L’urbanisation sénégalaise du système urbain post-indépendance à la question de l’émergence d’un axe urbain Dakar-Touba

L’urbanisation sénégalaise du système urbain post-indépendance à la question de l’émergence d’un axe urbain Dakar-Touba

Saisir la mécanique du fait urbain dans un contexte territorial aussi contrasté que celui du centre-Ouest sénégalais n’est pas une entreprise aisée, tant ses formes – tantôt expressions d’une logique d’organisation territoriale dirigiste (Dakar et Thiès), tantôt résultats d’investissements locaux (Touba et Mbacké) ou les deux à la fois (Diourbel) – varient d’une région à l’autre. ailleurs, les changements spatiaux ne sont pas le fruit du hasard. Parler donc d’émergence ne signifie nullement plaider pour un ordre spatial qui s’affranchirait de toute référence historique (né ex nihilo). En géographie, la notion d’émergence renvoie à un ordre géographique en cours de constitution et produit à partir d’objets ou d’événements qui en constituent l’arrière-fond. « L’émergence apparaît comme un acte de création, non à partir de rien, mais à partir d’éléments existants » (Dauphiné, 2004). Comme pour les systèmes biologiques qui en constituent le fondement, la théorie de l’émergence pour les systèmes spatiaux pose la question des interactions entre le tout et ses parties (échelle et interdépendances d’ordre hiérarchique ou non), le désordre et l’ordre – le premier étant non pas un obstacle à la réalisation du second, mais plutôt une des conditions (sans doute la plus importante de toutes) de cette réalisation – et l’antérieur et le postérieur (temporalité). De ce fait, elle désapprouve implicitement la démarche analytique et défend le caractère obligatoire de la démarche de va-et-vient entre les premiers et les seconds pour une bonne compréhension de structures nouvelles. Autrement dit, les structures émergentes étant le produit des rétroactions engendrées par le fonctionnement d’organisations préexistantes, leur intelligibilité ne saurait se faire sans une bonne connaissance des rapports entre les premières et les secondes. Aussi, la démarche proposée dans ce travail procède-t-elle d’une approche par les processus et par les analyses multi-niveaux et diachroniques. Loin d’être une coquetterie intellectuelle, la notion d’émergence est essentielle pour montrer toute la complexité des changements urbains en cours, relativement à l’urbanisation récente. Au Sénégal, la nouvelle émergence urbaine procède essentiellement de trois facteurs : la progression rapide du nombre de villes, la réorganisation des alliances inter-régionales et des trajectoires migratoires surtout et les nouveaux mécanismes qui sous-tendent les systèmes productifs et économiques des villes.

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« les villes ne dépendent plus exclusivement, comme dans la théorie des lieux centraux, de leur relation avec leur hinterland rural qu’elles polarisent, ou de leurs liens de concurrence avec les centres de même niveau immédiatement voisins. Des liens plus complexes sont pris en compte, intégrant des relations qui ne sont plus de proximité, mais de connexité, mais aussi des réseaux a-symétriques par rapport à l’emboîtement hiérarchique des fonctions urbaines » (Pred, 1973, cité par Bailly, Ferras et Pumain, 1992). La notion de système de villes peut se lire ici à travers la configuration spatio- temporelle des migrations interrégionales. Compte tenu de la quasi-inexistence de données sur les flux interurbains, nous sommes obligé de nous contenter des flux entre régions. Supposant en effet que le sens des migrations (ville vers ville, rural vers rural, campagnes vers villes et vice versa) dépend des motifs qui les sous-tendent, les données agrégées à l’échelle régionale ne manquent pas d’intérêt. Ces motifs devenant essentiellement d’ordre économique et monétaire, les villes sont devenues depuis une vingtaine d’années l’aboutissement principal des flux migratoires inter et intra-régionaux (contrairement aux migrations des années 1960 et 1970 surtout orientées vers les zones agricoles). aux autres régions du pays. D’après le recensement de 1988,18 la part de chacune des trois régions dans les échanges migratoires entre elles et les autres régions du pays se structure comme nous l’avons reprsenté dans le tableau 12.qu’elles n’en ont échangé avec les autres régions du pays. En effet, 50,98 % des migrants issus de la région de Dakar sont partagés entre les régions de Diourbel et de Thiès. De la même manière, 83,86% des migrants issus de la région de Thiès sont répartis entre les régions de Dakar et de Diourbel. Pour la région de Diourbel, 68,16% des migrants issus de son territoire sont répartis entre les régions de Dakar et de Thiès (12,78% en 1988 contre 12,72 % en 2002 pour cette dernière). Cela dit, c’est loin d’être un hasard si la dynamique des villes de ces trois régions se révèle spectaculaire par rapport à ce qui se passe dans les autres régions du pays puisque l’essentiel des migrants provenant de ces dernières sont captés par les villes et notamment par Dakar, Thiès, Diourbel et Touba.

 

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