Les roches mères marines

 Les roches mères marines

Introduction 

Les roches mères pétrolières sont des roches qui suite à leur enfouissement et à l‘augmentation des températures produiront des hydrocarbures. Elles sont de ce fait des éléments essentiels du système pétrolier (Magoon et Dow, 1994). La quantité et la qualité des hydrocarbures produits dépendent de nombreux paramètres intrinsèques à ces niveaux riches en matière organique. Parmi les roches mères, celles marines représentent plus de la moitié des roches riches en matière organique (Huc et al., 2005). Depuis plusieurs décennies, l‘industrie pétrolière exploite des hydrocarbures qui ont migré à partir de roches mères, généralement à faible perméabilité, jusqu’à des roches dites « réservoirs » à forte porosité et perméabilité. Au cours des derniers années, l‘augmentation de la demande et la baisse des réserves en hydrocarbures conventionnelles (issus de roches réservoirs à forte porosité et perméabilité et productibles à faibles couts) a conduit l‘industrie pétrolière à se tourner vers les hydrocarbures de roches mères : les oil shales ou gas shales. L‘augmentation de l‘intérêt pour ces ressources a conduit à mieux caractériser l‘architecture et la distribution des hétérogénéités présentes dans ces formations à granulométrie fine, longtemps considérées comme des ensembles lithologiques homogènes. Ce chapitre fait une synthèse des processus (géologiques, physico-chimiques et biologiques) associés à la formation des roches mères marines et à leur évolution. Il s‘articule autour de quatre points : dans un premier, la présentation du cycle du carbone, des roches mères et de leurs produits hydrocarbonés, puis dans un deuxième une présentation des outils de description et de caractérisation des roches mères. Dans un troisième point, une présentation des facteurs qui contrôlent le développement de roches riches en matière organique à grande et petite échelle sera faite et enfin dans un quatrième seront présentés les développements en cours sur la modélisation stratigraphique des roches mères. II. Les roches mères pétrolières 

  1. Les roches mères au cours des temps géologiques 

L‘accumulation des roches riches en matière organique n‘est pas un processus constant au cours des temps géologiques, plusieurs périodes sont connues pour présenter le plus forts taux d‘accumulations de carbone organique (Ulmishek et Klemme, 1990) : le Silurien, le début du Carbonifère, la limite Jurassique-Crétacé et la fin du Crétacé (Figure I – 1). Au cours des temps géologiques, trois facteurs de premier ordre semblent influencer la déposition de roches riches en Les roches mères marines matière organique : (1) le développement des végétaux terrestres, (2) la concentration en CO2 de l‘atmosphère, (3) le contexte tectonique global (Huc et al., 2005). Premièrement, à partir de la fin de l‘Ordovicien, l‘augmentation et le développement des végétaux supérieurs accélère l‘altération chimiques des roches et la formations de sols. L‘altération des roches et la formation des sols augmentent, par ruissèlement, les apports en nutriment aux zones aquatiques qui entrainent une augmentation de la productivité primaire aquatique (Algeo et al., 2001) Deuxièmement, l‘augmentation de la concentration en CO2 de l‘atmosphère induite par l‘intensification de l‘activité volcanique provoque une augmentation du développement du couvert végétal qui comme décrit précédemment impactera positivement la productivité primaire aquatique (Berner, 1997 ; Westbroek, 1992). Dernièrement, le contexte tectonique contrôlera (1) l‘activité volcanique et donc le dégazage de CO2 dans l‘atmosphère, (2) les régimes de subsidences qui seront propices ou non à l‘accumulation des sédiments riches en matière organique (Huc et al., 2005). Une partie importante des roches mères (e.g. Marcellus Shale, Montney Formation, Utica Shale, Schistes cartons…) ne s‘est pas déposée au cours des grandes périodes favorables à la formation de roches riches en matière organique (Figure I – 1). Les Montney-Doig Fms qui sont l‘objet principal de ce travail de thèse présente ainsi la particularité de s‘être déposées pendant une période de Green House, au Trias, une période où les autres exemples de roches mères sont très rares (Figure I – 1). Au premier ordre, la formation des roches mères est donc contrôlée par des mécanismes globaux. Les hétérogénéités dans ces roches mères marines reposent dans un second temps sur d‘autres facteurs s‘exprimant à plus petit ordre. 

