Les représentations de la Santé sexuelle chez les
médecins généralistes
Histoire de la sexualité et de la santé sexuelle
Longtemps sexualité et procréation ont fait partie de l’ordre du monde sans être considérées comme un domaine d’étude à part entière. Le terme de « sexualité » semble être apparu au XIXème siècle d’abord dans la botanique puis dans le genre humain, orienté tout d’abord essentiellement sur la fonction reproductive. (4) C’est dans cette visée procréative que la sexualité nécessitait d’être considérée. Les pathologies et problématiques sexuelles responsables de difficultés à la procréation étaient alors dignes d’intérêt et prises en compte. Les conduites sexuelles non reproductives étaient quant à elles réduites au domaine de la perversion. Au XXème siècle, les mouvements d’émancipation de la femme, la découverte de la contraception et le droit à l’avortement, ouvrent la possibilité d’une activité sexuelle à visée érotique séparée de la fonction reproductive. (5) C’est à ce moment là que le terme de « sexualité » prend son sens moderne, c’est à dire représentant l’ensemble des diverses modalités de la satisfaction sexuelle. L’épidémie de VIH au début des années 1980 va de nouveau radicalement modifier la place et le statut de la sexualité dans la société et la santé publique. Sexualité et bien être sont de nouveau écartés et le sexe se retrouve associé à la maladie, à la mort. (5) Le XXIème siècle voit l’usage de la contraception se généraliser et la procréation ne se place maintenant plus au centre de la sexualité. Au cœur de l’intimité et de l’affectivité, la sexualité apparaît désormais comme une pratique fondamentale dans la construction du sujet. Le répertoire sexuel s’est enrichi et la vie sexuelle n’est plus simplement représentée par la vie matrimoniale d’un couple hétérosexuel marié pour la vie. (4) 11 A ce jour, le terme de sexualité dans les dictionnaires de la langue françaises, comporte encore plusieurs définitions relativement différentes, représentant l’ensemble : des caractères de chaque sexe, des comportements relatifs à l’instinct sexuel, des phénomènes sexuels, ou des modalités de satisfaction instinctuelle liée à la reproduction de l’espèce. Cette définition évoluant selon les époques, sera surement amenée encore à évoluer dans les siècles à venir.
Définitions de la santé sexuelle
Le terme « santé sexuelle » apparaît au début du XXème siècle, c’est un concept issu du champ de la sexologie. Il est fondé sur une représentation interdisciplinaire de la sexualité humaine. (6) La première définition de ce concept par l’OMS a été énoncée en 1974. Cette première définition a été par la suite enrichie pour être celle qui est aujourd’hui mondialement reconnue, adoptée par l’OMS en 2002. « La santé sexuelle est un état de bien-être physique, émotionnel, mental et social associé à la sexualité. Elle ne consiste pas uniquement en l’absence de maladie, de dysfonction ou d’infirmité. La santé sexuelle a besoin d’une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, et la possibilité d’avoir des expériences sexuelles qui apportent du plaisir en toute sécurité et sans contraintes, discrimination ou violence. Afin d’atteindre et de maintenir la santé sexuelle, les droits sexuels de toutes les personnes doivent être respectés, protégés et assurés. La sexualité est un aspect central de la personne humaine tout au long de la vie et comprend le sexe biologique, l’identité et le rôle sexuels, l’orientation sexuelle, l’érotisme, le plaisir, l’intimité et la reproduction. La sexualité est vécue sous forme de pensées, de fantasmes, de désirs, de croyances, d’attitudes, de valeurs, de comportements, de pratiques, de rôles et de relations. Alors que la sexualité peut inclure toutes ces dimensions, ces dernières ne sont pas toujours vécues ou exprimées simultanément. La sexualité est influencée par des facteurs biologiques, psychologiques, sociaux, 12 économiques, politiques, culturels, éthiques, juridiques, historiques, religieux et spirituels. » (7) En 2013, aux Etats Unis, le CDC (Centers for Disease Control and Prevention) et l’ACCS (Comité consultatif sur l’administration sur le VIH, les hépatites, les MST, la prévention et le traitement) adoptent une définition de la santé sexuelle qui reprend la notion de globalité de la santé sexuelle ainsi qu’une approche positive de la sexualité. Cette définition ajoute à celle de l’OMS, « la capacité de compréhension des avantages, des risques et des responsabilités du comportement sexuel ». Ces dernières années, les réflexions concernant la santé sexuelle semblent donc tendre à une démédicalisation et à une approche globale et positive de la sexualité.
Problématiques sexuelles
Les problématiques de santé sexuelles sont diverses et de plusieurs ordres. En médecine et en psychiatrie, les problématiques sexuelles sont ainsi classifiées dans le DSM V (8) : • Dysfonctions sexuelles : o Retards de l’éjaculation o Troubles de l’érection o Troubles de l’orgasme chez la femme o Troubles de l’intérêt pour l’activité sexuelle ou de l’excitation sexuelle chez la femme o Troubles liés à des douleurs génito-pelviennes ou à la pénétration o Diminutions du désir sexuel chez l’homme o Ejaculations prématurées o Dysfonctions sexuelles induites par une substance ou un médicament o Autres dysfonctions sexuelles spécifiées o Dysfonctions sexuelles non spécifiées • Troubles de dysphorie de genre 13 • Troubles paraphiliques : exhibitionnisme, voyeurisme, frotteurisme, pédophilie, masochisme sexuel, sadisme sexuel, fétichisme, transvestisme Cette classification est discutable et peu satisfaisante pour les professionnels travaillant en santé sexuelle. Il est vrai qu’il est difficile de faire une liste exhaustive des problématiques sexuelles et de les classer, celles-ci étant souvent multifactorielles. On peut proposer les regroupements suivants : • Les problématiques liées à un manque ou une absence de connaissance sur son propre corps, ses organes, sur le fonctionnement de la sexualité et des pratiques sexuelles • Les problématiques liées à la relation à l’autre : sentiments, attachement, violences psychologiques et physiques • Les problématiques psychologiques : traumatismes infantiles, initiation sexuelle ratée, absence d’estime de soi, mauvaise image corporelle • Les problématiques somatiques associées à : des maladies, des déficiences, des blessures, des chirurgies, des mutilations sexuelles. • Les problématiques liées à l’usage de substances licites ou illicites : opiacés, antidépresseurs, anxiolytiques, amphétamines etc…
LISTE DES ABREVIATIONS |