Lésion médullaire traumatique

Lésion médullaire traumatique

Le système nerveux central 

Le système nerveux central (SNC) se divise en deux structures : l’encéphale localisé dans la boite crânienne et la moelle spinale confinée au sein du canal vertébral de la colonne vertébrale. La moelle spinale débute à la base du tronc cérébral et se termine au niveau des lombaires. Ces deux structures sont en communication directe via les neurones et leurs axones mais aussi grâce au réseau vasculaire, lymphatique et au liquide cérébrospinal (LCS). La considération et la compréhension de la communication entre l’encéphale et la moelle spinale, est essentielle afin de pouvoir développer des thérapies efficaces pour les pathologies du SNC.

La moelle spinale

Anatomie et fonction La moelle spinale est un tissu fragile essentiel à la communication bidirectionnelle entre l’encéphale et les organes périphériques. C’est pour cela qu’elle se situe au centre de la colonne vertébrale, qui la protège des chocs et des contraintes mécaniques. La colonne vertébrale est une structure osseuse constituée d’une succession de 33 vertèbres divisées en segments vertébraux : les vertèbres cervicales (C1-C7), thoraciques (T1-T12), lombaires (L1-L5), sacrales (S1-S5) et coccygiennes (1-4) (Figure 1) (Absinta et al., 2017). L’ensemble de ces vertèbres est attaché et articulé par des systèmes interdépendants composés de disques intervertébraux, de joints articulés et de ligaments contrôlés par l’activation musculaire (Miele et al., 2012). Cette configuration ostéoligamenteuse induit une stabilité et une mobilité permettant des mouvements de flexion et de rotation du tronc. La croissance différentielle lors du développement embryonnaire entre la colonne vertébrale et la moelle spinale induit un décalage entre les étages vertébraux et médullaires (Figure 2). On compte seulement 31 segments médullaires, 8 cervicales, 12 thoraciques, 5 lombaires et 1 coccygien. Le décalage commence au niveau du segment médullaire C8. A ce niveau, les nerfs spinaux sortent du canal vertébral par un orifice nommé foramen intervertébral, entre les segments C7 et T1. Il va s’accentuer progressivement tout le long de la moelle spinale, on observe le décalage le plus important au niveau du cône médullaire. Le segment médullaire L5 se retrouve au niveau des vertèbres T12-L1 alors que les nerfs spinaux provenant de ce segment sortent par le foramen intervertébral des segments L5 et S1 (Figure 3) (Langman & Sadler, 2008). Figure 1 : Planche anatomique représentant les segments vertébraux de la colonne vertébrale humaine en vue antérieure, latérale gauche et postérieure. Vertèbres cervicales (C1-C7), thoraciques (T1-T12), lombaires (L1-L5), sacrales (S1-S5) et vertèbres coccygiennes (1-4) (Yabka, 2019, modifié). Figure 2 : Représentation schématique de la croissance différentielle de la colonne vertébrale et de la moelle spinale. Au 3ème mois de l’embryogenèse la moelle spinale et la colonne vertébrale font la même taille et les segments vertébraux sont alignés aux segments médullaires (A). Le décalage est observable à partir du 5 ème mois induit par une croissance plus rapide de la colonne vertébrale et de la dure-mère (B). A la naissance, le cône terminal et le segment médullaire S1 sont alignés avec le segment vertébral L3 (C) (Langman, 2008).

