La variabilité génétique et clonale du tremble dans le temps
Plusieurs facteurs peuvent influencer la diversité génétique des espèces à travers le temps. Ceux-ci incluent les forces de l’ évolution comme la sélection naturelle, la mutation, et la dérive génétique (Hartl & Clark, 1997; Suvanto & Latva-Karjanmaa, 2005). Ces forces affectent directement la richesse allélique à l’intérieur d’une population en favorisant ou en éliminant certains allèles, ce qui détermine la capacité des espèces à s’adapter à des gradients environnementaux stables. Chez les espèces se reproduisant de manière végétative et sexuée, la fréquence du recrutement sexué est aussi susceptible d’affecter la diversité génétique (Eriksson 1989; 1993); la diversité génétique des espèces qui se régénèrent de manière sexuée suite à des perturbations initiales seulement tendrait à diminuer dans le temps, alors que celle des espèces qui se reproduisent de manière sexuée de façon répétitive se maintiendrait avec le temps (Cronberg 2002). Certaines études suggèrent une relation entre le nombre et la taille des clones de certaines espèces clonales et l’ouverture du couvert forestier, la compétition végétative, et l’âge des clones (Kudoh et al., 1999; Suvanto & LatvaKarjanmaa, 2005), ce qui laisse entrevoir une interaction entre les perturbations naturelles et la structure génétique des espèces clonales.
Un des problèmes importants lié au suivi de la variation génétique à travers le temps est la difficulté de trouver des peuplements qui représentent la structure génétique et clonale à des phases successionelles différentes. Lorsque le cycle de feu s’ allonge, les peuplements âgés sont souvent éliminés ou dégradés à cause de la mortalité naturelle, ce qui rend la comparaison avec les jeunes peuplements difficile. En outre, chez les espèces clonales, l’âge du ramet est beaucoup plus court que celui du genet, ce qui rend plus difficile l’évaluation de la diversité génétique à l’origine. Présentement, les études génétiques révèlent des résultats mixtes quant à la conservation de la diversité génétique et génotypique: certaines rapportent une accumulation de la variabilité génétique avec l’âge de la population et une corrélation entre l’âge de la forêt et la richesse en allèles rares (Cronberg 2002; Comps et al., 2001); d’ autres observent une diminution de la diversité génétique avec le temps et une diminution graduelle du nombre des genets (plantes vasculaires; Maddox et al., 1989 et mycètes; Dahlberg & Stenlid, 1990). La question du suivi de la structure génétique chez les espèces clonales nécessite alors une approche qui permet le suivi de la structure génétique et clonale (i.e. ramet et genet) des peuplements sur de longues échelles temporelles (Chapitres 1 et 2).
La variabilité génétique et clonale dans l’espace
La distribution spatiale de la diversité génétique chez les espèces qui se reproduisent par voie végétative est souvent liée au mode de croissance clonale qui a été classé entre 2 types: le type phalanx qui correspond à une croissance des ramets autour d’un ramet central de façon agglomérée, et le type guérilla qui se caractérise par une interdigitation des ramets des clones différents (Little & Dale, 1999; Cronberg 2002; Maddox et al., 1989). Dans le cas du tremble, les études réalisées jusqu’ à présent ne nous permettent pas d’établir Le patron de la distribution spatiale des clones. Ceci est principalement dû au fait que la plupart des études ont évalué la structure clonale du tremble en se basant sur des caractères morphologiques ou en utilisant des échelles d’échantillonnage qui ne permettent pas de statuer sur le patron de distribution des clones à petite échelle(< 100m) (Hyun et al., 1987; Jelinksi & Cheliak, 1992; Lund et al., 1992). Par ailleurs, 1′ effet des perturbations naturelles comme les feux et les trouées sur la distribution de cette diversité demeure inconnu. Seules quelques études fournissent quelques indices indirects sur une telle relation. Par exemple, Stevens et al. (1999) suggèrent l’ apparition d’une variation génétique et d’une structure géographique entre les populations de tremble issues de semis avec le temps en parallèle avec le processus de transition de peuplements issus de semis vers des peuplements issus de drageonnement. Barnes (1966) suggère que la fréquence des feux et la compétition inter clonale jouent un rôle important dans la détermination du degré d’entrecroisement entre les différents clones de tremble. Par conséquent, une évaluation de l’importance relative des perturbations naturelles et de l’échelle à laquelle ces processus pourraient exercer un effet sur la distribution spatiale de la diversité clonale du tremble s’avère nécessaire afin de mieux comprendre la dynamique de la structure clonale du tremble (Chapitre 3).
