Les territoires, leurs interactions et les polarités
La polarité La polarité résulte de la polarisation
Celle-ci traduit « l’attraction d’un lieu, d’un espace, par un pôle » (Brunet et al., 1993), qui « …attire vers lui l’attention, les clients, les migrations : les régions polarisées le sont par une ville, un lieu central vers lequel converge un champ d’attraction. » La polarité est un principe fondateur en géographie. En témoignent les divers modèles existants tendant à expliquer les échanges dans le monde, ou encore l’organisation spatiale des territoires, des villes et des systèmes de villes. Nous donnons ici une liste non exhaustive de modèles bien connus en géographie (Haggett, 1973; Ferras, 1993; Camagni, 1996; Pumain et Saint-Julien, 1997) qui tentent d’expliquer les interactions à différentes échelles.
Car même s’ils ne sont pas parfaits, ces modèles s’accordent tous sur un point, à savoir que l’espace est polarisé. C’est-à-dire que certains lieux ont la particularité d’attirer davantage que d’autres, ou encore qu’ils ont des fonctions, des aménités ou des attributs plus importants. Ce principe de polarité est fondamental dans la méthodologie de TAD que nous proposons, car il est aux sources des optimisations que nous comptons introduire.
Le modèle centre/périphérie
Utilisée en économie des inégalités de développement (Amin, 1973), cette analogie à la géométrie caractérise « l’opposition entre les deux types fondamentaux de lieux dans un système spatial […] » (Grataloup, 2004). On parle alors de lieux dominants et 4périphéries et espaces intermédiaires dominés que l’on retrouve à toutes les échelles géographiques. Mais c’est au niveau mondial que le concept prend vraiment sa dimension et notamment dans l’oppositon des mondes développé et sous-développé, du Nord et du Sud.
Le modèle centre/périphérie décrit les lieux dominants ou gouvernants comme les centres et les lieux subordonnés comme les périphéries. Des nuances peuvent apparaître dans ce modèle. En effet, au sein même des périphéries, certains lieux peuvent occuper une position centrale et réciproquement certains centres peuvent paraître périphériques en comparaison des centres plus importants. Remis dans le contexte des années 1980, deux centres décisionnaires s’imposent (États-Unis et URSS) et le reste du monde peut sembler périphérique car subissant les volontés des deux super-puissances. Toutefois, des centres secondaires apparaissent et tirent leur épingle du jeu, notamment l’Europe de l’Ouest ou l’Australie et la NouvelleZélande.
Restreint à une réflexion tiers-mondiste des années 70-80, ce modèle peut être étendu à une véritable analyse des interactions à l’échelle mondiale montrant les liens existant entre les différentes régions du monde et notamment les déséquilibres dans les flux (biens, personnes, informations…) dont l’orientation peut se faire à sens unique. La notion de périphérie (et sa domination) existe parce que le solde déficitaire de flux se fait au profit du centre dominant. Certains pôles sont donc plus attractifs ou plus conquérants, en ce sens qu’ils orientent les polarités et toute l’organisation des flux de personnes, de biens, de marchandises, voire des informations.
La notion de périphérie reste toutefois assez relative car elle se situe souvent en marge d’une autre zone périphérique liée à un autre centre. Ainsi, le modèle centrepériphérie n’est finalement qu’une introduction à la multi-centralité où il existe des espaces de transition entre chaque centre. Ces transitions consitutent les espaces intermédiaires décrits sur la figure 3.1. Le modèle centre/périphérie convient toutefois à la mise en lumière de relations d’inégalités spatiales.
La théorie des lieux centraux
Directement issue des travaux de Christaller (1933) et Lösch (1940), la théorie des lieux centraux établit une hiérarchie entre lieux de peuplement, reposant sur le principe selon lequel certaines unités jouent des rôles spécifiques pour l’ensemble de la communauté. Ainsi, dans une petite unité spatiale telle qu’un village, l’on trouvera aisément une boulangerie et une école, mais seule une unité spatiale de rang supérieur disposera de services tels que l’hypermarché et l’université.
Ainsi le modèle christallérien hiérarchise les unités de peuplement en fonction de leurs tailles et de la spécificité des services qu’elles proposent aux unités de rangs inférieurs qui leur sont directement dépendantes. L’objectif de Christaller était d’expliquer le nombre et la taille des villes ainsi que leurs espacements, en se basant sur des principes de clientèle périphérique et de portée de biens. La clientèle d’un centre regroupe la population susceptible de vouloir disposer des biens ou services de ce même centre.
Ainsi la zone concernée est limitée dans l’espace par les coûts de transport à la charge de la clientèle. Cette distance maximale que le consommateur peut supporter est appelée portée d’un bien. Certains services n’existent donc que si la demande est suffisamment importante et atteint le seuil d’apparition de ces services.