Structure tissulaire

La structure tissulaire de la moelle spinale peut être divisée en cinq parties distinctes : la substance grise, la substance blanche, les méninges, le canal central et le réseau vasculaire/lymphatique. Chacune de ces parties a une fonctionnalité et une organisation cellulaire précise. 1.2.1. Substance grise La substance grise est composée essentiellement par le corps cellulaire des neurones et des cellules gliales maintenant les arbres dendritiques de ces neurones. Elle est constituée de deux hémisphères symétriques, reliés par une commissure de substance grise dans laquelle passe le canal épendymaire. Chacun de ces hémisphères est composé de deux expansions. Au niveau ventral, celle-ci est appelée corne antérieure alors qu’au niveau dorsal elle est appelée Figure 3 : Représentation schématique des segments médullaires comparés aux segments vertébraux. Il existe 31 segments médullaires, 8 cervicaux, 12 thoraciques, 5 lombaires, 5 sacrés et 1 coccygien. La moelle spinale est située entre les segments vertébraux C1 et L1. Le décalage entre segments médullaires et vertébraux débute au niveau C8 et s’accentue jusqu’au cône médullaire (Cochard, 2015). Chapitre I : Le système nerveux central 23 corne postérieure. Ces deux cornes sont séparées au centre par la substance grise intermédiaire (Cho, 2015). Lors d’une coupe transversale on peut facilement identifier cette structuration de la substance grise grâce à son organisation en « papillon » ou en « H ». Cette description macroscopique peut être complétée par une description microscopique des neurones en territoire ou lamina. En 1952, Rexed est le premier à décrire cette organisation liée à la cytoarchitecture des neurones chez le chat (Rexed, 1954). On distingue 10 laminae, la première est située au niveau de l’apex de la corne postérieure puis les laminae se succèdent jusqu’à la 9 ème au niveau de l’apex de la corne antérieure. La 10ème correspond à la zone entourant le canal central (Figure 4) (Diaz & Morales, 2016). L’enchaînement des laminae est quasiment similaire tout le long de la moelle spinale, mais la prédominance de chacun de ces territoires va varier en fonction du segment médullaire et de la densité des projections axonales périphériques. Chaque lamina est composée du corps cellulaire de neurones de projections, d’interneurones excitateurs ou d’interneurones inhibiteurs, permettant de faire le relai entre les nerfs périphériques et l’encéphale. Les laminae I à VI sont situées dans la corne postérieure. Les laminae I et II sont le relai des processus douloureux et de la température. Les laminae III et IV transmettent les informations relatives au toucher telles que la vibration et à la pression. Les afférences sensorielles provenant de la peau, des muscles et des viscères sont relayées par la lamina V. Quant à la lamina VI, elle est Figure 4 : Représentation schématique de l’organisation cytoarchitecturale de la substance grise des segments cervicaux de la moelle spinale. Dans la représentation de Redex, la substance grise est divisée en 10 laminae. Les laminae I à VI sont situées dans les cornes dorsales. Les laminae VII à IX sont situées dans les cornes ventrales. Enfin la lamina X représente la zone entourant le canal central (Britannica encyclopedia, 2007). Chapitre I : Le système nerveux central 24 impliquée dans les réflexes de flexion et de retrait liés aux stimuli douloureux (Cramer & Darby, 2003). La lamina VII située dans la zone intermédiaire, relaie les informations proprioceptives et est aussi composée d’interneurones se projetant sur les autres laminae permettant les mouvements reflexes et automatiques. Enfin les laminae VIII et IX, situées dans la corne antérieure, ont un rôle dans le relai des informations motrices. La lamina VIII est composée d’interneurones et de neurones proprioceptifs impliqués dans la fonction locomotrice et est en contact avec la lamina IX composée majoritairement de motoneurones (Figure 5) (Mai & George, 2011; Diaz & Morales, 2016). Cependant les fonctions des laminae ne sont pas figées et de nombreuses connexions existent entre elles via des interneurones permettant l’ajustement de mouvements complexes ou bien la formation d’arcs réflex.

