Les pérovskites comme photocathodes

Synthèse des pérovskites

Il existe plusieurs voies de synthèse différentes pour obtenir les titanates de calcium, baryum et strontium (cf. Chapitre 1.3.2.2). Nous avons choisi de les synthétiser sous forme de film par voie sol-gel couplée au dip-coating comme méthode de dépôt car c’est un procédé simple, peu onéreux et qui permet de réaliser des films de surface homogène.
La composition des solutions initiales est reportée dans le tableau 3.1 ci-dessous.
Pour les pérovskites, les quantités initiales en précurseur ont été ajustées d’après les résultats obtenus en analyse dispersive en énergie afin d’obtenir un rapport 1:1 entre l’alcalino-terreux et le titane.
Dip-coating : A partir d’un sol dont la composition est indiquée dans le tableau 3.1, cinq couches sont déposées par dip-coating sur un substrat de silicium ou de quartz recouvert de FTO (SnO2 dopé au fluor) sur une face, pour la conduction des charges, préalablement lavé à l’éthanol. Les différentes couches sont déposées sous air sec (RH% < 5%) à vitesse constante, 𝑣 ≅ 2,5 𝑚𝑚/𝑠 et à température ambiante. Un traitement « flash » de 2-3 min est effectué dans un four chauffé à 400°C  entre chaque couche déposée. Ce type de traitement thermique rapide est nécessaire pour consolider le réseau inorganique. 2) Calcination : Elle est effectuée entre 30 min et 1h à des températures comprisesentre 600°C et 900°C, afin de cristalliser les différents matériaux et d’éliminer les espèces organiques éventuellement présentes (copolymère à blocs). Des électrodes « mésoporeuses » ont également été synthétisées afin de maximiser l’interface électrode/électrolyte et donc de minimiser le trajet des porteurs de charge photogénérés vers la surface. Pour cela, un copolymère à blocs est ajouté à la composition du sol initial (cf. tableau 3.1) [6] : le PIB-b-PEO (PolyIsoButylène-b-Poly(oxyde d’éthylène)) [7] ou le F127 (poly(oxyde d’éthylène)-poly(oxyde de propylène) [8] un copolymère tri-blocs de type ABA.
Dans un souci de simplification, dans la suite de ce chapitre, les échantillons synthétisés à partir de solutions sans copolymère à blocs seront appelés « denses », par opposition aux échantillons « mésoporeux » pour lesquels un copolymère à blocs (quantité entre parenthèses dans le tableau 3.1) a été ajouté au sol initial. Ce chapitre débutera par l’étude de CaTiO3, puis de BaTiO3 et enfin de SrTiO3. L’influence du dopage au fer et à l’azote sur les propriétés structurales, optiques et électriques sera discutée pour chaque matériau. 129 5µm 1µm 500 nm

Etude du titanate de calcium (CaTiO3)

CaTiO3 a été étudié dans un premier temps sans dopage. Puis, une étude par microscopie électrochimique (SECM) a été réalisée afin de tenter de déterminer le taux de dopage optimal en fer par rapport au photocourant généré. Le co-dopage au fer et à l’azote a été ensuite étudié sur des films minces obtenus par dip-coating.

