L’importance du riz n’est plus à démontrer puisque cette céréale constitue la principale alimentation pour une majeure partie de la population mondiale en général et pour Madagascar en particulier. (1, 2, 3, 4) Le riz est la deuxième céréale après le maïs en termes de surface cultivée (153 Mha en 2004) et de quantité produite (608 Mt en 2004), avec un rendement moyen de 4,0 t/ha qui marque de très importantes disparités (5, 6) comme à Madagascar où ce rendement stagne à 2t/ha depuis des décennies (7, 8, 9, 10). C’est, en revanche, la première céréale pour l’alimentation humaine. Elle représente la base de l’alimentation de plus de 2,5 milliards de personnes dans les pays en voie de développement avec des consommations annuelles très importantes. La consommation du riz atteint 40 à 60 kg/hab/an en Afrique et en Amérique Latine, et 100 kg en Asie, avec un record pour la Birmanie avec plus de 200 kg (11). La consommation à Madagascar est nettement supérieure à la moyenne de l’Asie car elle atteint, en l’an 2000, 140 kg/hab/an selon la FAO(en 2004) .
L’Asie domine l’économie du riz avec 90 % des surfaces et de la production qui y sont concentrées, l’Amérique Latine et l’Afrique se partageant l’essentiel des 10 % restants .
Le riz est avant tout une production d’autoconsommation. Les grands pays producteurs (Inde, Chine, Indonésie, Bangladesh, Thaïlande, Vietnam) sont également les principaux consommateurs. Ils se suffisent désormais à eux-mêmes, aussi une part assez minime de la production est-elle échangée sur le marché mondial (6 % de la production), essentiellement du fait de quelques pays gros exportateurs (Vietnam, Thaïlande, Etats-Unis, Inde, Pakistan). Les exportations concernent en particulier les riz aromatiques basmati et thaïlandais (10 % du total) (5). A Madagascar, l’autoconsommation en riz du ménage riziculteur s’élève en moyenne à 54.3% de la production et la vente 25, 8%.
HISTORIQUE
HISTORIQUE ET GENESE DE LA RIZICULTURE
Le riz est une des plus anciennes plantes céréalières cultivées, plantes à paille comme le blé, le maïs ou le sorgho. Le riz d’origine asiatique, Oryza sativa a pour berceau les contreforts de l’Himalaya et la Chine. De l’Inde, le riz s’étendit à toute la Chine, à la Corée, au Japon puis au proche Orient – la Perse et les pays méditerranéens. Le riz Oryza sativa a été domestiqué il y a près de 9000 ans en Asie et 4000 ans en Afrique avec l’espèce Oryza glaberrima qui provient de l’Ouest Africain (Delta du fleuve Niger au Mali) .
Parmi une vingtaine d’espèces de riz existant au sein du genre Oryza, les deux qui sont mondialement répandues sont cultivées. Deux types d’ Oryza sativa sont distingués : la sousespèce japonica , au feuillage vert foncé et à la dernière feuille retombante, donne un riz collant à la cuisson et des grains arrondis tandis que les plants de la sous-espèce indica, ont une dernière feuille plus dressée et donnent un riz sec à la cuisson et des grains allongés. Oryza glaberrima n’est pas cultivé en dehors de l’Afrique.
La culture d’Oryza sativa est importante en Extrême – Orient, au Sud – Est de l’Asie, où elle a pris naissance. Plus précisément, elle a été domestiquée à une époque très ancienne, vraisemblablement dans le Sud de l’Inde, peut être même en Indonésie, et autour des grands lacs du Cambodge. De là, la culture du riz se propage très rapidement vers l’Asie, puis se dissémina avec des rythmes forts différents presque dans toutes les régions du Continent Asiatique. La riziculture est introduite en Espagne par les Maures au VIIIe siècle, puis en Italie au XVe siècle. En France, les premières tentatives de cultures du riz sont réalisées en Camargue et dans les marais de l’Ouest à la fin du XVIe s. (11) Indépendamment de la diffusion asiatique puis européenne d’O.sativa, l’espèce O. glaberrima a été domestiquée très tôt en Afrique de l’Ouest. Les traces archéologiques de la domestication trouvées autour du Lac Tchad remontent à 1800 av J.-C (19). Portères (1950) distingue un centre de domestication primaire dans le Delta Central du Niger (au Mali), et un centre secondaire en Sénégambie (20). A partir du XVIe siècle, les variétés asiatiques d’O.sativa amenées par les Portugais se sont ajoutées aux variétés locales africaines. Ce n’est que tardivement que la culture du riz apparaît à Madagascar, à la suite de la conquête du monde méditerranéen et du pourtour Africain de l’Océan Indien. A Madagascar, c’est l’espèce Oryza sativa qui est utilisée, et de nombreuses variétés sont cultivées ou en collection dans les stations de recherche. La terminologie reflète l’histoire du riz. Le mot désignant le riz est initié dans une langue orientale, le chinois ou le sanskrit. En passant par le grec, il est devenu oruza. Le latin le transforme en oryza, l’arabe en eruz, puis l’espagnol et le portugais en arroz et l’italien en riso. Au XIIIe siècle, il prend la forme de ris en français, avant de se fixer en riz. En Afrique de l’Ouest, là où préexistait une riziculture indigène, le riz est souvent désigné à partir d’une racine mandingue Malo/Maro ; ailleurs, les racines arabes ou portugaises eruz / arroz prédominent .
