Localisation dynamique et égalité des conductances de Hall pour des opérateurs de Schrödinger magnétiques aléatoires
Introduction générale
L’intérêt qu’Anderson porta au transport électronique dans les milieux désordonnés [A], a donné naissance à un nombre considérable de travaux destinés à l’étude des opérateurs de Schrödinger aléatoires, introduits pour décrire rigoureusement ces types de structure. Anderson t valoir qu’en présence d’impuretés, les électrons auraient tendance à se localiser dans des régions bornées et proches de leurs positions initiales, éliminant ainsi toute possibilité de transport et donc de courant. Le mécanisme physique de cette localisation revient à supprimer l’eet tunnel à grande distance en raison de la décohérence induite par le milieu aléatoire. Suite à cette découverte, Anderson s’est vu attribuer le prix Nobel de la physique en 19. L’analyse du transport électronique consiste à étudier le comportement du système étudié à travers l’évolution temporelle de paquets d’ondes. Considérons un espace de Hilbert H séparable et H : H → H un opérateur auto-adjoint de domaine D(H), décrivant le système étudié. Dans ce travail, on s’intéresse au comportement d’un électron dans l’espace physique de dimension d, R d , et donc H = L2 (R d ). Soit ψ ∈ D(H) un état initial tel que kψk = 1. L’évolution temporelle de l’état ψ est déterminée par l’équation de Schrödinger ( i ∂ ∂tψt = Hψt ψt=0 = ψ (1.1) et est donnée par ψt = e−itHψ. (1.2) La localisation dynamique se dénit par la non-propagation des paquets d’ondes (1.2) sous l’évolution temporelle issue de l’équation de Schrödinger (1.1). Nous formulerons les détails de la dénition mathématique de la localisation dynamique un peu plus loin, voir (1.5). Les états présentant un tel comportement, sont appelés des états localisés. A l’inverse, les état délocalisés sont générateurs de transport électronique, comme c’est le cas dans les milieux périodiques modélisant des cristaux parfaits. 5 Chapitre 1. Introduction générale Signalons que le théorème de RAGE dû à Ruelle, Amrein, Georgescu et Enss (e.g. [CFKS]), met en évidence l’incidence que cette notion de localisation a sur la nature du spectre et conrme l’intuition physique. En eet, il existe une décomposition spectrale de l’espace physique H donnée par H = Hac ⊕ Hsc ⊕ Hpp, tel que σ(H|H• ) = σ•(H) où • = {ac, sc, pp}. Le théorème de RAGE atteste que ϕ ∈ Hpp ⇔ lim R→∞ sup t χ{|x|>R} e −itHϕ = 0, ϕ ∈ Hc ⇔ lim T→∞ 1 T Z T 0 χ{|x|≤R} e −itHϕ dt = 0 pour tout R > 0, avec χ{|x|≤R} et χ{|x|>R} désignant les fonctions caractéristiques des régions {|x| ≤ R} et {|x| > R} et où Hc regroupe Hac et Hsc. Ceci révèle que les éléments de Hpp concordent avec des états physiquement bornés dans le sens où l’évolution temporelle e −itHϕ ne quitte pas ou très peu la partie compacte {|x| ≤ R}. Alors que l’inverse se produit pour les états de Hc, puisqu’ils nissent par quitter toute partie compacte de l’espace. Dans le cadre des opérateurs dits d’Anderson, la localisation fut interprétée comme la présence du spectre purement ponctuel avec une décroissance exponentielle des fonctions localisées. Cependant, il est actuellement bien établi que cette forme de localisation bâptisée, localisation d’Anderson, n’est pas susante pour s’assurer de la localisation dynamique du système. Cette dernière exclut toute forme de transport alors que la localisation d’Anderson peut en autoriser. Précisons d’abord ce que nous entendons par transport. An d’analyser le comportement dynamique, on cherche à déterminer, en moyenne, la position d’une particule après qu’elle a évolué pendant un temps t à partir d’un état intial ψ. Ceci se traduit par la quantité hPI (H)e−itHψ, |X| 2PI (H)e−itHψi = |X|PI (H)e−itHψ 2 , (1.3) où |X| est l’opérateur position déni par (|X|ψ)(x) = |x|ψ(x) pour ψ ∈ H et PI (H) est la projection spectrale sur un intervalle d’énergie I. De manière générale, on considère les moments d’ordre p mψ,p,I (t) = hPI (H)e−itHψ, |X| pPI (H)e−itHψi. (1.4) Partons d’un état initial ψ à support compact. Si les électrons avec des énergies dans une fenêtre I, se déplacent balistiquement avec une vitesse moyenne υ alors mψ,2,I (t) est de l’ordre de υt2 pour des temps t susamment grands. Par ailleurs, si les électrons sont localisés, il est nalement assez naturel de s’attendre à ce que le moment mψ,2,I (t) soit uniformément borné en t. Cela revient à dire qu’en ayant 6 de la localisation d’Anderson dans un tel intervalle I, mψ,p,I (t) devrait être uniformément borné en t pour toute condition initiale ψ convenablement choisie : sup t mψ,p,I (t) = sup t |X| p 2PI (H)e−itHψ 2 < ∞. (1.5) Mais c’est loin d’être le cas puisqu’il est actuellement bien établi par Simon [Si2] qu’en présence d’un spectre purement ponctuel, le mouvement ne peut pas être balistique lim t→∞ mψ,2,I (t) t 2 = 0, (1.6) pour tout état initial ψ à support compact. Et [DeRJLS2] ont construit un exemple d’opérateur quasi-périodique ayant du spectre purement ponctuel et des fonctions propres exponentiellement localisées et pour lequel lim sup t→±∞ mψ,2,I (t) t 2−δ = ∞ pour tout δ > 0, pour une large classe de données initiales ψ à support compact. Ce résultat a été étendu à une classe plus large d’opérateurs quasi-périodiques dans [DBF] puis dans [GKT] ainsi qu’à des opérateurs à potentiel lacunaire. Ce qui signie que le moment peut croître de façon arbitraire et donc s’approcher du mouvement balistique malgré le fait que l’opérateur présente de localisation d’Anderson. La borne (1.6) donnée par Simon est donc optimale. Il existe également des exemples d’opérateurs avec localisation d’Anderson et un transport sous-balistique. C’est le cas du modèle des dimères : voir [DBG] pour la localisation d’Anderson et [JSS] pour l’existence de transport.
