Les UV, la croissance des plantes et la machinerie photosynthétique
Le développement des plantes est possible grâce à la présence de la couche d’ozone qui joue le rôle d’un écran vis-à-vis des rayonnements UV au niveau de la stratosphère. Cette couche, en jouant le rôle d’un filtre à UV, absorbe les rayons solaires UV-C et une partie des rayonnements UV-B. Une des conséquences de l’application des rayons UV sur les plantes, est la génération du stress oxydatif (Costa et al., 2002) suite à la formation des espèces réactives oxygénées qui peuvent altérer les lipides, les pigments, les protéines et même les acides nucléiques (Dai et al., 1997). Les rayonnements UV-A sont moins néfastes que les rayonnements UV-B et UV-C sur les plantes (Barta et al., 2004).
La dose ou fluence, qui s’obtient simplement en multipliant la puissance par le temps, dépend de la puissance des lampes et du temps d’exposition. Quoiqu’elles constituent un composant mineur du spectre solaire, les radiations UV-B sont capables d’affecter de manière disproportionnée les processus métaboliques chez les animaux, l’homme, les plantes et les microorganismes. L’intérêt accordé à l’étude des effets de ces radiations sur les plantes prend de plus en plus d’ampleur. Les longueurs d’ondes UV-B sont biologiquement actives, mais elles sont aussi les plus agressives. Toutefois, les niveaux perçus par les plantes dépendent de la latitude et de la durée d’exposition, autrement dit de l’intensité d’exposition (Houghton JT et al., 2001). Chez les plantes, les radiations UV-B peuvent interférer avec la croissance, le développement, la photosynthèse, la floraison, la pollinisation et la transpiration (Rozema et al., 1997). Un grand nombre de publications relatant l’effet de ces radiations sur la reproduction des plantes (Phoenix et al., 2002), ont souligné leur influence sur le développement, la production du fruit incluant le développement des structures reproductives, la formation du nectar, l’activité des pollinisateurs, la viabilité du pollen et la germination, ainsi que la reproduction végétative (Bjorn, 2002).
Outre ces effets, les radiations UV-B induisent des modifications morphologiques au niveau de la feuille et au niveau de la plante entière (Rozema et al., 1997). Par exemple, l’enroulement des feuilles, afin de réduire la surface foliaire touchée par ces rayonnements, est une réponse photo-morphogénique qu’on observe à des doses faibles d’UV-B (Greenberg et al., 1996). L’épaississement de la feuille est une autre stratégie de protection qui peut être accompagnée d’une redistribution de la chlorophylle de sa surface adaxiale (Day and Vogelmann, 1995). Les UV-B peuvent aussi être à l’origine de changements dans la forme de la feuille, résultant peut-être d’une inhibition non homogène de la croissance (Greenberg et al., 1996). Les changements dans la morphologie de la plante, résultat d’une exposition à ce type de radiations, sont dûs en plus grande partie à la balance compétitive entre les espèces qu’aux changements dans la machinerie photosynthétique (Barnes et al., 1990). Outre sa fonction de barrière de protection mécanique, l’épiderme des feuilles joue un rôle assez important dans la protection du mésophylle chlorophyllien sous-jacent contre les effets induits par des rayonnements UV. Ce rôle de filtre de l’épiderme est réalisé grâce aux composés phénoliques, aux flavonoïdes et aux acides hydroxycinamiques. Les flavonoïdes peuvent être présents sous forme de glycosides dans les vacuoles des cellules épidermiques (Strid et al., 1990). Quant aux acides hydroxycinamiques, outre cette forme, ils peuvent être dans la plupart des cas estérifiés dans la cuticule, avec l’hémicellulose de la paroi cellulaire ou même avec des flavonoïdes (Furuya et Galston, 1965).