CaTiO3 non dopé

La surface du matériau « dense » est analysée par microscopie électronique à balayage. Celle-ci présente une porosité, ainsi que des fissures, comme on peut le voir sur les clichés SEM-FEG de la figure 3.4. Ces fissures sont probablement dues à différentes contraintes lors de la calcination. Ce phénomène sera discuté dans la partie 3.4 sur SrTiO3 pour lequel cela a également été observé.
A partir de la courbe d’absorbance, on peut tracer (𝐴ℎ𝜈)𝑚 en fonction de l’énergie ℎ𝜈, avec m = 2 dans le cas d’un matériau à gap direct et m = 1/2 pour un matériau à gap indirect. Cette méthode permet de savoir en traçant ces courbes avec les deux exposants si le semiconducteur étudié possède un gap direct ou indirect. De plus, l’extrapolation de la partie linéaire permet d’estimer la valeur de la largeur de bande interdite à l’intersection avec l’axe des abscisses. D’après la figure 3.6, nous remarquons tout d’abord que CaTiO3 possède deux gaps, l’un direct égal à environ 3,9 eV, l’autre indirect d’environ 3,5 eV, comme cela a déjà été décrit dans la littérature [9].
La pente de la partie linéaire de la courbe est positive, ce qui confirme bien que le titanate de calcium est un semiconducteur de type n. De plus, en extrapolant la partie linéaire jusqu’à 1/C2 = 0, le potentiel de bandes plates est facilement déterminé (à 25 mV près), soit environ -0,3 V vs RHE. Ce résultat confirme que l’énergie du bas de la bande de conduction de CaTiO3 est supérieure à celle nécessaire pour la réduction des protons. Enfin, la quantité de dopants est facilement calculée à partir de la pente de la partie linéaire, on obtient environ 1,7.1014 cm-3. Cette valeur est relativement faible par rapport aux valeurs classiques rencontrées dans la littérature.

Influence du dopage

Comme nous venons de le voir, CaTiO3 est un semiconducteur de type n, possédant deux band gaps d’énergie supérieure ou égale à 3,5 eV. Notre objectif à présent est de changer sa nature, en semiconducteur de type p ; ainsi que de diminuer la largeur de sa bande interdite. Notre stratégie est de doper dans un premier temps le titanate de calcium au fer afin de le substituer au titane dans la structure pérovskite. Puis, un co-dopage à l’azote devrait permettre de changer la nature du semiconducteur ainsi que de diminuer le band gap grâce à l’énergie des orbitales de l’azote, plus hautes en énergie que celles de l’oxygène.

