Lutter contre les infections un combat sans fin
De la grande diversité des objectifs et procédés
De la neutralisation des miasmes à la désinfection
Alors que la chimie moderne vit ses prémices au XVIIIe s., les premières opérations de neutralisation visent les mauvaises odeurs 673 . On cherche donc, non pas à supprimer l’origine des désordres, mais à faire disparaitre leurs conséquences. Pour empêcher la puanteur, des produits masquants sont employés, comme le vinaigre en aspersion ou des fumigations de plantes aromatiques.
Puis, avec les progrès techniques, des moyens de brassage sont déployés pour disperser les atmosphères délétères des fosses d’aisances, soit par des cheminées d’aération qui évacuent les exhalaisons au niveau des toits, soit par la force mécanique qui actionne le ventilateur, avec ou sans fourneau. Exemple de procédé de neutralisation de l’interface usager après emploi, le brevet n°18286 du 12 janvier 1854 propose une désinfection des sièges d’aisances dans les appartements par la ventilation combinée sur les fosses et suivant la hauteur des maisons. On peut s’étonner qu’en 1854, la dispersion des odeurs constitue encore un procédé de désinfection. Par la suite, les réactifs chimiques font leur apparition, avec le chlore et les sels métalliques.
Etape de transition avant le traitement des matières de vidange stricto sensu, les fumigations guytoniennes, car préconisées par Guyton-Morveau, sont réalisées en versant de l’acide sulfurique (H2SO4) sur du sel marin (NaCl), ce qui permet d’oxyder avec l’acide chlorhydrique (HCl) produit les composés gazeux réduits comme l’hydrogène sulfuré (H2S) par exemple 675 . Avec le développement de la bactériologie dans la seconde moitié du XIXe s., arrivent les procédés biologiques, intensifs ou extensifs pour l’épuration des eaux usées, non pris en compte dans ce travail.
Si la désinfection s’applique dans un premier temps aux traitements des gaz, des procédés se développent pour les matières liquides et solides, avec des solutions de destruction (thermique, chimique, biologique et catalytique), distinctes des opérations dites de récupération (adsorption, absorption, condensation, puis filtration membranaire). Signe de ces évolutions, en 1822, pour combattre la contagion par les miasmes, trois moyens sont distingués.
De la désinfection tous azimuts Illustration de la complexité des opérations de désinfection, au niveau de l’interface usager, le brevet n°17069 du 1er décembre 1856 déposé par M. Morard à Lyon pour une fosse mobile inodore etc… apparait bien complexe dans ce petit meuble avec porte en forme de fauteuil de 66 cm de long sur 52 cm de largeur, 48 cm de hauteur avec un dossier à 85 cm de hauteur, se trouve un petit tonneau en bois de chêne de forme conique cerclé de fer.
Avec des armatures à tringles et poulies qui peuvent monter et descendre à l’aide de contre-poids et de cordes, le siège qui reçoit la cuvette monte et descend à volonté pour permettre la vidange de la fosse678 . Dans l’intérieur du siège, de chaque côté du tuyau qui reçoit les matières, on dispose deux bassins cylindriques, l’un rempli d’eau pour la propreté de la cuvette, et l’autre pour les produits désinfecteurs constitués par un mélange de sulfate de fer et de cuivre (2 x 500 g), acide sulfurique (500 g), chlore (100 g) et eau (4 l).
D’après les expériences faites, par la dissolution des sels et le mélange du liquide, on obtient un produit suffisant pour désinfecter 1 m3 de matières fécales liquides et solides. Outre la fragilité de ses cordes et poulies, ce système présente un risque chimique avec le stockage des réactifs à domicile. Autre exemple de la désinfection de l’interface usager vers 1890, pour réduire la dangerosité des urinoirs publics, le rinçage à l’huile est mis en œuvre par le docteur Beetz à Vienne car ce qui cause l’infection des urinoirs et des latrines collectives, c’est bien moins la présence et la décomposition des matières fécales, que la formation sur les surfaces libres de dépôts de sels urinaires subissant la fermentation ammoniacale.