Limitation des courants d’appel dans un convertisseur AC-DC
Gestion des courants d’appel
Dans cette partie, les solutions existantes de limitation des courants d’appel dans un convertisseur AC-DC seront étudiées pour répondre à la norme décrite dans le chapitre 1.3.3. Une analyse exhaustive de la littérature, fondée sur de nombreux articles, des brevets et des notes d’application, va permettre de définir les avantages et les inconvénients des solutions actuellement employées [47]–[69]. 2.2.1. Analyse des solutions existantes De manière générale, il est possible de positionner le limiteur de courant du côté alternatif, soit sur la phase (cf. Figure 2-1 a)), soit sur le neutre (cf. Figure 2-1 b)), ou alors du côté continu, soit sur le bus DC (cf. Figure 2-1 c)), soit sur le GND (cf. Figure 2-1 d)). La configuration d) n’est actuellement pas utilisée pour des raisons de référence de l’électronique de commande. À noter que ces solutions peuvent être implémentées dans des convertisseurs AC-DC avec et sans pont redresseur.
Solution passive à base d’une résistance de puissance
La première solution consiste à insérer une résistance de puissance en série sur le chemin de la surintensité. Ainsi, l’intensité du courant est limitée par la valeur ohmique de la résistance. L’équation (2-1) définit la valeur minimale de la résistance en fonction du courant maximal que l’on souhaite obtenir lors des phases transitoires (cf. Figure 2-2). Durant ces phases, l’impédance d’entrée est par hypothèse très faible La Figure 2-2 montre que plus la valeur de la résistance est faible, plus la valeur maximale du courant d’appel à limiter est importante. La valeur de la résistance doit en particulier être dimensionnée pour minimiser les pertes par effet Joule en régime nominal (cf. Équation (2-2) et Figure 2-3). Pour limiter l’intensité du courant à 39,19 A (valeur définie dans le Chapitre 1), une résistance de 8,3 doit être choisie. Cette solution, bien que limitée en termes de rendement, reste néanmoins extrêmement triviale, très fiable et à faible coût. C’est la raison pour laquelle elle est utilisée pour des applications de faible puissance (e.g., outils portatifs, chargeurs de téléphone mobile, …). Pertes = R MIN.IIN_RMS 2 (2-2) – 𝐼𝐼𝑁_𝑅𝑀𝑆 : courant efficace du réseau électrique
Solution passive à base de thermistance
Pour adresser des applications de plus forte puissance, la résistance est remplacée par une thermistance afin de diminuer les pertes énergétiques nominales. On distingue deux types de thermistance : celle à coefficient de température négatif (CTN) et celle à coefficient de température positif (CTP). Dans le premier cas, la thermistance possède une forte résistance à température ambiante (25 °C). Elle s’échauffe quand un courant la traverse et sa valeur ohmique diminue. Dans le second cas, c’est l’inverse. La thermistance possède une faible résistance à température ambiante. Elle s’échauffe quand un courant la traverse et sa valeur ohmique augmente. Même si la thermistance de type CTN est beaucoup plus utilisée pour la gestion des courants d’appel, la thermistance de type CTP est employée dans des applications spécifiques (e.g., déconnexion d’un enroulement du moteur d’un compresseur de réfrigérateur une fois le moteur démarré). Le dimensionnement d’une thermistance CTN s’effectue de manière analogue à la solution présentée précédemment. Toutefois, il est important de prendre en compte l’évolution de la température lors du fonctionnement en régime permanent. La relation de Steinhart-Hart est alors utilisée pour le dimensionnement (cf. Équation (2-3) [70]). Dans cette équation, le paramètre β est un coefficient de température disponible dans la notice du fabriquant de la thermistance. Il est important de noter que ce paramètre est constant uniquement dans des plages de température (e.g., dans les plages 25-50 °C ou 25-85 °C). Plus ce coefficient est élevé, meilleure sera la sensibilité en température. La Figure 2-4 montre l’évolution de la valeur ohmique de la thermistance en fonction de la température.Cette méthode, d’apparence simple, présente néanmoins des inconvénients. L’efficacité de la limitation du courant d’appel dépend fortement de la température ambiante. À des températures très basses (inférieures à zéro degré Celsius), des problèmes de démarrage peuvent se produire car la résistance est trop importante pour atteindre le courant nominal de l’application. De plus, la limitation du courant est insuffisante pour des températures excessivement élevées du fait de la diminution de la valeur ohmique de la thermistance. Un autre inconvénient est lié aux éventuelles microcoupures du réseau électrique. Par exemple, pour une coupure de l’ordre de 100 ms, le condensateur électrochimique se décharge. Lorsque le réseau est rétabli, la thermistance est encore chaude. La limitation de courant n’est alors plus efficace. Enfin, la thermistance de type CTN provoque des pertes par effet Joule (de l’ordre de 1% de la puissance de l’appareil). À l’image de la solution précédente, les limiteurs à base de thermistance sont utilisés dans des applications de faible puissance, i.e. jusqu’à 100 W (e.g., chargeurs d’ordinateurs portables, …).
