Libéralisation financière, aveuglement au désastre et spéculation au cœur des paniques bancaire

Libéralisation financière, aveuglement au désastre et spéculation au cœur
des paniques bancaire

 L’aveuglement au désastre

Ce concept (disaster myopia) défini par Guttentag et Herring (1986) est une tendance systématique à la sous-estimation des probabilités subjectives de chocs (notamment chocs de crédit résultant d’un défaut d’un ou de plusieurs emprunteurs) ou à la surestimation des perspectives de croissance économique. Ces probabilités subjectives désignent des estimations et des jugements qui guident les individus sans référence obligée à la cohérence logique et relèvent de la probabilité psychologique.

Elles s’opposent aux probabilités a priori (qui peuvent être déterminées à l’avance comme dans le cas de l’obtention du côté face d’une pièce de monnaie non truquée) ou aux probabilités empiriques déterminée à l’aide de l’observation et de l’expérimentation. Libéralisation financière, aveuglement au désastre et spéculation au cœur des paniques bancaires 49 3.1.1 Le concept défini par Guttentag et Herring (1986) Ces auteurs ont utilisé des notions de psychologie comportementale et cognitive (Charreaux, 2004). Plusieurs hypothèses « heuristiques » c’est à dire qui ont pour objet la découverte des faits en psychologie comportementale et cognitive justifient la myopie au désastre : – une heuristique de mémoire (availability heuristic) : la myopie au désastre est fonction du temps écoulé depuis le dernier choc. Si le souvenir du dernier choc est lointain, alors la croyance dans la survenance d’un tel événement sera faible. La probabilité subjective d’un choc devient alors une fonction décroissante de la période de temps écoulée depuis le dernier choc. Guttentag et Herring citent à titre d’exemple dans leur article « credit rationing and financial disorder » (p. 1363), le cas d’un automobiliste qui vient d’être témoin d’un accident et qui se met immédiatement à conduire plus prudemment; sa vigilance décroît ensuite avec le temps.

Dans le cas d’une crise financière suivie de faillites et de disparitions d’établissements de crédit insolvables, la reprise qui peut s’ensuivre est susceptible de donner naissance à de nouveaux comportements imprudents : « Cependant, si la reprise s’effectue avec prudence en raison du souvenir toujours manifeste chez les agents des graves conséquences du sur-crédit, la nouvelle phase d’essor estompe progressivement la mémoire de ce désastre (disaster myopia, soit l’aveuglement au désastre ), d’où l’idée que la stabilité est aussi déstabilisante : les agents ne retiennent pas les leçons du passé et renouvellent les mêmes erreurs », (Gilles, 2004, p 72).

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Les facteurs amplificateurs

Ce phénomène de myopie au désastre est aussi favorisé par : – le degré de concurrence au sein de la communauté bancaire. 51 En effet, une concurrence exacerbée peut pousser les établissements financiers à offrir des taux bas aux emprunteurs présentant un risque et cela, afin de conserver ou gagner des parts de marché. Les banques non soumises à la myopie au désastre sont alors amenées à pratiquer des taux bas car elles sont en concurrence avec d’autres établissements opérant de telles pratiques. La prime de risque, qui a pour fonction la rémunération du coût du risque de défaillance de l’emprunteur, est alors fortement réduite et peut devenir quasiment nulle : « dans un environnement fortement concurrentiel, dès lors que les prêteurs sont en deçà de leur seuil heuristique, c’est à dire qu’ils perdent toute sensibilité à la probabilité de défaut, la dynamique de surendettement peut s’enclencher.

L’offre de crédit agrégé découle de la distribution de ces seuils heuristiques dans la communauté bancaire. La dynamique de surendettement se caractérise par une accélération de l’offre de crédit, un tassement (pouvant aller jusqu’à la quasi disparition ) des primes de risque et une détérioration non perçue par les créanciers, de la qualité de leurs créances. La crise de crédit qui en résulte est généralement brutale et le renversement des comportements des banques qu’elle suscite porteur de risque systémique » (Scialom, 1999 p 65).

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