Capitaliser sur la diversité génétique du tremble
Depuis quelques décennies, on observe une augmentation significative de la demande commerciale pour le tremble, notamment pour la fabrication des panneaux à particule, des panneaux à fibres, et la décoration. Un des moyens pour répondre à cette demande consiste à augmenter la productivité des peuplements de tremble en favorisant la régénération des génotypes les plus prometteurs. Cependant, l’ efficacité de cette stratégie demeure inconnue et se heurte à plusieurs obstacles tel que: (1) le manque d’ information sur la répartition spatiale des clones de tremble à petites échelles, ce qui ne facilite pas la sélection des génotypes car les différents clones peuvent être étroitement entrecroisés (Wyman et al., 2003) ou avoir une grande similarité morphologique (Suvanto & Latva-Karjanmaa, 2005); 2) le manque d’information quant à l’effet des coupes partielles dans les peuplements de tremble et leur effet sur la régénération de certains génotypes; et (3) la grande variabilité génétique et clonale observée à l’intérieur des populations de tremble qui implique que le processus de sélection ne doit pas compromettre la diversité génétique de cette espèce à long terme. Jusqu’à présent, les coupes totales des peuplements de tremble demeurent la pratique sylvicole la plus répandue. Notre approche consistait à faire une évaluation de l’ effet des perturbations naturelles sur la structure clonale du tremble à l’échelle du peuplement (trois premiers chapitres). Une meilleure compréhension des processus naturels nous permettront de mieux adapter ces stratégies afin de concilier l’objectif de la préservation de la dynamique naturelle avec celui de l’augmentation du rendement ligneux dans les peuplements de tremble (Chapitre 4).
DNA extraction and amplification Samples were ground and genomic DNA was extracted using Doyle and Doyle standard procedure (Doyle & Doyle, 1987) with minor modifications. A total of 87 and 81 trees were analyzed at site H and I, respectively. DNA amplification was carried out using AmpliTaqGold®DNA Polymerase (Applied Biosystems, Califomia). Individuals were genotyped at four microsatellite loci, PTR1, PTR2, PTR3 and PTR4 as described in Dayanandan et al. (1998) (Table 1.1). Amplification was carried out using a 96-Well GeneAmp® PCR System 9700, from Applied Biosystems (Califomia, USA) in a total volume of 25 111 containing 0.4 ng/)11 of DNA, 0.5 pmoles/)11 of primers, 0.2mM dNTP, 2.5 mM MgCI2 and 15mM Tris-HCl (pH= 8.0). The amplification conditions were as follows: 10 min at 95°C to activate the enzyme and denature DNA strands, followed by a touch down PCR of 33 cycles with a temperature gradient varying from 60°C to 54°C. Bach cycle lasted about 14 min and a final step of 72°C for 7 min was added for extension during amplification. Prior to electrophoresis, 1.5 11! of PCR product was mixed with 0.25 ).tl of internai size standard (TAMRA; 500 base pairs) and 12 JÛ of deionized formamide. The loading product was then heat-denaturated and immediately placed on ice. Amplified DNA was then analyzed using Gene Scan Software and ABI Prism 310 Genetic Analyzer from Applied Biosystems.
Genetic and genotypic diversity
The high levels of polymorphism (100%) observed in trembling aspen are comparable with values reported in the literature (Ellstrand & Roose, 1987; Liu & Fournier, 1993), and reflect the highly diverse genetic pool of aspen in Quebec’s boreal forests. Given the relatively short temporal gradient covered by the three cohorts for this long lived species, the decrease in the number of alleles per locus in the third cohorts could be attributed to the relatively small sample size used. Accordingly, Waples (1989) suggested that small sample sizes rather than genetic drift may be the primary reason for observed changes in allele frequencies. Heterozygosity was also very high in all cohorts further reflecting the high genetic diversity of aspen. Expected heterozygosity values are consistent with our previous report using microsatellites (Wyman et al., 2003), but exceed by two to three times the values reported in other studies using isozymes or RAPD (Hyun et al., 1987; Jelinksi & Cheliak, 1992; Lund et al., 1992; Yeh et al., 1995; Stevens et al., 1999).