HISTORIQUE DU SRI
En 1984, une nouvelle technique agricole est mise au point par le Père de Laulanié et son équipe. Elle prendra plus tard le nom de SRI, abréviation de Système de Riziculture Intensive. Les pays du Sud-est asiatique l’adoptent. Leur production augmente considérablement. A Madagascar, le nouveau système a du mal à s’imposer. Il faut l’obstination des membres de l’ATS, héritiers de l’œuvre de De Laulanié pour que les premiers résultats apparaissent. Aujourd’hui, la production des adeptes du système atteint jusque dans les 20t/ha, un exploit quand on sait que la moyenne nationale de production rizicole ne dépasse pas les 2,5t/ha .
a- Découverte du SRI et mise au point du fondement
Le SRI a été découvert par hasard au cours d’une sécheresse en 1983-1984. Le père Henri de Laulanié formait des jeunes agriculteurs à Antsirabe et des contraintes de temps l’ont obligé à repiquer des plants de riz au bout de 15 jours au lieu de 21. A la multiplication des tiges, il a vu qu’il y avait 2 à 3 fois plus de rendement qu’avant. Il a fallu des années pour mettre au point la technique. Une publication intitulée « Modèle de tallage de Katayama », du nom d’un chercheur japonais, en a apporté l’explication scientifique. L’association « Tefy Saina », créée en 1990, est la détentrice de cette trouvaille. Le père de Laulanié a publié le fruit de ses recherches en 1992 sur la technique du repiquage des plants très jeunes, mais aussi la culture à contresaison, le planage des rizières, la fumure naturelle, la conduite d’eau. Aujourd’hui, 32 nations ont adopté ce principe et Madagascar se retrouve dans la situation d’importer 200.000 tonnes de riz SRI de l’étranger !
b- Evolution du SRA au SRI
Depuis son arrivée à Madagascar au début des années 1960, le père Henri de Laulanié a travaillé étroitement avec les paysans malgaches. Il leur a d’abord enseigné la pratique du système de riziculture améliorée ou SRA. Cette méthode a été vulgarisée dans les années 1960. Elle consiste à mettre en terre des plants de riz âgés de 30 jours et à leur assurer jusqu’à la moisson une rentrée d’eau suffisante. Mais le rendement moyen est de 2t/ha. C’est à partir de cette pratique qu’un nouveau système à plus haut rendement a été découvert.
Les constatations et la recherche qui s’ensuivaient ont débuté en 1983 quand le pays était menacé par la sécheresse. Le père de Laulanié a conseillé alors à ses étudiants du centre de formation d’Antsirabe de repiquer des plants de riz âgés seulement de 15 jours, croyant que lorsque la pluie viendrait, les plants auraient atteint la maturité voulue. Personne n’a évidemment pas cru à la réussite et les résultats étaient inattendus. Chaque plant mis en terre a donné 20 à 30 épis de paddy alors qu’avec le système habituel, on n’obtient que 10 épis par plant. Cette découverte, accidentelle comme celle de la pénicilline, n’est pas immédiatement reconnue. Loin de s’en formaliser, le Père poursuit ses travaux et incite ses disciples à cultiver des plants encore plus jeunes : âgés de 12, de 10, voire de 8 jours.
c- Poursuite des expérimentations pour une assise technique du SRI
Les essais, les expériences et les réalisations en la matière concordent en ce qui concerne les possibilités de rendements élevés pour la riziculture malgache. Ces rendements atteignent 2 à 6 fois plus que les rendements traditionnels actuels du pays. En 1988, le Père De Laulanié tente d’avancer une explication scientifique à sa découverte. Il se base sur le modèle de tallage du riz avancé par un chercheur japonais du nom de Katayama. Les scientifiques et les pouvoirs publics commencent alors à s’intéresser au nouveau système. Des expériences probantes sont menées dans divers endroits de la Grande Ile.
Si avec le système traditionnel de la production rizicole, les paysans sont habitués aux 2 t/ha, avec le SRI ils dépassent largement ce rendement. Une graine de semence donne 15.000 grains de paddy, soit 4,5 kilogrammes de riz sur 4 m². Grâce à cette productivité très élevée, les paysans sont primés par le Ministère de l’Agriculture. Leurs exploits ont été rapportés en Chine lors de la conférence internationale et sont publiés dans le monde entier grâce aux informations transmises par Tefy Saina et CIIFAD (Cornell University). Pour diffuser la méthode du SRI, l’association Tefy Saina décide de créer des villages-écoles pilotes dans diverses régions de Madagascar. Il s’agit d’y mettre en œuvre tous les projets de développement initiés par l’association. La vulgarisation du SRI en est un élément essentiel.
INTRODUCTION |