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Dépôts par voie humide :
Les méthodes de dépôt par voie humide regroupent les procédés dont les étapes de synthèse peuvent s’effectuer en phase liquide. Parmi ces techniques, la cellule photovoltaïque à base de CZTSSe qui a le meilleur rendement est synthétisée grâce à une solution d’hydrazine [6]. Ce solvant permet de solubiliser les précurseurs qui sont déposés sur le substrat de la cellule par spin-coating. Ensuite, un recuit des précurseurs sous atmosphère de soufre permet d’obtenir le CZTSSe. L’hydrazine est un produit toxique et facilement inflammable. Son utilisation n’est pas compatible avec une fabrication de cellules photo-voltaïques à base de CZTSSe à grande échelle. Dans ce contexte, des équipes cherchent à synthétiser du CZTSSe par voie liquide sans utiliser d’hydrazine. Une technique assez répandue consiste à mélanger des particules d’encre avec du Cu, Sn et du Zn en phase liquide (acétate de cuivre, chlorure de zinc…) dans de la thiourée et du DMSO. Ensuite, les précurseurs sont recuits dans une atmosphère gazeuse pour former le CZT(S,Se) [34]. Avec cette méthode, Schnabel et al. [35] recuisent les précurseurs sous une atmosphère de SnSe2 au lieu de Se et obtiennent une cellule avec 10,3% de rendement. Toujours en utilisant le DMSO, Haass et al. [36] développent un procédé de recuit en trois étapes et obtiennent une cellule de CZTSSe avec 11,2% de rendement. Il existe d’autres techniques de dépôt par voie humide comme l’électrodépôt [12] ou l’impression [37].
Revue de rendement
En 1997, Katagiri et al. [38] présentent la première cellule photovoltaïque à base de CZTS pur. Celle-ci est constituée d’une couche tampon en CdS, un contact arrière en Mo et un contact avant en ZnO:Al et a un rendement de 0,66%. Cette cellule est fabriquée par sulfurisation des précurseurs déposés par évaporation. Par la suite, le même groupe optimise leurs procédés de fabrication. Ils déposent les précurseurs sous vide et travaillent sur la gravure des oxydes métalliques restant en surface de la couche active à la fin du recuit. Ils obtiennent des dispositifs avec 6,7% de rendement [39] en 2008. En parallèle, les cellules photovoltaïques à base de sélénium pur sont aussi en cours de développement. Zoppi et al. [40] développent un dispositif photovoltaïque à base de CZTSe pur avec 3,2% de rendement en 2009. Le CZTSe est obtenu en sélénisant les précurseurs déposés par pulvérisation. Le mélange des chalcogènes dans l’alliage représente une avancée technologique majeure dans le domaine. Le laboratoire IBM développe une méthode de fabrication par voie humide qui consiste à déposer les précurseurs par spin-coating. Au préalable, ils sont tous dissous dans une solution d’hydrazine. Le matériau est ensuite obtenu par recuit. En quelques années, le procédé est développé et les rendements des cellules obtenus atteignent successivement 10,1% [41], 11,1% [21] puis 12,6% [6]. En parallèle, les travaux sur les matériaux contenant du soufre pur et du sélénium pur se développent. Brammertz et al. [42] développent en 2013 une cellule de laboratoire à base de CZTSe pur avec 9,7% de rendement par sélénisation de précurseurs déposés par pulvérisation. L’année suivante, avec le même procédé de fabrication, leur cellule à base de CZTSe pur atteint 10,4% de rendement [43]. Kato et al. [44] de Solar Frontier développent du CZTS pur par sulfurisation des précurseurs. En contrôlant la structure d’empilement des précurseurs ainsi que les conditions de sulfurisation, ils obtiennent une cellule à base de CZTS avec 9,2% de rendement et est actuellement le record avec du soufre pur.
La courbe de progression de rendement des dispositifs à base de CZTSSe ressemble fortement à celle du CIGS représentée en pointillé noir sur la figure 2.7. Sur cette figure sont représentés les principaux rendements des cellules à base de CZTS pur, de CZTSe pur et de CZTSSe par voie humide ou sèche. Les triangles pleins représentent l’évolution des rendements obtenus au sein du laboratoire. Les procédés utilisés permettent d’obtenir des cellules à 7,2% de rendement.
