L’INNOVATION PAR L’USAGE

L’INNOVATION PAR L’USAGE.

L’innovation liée aux NTIC, qu’elle soit de nature technique, économique ou d’usage, est un thème qui croise toutes les ruptures et les continuités. Elles se concrétisent par de nouveaux modes d’interaction tels que : la multimodalité, le 3D, la RV, les clones, la reconnaissance, les agents. La prise en compte de l’interactivité dans les usages impose de différencier son la « méthode » du « résultat ». Qu’entend-on par « innovation » et par » usage » afin de s’appuyer sur des « intentions communes » et « références partagées ». Les NTIC font, chaque année, une percée significative et nourrissent des débats dans toutes les disciplines. Nous revisitons la théorie et les composantes de communication de Shannon dans le but d’enrichir ses bases et les élargir avec deux paramètres contextuels (intention et référence). Nous distinguons « conduite du dialogue » et « résultat obtenu » et nous croisons les critères, « efficacité » et « satisfaction » afin de sortir d’une évaluation jugée spécifique ou globale. Trois exemples d’applications viennent illustrer l’innovation par les usages, au travers des technologies émergentes, pour favoriser les innovations convergentes : les projets HOURIA, POGO, Mise en scène. L’innovation par l’usage, appliquée aux interactions multimodales, se trouve enfin schématisée et synthétisée dans un dessin final qui n’a pour objectif que de fixer les idées et servir de guide à un débat. Mots – clés Usage, innovation, ruptures, continuités, communication, efficacité, satisfaction, intermédiation, interactions multimodales, coopératives, sémantiques. Summary Innovation related to the NTIC, that it is of technical nature, economic or of use, is a topic which crosses all the breakdowns and continuities. They are concretized by new fashions of interaction such as : multimodality, 3D, RV, avatars, speech recognition, intelligent agents. Taking into account the interactivity in the uses forces to differentiates its «method » from «the result ». What understand one by «innovation » “and » use » is important in order to find a «common intentions »and «shared references ». The NTIC make, each year, a significant opening and provide debates in all disciplines. We revisit the theory and the components of communication from Shannon with an aim of enriching its bases and of widening them with two contextual parameters (intention and reference). We distinguish  » leading dialogue  » and  » result obtained  » and we cross the criteria,  » effectiveness  » and  » satisfaction  » in order to leave an evaluation considered to be specific or total. Three examples of applications come to illustrate the innovation by the uses, through emergent technologies, to support the convergent innovations such as : projects HOURIA, POGO, Put in scene. Innovation by the use, applied to the multimode interactions, is finally synthesized in a final drawing which aims is only to fix the ideas and to be used for a guide to debate. Keywords Use, innovation, breakdowns, continuities, communication, effectiveness, satisfaction, intermediation, interactions multimode, co-operative, semantic. . L’INNOVATION DE SERVICE TIREE PAR LES USAGES Qu’entend-on par innovation ? « Action d’inventer, de créer quelque chose de nouveau et aussi, introduire quelque chose de nouveau dans un domaine particulier » (Petit Larousse). En matière d’innovation, on distingue productions et processus. En d’autres termes on obtient les résultats de ses méthodes. Aujourd’hui, l’innovation se fait autant aux interfaces qu’au sein de chaque discipline. Hier, on pensait « technique » en parlant d’innovation, demain on parlera d’innovation « économique » et même « sociale ». Peut-on pour autant les associer et évoquer une « techno-éco-sociale ». En sommes-nous si loin ? Qu’en est-il de l’innovation dans les productions ? On ne réduit plus l’innovation à la technologie, elle vient de partout et de tout le monde. Elle est technique, ergonomique, économique, sociale. C’est pourquoi on distingue les innovations implémentées directement dans les produits (mécanismes et fonctions, matériels et logiciels) de celles qui l’accompagnent (présentations claires et précautions d’usages, interactions et ouvertures). Les premières sont des « montrables » et « démontrables » de ce qu’ils savent faire, les secondes, des catalyseurs et des facilitateurs pour intégrer les premiers dans les usages. Dans les productions classiques, les premières font état de problèmes préalables à résoudre (faisabilité technique, industrielle), les secondes, de modèles dérivés de diffusions (plan de marché et retour sur investissement, acceptabilité ergonomique et sociale).