Dopage au fer

Nous allons tout d’abord commencer par étudier le dopage au fer de CaTiO3. Nous avons débuté cette étude en effectuant une analyse préliminaire par microscopie électrochimique à balayage (SECM) afin de tenter de déterminer le taux de dopage au fer optimal. Puis, nous avons synthétisé des films de CaTiO3 dopé au fer par voie sol-gel couplée au dip-coating, afin de confirmer ou d’infirmer les résultats obtenus par SECM. L’influence de la mésoporosité ainsi que de la température de calcination ont été également étudiées.
Dans un premier temps, nous avons essayé de connaître le taux optimal de dopage au fer. Pour cela, nous avons utilisé un microdispenseur couplé à la microscopie électrochimique à balayage. Cette technique a été développée par Allen J. Bard [12][13]. Le procédé permet de déposer des spots de différentes compositions espacés d’environ 500- 700 µm, à partir de solutions contenant les précurseurs de la pérovskite CaTiO3 et de Fe2O3 pour le dopage au fer, et de connaître rapidement le photocourant généré par chacun des spots. La démarche expérimentale est expliquée plus en détails en annexe. Ce travail a été effectué en collaboration avec Beatriz Puga Nieto, Carlos Sanchez-Sanchez et Vincent Vivier du Laboratoire Interfaces et Systèmes Electrochimiques (LISE), situé à Paris 6. Pour ce dispositif, l’éthanol est trop volatil par rapport à la durée de dépôt et sa tension superficielle avec le substrat est trop faible pour pouvoir effectuer des dépôts espacés de 500 µm. En conséquence de quoi, on change le solvant de la solution initiale quicontient les précurseurs. Les nouvelles compositions sont reportées dans le tableau 3.2.
Nous avons opté pour des solutions principalement composées d’eau comme solvant.
Les différents spots sont disposés sur un substrat de quartz recouvert de FTO (SnO2 :F) sur une face. Puis, un traitement thermique d’une heure à 600°C est effectué. La figure 3.9.a) et c) suivante montre les images MEB des différents spots déposés à l’aide d’un microdispenseur sur le substrat de quartz/FTO avec les taux de dopage théoriques en fer indiqués en bleu. Les spots semblent à première vue homogènes, sauf ceux pour 23% théorique de dopage en fer où il semble qu’il y ait coexistence de deux phases différentes : l’une au centre et l’autre qui forme une couronne autour de cette première phase.
Sur la figure 3.9.e) et f), sont représentées les images SECM obtenues. Les réponses diffèrent selon le taux de dopage en fer. On remarque sur la figure 3.9.e) que les spots deviennent marrons plus foncé quand le taux de dopage augmente. Selon l’échelle qui indique l’intensité du courant, cela signifie que le courant devient plus négatif, sauf sur une couronne autour des spots observée à partir du 15% de dopage en fer théorique. Celle-ci est de couleur verte, ce qui indique que le courant est positif. Il est possible que les spots contiennent non pas un matériau, CaTiO3 dopé au fer, mais deux matériaux comme par exemple, CaTiO3 dopé au fer et Fe2O3, semiconducteur de type n qui exhibe un courant Figure 3.9: a), c) Clichés MEB des différents spots déposés de CaTiO3 en fonction du taux de dopage en fer b), d) : Représentation schématique de la distribution des spots indiquant le nombre de gouttes déposées de chaque solution, en rouge la solution contenant les précurseurs pour former CaTiO3 et en bleu celle pour former Fe2O3 e), f): Images SECM de CaTiO3 dopé à différents pourcentages atomiques en fer, 0,5V vs RHE, pH=6.positif. Sur la figure 3.9.f), tous les spots possèdent cette couronne avec un courant positif et le courant au centre des spots diminue progressivement de 17% de dopage théorique en fer à 23%.
Les photocourants obtenus par les différents spots sont résumés sur le graphe de la figure 3.9. Un taux optimal en fer, de 17% théorique, semble se dégager. En effet, le dopage induit deux effets : d’une part, augmenter le taux de dopage permet d’augmenter la conductivité du matériau; d’autre part, cela diminue la largeur de la zone de charge d’espace car celle-ci est inversement proportionnelle à la quantité de dopant. Ces deux effets ont des tendances opposées, c’est pourquoi il existe un compromis, soit un taux de dopage optimal.
Nous allons à présent vérifier les résultats obtenus par SECM, en synthétisant différents échantillons par voie sol-gel, couplée au dip-coating. Les compositions testées sont celles avec un taux de « dopage » en fer théorique de 0%, 6%, 17% et 23%, en prenanten compte les taux expérimentaux de dopage obtenus par EDX lors de la synthèse (tableaux 3.3). Dans un souci de simplicité, l’appellation des échantillons par leur taux de « dopage » théorique en fer sera conservée dans la suite de cette partie. Cinq couches sont déposées pour chaque composition sur des substrats de quartz/FTO. L’idée est ainsi de comparer le titanate de calcium non dopé avec une composition avant, après et au niveau de l’optimum obtenu d’après l’étude réalisée en SECM.