La comparaison du spectre d’absorption peut fournir un outil assez précis pour l’identification des classes de phénols présents dans les feuilles des plantes. Une bonne corrélation négative entre les absorbances des extraits foliaires totaux et entre les transmittances épidermiques a bien confirmé que l’épiderme était le premier responsable de l’absorption des rayons UV dans les feuilles des plantes (Furuya et Galston, 1965). Par ailleurs, des études, réalisées sur le Sorgho (Sorghum vulgare L.), ont évalué l’impact des rayonnements UV-B sur la biomasse, les teneurs en pigments photosynthétiques, en flavonoïdes et en acide ascorbique ainsi que sur les activités de la peroxydase et de la catalase. Au terme de 60 jours de culture en plein champ à des doses ambiantes normales et élevées de rayonnement UV-B, une diminution de la photosynthèse liée à une baisse de la conductance stomatique est enregistrée chez cette espèce. Cet effet est accompagné par une réduction des teneurs des pigments chlorophylliens et des caroténoïdes (Ambasht et Agrawal, 1998). En revanche, chez le petit pois, aucun effet spécifique direct de ces rayonnements sur les enzymes des voies de biosynthèse de la chlorophylle n’a été observé chez des plantes éclairées, que ce soit avec une lumière visible complétée par des doses de lumière UV-B, ou avec une lumière visible de contrôle précédée par une courte exposition de quelques heures aux UV-B (Strid et Porra, 1992). Selon les auteurs de ce travail, l’effet majeur des radiations UV-B serait une mauvaise régulation génétique des voies de biosynthèse de ces pigments conduisant à leur dégradation.
Les UV et la synthèse des flavonoïdes Récemment, les flavonoïdes ont suscité beaucoup d’intérêt en raison de leurs effets bénéfiques sur la santé humaine. Ils ont des effets antiagrégants plaquettaires, antiviraux, antiallergiques, anti-inflammatoires, anti-tumoraux et des activités antioxydantes (Ross et Kasum, 2002). C’est une classe de composés phénoliques omniprésents dans les plantes, y compris dans les fruits, les légumes et les céréales, que ce soit au niveau de leurs feuilles, de leurs tiges, de leurs fleurs, de leurs fruits ou du pollen. Le terme «flavonoïdes» proviendrait de flavedo, désignant la couche externe des écorces d’oranges. Ils sont reconnus pour jouer de multiples rôles dans les réactions des plantes supérieures contre des agents stressants d’origine différente, allant de la défense contre les pathogènes et les prédateurs à la protection des feuilles contre le rayonnement solaire (Ross et Kasum, 2002). Les anthocyanes comptent parmi les flavonoïdes qui ont fait l’objet de nombreux travaux de recherche. Ce sont des composés solubles dans l’eau qui donnent la couleur pourpre aux feuilles et aux organes (Harborne, 1988). Leur synthèse dans le cytoplasme est suivie par leur séquestration active dans les vacuoles grâce à des pompes à glutathion (Mars et al., 1995). Par exemple, il a été montré que la glutathion S-transférase (GST) est impliquée dans la séquestration vacuolaire de ces pigments chez le maïs. La quercétine est un autre type de flavonoïde ayant une activité antioxydante et utilisé depuis plus de trente ans pour renforcer la résistance aux allergies alimentaires et respiratoires. Ses effets biologiques s’expliquent principalement par son activité anti-oxydante, par une synergie spécifique avec la vitamine C (quercétine et vitamine C se protègent et se régénèrent mutuellement) et par une activité anti-inflammatoire diversifiée et polyvalente.
Rappels sur la biosynthèse de quelques flavonoïdes. Les flavonoïdes proviennent de deux voies principales du métabolisme secondaire des plantes: la voie shikimique et la voie de l’acétate (Ross et Kasum, 2002). Ils possèdent tous un même squelette de base à quinze atomes de carbone constitué de deux unités aromatiques; deux cycles en C6, reliés par une chaîne en C3. Selon leur structure chimique, ils sont classés en flavonols, flavones, flavanones, isoflavones, catéchines, anthocyanes et chalcones (Ross et Kasum, 2002). Les précurseurs de la biosynthèse des anthocyanes sont les flavan-3,4-cis-diol ou leucoanthocyanidines (Heller et Geiger, 1988). L’aglycone de l’anthocyane, qui est aussi le chromophore, est appelé anthocyanidine. Le chromophore est en fait une molécule colorée qui désigne le groupement d’atomes au sein de cette molécule qui est responsable de sa couleur. Cette propriété optique résulte d’une capacité à absorber l’énergie des photons dans une gamme du spectre visible tandis que les autres longueurs d’onde sont transmises ou diffusées. Le plus souvent, les anthocyanes sont glycolysés en position 3 et 5. Les sucres les plus fréquents sont des sucres simples, ce sont des monosaccharides comme le glucose qui est un ose simple et plus particulièrement un aldose, un isomère d’autres sucres comme le mannose et le fructose, de formule C6H12O6, et le galactose qui est un épimère du glucose au 4ème carbone. A leur tour, les sucres peuvent être acylés par l’acide cinnamique de formule C6H5–CH=CHCOOH qui est un acide organique de faible solubilité dans l’eau.
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