Mécanismes de rupture du PVDF
La rupture des polymères solides dépend beaucoup de leur morphologie, de la température, de la vitesse de sollicitation et du mode de chargement. A l’échelle moléculaire, la rupture se déroule sur les lieux de plus faible résistance. En général, la rupture évite la coupure directe des chaînes macromoléculaires, très coûteuses en énergie puisque les liens sont alors covalents [Peterlin, 1972]. Dans les polymères semi-cristallins, les liens entre les enchevêtrements et les cristaux sont essentiellement mécaniques et non chimiques. Ainsi, ces liens pourront être cassés sans avoir à rompre les chaînes. Suivant la température et le taux de déformation, la rupture peut se dérouler avant même d’avoir atteint la limite d’écoulement, on parle alors de rupture fragile. Dans les autres cas, on parle de rupture ductile. Beaucoup de mécanismes sont proposés pour décrire la propagation ductile et l’idée commune est que finalement les mécanismes sont surtout fonction du type de polymère [Clay et Kander, 2002]. Les mécanismes de rupture des polymères semi-cristallins en général dépendent également de l’état de contrainte locale (pour simplifier : conditions de déformations planes (DP) et de contraintes planes (CP)). Ces conditions s’avèreront encore plus délicates à étudier quand on sait que sur une même éprouvette les deux conditions interviennent. Il n’y a plus aucun doute désormais sur l’importance des conditions de DP pour la rupture des thermoplastiques notamment dans le cas des éprouvettes entaillées ou fissurées. De telles conditions mènent généralement à des ruptures fragiles [Friedrich, 1983]. La sensibilité à la présence d’une fissure sera d’autant plus grande que la température est faible et la vitesse élevée [Vincent, 1964].
Rappels des principaux types de rupture obtenus
Dans le chapitre précédent, les différents essais mécaniques ont montré que le mode de rupture pouvait varier suivant la géométrie de l’éprouvette, la température et la vitesse de sollicitation. Les essais de traction sur éprouvettes lisses ont indiqué qu’à 20°C la rupture était ductile, caractérisée notamment par un important blanchiment de la zone endommagée et par un étirement important de la matière. A plus basse température, le volume libre des chaînes amorphes ayant diminué, cela induit une plus grande rigidité menant à une rupture brutale des éprouvettes. Les essais de traction sur éprouvettes entaillées ont indiqué la même évolution avec la température, et les essais sur AE0.15 ont indiqué en plus un fort effet de la triaxialité sur la déformation à rupture à 20°C. Les essais de flexion et de traction réalisés sur éprouvettes fissurées ont confirmé l’importance de la triaxialité sur le mode de propagation, et ont également révélé l’importance de la géométrie de l’éprouvette. Pour la suite, on s’attachera à décrire les différences observées entre les différentes géométries, en mettant en évidence l’influence des différents paramètres (température, vitesse, géométrie, triaxialité) sur le mode de rupture. Pour qualifier le type de rupture, des observations macroscopiques mais également des observations des faciès de rupture réalisées au MEB vont être utilisées. Un faciès de rupture sera dit ductile par la présence notamment de nombreux fibrilles étirées. A contrario, un faciès sera qualifié de fragile par l’absence totale de déformation de la matière.
La rupture du PVDF peut prendre différents aspects suivant la température de l’essai. Pour des températures supérieures à 50°C, la striction peut se propager dans toute l’éprouvette en cours de déformation [Castagnet, 1998]. Un écoulement important du matériau est alors obtenu. Suivant l’état de surface des éprouvettes, la striction peut concerner une longueur plus ou moins importante de l’éprouvette. Il est possible de la mettre en évidence sur une courbe contrainte- déformation, en utilisant un extensomètre longitudinal et latéral. Sur la figure III.30, la striction est enregistrée dans l’extensomètre longitudinal (déformation importante), alors que l’extensomètre latéral, qui se situe en dehors de la zone qui strictionne, indique une saturation de la déformation (cf. Figure III.30). A -10°C, le faciès de rupture est plat, il n’y a plus d’étirement de matière comme c’était le cas à 20°C. L’influence de la température sur la mobilité des chaînes est ainsi mise en évidence. Le blanchiment reste présent, mais la zone concernée se limite à la zone de rupture comme le montre la figure III.31. A plus basse température, et principalement aux très basses températures (-80°C et -100°C), le faciès de rupture est très souvent en biseau et dans certains cas, la rupture s’initie en plusieurs endroits en même temps créant un morcellement de l’éprouvette. A partir de -50°C, il n’y a plus de zone blanchie, l’absence de croissance significative de cavités à ces températures est ainsi postulée. Dans ces conditions (basse température), le matériau est sensible à l’endommagement par bandes de cisaillement.