Les stratégies d’apprentissage et de communication se retrouvent-elles dans les ENA

Les stratégies d’apprentissage et de communication se retrouvent-elles dans les ENA

Les stratégies mises en œuvre par l‟apprenant dans l‟ENA sont strictement conditionnées par l‟environnement d‟action et d‟apprentissage que l‟enseignant lui propose. Cet environnement dépend à son tour, a priori, de la vision d‟enseignement/apprentissage supporté par l‟ordinateur que l‟enseignant privilégie (auto apprentissage avec tutorat, co-apprentissage, apprentissage mixte, etc.), de la pédagogie qu‟il pratique et du rôle qu‟il attribuera à chacun des acteurs de la situation d‟apprentissage. Plus l‟enseignant valorise le statut de l‟apprenant lui-même, mais aussi de l‟autre apprenant présent dans le même environnement en tant que partenaire tout aussi compétent, plus il privilège le co-apprentissage, plus les opérations et les comportements de l‟apprenant tendront vers les stratégies de collaboration. On se demandera si les stratégies d‟apprentissage et de communication décrite pour la classe de langues sont les mêmes pour les interactions qui se développent dans un blogue. 

L’évolution du concept de stratégie: vers une meilleure prise en compte de la collaboration

La notion de stratégie est apparue d‟abord en psychologie dans les années soixante, elle était définie comme « la façon individuelle de résoudre un problème ». Parmi trois types de stratégies les plus répandues, on cite « la généralisation, la simplification et l‟analogie » (Wilczyńska, 2005: 114). Plus tard, dans les années soixante-dix, la notion de stratégie entra dans le répertoire des concepts vivement discutés en DLC. La définition de stratégie du Dictionnaire de didactique du français (Cuq, 2003) cite quelques recherches fondamentales sur les stratégies. Etant donné qu‟au cours de ces vingt dernières années la relation entre les stratégies d‟apprentissage et les stratégies de communication a été très souvent soulevée par les chercheurs, nous essayerons de nous positionner par rapport à cette question.

A l‟époque où l‟on voyait l‟enseignant comme un double du locuteur natif en contexte scolaire, décrire les stratégies d‟apprentissage et de communication signifiait privilégier l‟interaction en LE avec soit un locuteur natif, soit l‟enseignant. Ainsi, l’interaction avec un autre apprenant (Naiman, 1978, cité par Michońska-Stadnik, 1996: 33) n’était pas vue comme une nécessité. La centration sur l’apprenant a rendu nécessaire d’envisager une évolution pour l‟enseignement/l‟apprentissage en prenant mieux en compte la valeur de la focalisation de l‟attention de l‟apprenant non seulement sur sa propre production mais aussi sur la production de l‟Autre dans une visée d‟observation et de correction des erreurs captées. Rubin (1981, cité par MichońskaStadnik, 1996: 33), considérait donc ce type de comportement comme une des stratégies directes possibles, tout en soulignant aussi l‟importance de la recherche de l‟interaction avec un locuteur natif, comme stratégies indirectes. Le bon apprenant fut alors perçu comme un exemple à observer et à suivre.

Cette réflexion a abouti dans les années 90 à la description des stratégies d‟apprentissage proposée par O‟Malley et Chamot (1990, cité par Michońska-Stadnik, 1996: 34), qui réservent aux comportements liés à l‟interaction un groupe de stratégies spécifiques, nommées les stratégies socioémotionnelles. On assiste alors à un tournant dans la perception de l‟apprenant, tournant qui permet la description de nouvelles stratégies comme collaborer avec 70 l’autre apprenant dans toutes sortes de problèmes cognitifs, métacognitifs ou organisationnels. Les stratégies de demander de l’aide à l’autre apprenant, interagir avec lui au sujet de et en LE ont été remarquées, décrites et en quelque sorte formellement reconnues comme stratégies positives pour l’apprentissage. Par ailleurs, Oxford (1990, cité par Michońska-Stadnik, 1996: 37-40), a distingué les stratégies concernant la gestion des émotions et les stratégies de collaboration. Elle a séparé aussi les stratégies concernant la gestion de ses propres émotions des stratégies de gestion des émotions des autres apprenants.

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Elle a fait remarquer l‟importance de la sensibilité émotionnelle commune des apprenants et d‟une sensibilisation que les apprenants sont en mesure de développer pour gérer et minimiser les tensions chez eux et entre eux. Cette évolution, qui n’a pas été suffisamment soulignée en DLC, nous semble au cœur de notre projet. L‟aspect de collaboration et les stratégies connexes acquièrent ainsi de plus en plus d‟importance, étant donné que les situations de collaboration supportée par le matériel numérique deviennent de plus en plus fréquentes. Nous verrons qu‟il s‟agit donc de passer d‟une approche sur le couple apprentissage/communication au couple collaboration/action.

L’apprentissage collaboratif: proposition de définition des « métastratégies » de collaboration et des stratégies d’apprentissage socialisées

Comme nous le verrons (cf. 1.3.5) l’apprentissage communautaire est basé sur des modes spécifiques de transmission de savoir, liés fortement aux échanges égalitaires. 1. « Les échanges, dans la communauté prennent souvent une forme narrative et ouverte. 2. Les membres d’une communauté ont la capacité d’inférer l’information désirée de l’information donnée. 3. Dans une communauté, les individus construisent l’interprétation de leur expérience personnelle. 4. L’apprentissage se contextualise en prenant une forme plus narrative. » (Poirier, 1996, cité par Dillenbourg, 2003) Les quatre types cités ci-dessus ne dessinent qu‟à grands traits (ou que dans les grandes lignes) le type de discours qui sera utile à un apprenant blogueur. Il s‟agit souvent de raconter son expérience, relater un événement, formuler un problème d‟apprentissage dans un contexte très précis, formuler des indications, formuler des 76 conseils, renvoyer à des ressources adéquates. Pour que ces échanges aient lieu, et pour qu‟ils atteignent une intensité élevée nécessaire à la création des liens émotionnels et à l‟apparition de l‟indice de partage, les membres de la communauté, dans notre étude les apprenants blogueurs, sont soumis à une nécessité d‟échafauder leurs méthodes de communication classiques avec des stratégies adaptées.

Quelles stratégies les blogueurs devraient-ils adopter pour poser un problème, pour demander de l‟aide en évitant le ton d‟exigence, puisque l‟apprentissage en communauté est basé sur la bonne volonté de chaque apprenant? Quelles stratégies de communication devraient-ils adopter pour aider celui qui est dans l‟embarras sans qu‟il se sente moins intelligent, moins compétent, voire embarrassant pour la communauté? Les membres de la communauté ont-ils peutêtre développé déjà des « metastratégies » qui règlent les risques de ce type? Serait-il possible que les stratégies sociales remplissent cette fonction? Les définitions dites « classiques » des stratégies d‟apprentissage prennent-elles en considération l‟aspect de l‟engagement des apprenants en action sociale avant qu‟il s‟engage en apprentissage?

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