L’exemple du GSM est frappant à cet égard. Les besoins et les usages sociaux ont précédé son industrialisation et présidé à sa diffusion. Il s’est concrétisé par un concentré de technologie dans ses terminaux. Les facteurs de différenciation et de personnalisation ont joué un rôle de plus en plus marqué dans leur diffusion. Qu’en est-il de l’innovation dans les processus ? Chaque discipline définit son périmètre de manière à l’isoler pour la rendre complémentaire des autres disciplines. Une combinaison de disciplines n’a pas pour objectif de développer un champ théorique propre mais plutôt de s’appuyer sur l’existant pour investir des champs d’application. L’ergonomie et l’IA sont deux exemples d’interfaces entre disciplines sources et applications cibles. Entre « savoir » et « faire », elles instaurent un « savoir-faire multidisciplinaire  » établissant des liens, tout en s’appuyant sur l’action et la concertation. Une des conditions favorable à l’innovation « techno-éco-sociale » est la fixation d’un objectif commun autour d’un projet de conception. Le processus à mettre en œuvre fait alors lui-même l’objet d’une négociation à travers laquelle on balaie tous les aspects du produit pour les positionner, les prioriser les uns par rapport aux autres et aboutir, autant que faire se peut, à une vision sinon commune, au moins partagée. L’innovation se trouve aussi alors dans les processus. L’ergonomie et l’IA y contribuent depuis longtemps. L’exemple de la Twingo montre à quel point la discussion autour de l’objet commun présenté à tous facilite la compréhension et la concertation des informations ainsi que l’efficacité des actions et des solutions.L’innovation est la somme des deux, processus et productions, ces derniers s’influencent de manière positive lorsqu’ils sont menés en parallèle. L’époque où les usages venaient sanctionner, a posteriori, les produits, semble en passe d’être révolue. S’il n’y a pas d’usages prévus, de profits attendus, il n’y a pas de produits non plus. Avant d’explorer cette nouvelle possibilité de l’innovation par l’usage, regardons ce qu’en entend par le mot usage ? Qu’entend-on par usage ? « Action, fait de se servir de quelque chose, utilisation, emploi et aussi, fonction, destination de quelque chose, emploi que l’on peut en faire ». (Petit Larousse) La première acception insiste sur l’utilisation effective, prioritaire, affichée (fonctions principales, attendues) ; la seconde, sur ce qu’on peut faire d’autre avec (fonctions secondaires, dérivées). En vertu du principe d’affordance (indications implicites qu’un objet peut offrir, intuitivement, de par sa propre forme ou par l’arrière plan culturel hérité sur son usage), le fait de porter attention à un objet doit (devrait), normalement, induire l’idée de son usage. Ce n’est pas toujours le cas, les objets se sont sophistiqués, imbriqués, distanciés avec le multimédia. Une représentation peut être fausse, partielle ou lacunaire au départ. L’homme a tendance à réduire l’inconnu (nouvel objet, information) au connu (idées, schémas actuels). Un nouvel usager s’appuiera d’abord sur ses connaissances et pratiques antérieures en y appliquant un raisonnement à la fois logique et analogique. L’utilisation préalable d’un mode d’emploi semble demeurer inutile, facultatif. S’il ne part jamais de zéro, en dépit d’utilisations fréquentes, il ne découvre jamais tout. La diversité des usagers croise aussi celle des usages. Un des problèmes majeurs (hommes et systèmes confondus) consiste à estimer le pré-requis chez l’interlocuteur pour s’adapter à lui et combler les manques parfois réciproques. Comment ? Une des solutions consiste à l’accompagner au cours de son interaction, dans son contexte, pour son objectif, par la construction de références partagées et d’intentions communes au lieu de lui imposer des détours par un cours ou exercice de rattrapage, qui peuvent s’avérer longs, ennuyeux et pas toujours efficaces. Cela est d’autant plus pertinent dans le cas des services dits « grand public » où l’usager peut être amené à interagir avec le système, une fois de temps en temps et n’a ni le temps ni l’envie de retenir la procédure d’interaction. Nécessité de distinguer entre usage, utilisation, utilité, fonctionnement. L’usage social « à quoi ça sert, à quoi cela peut me servir » est parfois confondu avec l’utilisation ergonomique « comment on s’en sert, est-ce que je sais un peu ou pas ». L’usage est proche aussi de l’efficacité économique « combien ça me coûte et combien çà va me rapporter ». La notion d’utilité recouvre en partie l’usage et l’efficacité. En définitive, pour l’usager, le fonctionnement technique (pourquoi ça marche et de quoi c’est fait) est ce qui l’intéresse le moins. Ce n’est pas qu’il n’y accorde aucune importance mais il n’acquiert que peu d’expertise technique en dépit de son utilisation. En revanche, on apprend mieux comment on se sert de quelque chose en sachant à quoi il sert. L’usage d’un service favorise l’instanciation d’une représentation. Il met à l’épreuve : présupposés, attentes, états mentaux, croyances et pré-requis et autorise, sans les épuiser : dérivations, braconnages, catachrèses, associations d’usages non prévus par le concepteur. L’anticipation d’usage est-elle possible, sans véritable interaction préalable ? En cas d’absence d’analogies ou de schémas, l’exploration de l’objet ou de la fonction procèdera par essais-erreurs. C’est le cas pour les jeunes enfants. Cela dit, si les usages sont bien factuels, donc observables, on peut se poser la question de leur prédiction en matière de nouveaux usages ? Entre les déclaratifs, obtenus par projections, et les usages réels, obtenus par observations, il y a un écart qui peut devenir important.