Solution passive utilisant une résistance associée à un interrupteur électromécanique
D’autres solutions existent pour des puissances plus importantes (i.e., supérieures à 500 W). En particulier, un relais électromécanique est placé en parallèle de la résistance de puissance. Lors de la connexion de l’appareil au réseau AC, la résistance joue le rôle de limiteur de courant. Le relais électromécanique est quant à lui commandé à la fin de la charge du condensateur DC (noté C1 dans la Figure 2-1). Dans ce cas, les pertes en conduction sont extrêmement réduites par rapport à la première solution car la résistance de contact du relais (i.e., de l’ordre de 50 mΩ) est beaucoup plus faible que la résistance de puissance (i.e., en général 200 fois plus petite). Ces pertes sont également réduites par rapport à la seconde solution (i.e., 5 fois plus petites). Pour vérifier l’état de charge du condensateur DC, on distingue deux méthodes : – Avec un retard à la commande du relais électromécanique. Après un calcul du temps de charge du condensateur DC, la commande est retardée par le biais d’un microcontrôleur avec un délai de l’ordre d’une centaine de millisecondes. Cependant, le vieillissement du condensateur DC peut influer sur le temps de charge de ce dernier. Cette solution est donc à proscrire. – Avec une comparaison en temps réel de la tension de sortie et de son niveau de tension en charge. Le relais électromécanique est dans ce cas commandé immédiatement une fois le condensateur chargé. À 80% de charge du condensateur, la régulation en mode PFC peut démarrer. L’utilisation en forte puissance se justifie par le fait d’une diminution des pertes en régime permanent. Toutefois, cette solution présente un nombre non négligeable d’inconvénients. Cette solution peut être problématique lors de fortes contraintes d’intégration (i.e., compacité et densité volumique). Par ailleurs, l’utilisation de relais peut dégrader la fiabilité du système, notamment pour les raisons suivantes : – Le relais est sensible aux vibrations et peut entraîner un risque d’explosion dans un environnement inflammable. – Le relais peut rester « collé » en cas d’interruption brève du réseau AC. En effet, les nombreuses commutations en charge vont diminuer la qualité du contact. Enfin, même si les pertes en régime permanent sont considérablement diminuées par rapport aux solutions précédentes, leur niveau reste néanmoins non négligeable. En particulier, il persiste toujours des pertes dues à la consommation de la bobine du relais (e.g., 500 mW pour un relais de calibre 16 A RMS) et des pertes par conduction (e.g., 12,8 W pour un relais de calibre 16 A RMS ayant une résistance de contact de 50 m). De plus, la résistance de contact se dégrade progressivement avec le nombre de cycles effectués, ce qui augmente par conséquent les pertes en régime permanent. À noter qu’un second relais peut être ajouté en série pour déconnecter le bus DC et ainsi, réduire les pertes en mode veille (cf. Figure 2-5).