Les rôles à assumer par l’enseignant en ÉPS
Perceptions des enseignants quant à leur rôle
Dans le cadre de sa profession, l’enseignant est appelé à endosser différents rôles comportant tous des caractéristiques spécifiques (Bordel eau et Morency; 2010). Dans la littérature scientifique, plusieurs ont tenté de situer les rôles qui sont attribués à l’enseignant. Parmi ceux-ci, on retrouve, le rôle de leader (Wilmore, 2007), ou encore de modèle, de motivateur, d’ animateur, de personne-ressource (Bordeleau et Morency, 2010; Presseau, 2004). Plusieurs spécialistes en éducation physique croient que les rôles de leader et de modèle sont ceux qui sont primordiaux pour faire la promotion d’un mode de vie sain et actif (Carson et al., 2009, Kouzes et Posner, 2002). En fait, Bordeleau et Morency (2019, p. 296) mentionnent que « l’enseignant en ÉPS a la responsabilité d’être un modèle, puisqu’il représente une personne qui peut influencer, entre autres, les élèves sur l’acquisition de saines habitudes de vie ». Ils ajoutent aussi que « sans être parfait, il doit démontrer qu’il fait de l’activité physique pour se maintenir en bonne condition physique et qu’il adopte de saines habitudes de vie afin de prévenir les problèmes de santé» (Bordeleau et Morency, 2019, p. 296). Un sondage, réalisé par Cardinal et Cardinal (2001), auprès de 1000 étudiants en enseignement de l’ÉPS sur le rôle de modèle révèle qu’être un bon enseignant inclus d’être un bon modèle de promotion de mode de vie sain et actif et cela va dans le même sens que d’autres études sur le sujet (Baghurst et Bryant, 2012; Carson et al., 2009). Certains ajoutent même qu’il est nécessaire pour la crédibilité de l’enseignant envers ses élèves de maintenir un bon niveau de compétences physiques (Carson et al., 2009). D’ailleurs, certains auteurs associent cela comme facteur d’influence du sentiment d’efficacité personnelle (Bandura, 2007) perçu par les enseignants. Pujade-Rebaud (1983) ajoute que, particulièrement pour les enseignants en ÉPS, le corps est mis en scène pour capter l’attention des élèves. Donc, les compétences physiques et l’engagement que démontre l’enseignant en ÉPS peuvent influencer la motivation des élèves à participer activement durant leurs cours (Archambault et Chouinard, 2016). Siedentop (1994) mentionne que « [Il’enseignement efficace est l’orchestration artistique d’un répertoire d’habiletés» (p. 23), et complète en ajoutant que « [la] compétence est différente de l’efficacité et combine à la fois un enseignement hautement efficace et une maîtrise de la matière» (p. 24). Alors, il semblerait que les rôles de modèle et de leader dans le maintien d’un mode de vie sain et actif soient pertinents pour avoir un effet réel et positif sur les élèves et leur adoption d’un mode de vie sain et actif. Enfin, malgré les rôles de leader et de modèle en santé, les études montrent que les enseignants en ÉPS éprouvent de nombreuses difficultés, notamment en début de carrière (Blankenship et Colement, 2009; Eldar, Nabel, Schechter, Talmor, et Mazin, 2003 ; Grenier, Rivard, Turcotte, Leroux, et Marzouk, 2019).
Perceptions des élèves à l’égard du rôle de l’enseignant en ÉPS
Il existe peu d’études qui traitent de la perception des élèves vis-à-vis l’engagement de leur enseignant en ÉPS (Robitaille, 2019. Toutefois, certaines d’entreelles révèlent un lien entre la perception des élèves face à la forme physique de leur enseignant et la performance des élèves durant leur cours d’ÉPS. En fait, les élèves auraient tendance à être plus motivés à s’engager physiquement dans ce cours lorsqu’ils perçoivent que leur enseignant est en bonne forme physique par rapport à une perception négative de ce dernier (Melville et Maddalozzo, 1998; Thomson, 1996). D’autres auteurs ajoutent que certains élèves ont besoin d’avoir une vision positive à l’égard de la santé et des compétences physiques de leur enseignant pour favoriser leur apprentissage (Carson, Magnotta, Lauer, Wetzel, Nguyen, Morrison, et al., 2009). Par ailleurs, il semblerait que les élèves qui aiment l’éducation physique, qui estiment favorablement cette matière, qui se considèrent compétents, et qui font beaucoup d’efforts, ont l’ impression d’obtenir un bon soutien de la part de leurs enseignants en ÉPS (Robitaille, 2019). Ainsi, la perception de l’élève vis-à-vis l’engagement de l’enseignant en ÉPS semble influencer son implication ou non dans ce cours. En fait, une étude portant sur l’influence de l’ éducation physique telle que perçue par des élèves et leur éducateur physique rapporte que les élèves «seraient fortement influencés par les conceptions de leur professeur, et qu’ il existerait un