La figure 2.7 souligne aussi l’existence de mini-modules et l’évolution de leurs rendements. Un mini-module est un dispositif comprenant quelques cellules photovoltaïques. Sugimoto et al. [45] développent en 2011, un mini-module à base de CZTS obtenu par sulfurisation des précurseurs déposés sous-vide. Le contact arrière est en Mo, la couche tampon en CdS et le contact avant en ZnO. En optimisant l’épaisseur déposée des précurseurs, un mini-module de 8,6% de rendement est obtenu. Par la suite, Solar Frontier, en combinant un procédé de sélénisation après une sulfurisation de précurseurs déposés par pulvérisation, ont réussi à obtenir un mini-module de 10,8% de rendement [44].
Mesures électriques en température sur le CZTSSe
Pour que les cellules photovoltaïques à base de CZTSSe présentent un intérêt commercial, il est nécessaire qu’elles atteignent des rendements de plus de 20%. Pour améliorer leur rendement, il est impératif de comprendre les mécanismes qui le limitent. En particulier, l’étude de l’activité des défauts est primordiale. A l’heure actuelle, la nature du dopage dans le CZTSSe n’est pas encore totalement connue [5] et l’optimisation des cellules photovoltaïques s’est beaucoup faite de manière empirique. Les mesures électriques telles que les mesures I(V) ou encore les mesures d’admittance sont beaucoup utilisées pour déterminer des caractéristiques électriques du matériau.
Mesures courant-tension I(V)
Les mesures de caractérisation électrique I(V) sont utilisées pour déterminer les paramètres basiques d’une cellule photovoltaïque. Les mesures effectuées à température ambiante sont plutôt bien interpré-tées dans la littérature. Cependant, dès qu’elles sont réalisées à basse température, des phénomènes apparaissent que les modèles utilisés usuellement n’expliquent pas. Gunawan et al. sont parmi les pre-miers à montrer que la résistance série du CZTSSe augmente de plusieurs ordres de grandeur lorsque la température diminue [53]. Ils expliquent par la suite que l’origine de cette augmentation pourrait être dû au transport dans le matériau [54]. Brammertz et al. [42] pensent que l’augmentation de la résistance série en température est un phénomène activé thermiquement. Enfin, Weiss et al. [55] expliquent que l’augmentation de la résistance série aurait pour effet de produire le saut de capacité dans les mesures d’admittance en dessous d’une certaine température. Pour l’instant, il n’existe aucun modèle valable qui explique le comportement du courant des cellules de CZTSSe à basse température et les effets de l’augmentation de la résistance série sont mal connus.
Mesures d’admittance
Les mesures d’admittance sont aussi beaucoup utilisées pour caractériser les cellules photovoltaïques.
Plus particulièrement, les mesures de capacité sont liées aux variations de charges. Les mesures de ca-pacité en fonction de la tension C(V) permettent d’obtenir des profils de densité de porteurs de charge,tandis que les mesures de capacité en fréquence C(f) permettent d’obtenir des propriétés des défauts telles que leurs niveaux d’énergie. Il existe peu de données dans la littérature de mesures C(V). En revanche, quelques profils de densité de charges dans le CZTSSe issus de mesures C(V) sont publiés. Brammertz et al. [42] obtiennent des profils de densité de charges dans du CZTSe pur à différentes températures. A 300 K, ils trouvent un dopage d’environ 1.1015 cm 3. A 213 K, il est d’environ 0,5.1015 cm 3. Oueslati et al. [43] publiende,même un profil de densité à température ambiante avec un dopage d’environ 1.1015 cm 3.
Concernant les mesures C(f), en 1996, Walter et al. [56] proposent une méthode pour déterminer la
distribution en énergie de défauts dans la bande interdite d’un semi-conducteur en mesurant l’admittance complexe d’une jonction p-n. Cette méthode est beaucoup appliquée dans le cas des cellules à base de CIGS. L’interprétation des mesures réalisées sur le CIGS étant cohérente, cette technique est aussi utili-sée dans le cas du CZTSSe. Gunawan et al. [54] ont synthétisé trois cellules et déterminent des niveaux d’énergie compris entre 0,13 et 0,2 eV de la bande de valence suivant les valeurs des largeurs de bande interdite des échantillons. Kask et al. effectuent des mesures d’admittance en température sur du CZTSe et trouvent deux niveaux d’énergie qu’ils appellent Ea1 à 120 meV et Ea2 à 167 meV [57]. Brammertz et al. [42] mesurent une énergie d’activation d’environ 135 meV dans du CZTSe avec 9,7% de rendement. Ces études, notamment grâce aux calculs ab initio de Chen et al. [9] attribuent ces niveaux d’énergie au défaut CuZn. Cependant, il n’existe aucune preuve expérimentale qui permet d’attribuer les niveaux mesurés aux défauts.
