Matrices cimentaires d’immobilisation
Cette première partie s’articule autour du squelette granulaire des matrices cimentaires, des ciments Portland, de leur composition et des hydrates qui composent leur structure durcie, ainsi qu’aux propriétés associées au caractère poreux du matériau.
Notions de pâte de ciment, mortier et béton
On obtient un mortier ou un béton en malaxant des granulats (sable ou sable + gravier) avec du ciment et de l’eau dans un malaxeur, avec ajout d’adjuvants si nécessaire (voir Figure I-1). Les adjuvants, généralement mélangés à l’eau avant d’être mélangés au ciment et aux granulats, sont de différents types : réducteurs d’eau, plastifiants, entraîneurs d’air, modificateurs de prise (retardateurs, accélérateurs), hydrofuges, etc. Concernant le squelette granulaire, Dmax représente le diamètre du plus gros granulat. Si Dmax est supérieur à 4 mm, il s’agit d’un béton, sinon (si Dmax est inférieur à 4 mm) il s’agit d’un mortier [Dupain et al. 2000] [Neville 2000]. Matrices cimentaires d’immobilisation et piégeage de tritium Chapitre 1 – Etat de l’art 20 Figure I-1 : les différentes formes de matrices cimentaires Le squelette granulaire est composé de différents types de granulats qui, selon leur taille, sont des sables, graviers, cailloux, etc. Les différents grains sont rendus cohésifs par la pâte de ciment jouant le rôle de « colle ». On appelle pâte cimentaire, liant, ou pâte liante, le mélange de ciment, d’eau et d’adjuvants. On parle de pâte de ciment pure en l’absence de granulats. Pour obtenir des mortiers homogènes dans tout leur volume ou d’une gâchée à l’autre, il est important de s’intéresser à la mise en œuvre (temps et vitesse de malaxage, température, compactage), à la composition du mélange et aux conditions de cure, car ils influent considérablement la qualité de ce dernier. Ainsi, grâce aux paramètres de formulation du matériau cimentaire, il est possible de piloter non seulement ses performances mécaniques, ses variations dimensionnelles, mais aussi sa porosité et ses propriétés de transport de fluide.
Le squelette granulaire
La qualité des granulats a une importance capitale sur la qualité d’un mortier ou d’un béton, puisqu’ils représentent les ¾ de son volume. Il existe plusieurs types de granulats : calcaires, silico-calcaires ou siliceux, roulés ou concassés, et l’accroche de la pâte de ciment est différente selon la nature du granulat. Les granulats impactent directement les propriétés primordiales d’un béton (durabilité, résistance notamment). Il est donc important de choisir leurs caractéristiques (surface spécifique, porosité, forme et réactivité chimique) en fonction des propriétés attendues. Ainsi, le ratio massique Granulats-sur-Ciment (G/C) influence la résistance en compression des bétons. Selon [Neville 2000], un rapport massique (G/C) de l’ordre de 3 permet d’obtenir de meilleures performances qu’avec des valeurs plus élevées (voir Figure I-2). En effet, pour assurer une cohésion efficace des granulats, la pâte de ciment doit être en proportion suffisante par rapport aux granulats.
Nature des granulats
L’accroche d’une pâte de ciment Portland est meilleure sur desgranulats calcaires [Neville 2000]. Par contre, le quartz (granulat siliceux) a une meilleure résistance à la compression que le calcaire. Si le squelette granulaire est bien constitué, c’est-à-dire s’il est suffisamment compact pour que les charges mécaniques passent majoritairement par le squelette et pas par la pâte, un mortier ou un béton aux granulats siliceux résiste davantage qu’un mortier ou un béton aux granulats calcaires [Neville 2000] [Agostini et al. 2010] [Torrenti et al. 2014]. D’un point de vue économique, il est plus intéressant (car plus facile) de concasser du calcaire que de la silice. Souvent, les granulats siliceux sont des granulats naturels comme le sable de mer (exemple : sable de Leucate, France). 1.2.2. Optimisation du squelette granulaire L’optimisation du squelette granulaire est liée non seulement à la taille des granulats, mais également à leur distribution de tailles (ou distribution granulométrique). Classification des granulats selon leur taille : Un squelette granulaire peut être constitué de granulats de nature, de forme et de taille très variée. Dans le domaine du Génie Civil, les granulats sont classés essentiellement selon leur taille (voir Tableau I-1)
Notion de compacité du squelette granulaire
La distribution de taille des grains du squelette est généralement optimisée afin d’obtenir une compacité maximale des grains, et donc un minimum de vide dans le matériau. En effet, un minimum de vides assure un maximum de performances mécaniques. Cela permet également de réduire la quantité de ciment mise en œuvre et d’obtenir une meilleure durabilité [Chanvillard et al. 1996]. La compacité C ou ou fraction solide Fs [Chanvillard et al. 1996] [De Larrard 1999] [Roquier 2016] est désignée comme le volume des éléments solides (granulats, grains de sables, etc.) rapporté au volume total : = 𝐶 = 𝐹𝑠 = 𝑉𝑠 𝑉𝑎𝑝𝑝 = 𝑉𝑠 𝑉𝑠 + 𝑉𝑝 Où Vs correspond au volume des éléments solides, Vp au volume des pores et Vapp correspond au volume apparent du milieu considéré (il est égal à la somme de Vs et Vp). La compacité C est également reliée à la notion de porosité (ou ), qui représente le volume de pores rapporté au volume apparent Vapp. Par définition : + = C + = Fs + = 1 En théorie, la compacité maximale d’un mélange ordonné de sphères de même taille est égale à 0,74 [De Larrard 1999] [Roquier 2016], ce qui correspond en cristallographie à un arrangement type hexagonal compact ou cubique à faces centrées. Pour optimiser la compacité d’un tel mélange, il faut utiliser des grains sphériques de taille différente afin de combler les vides présents entre les sphères. Ce principe est illustré par le modèle apollonien de Apollonius de Perge, qui correspond à l’empilement théorique optimal (voir Figure I-3)