L’ORGANISATION DES ACTIVITÉS COMMERCIALES

 L’ORGANISATION DES ACTIVITÉS COMMERCIALES

Le problème de la main d’œuvre: l’évolution de nouvelles populations à Acapulco. La population indigène de toute la Juridiction d’Acapulco arriva à n’être composée en 1644 que de quatre cent cinquante quatre neufs âmes490. A la fin du XVIIème siècle, bien que cette collectivité ait entamé son renouveau dans toute la Nouvelle Espagne, à Acapulco, comme le dit Gemelli Careri durant son séjour:… muy raramente se ve algún nativo del lugar, de rostro aceitunado491 . Lors de la réalisation d’ouvrages ordonnés par la Couronne, comme les travaux de fonte de l’artillerie, l’édification du couvent de Nuestra Señora de Guía, la construction du fort de San Diego ou les travaux de sa reconstruction, les autorités du port, suivant la coutume de la Nouvelle Espagne, recourraient aux indigènes de la Juridiction d’Acapulco ou de Juridictions les plus proches. Bien que les fonctionnaires du port comptent sur la main d’œuvre esclave de Sa Majesté ou sur de la main d’œuvre privée, celle-ci était minoritaire par rapport aux indigènes et beaucoup plus coûteuse. A cause de l’urgence dans laquelle se faisaient généralement ces travaux publics, et du grand nombre de travailleurs nécessaires, on utilisait les esclaves jusqu’à ce que cette fragile population indienne de la Juridiction arrive à les remplacer. Au XVIème siècle, les vice-rois Enríquez et Villamanrique avaient eu l’idée d’un système appelé Repartimiento pour résoudre le problème de la rareté de la main d’œuvre, imposant aux populations indigènes de fournir des travailleurs. En organisant une rotation saisonnière de leurs services appelée rueda ou tanda, on obligeait à travailler les hommes de quinze à soixante ans, en exceptant les nobles et ceux qui occupaient un poste public. Les populations de Cacaotepeque, Igualapa, Tixtla, Chilapa envoyaient à Acapulco cette main d’œuvre qui devait travailler trois semaines si les indigènes étaient mariés, et quatre pour les jeunes célibataires492. A la fin des travaux à Acapulco, ils retournaient dans leurs villages. La Caja Real les payait deux tomines par jour, alors que la location d’un esclave était de un peso par jour493 . Ce travail saisonnier fourni par les populations indigènes494 de la Juridiction d’Acapulco ou des Juridictions voisines justifie l’observation de Gemelli Careri sur la particularité que l’on voyait peu d’indigènes dans la ville. 

