L’identification des incitations au court-termisme pour les actionnaires
Certains actionnaires, comme les hedge funds, sont nettement plus enclins que les autres investisseurs à adopter des stratégies actionnariales de court terme. Ces incitations découlent de leur mode de rémunération (a) mais découlent aussi de questions structurelles propres à l’industrie des hedge funds (b), ces questions venant exclure l’utilisation de ces stratégies par les autres acteurs (c). fees155. Il faut relever un aspect psychologique et monétaire à la fois. Etant donné qu’ils représentent un risque systémique certain, les banques d’investissement imposent des séries de règles et de limitations pour contrôler les risques. Dès lors, les opérateurs de marchés ne seront pas en mesure de suivre leurs propres stratégies, ce qui peut inciter à la création d’un fonds pour avoir cette liberté. Une fois le fonds créé, une première rémunération sera le management fee qui est un prélèvement effectué sur les actifs gérés par le fonds. Cela servira dans un premier temps à couvrir les frais de fonctionnement du fonds, cependant, si ce dernier grossit, cela pourra s’avérer être lucratif. Il est généralement de l’ordre de 2% de la valeur des actifs sous gestion. L’existence d’un prélèvement sur le montant des actifs sous gestion peut être une incitation au court-termisme. Le gérant du fonds est poussé à adopter des stratégies de court-terme, permettant de maximiser les plus-values en un minimum de temps, pour que son fonds gagne en visibilité et croisse le plus rapidement possible. Il est aussi intéressant de relever que le hedge funds prélèvera généralement des frais de souscription à hauteur de 5% du montant investi.
La très grande majorité des hedge funds pratiquent des stratégies actionnariales de court terme, notamment dans le cadre des opérations de fusions-acquisitions157. Le facteur principal qui favorise et encourage le court terme tient dans le concept des performance fees. Il nous faut tout d’abord préciser que ces frais de gestion sont fixés par contrats entre le gérant et les investisseurs. Le législateur et le régulateur n’auront donc aucun moyen de les influencer ou de les réglementer. Ils ont pour finalité de rémunérer le gérant en fonction de sa performance et sont généralement de l’ordre de 20%, quelle que soit la taille du fonds ainsi que son secteur d’activité et sont payés annuellement158. Cela représente 20% de l’augmentation de la valeur nette de la part détenue par l’investisseur pendant la période sur laquelle la performance est déterminée. Cette clause est généralement assortie d’une deuxième venant stipuler qu’une telle rémunération sur la performance ne sera mise en œuvre que si cette même performance dépasse un certain pourcentage, généralement 4 à 5%159. La rémunération ne sera donc calculée, puis versée, que si le fonds produit des rendements minimaux. Les gérants seront d’ailleurs encore plus intéressés à maximiser la performance de court terme car ils détiendront généralement une partie du fonds dans lequel ils auront responsable des pertes qu’il aura effectuées. Il s’agit de l’aléa moral que nous avons déjà souligné précédemment161.
Dans le cas des hedge funds, le changement majeur de la structure des incitations passe essentiellement par la réforme des contrats de rémunération des gérants de cette industrie. Les commissions des gérants de hedge funds qui ont une double nature (management fees et performance fees) ont la particularité d’être asymétrique. Les commissions de performance sont positives en cas de gains, mais nulles en cas de pertes. Une telle asymétrie dans les rémunérations des gérants constitue une incitation à la prise de risque excessive qui ne va pas dans le sens des intérêts des investisseurs. Autrement dit, il n’y a aucun partage des risques entre le gérant et les investisseurs. En aucun cas, l’auto-investissement largement pratiqué par l’ensemble de gérants des hedge funds ne sauraient être suffisant pour rééquilibre ce partage des risques ». 41. L’explication de ce système de rémunération est simple, il est dans l’intérêt des investisseurs d’avoir un système de rémunération venant inciter les gérants du fond à avoir les meilleures performances possibles pour maximiser leurs retours sur investissement. La mise en place d’un tel système de rémunération n’est pas seulement une incitation à l’adoption de stratégies actionnariales de court terme, il laisse surtout peu le choix aux gérants de gérer autrement. S’il souhaite être rémunéré, tout du moins rémunéré au niveau d’attente propre à cette profession, le gérant du fonds devra dégager, sur une année, la performance la plus élevée possible. Dès lors, les gérants ont plus intérêt à effectuer des arbitrages purement .