LES PRINCIPAUX DÉFIS DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE
L’économie numérique soulève de nombreux défis pour les gouvernements dans la mise en place de leur politique fiscale. Ces défis sont généralement regroupés en trois catégories :
Les difficultés de percevoir la TVA dans le pays de destination où les biens, services et incorporels sont acquis par des consommateurs privés auprès de fournisseurs établis à l’étranger, qui peuvent ne pas avoir de présence physique directe ou indirecte dans ce pays ;
La capacité de certaines entreprises de tirer des bénéfices commerciaux dans un pays dans lequel elles n’ont pas de présence physique significative, remettant ainsi en question la pertinence des règles actuelles, suivant lesquelles l’assujettissement aux impôts dépend de la présence physique ;
La capacité de certaines entreprises de faire contribuer les utilisateurs à la valeur de leurs produits et services numériques, y compris via la collecte et le suivi de données, ce qui soulève la question de savoir comment attribuer et valoriser cette contribution.
L’OCDE s’est efforcée de trouver des solutions concrètes à ces différents défis fiscaux ; en ce qui concerne la collecte de la TVA, les travaux de l’OCDE dans le cadre du projet BEPS ont abouti à un accord international sur des recommandations visant à affecter la collecte de la TVA sur les livraisons transfrontalières « business to consumer » (ci-après « B2C ») au pays où se trouve le client .
En effet, la numérisation permet aux entreprises de desservir des clients dans le monde entier sans devoir être présentes physiquement dans le pays où est situé le consommateur. Par conséquent, un fournisseur peut très bien n’avoir aucun lien avec la juridiction où se situe le client de sorte que cette juridiction n’est pas en mesure d’imposer à ce fournisseur étranger qu’il facture et lui reverse la TVA afférente aux biens ou services incorporels livrés au consommateur final sur son territoire. Cela entraine une diminution des recettes TVA et « engendre des distorsions de concurrence entre les fournisseurs nationaux qui sont soumis à l’obligation de facturer le TVA sur les ventes aux clients locaux, et les fournisseurs étrangers qui peuvent échapper à cette obligation ou à l’égard desquels il peut être difficile de faire respecter les obligations liées à la TVA » .
Le Conseil de l’OCDE a dès lors adopté une « Recommandation sur l’application de la Taxe sur la Valeur Ajoutée/Taxe sur les Produits et Services aux échanges internationaux de services et de biens incorporels » le 27 septembre 2016. Cette Recommandation est le premier instrument juridique de l’OCDE dans le domaine de la TVA . Les « Principes directeurs internationaux pour la TVA/TPS » (ci-après « Principes directeurs ») ont été inclus dans cette Recommandation ; ils ont été publiés le 12 avril 2017.
C’est sur la mise en œuvre de ces principes au niveau européen que se concentre la présente contribution.
Il convient toutefois de relever que ces principes ne sont pas contraignants pour les membres de l’OCDE. Ils ne visent pas à imposer des prescriptions détaillées pour les législations nationales mais à définir des objectifs et à suggérer des moyens pour les atteindre .
L’Union européenne s’est également très tôt intéressée aux défis posés par le commerce électronique, spécialement en ce qui concerne la définition et la localisation des opérations imposables, de même qu’en ce qui concerne le taux applicable . La Commission européenne a en effet constaté que l’émergence d’un marché numérique mondial (internet), non limité géographiquement, rendrait potentiellement plus difficile de connaître l’emplacement et l’identité des parties aux transactions . Elle a dès lors adopté une série de mesures en matière de TVA, notamment des règles de localisation, applicables au commerce électronique.
Enfin, il convient de relever que l’augmentation des biens et services numériques a également un impact fiscal sur le fournisseur lui-même. Dans la mesure où l’opération est taxable dans le pays de consommation, celui-ci va être amené à se conformer à d’innombrables règles en matière de TVA qui peuvent varier d’une juridiction à l’autre.
La Commission européenne a pris conscience de cette difficulté et a dès lors proposé de simplifier les obligations fiscales des entreprises effectuant des ventes transfrontalières de biens et de services en ligne, notamment par la mise en place du mécanisme de « mini-guichet unique » (voy. infra).
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