L’influence de la Couronne sur le nouveau panorama d’Acapulco

Avant l’arrivée des Espagnols, Acapolco495 faisait partie des seigneuries indépendantes des Yopes ou Tlapanecos qui, d’une certaine façon, s’étaient unis au royaume de Mescaltepec. Le territoire occupé par les Yopes contenait une population dense répartie dans de nombreuses rancherías dispersées496 . A la fin de la Conquête du Mexique, Acapulco, partie intégrante de la Nouvelle Espagne, suivit le même processus de premiación que la Couronne octroya à ses conquistadors. Les indiens des villages soumis furent répartis à ces fidèles qui reçurent le droit de percevoir un tribut en espèces, mais ne disposèrent pas de la propriété territoriale à moins que la Couronne le concédât par dérogation. Ce système de récompense appelé encomienda, en échange, exigeait de l’encomendero qu’il soit fidèle au Roi, qu’il réside dans la ville ou le village dans lequel se trouvait son encomienda, qu’il s’occupe temporellement et spirituellement de ses indiens, et qu’ils fournissent obligatoirement de ses deniers l’aide militaire en cas de guerre quand les autorités locales le lui ordonnaient.Le royaume de Mescaltepec, qui incluait Coyuca et d’autres dépendances en plus d’Acapulco, fut donné en encomienda au conquistador Juan Rodríguez de Villafuerte, vecino de Zacatula498. Tant la diminution démographique de la population indigène499 occasionnée par les mauvais traitements et les diverses pestes500 , que les grandes controverses suscitées par ce régime, entraînèrent la perte progressive des privilèges initiaux des encomenderos. En 1573, à l’apparition des Ordenanzas de Descubrimiento, Nueva Población y Pacificación, la durée des avantages obtenus par l’octroi de l’encomienda à la Nouvelle Espagne fut limitée à trois vies -trois générations-, bien que parfois cela fût prorogé en échange de contributions pécuniaires. Alors que les encomiendas étaient frappées par ce processus de transformation, se stabilisait la route Manille-Acapulco-Manille. A Acapulco, la foire s’organisait, et y venaient tous ceux qui étaient impliqués dans l’entreprise des Philippines. Ces deux processus modifièrent le modèle socio-économique initial du port, composé des Espagnols ou gachupines501 qui avec les créoles formaient le groupe des gens de distinción. Aux débuts du XVIIème siècle, la fille de Juan Rodríguez de Villafuerte, doña Aldonza de Villafuerte, avait hérité de l’encomienda de Mescaltepec502 et par conséquent d’Acapulco et de Coyuca. En termes économiques, à partir de 1595, la production des vergers de cacao de la région de Coyuca avait commencé à décliner à cause du vieillissement des plantes dû aux épidémies et à cause de la compétition des régions de la Chontalpa -Tabasco-, de Soconusco – Chiapas y Veracruz-, de Venezuela -Caracas y Maracaibo-, et d’Équateur -Guayaquil-. En plus de ces vicissitudes, le système de l’encomienda subit en 1601 une autre secousse avec la décision de suppression par Philippe III du service personnel des indiens, bien que l’on ait continué à permettre aux encomenderos de recevoir les rentes que produisaient leurs villages. Néanmoins, la diminution progressive de la population indigène provoqua une baisse drastique de ces bénéfices. Ainsi, la encomienda, privée de toute sa nature initiale, resta comme un: mero adorno y al título de encomendero siguió unida una marca de distinción social.

L’encomendero et le commerce du galion de Manille

Si au XVIème siècle, l’encomendero s’implique dans l’approvisionnement du galion de Manille, les encomenderos du XVIIème siècle se mêlent moins de ce négoce. Leur image durant les vingt premières années est un peu floue. Ils apparaissent dans les comptes des Officiers Royaux en 1621 avec don Francisco Pacheco qui achète treinta y ocho botijas de clavo de comer 505 . Leur modeste participation dans le commerce du galion de Manille est due au fait que, malgré les interdictions de 1593, les peruleros continuaient à se déplacer à Acapulco et achetaient une grande partie de la cargaison. En 1640, on interdit définitivement ce commerce aux péruviens, et progressivement les marchands de la Nouvelle Espagne entrèrent dans ces opérations, et parmi eux, les encomenderos et les vecinos d’Acapulco. La Loi limitait la participation des Novohispanos, en leur interdisant d’acquérir les marchandises d’Extrême-Orient directement à Manille ou de passer commande aux commerçants philippins lors de leur présence au moment de la foire à Acapulco. Mais il était habituel que les Espagnols ou les Novohispanos établis aux Philippines envoient des marchandises et des esclaves directement à des membres de leur famille ou de leurs connaissances à la Nouvelle Espagne506 . L’augmentation de la participation des vecinos d’Acapulco dans la seconde partie du XVIIème siècle est claire et franche. Dans les comptes des Officiers Royaux, le capitaine Martín de Eguiluz, Francisco Diaz Hidalgo, Pablo de Carrascosa, Pedro Martínez Castellanos et Francisco Gutierrez achètent des marchandises et des esclaves, sont garants de personnes qui arrivent des Philippines, payent les droits des marchandises chinoises emportées hors registres, ou ceux des personnes qui arrivent par le galion, et envoient des marchandises et des regalos aux Philippines. Les mentions de ces travaux nous montrent plus précisément les activités de commerce que les encomenderos menaient en lien avec le galion et qu’ils pouvaient être fournisseurs à la fois du bateau et des bureaux du gouvernement. Dans les comptes de la Real Hacienda d’Acapulco de 1640 à 1660, c’est surtout Pablo de Carrascosa qui se présente comme garant à l’arrivée d’esclaves au port.  

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