et stratégies relationnelles : des diversifications qui s’opèrent à partir d’un noyau de caractéristiques communes du côté des éducateurs
13.2. Processus interprétatifs et stratégies relationnelles : des diversifications qui s’opèrent entre ouverture et retrait du côté des jeunes
13.3. Ecologie de la parole et questions professionnelles
Volume 3
Annexes
Liste des annexes
En guise d’index
Extrait du mémoire complexité interprétative et stratégies relationnelles dans des entretiens éducatifs au tribunal pour enfants
1. Introduction
Cette étude s’intéresse aux pratiques langagières et communicationnelles ainsi qu’à la socialisation langagière des jeunes de milieu populaire urbain. Ces vingt dernières années, ces questions sont devenues un sujet de société et plus récemment un objet de politique publique âprement débattu. Facilement réduites aux pratiques langagières entre pairs, leurs façons de parler et de communiquer sont souvent stigmatisées et perçues comme la manifestation d’une absence de maîtrise de la langue française et d’une défaillance dans le maniement différentiel de la langue selon les situations et les interlocuteurs. Qu’en est-il réellement ? Une longue expérience professionnelle à la Protection judiciaire de la jeunesse, croisée avec des études et recherches en sciences du langage, avertissait spontanément de la complexité de cette question et engageait à utiliser cette histoire professionnelle pour en dire quelque chose.
1.1. Ce qui a donné lieu à cette thèse
L’entrée dans la réalisation de cette thèse est en effet issue d’une double appartenance : celle d’éducatrice, de formatrice, et de chargée d’études à La Protection judiciaire de la jeunesse (désormais PJJ) et celle d’étudiante et vacataire en sciences du langage dans les années 83 à 89, ayant participé aux travaux du Groupe de Recherche sur l’Acquisition des Langues, en l’occurrence sur l’apprentissage du français par des migrants hispanophones en France. Cette double appartenance est asymétrique : j’exerce depuis une bonne trentaine d’années à la PJJ et ce n’est que sur une demi.
Néanmoins, ces allées et venues régulières entre PJJ et recherche en sciences du langage apparentent ma position actuelle comme chercheuse en sciences du langage à celle du« voyageur », métaphore en ethnographie initiée par Agar (1980, 1996) : quand l’ethnographe va sur le terrain, il se sépare de sa culture initiale et en pénètre une autre, douzaine d’années que j’ai été amenée à collaborer à des travaux de recherche étrangère. En retour, lorsqu’il quitte cette culture, et revient chez lui, il traverse une nouvelle séparation et la métaphore du voyage persiste : le familier devient étrange à son tour. Cet aller/retour régulier contribue à créer le double mouvement de proximité/distance suffisant pour permettre à l’ethnographe de devenir tel, ce qu’Agar a souligné dans son concept d’ « étranger professionnel ». Il me semble que les métaphores du « voyage » et de « l’étranger professionnel » rendent bien compte de quelques effets produits par mes allées et venues entre plusieurs mondes : celui, professionnel, de la PJJ, ceux rencontrés à l’occasion du travail éducatif et pédagogique effectué avec les jeunes et les familles d’origines sociales et culturelles très diverses, et enfin celui de la recherche en sciences du langage.
1.1.1. Sciences du langage, sciences humaines et PJJ.
Cette thèse a été initiée à la demande de la direction du Centre national de formation et d’études de la PJJ (CNFE-PJJ, actuellement ENPJJ). Quelques travaux de recherche en sciences du langage avaient été réalisés à partir de la PJJ. Ainsi, les travaux de Claire Basdevant (1983) sur des productions écrites et orales des enfants de familles migrantes pris en charge à la PJJ, à l’instar des travaux menés à l’époque (tels que Delofeu 1980), ont débouché sur la critique d’un handicap linguistique dû aux situations de bilinguisme de ces enfants et concluaient à l’absence de spécificité des enfants de migrants dans les difficultés scolaires : certains enfants ont des difficultés scolaires tout comme en ont certains jeunes français ayant les mêmes origines socioéconomiques.
Plus récemment, et dans un autre registre, Martine Santoire (2000) a approché les enquêtes sociales adressées au juge des enfants comme une activité langagière complexe, construite discursivement dans l’interaction, et remet ainsi en cause l’idée que ces rapports pourraient être des descriptions objectives de réalités indépendantes de leur conditions de description et leur dimension intersubjective. L’activité de description est ainsi une instance de fabrication du cas, qui demande à être perçue et travaillée comme telle, et notamment à pouvoir être soumise au principe du contradictoire propre au champ juridique.
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