Les propriétés spectrales de la localisation dynamique
Nous procédons à une classication de critères de localisation dynamique et de propriétés spectrales des fonctions propres, évoquée dans le chapitre précédent. Pour ce faire, nous n’avons pas recours à un modèle spécique mais plutôt un opérateur H de Schrödinger agissant sur un espace de Hilbert H. Nous considérons principalement les cas particuliers de L 2 (R d ) ou ℓ 2 (R d ) mais notre analyse demeure la même dans un cadre plus général. L’extension aux graphes sera aussi prise en considération. 2.1 Localisation dynamique On considère un opérateur auto-adjoint H sur l’espace de Hilbert H = L2 (R d ). On écrit PE := χ{E}(H) pour le projecteur spectral de l’opérateur H sur une énergie E ∈ R. On note σc(H) le spectre continu de H. On dira que le spectre de l’opérateur H est purement ponctuel dans un intervalle I si et seulement si σc(H) ∩ I = ∅. Pour décrire la dynamique du système donné par H et pour σ > 0 et ζ ∈]0, 1], on introduit le moment (σ, ζ)-sous-exponentiel au temps t de l’évolution temporelle, initialement localisée en espace près de u ∈ Z d et localisée en énergie par une fonction X ∈ Bb(I), Mu(σ, ζ, X , t) := e σ 2 |Xu| ζ e −itHX (H)χu 2 2 . (2.1.1) On dénit sa moyenne temporelle par Mu(σ, ζ, X , T) := 1 T Z T 0 Mu(σ, ζ, X , t)dt. (2.1.2) 13 Chapitre 2. Présentation des travaux de thèse – Partie 1 Le critère de localisation dynamique se traduit par la possibilité de borner ces moments qui, en particulier, assurent la décroissance des noyaux de l’évolution temporelle. Dans le théorème qui suit, nous généralisons le résultat principal de [T] et nous établirons des propriétés équivalentes de la localisation dynamique. Nous traitons le cas des opérateurs aléatoires dans la section 2.5.
Relation entre les trois classes de propriétés
On se pose maintenant la question du lien entre ces propriétés de décroissance avec celles de localisation dynamique citées dans le Théorème 2.1.1. Nous commençons par noter que kχxPEχyk2 ≤ kχxPEk2 kχyPEk2 , 19 Chapitre 2. Présentation des travaux de thèse – Partie 1 de telle sorte que (2.2.13) implique (2.1.8). On pourrait donc se demander si une décroissance rapide de kχxPEχyk2 est en fait équivalente à celle de kχxPEk2 kχyPEk2 . Cette question a d’ailleurs été soulevée dans [DeRJLS2], où les auteurs ont prouvé l’équivalence dans le cas discet ℓ 2 (Z d ) et pour une multiplicité égale à un (tr PE = 1). Dans le même registre, les auteurs de [EGS] ont construit une base de HE possédant une propriété de type (SUDEC) dans la mesure où tr PE < ∞ et |hδy, PE δxi| ≤ Cǫe ǫ(|x|+|y|) e −σ|x−y| . Nous cherchons à résumer les relations entre les trois catégories de propriétés décrites respectivement dans le Théorème 2.1.1, le Théorème 2.2.1 ainsi que dans le Thoérème 2.2.2. Nous répondons en particulier à la question de [DeRJLS2] portant sur l’équivalence entre (DL) et (SULE) et le rôle joué par la multiplicité. Et nous rappelons que Del Rio et al. traitaient seulement le cas d’un spectre simple [DeRJLS2]. Rappelons que les critères (SULE)/(SUDEC) caractérisent une famille de vecteurs propres alors que la notion de localisation dynamique concerne des énergies. Pour plus de commodité, nous adoptons la dénition suivante. Dénition 2.3.1. On dit que l’opérateur H vérie la propriété (SUDEC)/(SULE) dans un intervalle I si le spectre de H dans I est purement ponctuel et vérie (SUDEC)/(SULE) pour l’ensemble E = σ(H) ∩ I. On considère la même dénition pour (SUDEC+)/(SULE+) dans
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