L’influence des ambassadeurs permet aux marques de recruter de nouveaux clients
. Contexte : la mise au travail des consommateurs
Les consommateurs : co-producteurs de leurs propres achats Quel est le point commun entre trier ses ordures, monter un meuble, enregistrer ses achats à une caisse automatique ou encore faire un virement soi-même sur Internet ? Dans tous ces cas, le consommateur est coproducteur de valeur. Il est mis à contribution par les entreprises dans de nombreux domaines, et à différentes étapes de la production. Ainsi le consommateur est-il plus actif, responsable et expert. Le consommateur est parfois transformé en quasi-employé : « il produit de la valeur pour l’entreprise et remplace partiellement le travail que faisaient des professionnels »41. Marie-Anne Dujarier décrit cinq formes principales d’externalisation des tâches : – le travail d’ajustement marchand : l’offre et la demande s’ajustent et se déplacent progressivement vers le consommateur – la finition du produit. Cette stratégie fait le succès d’Ikea : les clients achètent des meubles en kit, doivent ensuite les monter eux-même chez eux, ce qui représente parfois plusieurs heures de travail – la prestation sans relation : cette stratégie est largement utilisée dans les banques, les bureaux de postes, les transports ou même les agences de voyage. Il revient aux consommateurs de fabriquer ou faire livrer un bien ou un service en manipulant un automate. Par exemple, il est possible de déposer un chèque directement via un automate, sans passer par un agent. La prestation de service est réduite alors que le prix n’a pas baissé – la réparation des pannes : le principe est de faire réaliser les tâches de réparation par le consommateur, grâce à des instructions en ligne ou à des téléopérateurs. C’est souvent le cas dans le milieu de la téléphonie mobile 41 M-A. Dujarier, Le travail du consommateur, éditions La découverte, 2014. Co-créateurs Les consommateurs sont donc habitués depuis quelques dizaines d’années à coproduire pour optimiser leur propre processus d’achat. Avec l’arrivée du digital, nous allons voir comment les entreprises mettent les consommateurs au travail en ligne, là où ont de plus en plus lieu les achats de biens et services, et ce, dès le processus de production. Aujourd’hui par exemple, les consommateurs sont de plus en plus impliqués dans la conception des produits et sont fréquemment invités à donner leur avis, partager leurs idées originales ou même participer à une publicité, et ce gratuitement. Cela s’appelle le crowdsourcing. Outre le fait que c’est une main d’œuvre gratuite, l’avantage de faire participer les consommateurs est de mieux les satisfaire, étant donné qu’ils participent à la conception du produit ou du service. Ils seront également plus à même de recommander un produit auquel ils auront participé. Cette démarche contribue aussi à établir des rapports plus horizontaux avec les consommateurs. Prenons l’exemple de la marque Lego qui est une parfaite illustration de crowdsourcing. En 2013, la marque a lancé sa plateforme collaborative Lego Ideas42 pour ses consommateurs. Chaque personne souhaitant voir un projet se développer en Lego peut soumettre son idée sur le site. Les internautes ont ensuite la possibilité de voter pour les constructions et figurines qu’ils préfèrent (et qu’ils sont donc susceptibles d’acheter). Lorsqu’un projet comptabilise dix mille votes, il est retenu par l’entreprise et mis en vente. Le constructeur de la boîte reçoit 1 % de l’argent gagné par les ventes du produit. C’est de cette façon que sont nés les Lego « Retour vers le Futur », « Ghostbuster » ou encore le « Yellow Submarine » ; trois réussites marketing.
Les ambassadeurs : un relai de communication plus crédible
Un consommateur fidèle à une marque sera plus à même de recommander cette marque à ses amis, en partageant un contenu sur les réseaux sociaux, en likant une publication de cette dernière ou alors en la taguant dans ses publications, il est question de bouche à oreille numérique. Les spécialistes parlent de « pollinisation du web », ce qui consiste à faire du consommateur un instrument de publicité discrète. Certains chercheurs parlent aussi de digital labor (travail numérique) et le définissent comme « un travail éminemment cognitif qui se manifeste à travers une activité informelle, capturée et appropriée dans un contexte marchand en s’appuyant sur des tâches médiatisées par des dispositifs numériques »46. Les internautes créent de la valeur tous les jours, sans même s’en apercevoir et enrichissent les géants du web. Mais la prescription n’est pas la seule forme de travail en ligne, nous allons voir que les entreprises mettent à contribution les consommateurs de multiples façons, nous parlons dans ces cas-là de travail collaboratif47 . Pour fonctionner, une entreprise a besoin de recruter des nouveaux clients dans un premier temps, et de les fidéliser dans un deuxième temps afin qu’ils continuent à utiliser les biens ou services et diffusent une attitude favorable envers la marque. Il est important de bien faire la différence entre un « influenceur » et un « ambassadeur » tels qu’ils sont utilisés par les professionnels. Un influenceur est quelqu’un qui a une très large audience sur les réseaux sociaux et qui gagne de l’argent grâce à son influence. Un influenceur va pouvoir faire la promotion de plusieurs marques et n’est pas un ambassadeur fan d’une seule marque. Par exemple, la bloggeuse Anne Lataillade du blog Papilles et pupilles48 partage des recettes et des expériences de voyage. Cette bloggeuse est une influenceuse car elle a une très large audience : sur Facebook plus de deux cent mille personnes la suivent. Cela en fait donc une personne très influente pour les marques. D’ailleurs, on peut voir qu’elle fait la promotion de différentes marques : par exemple elle a posté le billet « Poulpe à la Skordalia – Recette spéciale 140 ans de NEFF » (NEFF est une marque d’électroménager) ou un autre billet sur le « Saumon laqué aux saveurs asiatiques à la sauce Tabasco®rouge ». Il est fort probable qu’elle ait été rémunérée pour faire la promotion de ces produits. La rémunération peut se faire soit en cadeaux soit en argent. Les influenceurs sont depuis quelques années au cœur de la stratégie des marques tentent de les utiliser pour communiquer de façon discrète. Mais les consommateurs sont au fait que désormais les influenceurs sont rémunérés et cela remet clairement en cause leur impartialité et sincérité. Contrairement à l’influenceur, l’ambassadeur de marque n’a pas autant d’audience. Il est fidèle souvent à une seule marque, en fait la promotion car il est tout simplement passionné et n’est pas rémunéré.