Les TIC pour la santé
ine. Les TIC appliquées à la santé recouvrent un champ de pratiques et de domaines très large. En termes d‟application, elles peuvent être utilisées pour la production, la transmission, la gestion et le partage d‟informations numérisées au bénéfice des pratiques tant médicales que médico-sociales. Ces technologies s‟utilisent principalement dans quatre domaines : – l‟informatique hospitalière comprend les logiciels, réseaux et terminaux de communication utilisés à l‟hôpital, que ce soit pour la gestion administrative, médico-économique ou les processus de soins ; – l‟informatique pour les professionnels de santé libéraux est relative aux applications liées à la gestion des dossiers patients, du cabinet, et des technologies de communication entre professionnels de santé ; – la télémédecine est l‟utilisation des TIC pour la pratique médicale en présence d‟un professionnel de santé ; – les informations de santé permettent aux usagers/patients et aux acteurs du monde médico-social d‟accéder à des informations de prévention et de recommandations sanitaires, à des alertes, à des conseils et des bonnes pratiques, à des annuaires, etc. D‟un point de vue pratique, les TIC pour la santé peuvent concerner une multitude d‟usages : les échanges d‟avis à distance entre professionnels ; l‟assistance à distance à visée diagnostique et thérapeutique ; la pratique à distance d‟un acte chirurgical ; la circulation de données de santé sur un réseau informatisé dédié à la santé ; la participation à la gestion des systèmes de santé ; l‟accès des citoyens aux informations concernant leur santé ; l‟accès à des téléservices1 médicaux ; etc. Ces sous-domaines et usages composant les TIC pour la santé renvoient à des réalités très différentes et peuvent être abordés sous différents angles dont celui de la télémédecine, pratique spécifique appartenant à la télésanté.
La télémédecine
La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l‟information et de la communication. Plusieurs auteurs se rejoignent sur une définition de la télémédecine comme l‟usage des TIC pour la santé à distance (Cartwright, 2000 ; May et Ellis, 2001 ; Roine, Ohinmaa et Hailey, 2001 ; Lehoux et al., 2002 ; Nicolini, 2007). Dans son acception retenue par les pouvoirs publics et par beaucoup d‟acteurs intervenant dans ce champ, elle met en rapport, entre eux ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et, le cas échéant, d‟autres professionnels de santé apportant leurs soins au patient. Elle permet : d‟établir un diagnostic, d‟assurer, pour un patient à risque, un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes, ou d‟effectuer une surveillance de l‟état des patients. Cette définition est reprise de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l‟hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires2 définissant la télémédecine. La définition des actes de télémédecine et leurs conditions de mise en œuvre et de prise en charge financière sont fixées par le décret n° 2010-1229 du 19 octobre 20103 qui indique que « relèvent de la télémédecine, les actes médicaux, réalisés à distance, au moyen d’un dispositif utilisant les technologies de l’information et de la communication ». En lien avec cette définition, le champ de la télémédecine peut être couvert par les actes principaux que sont la téléconsultation, la téléexpertise, la télésurveillance et la téléassistance (qui n‟est pas toujours un acte médical). La plupart des études académiques qui définissent la télémédecine le font en se concentrant sur le type de technologie employée et le mode de consultation (synchrone et asynchrone) (Gherardi, 2010). Plus particulièrement, une analyse de la littérature spécialisée du Journal of Telemedicine and Telecare sur plusieurs années et réalisée par Nicolini, Bruni et Fasol (2004) montre la prévalence de deux types d‟études sur la télémédecine : les premières systématisent les résultats de nombreuses études pilotes, les secondes évaluent les projets de télémédecine (Gherardi, 2010).
Implication et enjeux
Enjeux politiques et sociétaux
D‟un point de vue politique, l‟idée que la télésanté et la télémédecine répondent à des enjeux aussi bien sociétaux qu‟économiques est souvent mise en avant. Sociétaux, au sens où ces pratiques peuvent permettre de garantir un accès équitable aux soins dans un contexte marqué par le vieillissement démographique et la baisse de la démographie médicale dans certaines parties du territoire, d‟optimiser l‟accès aux informations et aux soins, d‟assurer la continuité des soins, d‟informer le public, ou également de former les professionnels, notamment ceux situés en zones rurales. Les TIC pour la santé se sont intégrées dans la pratique médicale et sont souvent perçues comme des outils d‟aménagement du territoire en termes d‟organisation du système de soins. Économiques, en ce que ces outils sont évoqués comme pouvant stimuler l‟innovation, l‟emploi et la croissance, et permettre la compétitivité et le développement économique des territoires. En effet, plusieurs rapports récents relatifs aux TIC pour la santé, à la télésanté et à la télémédecine (Lasbordes, 2009 ; Simon et Acker, 2008) reprennent certains constats démographiques ou relatifs à l‟organisation des soins pour justifier le développement de ce domaine. Pour May, Mort, Williams, Mair et Gask (2003), malgré certaines études qui remettent en question son efficacité, son acceptabilité par les patients, et sa rentabilité, la télémédecine est attractive pour les responsables politiques parce qu‟elle semble offrir une solution 12 Introduction générale technologique pour certains problèmes structurels qui affectent l‟accès aux soins, tels que la difficulté d‟accès à des spécialistes. Que ce soit en termes sociaux ou économiques, les TIC pour la santé sont donc des pratiques ou des outils interdépendants des territoires. En effet, leur utilisation dans un cadre médical implique une relation avec les politiques de santé et d‟organisation des soins, qui sont établies en fonction de critères, pour certains territoriaux.
Implications d’ordre technologique et organisationnel
Le développement de la télémédecine nécessite l‟existence préalable d‟applications support. En effet, les offres de biens et services de télémédecine nécessitent une intégration à des systèmes d‟information et réseaux. Dossier Médical Personnel4 , données personnelles de santé, systèmes d‟information hospitaliers sont autant de composantes qui sont mentionnées comme participant au développement des TIC pour la santé et qui sont interdépendantes du développement de la télémédecine. Plusieurs mesures prises entre 2009 et 2010 visent à créer et mettre en œuvre les conditions favorables au déploiement de systèmes d‟information partagés de santé en cohérence avec un cadre national. Ainsi ces différentes composantes de ce que sont ou impliquent les TIC pour la santé et dans lesquelles la télémédecine doit s‟intégrer, montrent l‟interdépendance de cette technologie avec les autres technologies et organisations existantes. 1.3.3 Un objet de recherche frontière de plusieurs problématiques de recherche en sciences sociales À travers leurs différents domaines d‟application, les TIC pour la santé tendent à rassembler une grande variété d‟organisations qui jouent un rôle dans la construction des projets, leur gouvernance et financement. Beaucoup d‟organismes s‟emparent de ce sujet, qu‟ils soient publics ou privés, fournisseurs de services ou professionnels de santé. Entre instances étatiques, collectivités locales, industriels des TIC et de la santé, usagers à la fois professionnels de santé et grand public, réseaux de soins et établissements de santé, une multitude d‟acteurs est partie prenante de la télésanté. Les échelles d‟intervention s‟interpénètrent. D‟un territoire à l‟autre, les partenariats entre acteurs ne sont pas les mêmes.