Au Canada, les adolescents et les adultes accusés d’un acte de délinquance sont suivis par des systèmes de justice différents. Ce choix provient du principe que le modèle justicier adulte ne convient pas aux adolescents (Brennan, 2012).
En 2003, le gouvernement libéral modifie la Loi sur les jeunes contrevenants (LJC) pour celle de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA). Cette dernière met l’accent sur la responsabilisation du jeune et la protection du public. Les peines ne sont plus imposées pour des raisons de vulnérabilité et de besoins spécifiques du jeune, mais en termes de gravité des délits et d’harmonisation des peines selon la région. À cause du principe de proportionnalité, il est plus difficile d’appliquer une ordonnance pour répondre aux besoins de réadaptation identifiés chez le jeune (Gaumont, 2010).
D’autre part, la LSJPA a été conçue dans un effort de déjudiciarisation des adolescents ayant commis des infractions moins graves (Gaumont, 2010). Ce changement a amené la mise en place de mesures extrajudiciaires. Ce type de mesure est applicable dans les cas de délit mineur et de premier délit sans aggravation (menu larcin, vol, voie de fait simple). Ainsi, la plupart des jeunes qui commettent leur premier délit suivent le programme de mesures extrajudiciaires, ce qui fait en sorte qu’ il y a moins d’ affaires traitées via le tribunal de la jeunesse (Brennan, 2012). Ces mesures visent à imposer des conséquences opportunes et significatives aux jeunes, tout en leur évitant la stigmatisation associée à l’implication officielle dans le système de justice (Ministère de la Justice, 2011). Ce changement a pour but de sensibiliser et de responsabiliser le jeune face à l’infraction commise (Brennan, 2012).
Dans les cas où le jeune récidive, qu’il ne respecte pas les conditions de la mesure extrajudiciaire ou que son délit soit fait avec aggravation, le jeune se retrouve devant le tribunal de la jeunesse. Lors de son jugement, la loi exige au juge d’envisager toutes les solutions avant d’appliquer une peine de mise sous-garde en centre de réadaptation (Ministère de la Justice, 2011). Ainsi, la mise sous-garde est réservée aux jeunes coupables d’infraction avec violence qu’ils soient récidivistes ou pas, et à ceux qui ont compromis aux conditions d’ordonnance et aux multirécidivistes. Avec la LJC, il était possible d’imposer un placement sous garde pour un jeune éprouvant des problématiques sociales ou psychologiques, mais pas avec la LSJPA (Gaumont, 2010).
Depuis l’entrée en vigueur de cette loi, le nombre de causes réglées devant le tribunal de la jeunesse et le recours à la mise sous-garde ont diminué (Brennan, 2012). Ainsi, la LSJPA a permis d’éviter la lourdeur de l’intervention judiciaire à certains jeunes. Il reste que, malgré la réduction des interventions judiciaires, la prévalence en matière d’agression physique se serait maintenue et aurait même augmenté en termes de gravité.
Prévalence des agressions physiques chez les adolescents au Canada
Il n’existe pas de source unique permettant de déterminer le nombre de jeunes commettant des crimes au Canada comme au Québec. En effet, il y a les déclarations volontaires, les registres officiels, les données de la police et les sondages de victim isations (Sécurité publique Canada, 2012).
Au Québec, les registres officiels du Ministère de la Sécurité publique (2015) ont répertorié tous les délits dont les jeunes Québécois ont été reconnus coupables en 2012. Selon ce registre, il y a eu 8206 délits contre la personne, dont 1762 condamnations pour menaces, 4391 voies de fait sans abus sexuel, 426 abus sexuels et 5 homicides. Cependant, ces données ne tiennent pas compte des jeunes de moins de 12 ans ainsi que de ceux qui n’ont pas été reconnus coupables devant le tribunal.
Bien que ces chiffres puissent nous donner un aperçu de la situation au Québec, la disposition de la LSJP A complique la représentativité de ces données. Ayant moins de causes passant devant le tribunal, il est donc plus difficile de connaitre la véritable prévalence en matière de voies de fait. En 2009, Dauvergne a contourné cette difficulté en observant le taux de voies de fait déclarées par la police au Canada et non celui traité par le tribunal de la jeunesse (Dauvergne, 2009). Aucune étude de ce genre ne fut trouvée pour la grandeur du Québec.
De manière générale, au Canada, les voies de fait de niveau un sont restées stables ou ont diminué quelque peu. En revanche, les taux de voies de fait des niveaux deux et trois ont progressé ces dernières années: ceux de niveau deux augmentent graduellement depuis 1983 et ceux de niveau trois depuis 2005. Ces taux ont augmenté tant chez les adultes que chez les jeunes. Il reste que les jeunes sont ceux chez qui la hausse est la plus importante. Entre 1998 et 2008, le taux de jeunes auteurs présumés de voies de fait de niveau deux et trois a augmenté de 28 % par rapport à 12 % chez les adultes (Dauvergne, 2009). Néanmoins, la majorité des crimes violents reste les voies de fait simple chez les jeunes avec une prévalence de 38 % des crimes violents. Les voies de faits graves représentent 23 %, les menaces 14 %, les vols qualifiés 15 %, les agressions sexuelles 5 % et l’homicide ou tentative de meurtre est en dessous de 1 % (Gaumont, 2010). Il reste, cependant, que ce ne sont pas tous les délits violents qui sont rapportés à la police. Il y a donc une certaine marge d’erreur à considérer (Dauvergne, 2009).
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