MALADIE DE LAPEYRONIE
Historique
La première description scientifique fut faite en 1743 par François Gigot de Lapeyronie, premier chirurgien du roi Louis XV et fondateur de l’académie royale de chirurgie. Quelques écrits documentés sur la maladie et antérieurs aux travaux de Lapeyronie ont été rapportés par André Vesallus puis Gabrielé Fallopio en 1561, et bien avant, en 1267, Theodoric écrivit un chapitre sur les indurations du pénis. Pendant longtemps, le traitement a été uniquement médical. C’est en 1828 que George Mc Clellan pratique la première incision de la plaque ossifiée. Au XIXe siècle, M Physick réalisa le premier redressement de verge selon le procédé qui deviendra plus tard la technique de Nesbit.
Epidémiologie
Les deux tiers des patients ont entre 40 et 60 ans. Sa prévalence serait de l’ordre de 3,2 à 9%. Elle augmente avec l’âge, puisqu’elle est estimée à 7 % après 50 ans. 3. Rappels anatomiques [7-12] Le pénis est l’organe de copulation et de miction chez l’homme.
Situation, aspect général et dimensions
Le pénis est appendu à la partie antérieure du périnée, au-dessus du scrotum, audessous et en avant de la symphyse pubienne. Il présente à décrire deux parties : o Une partie postérieure, périnéale ou racine du pénis, oblique en haut et en avant. Elle correspond à la portion fixe de la verge ; o Une partie antérieure ou pénis proprement dit, libre et mobile, présente : – Le corps du pénis : partie principale de la portion mobile du pénis. Il varie selon l’état de flaccidité ou d’érection. En flaccidité, il est mou, cylindrique, sa direction est verticale vers le bas. En érection, il devient plus volumineux, rigide, turgescent, prismatique triangulaire, à bord arrondi. Sa direction 5 devient oblique en haut et en avant de l’abdomen avec lequel il forme l’angle abdomino-pénien (45 à 90°) prolongeant la direction de la partie périnéale. – Le gland : renflement antérieur conoïde recouvert par une muqueuse et percé à son sommet par le méat urétral. C’est une expansion distale du corps spongieux. Sa base ou couronne déborde le corps du pénis avec lequel il est séparé par le sillon balano-prépucial ou col du gland. Les dimensions du pénis sont variables selon les individus, l’âge et l’état de flaccidité ou d’érection. En moyenne, chez un adulte, la partie libre mesure : – à l’état de flaccidité, 10 à 12 cm de longueur pour 8 à 9 cm de circonférence ; – à l’état d’érection, 15 à 18 cm de longueur pour 10 à 12 cm de circonférence.
Structure
Le pénis est constitué par des organes érectiles entourés par des enveloppes. o Les organes érectiles : – Les corps caverneux sont deux constituants symétriques en forme de cylindres juxtaposés de part et d’autre de la ligne médiane. Ils prennent racine au bord inférieur des branches ischio-pubiennes, puis se rejoignent sur la ligne médiane au dessous de la symphyse pubienne et parcourent ensuite le pénis, disposés en canon de fusil. Les deux corps caverneux sont au contact par l’intermédiaire d’un septum (cloison pectiniforme). Ils limitent ainsi deux gouttières longitudinales médianes : une gouttière supérieure (suscaverneuse), occupée par le pédicule dorsal de la verge et une gouttière inférieure (sous-caverneuse ou urétrale), plus large et plus profonde, comblée par le corps spongieux et l’urètre. Chaque corps caverneux se termine par un sommet mousse à la base du gland. Ils sont enveloppés dans une gaine (albuginée) très résistante et élastique. Ils sont fait d’un tissu érectile composé de nombreuses travées détachées de la face profonde de l’albuginée, anastomosées entre elles et limitant des aréoles. 6 – Le corps spongieux est situé, sur la ligne médiane, dans la gouttière inférieure déterminée par les corps caverneux. Il entoure l’urètre spongieux sur toute sa longueur. Il est en continuité avec le gland. o Les enveloppes du pénis sont faites de quatre tuniques superposées : la peau (fine, mobile, assez pigmentée), le fascia superficiel du pénis (dartos), la celluleuse (très lâche, contenant des vaisseaux et nerfs), le fascia profond du pénis ou fascia du pénis ou fascia de Bück (engaine les corps érectiles et fusionne avec leur albuginée au niveau du sillon balano-préputial).
Vascularisation et innervation du pénis
Le pénis est irrigué par deux groupes artériels : – Les artères profondes, branches de l’artère honteuse interne, sont destinées aux corps érectiles. Ce sont les artères caverneuses, l’artère dorsale du pénis (chemine sur la face dorsale du corps caverneux), l’artère du bulbe du pénis et les artères bulbo-urétrales. – Les artères superficielles sont destinées aux enveloppes, elles cheminent dans la couche celluleuse et proviennent de l’artère honteuse externe, de l’artère périnéale et de l’artère dorsale du pénis. o Le retour veineux est assuré par : – les veines profondes drainent les organes érectiles et se jettent dans la veine dorsale profonde du pénis, entre les artères dorsales, qui se jette dans le plexus veineux vésical. Les rameaux issus du corps spongieux contournent les corps caverneux avant de se jeter dans la veine dorsale profonde. – les veines superficielles drainent les enveloppes. Elles se jettent dans la veine dorsale superficielle qui monte à la face dorsale du pénis et se termine, à la racine de la verge, dans la veine saphène interne. o Les lymphatiques gagnent les nœuds inguinaux superficiels et profonds. o L’innervation des organes érectiles est assurée par les rameaux du nerf honteux interne (nerfs périnéal et dorsal du pénis) et du plexus hypogastrique 7 inférieur. Les enveloppes sont innervées par des rameaux issus du nerf ilioinguinal et du nerf honteux interne (périnéal et dorsal). Figure 1 : Coupe transversale du pénis : organes érectiles, enveloppes,vaisseaux et nerfs .
Histologie de l’albuginée
Chez le sujet jeune, l’albuginée mesure 0,25 mm d’épaisseur. Elle est constituée de deux couches de fibres de collagène ondulées, une couche longitudinale externe et une couche circulaire interne. L’albuginée ne contient pas de fibres musculaires lisses. Sous l’albuginée se situe un tissu conjonctivo-aréolaire lâche contenant de nombreux capillaires. Ce tissu sépare l’albuginée des corps caverneux riches en fibres musculaires lisses. Le collagène de l’albuginée est constitué à part égale de collagène de types 1 et 3.
Anatomopathologie
La maladie de Lapeyronie évolue en deux phases : – la première phase, inflammatoire, dure trois à six mois. Elle est marquée par l’apparition d’un infiltrat inflammatoire lympho-plasmocytaire péri 8 vasculaire se développant entre l’albuginée et les corps caverneux, dans la zone de jonction du tissu conjonctif et du tissu aréolaire. Les plaques inflammatoires présentent des dépôts d’anticorps immunoglobulines M et des infiltrats de lymphocytes T et macrocytaires sous l’albuginée. – la deuxième phase, phase chronique ou séquellaire, est marquée par l’apparition de la fibrose. Celle-ci débute entre l’albuginée et les corps caverneux puis atteint l’albuginée. Le pourcentage de collagène s’accroît et le collagène de type 3 devient prépondérant. La courbure de la verge apparaît lors de cette phase fibreuse. La fibrose s’étend ensuite vers les corps caverneux entraînant une atrophie et une destruction des fibres musculaires lisses. Après 7 à 24 mois d’évolution, la plaque fibreuse peut se calcifier. Elle peut également régresser, voire disparaître spontanément.
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