En 2013, Weiss et al. [55] mettent en évidence que l’augmentation de la résistance série à basse température a une influence sur le signal d’admittance. Ils montrent qu’avec le circuit équivalent utilisé usuellement pour interpréter les mesures C(f), la résistance série provoque une marche de capacité qui aurait été interprétée comme la contribution d’un défaut. Cela montre qu’il existe encore des lacunes dans notre compréhension des phénomènes électriques qui régissent les cellules photovoltaïques à base de CZTSSe. Pour pouvoir atteindre un jour l’objectif de réaliser des cellules à base de CZTSSe viables commercialement, il faut améliorer la compréhension du matériau pour espérer synthétiser des cellules avec un rendement de l’ordre de 20%.
Table des matières
1 Introduction
1.1 L’énergie photovoltaïque
1.1.1 Le spectre solaire
1.1.2 Les porteurs de charge dans un semi-conducteur
1.1.3 La jonction p-n
1.2 Les couches minces
1.2.1 Contexte
1.2.2 Applications
1.3 Positionnement de la thèse
2 État de l’art
2.1 Le CZTSSe
2.1.1 Structure cristalline
2.1.2 Propriétés optiques
2.1.3 Défauts et dopage
2.1.4 Phases cristallines mineures
2.1.5 Méthodes de fabrication
2.2 Revue de rendement
2.3 Mesures électriques en température sur le CZTSSe
2.3.1 Mesures courant-tension I(V)
2.3.2 Mesures d’admittance
3 Techniques expérimentales
3.1 Procédé d’élaboration
3.1.1 Le contact arrière
3.1.2 Le CZTSSe
3.1.3 La couche tampon
3.1.4 Le contact avant
3.2 Caractérisation physico-chimique du matériau
3.2.1 Méthodes de caractérisation
3.2.2 Mesures de caractérisation du CZTSSe
3.3 Caractérisation électrique du dispositif
3.3.1 Mesures I(V) sous éclairement
3.3.2 Mesures J(V) sous obscurité
3.4 Caractérisation en température
3.4.1 Dispositif expérimental : le cryostat
3.4.2 Montage des échantillons sur boîtier DIL
3.4.3 Calibration du cryostat en température
4 Caractérisation électrique du CZTSSe en température
4.1 Analyse des défauts dans une jonction p-n
4.1.1 Les types de défauts
4.1.2 Les recombinaisons
4.1.3 Réponse d’un défaut à un signal de tension
4.1.4 Mesure de capacité
4.1.5 Spectroscopie d’admittance
4.2 Caractérisation électrique des échantillons
4.2.1 Mesures C(V)
4.2.2 Spectroscopie d’admittance
4.2.3 Caractéristique densité de courant-tension
4.3 Conclusion
5 Calcul de l’admittance
5.1 Les bases du calcul
5.2 Calcul de l’admittance en régime alternatif
5.3 Comparaison aux mesures expérimentales
5.3.1 La capacité
5.3.2 La conductance
5.3.3 Mesure de résistance
5.3.4 Conclusion
6 Phénomènes de transport dans le CZTSSe
6.1 La percolation
6.1.1 Les fluctuations de potentiel
6.1.2 Mise en évidence expérimentale
6.2 Calcul et comportement de l’admittance avec des fluctuations de potentiel
6.2.1 Calcul de l’admittance
6.2.2 Réponse d’un défaut à un signal de tension en intégrant les fluctuations de potentiel
6.2.3 Conclusion
6.3 Le transport par hopping
6.3.1 La loi Universelle de conductivité
6.3.2 Description du hopping
6.3.3 Différents types de hopping
6.4 Mise en évidence de la relaxation diélectrique dans les mesures de conductivité
6.4.1 Description de la relaxation en énergie des porteurs de charge et de la conduction
par hopping
6.4.2 Contribution de la relaxation diélectrique
6.5 Conclusion
7 Conclusion
7.1 Travaux réalisés
7.2 Perspectives
A Résolution de l’équation de Poisson petit signal
B Calcul de l’expression de Cmes et Gmes