lien étroit entre les contenus pédagogiques proposés et les catégories d’activités et de réinvestissement» (Le Goff, 2003). Kouzes et Posner (2002) mentionnent que « le leadership n’a pas juste à voir avec la personnal ité, mais aussi avec la pratique » (traduction libre) (p. 63). Donc, la manière dont l’enseignant va enseigner son contenu semble influencer positivement ou négativement leurs élèves face à la pratique d’activités physiques, mais aussi vis-à-vis leur perception de la matière enseignée. En effet, Robitaille (2019) mentionne dans son étude plusieurs critiques négatives à l’égard de l’ÉPS. Parmi les critiques soulevées par les élèves, on retrouve la présentation d’activités physiques redondantes et peu motivantes; un intérêt axé vers celui des garçons plutôt que celui des filles, des stratégies d’enseignements limitées, une valorisation encore trop ciblée sur la victoire, un manque de soutien pour les élèves dans le besoin, des évaluations trop flexibles ainsi qu’un manque d’apprentissage vécu dans les cours d’ÉPS (Robitaille, 2019). D’autres études ajoutent que de vivre des expériences négatives durant les cours d’ÉPS peut fortement dissuader les élèves de pratiquer des activités physiques en dehors des heures de cours (Carroll et Loudimis, 2001; Safvenbom, Haugen, et Bulie, 2015). De plus, une étude ontarienne réalisée auprès d’élèves de la 4e à la ge année a révélé que seulement 30 % des plus jeunes élèves et 60% des plus vieux élèves croient que l’enseignant en ÉPS aime l’activité physique quotidienne (Patton, Overend, Mandich, et Miller, 2014, p. 15). Alors, sans nier les autres aspects qui englobent un enseignant compétent, il est important de considérer que, pour susciter la motivation des élèves, les enseignants en ÉPS devraient davantage prêcher par l’exemple afin de « convaincre les élèves que l’activité physique est partie intégrante d’un mode de vie sain» (Patton et al., 2014, p. 16).
Les problèmes rencontrés en début de carrière
Durant leur carrière professionnelle, la plupart des enseignants vont rencontrer des épisodes de difficultés. Dans au moins 20 % à 30 % des cas, les enseignants québécois vont quitter la profession avant d’avoir accumulé cinq années d’expérience (De Angelis et Presley, 20 Il ; Fédération du syndicat des enseignants [FSE], 20 Il; Kirsch, 2006). Pour certains, les relations professionnelles et les stratégies d’enseignements sont les principales causes d’abandon (Blankenship et Colement, 2009; Eldar, Nabel, Schechter, Talmor, et Mazin, 2003; Macdonald, 1993; Mohr et Townsend, 2001). Aussi, plusieurs enseignants novices mentionnent qu’ils ne se sentent pas suffisamment outillés pour affronter le « choc de la réal ité » (Martel, Ouellette, et Ratté, 2003) associé à l’insertion professionnelle et au début de carrière en enseignement. Cela se traduit par une grande fatigue induite par les exigences physiques de la tâche ainsi que par la précarité de l’emploi en début de carrière chez les enseignants en ÉPS (Grenier, Rivard, Turcotte, Leroux, et Marzouk, 2019).
Par ailleurs, une étude portant sur les savoirs fondamentaux liés à une insertion professionnelle réussie en ÉPS fait ressortir quatre aspects pouvant la faciliter : 1) les compétences interrelationnelles avec les membres de l’équipe-école; 2) les connaissances de la culture spécifique de l’école; 3) les connaissances des pratiques d’embauche et d’affectation; 4) le niveau d’acquisition des compétences professionnelles en enseignement (Grenier et al., 2003). À l’inverse, l’absence de ces mêmes aspects constituerait un obstacle à leur insertion. Le dernier point concernant les compétences professionnelles vient directement interpeller les compétences de l’enseignant tant dans son savoir-faire que dans ses connaissances. Ainsi, les difficultés d’insertion professionnelle et de décrochage chez l’ensemble du corps enseignant suggèrent qu’on s’intéresse plus particulièrement aux jeunes enseignants en ÉPS.
Selon les quelques études qui abordent les facteurs problématiques plus spécifiques aux jeunes enseignants en ÉPS, le manque de connaissances de différentes disciplines sportives et le manque de crédibilité aux yeux des élèves ont été rapportés (Martel, Ouellette, et Ratté, 2003). En revanche, si plusieurs études se sont intéressées à l’insertion professionnelle de jeunes enseignants, très peu d’entre elles, voire aucune, ont vérifié les compétences physiques de cette population et l’impact de celle-ci sur leur insertion professionnelle. Ainsi, il faut se pencher vers les études qui englobent les difficultés vécues durant la tâche d’un enseignant en ÉPS pour mieux comprendre cet aspect.
1. INTRODUCTION |