La cristallinité ainsi que le nombre de phases sont vérifiés par diffraction des rayons X. Le pic principal de diffraction (110) de CaTiO3 est présent sur chacun des diffractogrammes, bien que son intensité soit relativement faible par rapport aux pics du substrat présents sur les différents diffractogrammes. Le zoom sur le pic de diffraction principal (110) de CaTiO3 semble montrer un léger décalage vers la gauche avec l’augmentation du taux de fer, qui pourrait correspondre à une substitution du titane par le fer. La qualité des diffractogrammes n’est pas assez bonne pour le confirmer à 100% et nepermet pas d’obtenir une estimation de la taille des cristallites. De plus, aucun nouveau pic de diffraction n’est apparu sur les diffractogrammes avec l’augmentation du taux de fer dans la composition du sol initial. Ainsi, il semble qu’aucune nouvelle phase ne soit apparue dans la composition des électrodes. En effet, l’hématite par exemple, qui était une nouvelle phase hypothétique composant certains spots en SECM, est cristallisée à 800°C donc on devrait voir ses pics de diffraction, ce qui n’est pas le cas.
Sachant que la différence de photocourant est négligeable entre les deux types d’électrodes, i.e. avec et sans copolymères à blocs présents au sein du sol initialement, nous nous concentrerons dans la suite de cette partie sur les échantillons « denses ». L’influence de la température de calcination sur les propriétés structurales et électriques des échantillons de CaTiO3 dopé au fer (3% atom.) est à présent étudiée. Ainsi, après avoir déposé cinq couches par dip-coating sur un substrat de silicium, les échantillons sont calcinés à 800°C ou 900°C.
En diffraction des rayons X, il est toujours impossible de voir les pics de diffraction de CaTiO3 (surtout le pic principal (110) situé à 2θ=33,5°) car ceux-ci sont positionnés aux mêmes angles que ceux du silicium dont l’intensité est nettement plus importante. Cependant, sachant que les diffractogrammes de la figure 3.11 ont confirmé la présence de CaTiO3 et son état cristallin après avoir été calciné à 600°C, nous supposons qu’après une calcination à 800°C ou 900°C, le titanate de calcium est bien cristallin.
La surface des échantillons est ensuite analysée par microscopie électronique à balayage. Le titanate de calcium « dense » dopé au fer et calciné à 800°C et 900°C présente en surface de gros grains aux deux températures de calcination (cf. figure 3.18). La différence est qu’à 900°C la surface de la couche de FTO du substrat apparait sous les grains. Ainsi, la croissance des grains serait plus importante à 900°C car toute la couche constituant un fond continu à 800°C a disparu sur les clichés de l’électrode calcinée à 900°C.
De plus, la composition des échantillons est vérifiée par analyse dispersive en énergie, afin de toujours obtenir un rapport Ca/Ti proche de 1 et un taux de fer au sein de l’électrode de 3% atomique. Enfin, la caractéristique courant-tension du titanate de calcium dopé au fer (3% atom.) est tracée sur la figure 3.19, en alternant les périodes dans l’obscurité et sous illumination, afin de connaître le photocourant généré par les électrodes dopées au fer et calcinées à différentes températures. Il est clair que pour les deux températures de calcination, le photocourant est plus important côté anodique que cathodique. Cela indique que le dopage au fer ne permet apparemment pas de changer la nature du semiconducteur.
De plus, le photocourant s’annule à environ 0,3V vs RHE, or, d’après le modèle de GärtnerButler, celui-ci s’annule lorsque le potentiel est égal au potentiel de bandes plates. On en déduit que CaTiO3 dopé au fer (3% atom.) est donc toujours un semiconducteur de type n. Ce résultat pourrait s’expliquer par une autocompensation des charges, i.e. le fer substitue le titane ainsi que le calcium pour compenser le déficit de charge crée, au lieu de créer des lacunes d’oxygène, selon l’équation suivante :

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Co-dopage au fer et à l’azote

Après avoir dopé des échantillons au fer, nous allons à présent les doper également à l’azote. En effet, le dopage au fer a révélé une diminution de la largeur de bande interdite. Nous allons donc conserver cette propriété et tenter de changer le comportement dusemiconducteur en substituant les atomes d’oxygène par des atomes d’azote.Expérimentalement, les échantillons ont été synthétisés par voie sol-gel, couplée au dip-coating, puis calcinés à 800°C ou 900°C pour cristalliser le titanate de calcium. Ensuite, un traitement thermique à la même température a été effectué sous ammoniac afin de doper les échantillons à l’azote. La nitruration a été réalisée en collaboration avec Franck Tessier de l’Université de Rennes. Dans ce paragraphe seuls les résultats à 900°C seront présentés car c’est à cettetempérature que le meilleur photocourant est obtenu, probablement grâce à un plus fort taux de dopage en azote.

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