This was not unexpected since microsatellites are usually more variable thau other markers as their mutation rate is estimated between 10-2 and 10-6 (Scrosati, 2002). No significant decrease in aspen genetic diversity was detected across the thà:e cohorts. It appears that aspen genetic diversity cau be maintained for a long time, at ]east 180 y following fire. Similarly to genetic diversity, no significant differences in genotypic diversity were observed between the three cohorts at both sites. The high levels of genotypic diversity and the large number of genets made of one ramet indicate that a highly multiclonal structure was maintained in the three cohorts. Our data contrast with reports of large and dominant clones within aspen populations in other regions based on morphological and phenological characteristics (Kempermann & Barnes, 1976), but are consistent with the results of Wyman et al. (2003) who observed 11 aspen genotypes per 15 samples in Quebec’s boreal forest. The general prediction about the decline in genotypic diversity in clonai species is therefore not supported in aspen.
Mechanisms controlling genetic and clonai structures across three cohorts No impact of disturbance type can be directly associated with aspen genetic and clonai diversity pattems across the three cohorts. Both genotypic diversity and the percentage of unique genets in postfire cohorts were not different from those observed in gap disturbance cohorts, although aspen density decreased in the third ones. As the stand ages and aspen recruitment is limited due to canopy gaps and increased vegetation competition, the genets in the new cohorts will be reduced to one or few ramets and form isolated but highly multiclonal aspen patches. Similarly, seedling recruitment is unable to explain the conservation of high levels of genetic and clonai diversity over time. Although conditions required for aspen seed germination (soil disturbance, exposed mineral soil and moisture) are usually met after a fire (Barnes, 1966; Romme et al., 1997), aspen seeds have a very short viability period that lasts 2 to 4 weeks (Perala, 1990), and a light layer of leaves or duff on the mineral soil or sorne grass species are usually sufficient to form an insulating layer and inhibit aspen seedlings growth (Barnes, 1966; Landhausser & Lieffers, 1998). Moreover, even if sorne seeds could have germinated, the coniferous species dominating the canopy in older serai stages would have prohibited them from acquiring enough light to grow and reach the canopy.
This is particularly true since insect outbreaks would not immediately eliminate conifers from the canopy, and these can stay standing severa! years after being attacked by an epidemie (Kneeshaw & Bergeron, 1998). Alternatively, an insight on the mechanism controlling aspen genet and ramet dynamics can be inferred from the observations of two concurrent processes. On one hand, a limited number of genets suckered in successive cohorts and most genets were unique (76% to 94%) indicating that no specifie genet was selected to dominate the stand across time. On the other hand, very small genetic differentiation was observed between cohorts, indicating that the different genets they contain originated from the same gene pool, most probably established in the initial post-fire cohort. In the absence of significant seedling recruitment in the two gap disturbances cohorts, apical dominance has to be invoked to explain these observations. Apical dominance is a process of hormonal control that inhibits suckering (Frey et al. 2003). Once the top of the tree is removed or eut, apical dominance is released, and suckering is promoted. We suggest that apical dominance inhibited living aspen stems in one cohort from suckering in the next one, especially at short time intervals such as between the second and third cohorts (45 to 65y), but favored the suckering of genets whose ramets have been eliminated from the post fire cohorts and whose apical dominance was removed. This was supported by the limited number of genets (2/77 and 4/62) that kept suckering for two or three successive cohorts. Since a large number of unique genets was continuously present in ail cohorts without seedling recruitment (ifwe except the post fire cohort), we deduce that the gene pool established at the origin of the stand is considerably large. In the absence of major disturbances and seedling recruitment, periodic suckering of genets in successive cohorts would contribute to the maintenance of aspen genetic variability across a long successional gradient.
LISTE DES FIGURES |