Substance blanche

A l’opposé de la substance grise, on ne retrouve pas de soma de neurone dans la substance blanche. On retrouve dans cette substance, les axones des neurones situés dans la substance grise et les axones de premier ordre ne faisant pas synapse dans la moelle et allant directement se projeter sur les structures cérébrales. Les axones sont regroupés en faisceaux de fonction commune et occupent des territoires précis de la substance blanche (Figure 6). Figure 5 : Représentation schématique des laminae de Rexed et des projections axonales correspondantes. Les cornes postérieures sont constituées des laminae I à VI. Elles reçoivent les informations sensorielles véhiculées par les neurones des ganglions de la racine dorsale, dorsal root ganglion (DRG). La lamina VII se situe dans la substance grise intermédiaire et est composée d’interneurones se projetant sur les autres laminae. Les cornes antérieures sont impliquées dans le relai d’informations motrices via les motoneurones, elles sont constituées des laminae VIII et IX (Andrew J Thorpe, 2011).  On définit généralement deux systèmes, le système nerveux somatique et le système nerveux végétatif. a. Système nerveux somatique Dans le système nerveux somatique, on distingue différents tractus définis par le regroupement d’axones en faisceaux relayant des informations de même nature. Ces tractus sont divisés en deux systèmes, le système descendant et ascendant. Le système descendant : Le système descendant regroupe les tractus contrôlant la motricité. Ce système est composé de deux sous-systèmes. Le système moteur pyramidal comprend le tractus cortico spinal (CST) contrôlant les mouvements volontaires. Il est composé de neurones localisés dans les cortex prémoteur et moteur primaire, se projetant sur les motoneurones des cornes antérieures via les laminae VIII Figure 6 : Illustration des principaux territoires de la substance blanche parcourus par les faisceaux sensitifs et moteurs. Chaque tractus à une position précise dans la substance blanche. Les faisceaux sensitifs (ascendants) sont particulièrement présents dans la substance blanche postérieure alors que les faisceaux moteurs (descendants) sont essentiellement situés dans la substance blanche ventrale. Les zones latérales de la substance blanche contiennent à la fois des faisceaux sensitifs et moteurs (Sheerin, 2004). Chapitre I : Le système nerveux central 26 et IX dans la moelle spinale. Les faisceaux d’axones composant ce tractus, pour 90% d’entre eux, décussent entre le bulbe rachidien et la moelle spinale au niveau des pyramides situées à la base du tronc cérébral (Figure 7) (Armand, 1982). En opposition avec le système moteur pyramidal, il existe le système extrapyramidal. Ce système composé d’un ensemble fonctionnel de tractus, est impliqué dans les commandes motrices involontaires. Il regroupe les faisceaux rubro-spinaux, vestibulo-spinaux, reticulospinaux, tecto-spinaux et olivo-spinaux. Nous n’allons pas rentrer dans le détail de la fonction de chacun de ces faisceaux, cependant on peut résumer leurs rôles par le contrôle de la posture, la coordination des membres, les réflexes gravitaires et l’équilibre. Ce système, par le biais d’interneurones, permet un ensemble de rétrocontrôles du CST sur différents segments Figure 7 : Représentation schématique de la voie cortico-spinale. Les axones provenant du cortex moteur traverse le pont par les pédoncules cérébelleux, puis, 90% d’entre eux franchissent la ligne médiane et décussent au niveau des pyramides du tronc cérébral avant de parcourir la moelle spinale jusqu’à leur motoneurone cible (Crossman, 2015). médullaires. Les boucles de rétrocontrôle sont nécessaires à une motricité précise et coordonnée (de Oliveira-Souza, 2012). Le système ascendant : Les faisceaux composant le système ascendant sont les relais des messages sensoriels provenant de la périphérie. Cinq tractus composent ce système, le système lemniscal permettant la sensibilité tactile, le système extralemniscal ou antérolatéral impliqué dans le relai des messages douloureux, les tractus spinocérébelleux et proprio-spinal spécialisés dans l’acheminement des informations de la proprioception et le tractus de Lissauer. La voie lemniscale est chargée de relayer les informations précises de toucher, de vibration et de pression. Le relai des informations est permis par les neurones sensoriels de premier ordre dont le soma est situé dans le DRG et qui se projettent directement sur le bulbe rachidien. Les axones une fois dans la moelle sont divisés en deux faisceaux, le faisceau gracile et cunéiforme relayant respectivement les informations du bas et du haut du corps. Au niveau du tronc cérébral, les axones des deux voies réalisent des synapses avec les neurones du noyau gracile et cunéiforme. A la sortie de ces noyaux, les axones des neurones de second ordre, forment les fibres arquées internes et décussent en franchissant la ligne médiane. Elles forment alors un gros faisceau appelé lemnisque médian qui se projette sur le noyau ventro-postérieurlatéral (VPL) du thalamus puis par un neurone de troisième ordre, sur le cortex somesthésique primaire (Figure 8A) (Purves et al., 2015). La voie extralemniscale, à la différence de la voie lemniscale, n’est pas directe. Les neurones sensoriels de premier ordre se projettent sur les noyaux des laminae des cornes postérieures. Ils réalisent des synapses avec des neurones de second ordre qui décussent puis remontent la moelle spinale jusqu’au noyau VPL du thalamus avant d’atteindre le cortex somesthésique primaire. Cette voie permet le relai des sensations douloureuses et non douloureuses de température ainsi que des sensations douloureuses tactiles et de pression. Une partie des axones se projettent sur des interneurones de la substance grise intermédiaire permettant la communication avec les motoneurones des cornes antérieures. Cette communication est impliquée dans les phénomènes de reflexe d’extension croisée (Figure 8B) (Purves et al., 2015). Le tractus spinocérébelleux relaie les informations inconscientes de proprioception provenant des muscles et des tendons jusqu’au cervelet. Les neurones de premier ordre réalisent des synapses avec des neurones de second ordre situés dans les laminae (V – VII). On peut  subdiviser cette voie en 3 sous parties, le tractus spinocérébelleux antérieur relayant les informations proprioceptives des structures musculosquelettiques innervées par les segments médullaires allant de L2 à l’extrémité caudale de la moelle spinale.