Types, potentiel pétrolier et évolution des roches mères au cours de l’enfouissement 

Les roches riches en matière organique se déposent dans des environnements variés : marin, deltaïque, continentale, lacustre… Le type et la quantité des particules organiques présentes dans une roche mère influencent significativement son potentiel pétrolier. Ainsi, les roches mères sont classées en trois types (I, II et III) qui permettent de les regrouper en fonction de leur composition et de leur potentiel pétrolier (Tissot et al., 1974 ; Espitalié et al., 1977).

Types de roches mères et potentiel pétroligène

 Initialement, ces trois types ont été définis grâce à des analyses élémentaires des kérogène sur la base de l‘analyse élémentaire en carbone, hydrogène et oxygène et aux rapports H/C et O/C (Tissot et al., 1974, Figure I – 2A.). Dans cette classification, le type I présente le plus fort rapport H/C et le type III le plus fort rapport O/C. Le type I, dérivant principalement de composés algaires et bactériens, est associé à des dépôts lacustres (e.g. Green River Shale Fm). Le type II, qui est lui principalement issu d‘organismes planctoniques, se retrouve généralement dans les environnements marins (e.g. le Toarcien inférieur du bassin de Paris). Le type III, majoritairement composé par des débris lignocelulosiques dérivant de végétaux supérieurs, est fréquemment associé aux dépôts continentaux et aux charbons mais peut aussi être retrouvé dans des sédiments marins déposés à proximité des embouchures de grands fleuves (e.g. le fleuve Congo). Figure I – 2 : Diagrammes de caractérisation et de qualification des roches mères. A. Diagramme de Van Krevelen présentant les types de roches mères (Tissot et al. 1974, Durand 1980), 

Potentiel pétroligène d’une roche mère (d’après Dembicki, 2009) 

Le potentiel pétroligène d‘une roche est, aujourd‘hui, principalement mesuré grâce à la pyrolyse Rock-Eval (Behar et al., 2001). Ce potentiel est fonction de deux paramètres : la quantité de carbone organique dans la roche (le carbone organique total (COT) exprimé en % massique) et la I quantité d‘hydrocarbure qui sera produite par cette masse de carbone : le S2 (exprimé en mgHC/groche, Figure I – 2B). Ainsi le potentiel pétrolier est fonction de la quantité de matière organique présente mais aussi de sa qualité. Par exemple, un charbon, peut être composé de 70% de carbone organique mais de peu d‘hydrogène produira très peu d‘hydrocarbures (Bordenave, 1993). Les roches mères de type I, majoritairement composée d‘une matière organique algaire possèdent les meilleurs caractéristique roches mères. Cependant leur extension reste limitée. Les roches mères de type II possèdent un potentiel pétrolier inférieur à celle des roches mères de type I mais généralement leur extension est plus importante. Enfin, les roches mères de type III présentent caractéristiques pétroligènes les plus faibles (Tissot et Espitalié, 1975). 

Evolution thermique et génération d’hydrocarbures

 Au cours de leur enfouissement, les roches riches en matière organique subissent trois étapes de transformations : la diagenèse, la catagenèse et la métagenèse (Figure I – 3). Au cours de cet enfouissement, la matière organique présente dans la roche va se transformer jusqu’à produire des hydrocarbures. . Au cours de la diagenèse, la matière organique se transforme en kérogène et en produits lourds. Au cours de la catagenèse l‘essentiel du kérogène va produire des produits lourds qui produiront à leurs tours des hydrocarbures légers (Behar et al., 2008). Enfin, au cours de la métagenèse, le reste du kérogène et les hydrocarbures préalablement formés se transforment en gaz. A chacun des deux stades de générations d‘hydrocarbures (métagenèse et catagenèse), des résidus carbonés inertes sont générés (Tissot et Welte, 1984). La vitesse de génération d‘hydrocarbures et les températures requises pour déclencher cette réaction dépendent du type de matière organique présent dans la roche (Espitalié et al., 1986). De manière très simplifié, les roches mères de type I génèrent précocement une huile légère alors que les roches mères de type III génèrent tardivement du gaz (Tissot et Espitalié, 1975).

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