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L’innovation par l’usage.

L’usager lui-même n’est pas constant, il n’engagera sa réponse qu’une fois l’objet réel devant lui et utilisé dans une vraie situation. Pour diminuer cette réserve, ce déficit de fiabilité, l’anticipation des usages s’appuie sur les connaissances et expérimentations issues de croisements entre disciplines techniques, ergonomiques, économiques et sociologiques. Cette hybridation aboutit à des compromis plus ou moins rationnels ou rationalisés, au travers d’un panorama plus exhaustif des aspects concernés que ne pourrait le faire une seule discipline ni un panel de futurs usagers. disciplines questions observations prédictions technologie Pourquoi ça marche et de quoi c’est fait ?Enregistrement des interactions systèmes benchmarks Continuité/rupture prévisible Innovation des optimisations sociologie A quoi ca sert, et quoi cela peut me servir ? Entretiens, observations Enquêtes rapportées Continuité habitudes Innovation des usages ergonomie Comment on s’en sert ? Je sais un peu ou pas Tests en laboratoire Expérimentations terrain Continuité de représentation Innovation des assistances économie Combien ça coûte et combien çà me rapporte ? Analyse coût de revient Analyse niche marché Décision d’attendre Décision de se (ré)-équiper Tableau 1 : croisement entre disciplines et prédiction par anticipation Un nouvel usage ne se décrète pas, par simple anticipation. Pour fédérer les points de vue des concepteurs et des utilisateurs, des méthodes sont pratiquées au sein des projets telles que, pour n’en citer qu’une, la « méthode des scénarios » basée sur l’observation in situ pour modéliser l’activité et la traduire dans un langage commun aux ergonomes et aux concepteurs (par exemple Use Case, UML, systèmes de notations : IBIS, PHI, DRL, QOC. Lacaze 2002). Elles permettent à différents points de vues, complémentaires, antagonistes, concurrentes, d’aboutir à une définition, une expression, une formalisation parfois commune dans un cahier des charges des spécifications du prototype. Après ces deux approches sur l’innovation et sur l’usage, il paraît intéressant de regarder à présent les éléments qui permettent de les croiser. L’innovation par l’usage ? « L’innovation par l’usage » est un renversement de point de vue consistant, partant des usages observés, dysfonctionnements repérés, attentes rapportées dans une situation d’activité réelle, de faire utiliser à ces mêmes usagers une simulation d’un futur objet dans leur futur contexte probable d’activité. Il ne s’agit pas de construire un prototype de faisabilité technique ni même fonctionnelle mais de se rapprocher du prototype du service et d’usage. Des techniques de simulation, coté système (informatique multimédia) sont couplées avec des méthodes de simulation, coté humain (Magicien d’Oz) pour satisfaire aux critères de vraisemblance ou naturel de l’interaction. Dans certains cas, un assemblage, matériel et logiciel, répond de manière « ad hoc » aux besoins de la nouvelle situation d’activité (recherche, partage, modification, création d’informations) et rapproche l’usage des interactions multimodales, plus naturelles chez l’homme, en vue d’une meilleure adéquation (besoins des personnes, médias disponibles, structurations des serveurs). Les interactions et les fonctions nouvelles sont simulées à travers des objets virtuels, avant d’être utilisés dans des organisations réelles. Sur la base de la réalité, on utilise la réalité augmentée et la réalité virtuelle. La simulation la plus complète possible (réaliste) est pertinente pour contrôler les risques face aux besoins et attentes des acheteurs et en mesurer nombre de conséquences néfastes pour les usages ou les usagers.

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