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Table des matières

INTRODUCTION
Chapitre I : Le système nerveux central
1. La moelle spinale
1.1. Anatomie et fonction
1.2. Structure tissulaire
1.2.1. Substance grise
1.2.2. Substance blanche
1.2.3. Canal central
1.2.4. Nerfs spinaux
1.2.5. Méninges
1.2.6. Réseau sanguin
1.2.7. Réseau glymphatique
1.2.8. Le système ventriculaire
1.3. Composition cellulaire
1.3.1. Neurones et axones
1.3.2. Cellules gliales
2. Encéphale
2.1. Bulbes olfactifs
2.1.1. Structure
2.1.2. Cellules gliales olfactives
2.2. Hippocampe
2.2.1. Structure
2.2.2. Mémoire
2.2.3. Neurogenèse
2.3. Zone ventriculaire, sous ventriculaire et RMS
2.3.1. Structure et neurogenèse
Chapitre II : Les lésions médullaires traumatique
1. Etiologie
2. Mortalité et complications
3. Physiopathologie
3.1. Inflammation, réponse immunitaire et formation de la cicatrice médullaire
3.1.1. Hémorragie et ischémie
3.1.2. Phase immédiate
3.1.3. Phase aiguë
3.1.4. Cicatrice médullaire
3.1.5. Régénération
4. Conséquences périphériques
5. Conséquences cérébrales
Chapitre III : Stratégies thérapeutiques
1. Pratiques cliniques actuelle
2. Thérapies étudiées
2.1. Approche pharmacologie
2.1.1. Modulation de la matrice extracellulaire
2.1.2. Anti-inflammatoire
2.1.3. Neuroprotection et neurorégénération
2.2. Stimulation électrique
2.3. Stimulation magnétique
2.4. Transplantation cellulaire
2.4.1. Cellules de Schwann
2.4.2. Cellules souches embryonnaires
2.4.3. Cellules souches pluripotentes induites
2.4.4. Cellules souches neurales ou progéniteurs neuronaux
2.4.5. Cellules souches mésenchymateuses
2.4.6. Cellules gliales olfactives
OBJECTIFS DE THESE
RÉSULTATS
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE 3
ANNEXES
ANNEXE I – The Regenerative Effect of Trans-spinal Magnetic Stimulation After Spinal Cord
Injury: Mechanisms and Pathways Underlying the Effect
ANNEXE II – Spinal cord injury: can we repair spinal cord non-invasively by using magnetic stimulation?
ANNEXE III – Inhibition of ADAMTS-4 Expression in Olfactory Ensheathing Cells Enhances Recovery after Transplantation within Spinal Cord Injury

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