Les nouveaux modes d’intervention dans l’analyse
diachronique des centres urbains
Territoires couverts Aires théoriques de l’étude
L’aire d’étude comporte le territoire couvert par ce qui est désigné dans cette étude par « nouveaux modes d’intervention sur l’espace ». Il ne s’agit pas de faire l’inventaire (depuis 2000) des actions et discours sur l’espace et de les analyser, mais de sélectionner ce qui peut éclaircir utilement notre thèse fondamentale. Le caractère restrictif de la démarche, malgré tout, ne dénotant nullement que ce qui est sélectionné, fait l’objet à priori d’une analyse partielle. Il ne s’agit pas, non plus, de lier l’ordre de priorisation des interventions à leur date de mise en œuvre, en prenant comme repère mars 2000. Il sera plutôt fait appel à la place que l’Etat accorde à l’intervention, à la capacité que cette dernière déploie par exemple, dans le 55 changement (image) d’un secteur territorial ou dans l’influence qu’elle exerce dans les pratiques urbaines au point de les modifier. Naturellement, ces analyses se rapporteront d’abord aux conditions particulières de l’évolution des villes dans l’armature nationale, et les conséquences de la croissance urbaine dans les principales villes du pays. L’arsenal juridico institutionnel avec ses nouveaux textes et ses nouveaux codes sensés légalisés, codifiés et planifiés les interventions urbaines, participe à l’extension des analyses aux cadres institutionnels qui agissent directement ou indirectement sur les décisions. Toujours est-il que, la part importante que l’analyse du logement occupe dans notre démonstration est à la mesure de la place que le logement occupe d’abord, dans le discours de l’Etat qui affirme vouloir réaliser l’équation « une famille un toit » et ensuite, dans la programmation gouvernementale, obligée « officiellement » de reporter les élections locales de 2008, parce qu’un programme de logement « urgent », «le plan Jaxxay» avait besoin des fonds (52milliards)109 déjà affectés au scrutin, pour sa réalisation. Par ailleurs, chaque ville ayant une identité propre, l’insertion d’un équipement commun peut avoir la même expression dans les tissus urbains parce qu’il les valorise (espaces jeunes), mais ne pas faire l’objet de la même pratique des citadins établis dans des villes différentes (ex. Saint-Louis comparée à Kébémer). Une telle approche suppose que les données récoltées pourront provenir de différentes villes, pourvue qu’elles satisfassent à la théorie ponctuelle pour laquelle elles eussent été convoquées. 109 Le chiffre officiel 56 Sites d’étude Carte 2 : Division administrative du Sénégal Les sites d’étude comprendront les villes du Sénégal, que nous n’étudierons pas de long en large, mais plutôt à partir de l’identification d’un nouvel aspect de leur urbanisme qui les rattache à notre problématique. De façon générale, la pertinence de l’intervention est plus déterminée par son opportunité dans les besoins d’aménagement d’une ville donnée, plutôt que sa couverture du champ urbain sénégalais. « L’analyse diachronique des villes… » telle qu’elle donne un titre a ce travail, sous-entend que les villes sélectionnées illustrent chacune en ce qui la concerne, un aspect de l’analyse générale des nouveaux modes. Certaines approches regroupent une catégorie de villes de l’armature urbaine nationale lorsqu’elles mettent en évidence des processus généraux observés dans des villes appartenant à la même catégorie : petites communes, communes secondaires, grandes communes, communes de l’équerre. Il peut aussi s’expliquer par un type d’intervention uniquement destiné à des villes dont le ciment qui les réunit et qui typifie leur évolution est par exemple la religion 57 (Tivaouane, Touba). L’analyse de ce type d’intervention pouvant se faire simultanément dans les villes bastions religieux et dans les sous territoires urbains bastions confrériques (Cambéréne, à Dakar, Médina Baye à Kaolack, Madior Cissé dans le Sud (Kertian) à SaintLouis), Médina Gounass… Dans le but de mieux faire comprendre les évolutions constatées dans les villes, les mesures ne peuvent être prises que dans les villes considérées. C’est pour cette raison que dans la première partie de ce travail, nous avons pris le choix méthodologique de partir de notre lecture des villes de l’armature, qui ont été étudiées nommément en fonction des caractères de leur évolution récente, qu’elle soit le fruit de leur propre dynamique, ou sous l’impulsion des autorités publiques et/ou des acteurs privés. Les analyses clés de notre thèse, qui se rapportent à ce que nous estimons être les processus spatiaux majeurs au Sénégal, entre autres la monumentalisation de l’urbanisme (Parc culturel), la « jaxxaïsation » de la question du logement social (« Plan Jaxxay ») et les enjeux qui se dégagent du boum de la promotion immobilière (national et international) et bien d’autres phénomènes, ne peuvent être saisis, naturellement avec pertinence, que dans certains espaces. C’est le cas de Dakar et son agglomération qui s’imposent dans ce sens, comme lieu privilégié des analyses afférentes à ces processus, tout en en gardant pas l’exclusivité. Surtout en ce qui concerne la réalité de la question du logement et l’accession des citadins à la propriété bâtie, à la propriété du sol, également. Et, ce que cette appropriation procure en termes de « niche » dans les enjeux gestionnaires de la ville. Ces différentes postures constituent un domaine dans lequel on voit naître dans les grandes villes de l’intérieur du pays, des modes identiques à ceux considérés à Dakar, mais encore, des situations spécifiques expliquées localement. A Richard Toll, Mbour, Touba villes où les taux de croissance urbaine sont élevés ( 12%, 8% et 6%)110, les anticipations foncière des pouvoirs locaux décelées à Khouma (Richard Toll)111, à Malikounda (Mbour) et les soixante dix mille parcelles distribuées à Touba dans les années quatre vingt, ont été à la base de processus spéculatifs qui ont fait grimper les prix du foncier, même si les cessions gratuites à l’origine ont permis à plusieurs familles d’être logées. Il s’agira dans les enquêtes de caractériser autant 110 D’après les statistiques de 2002 111 Les parcelles distribuées dans le cadre de la restructuration de Khouma, ont été revendues par les propriétaires, à Mbour des conflits fonciers résultant du boum immobilier de la petite côte opposent la commune et la communauté rurale de Malicounda pour l’appropriation et à Touba la métropolisation de la ville entraîne une ruée sur les terres d’extension sur des bases très spéculatives. 58 que faire se peut dans la validation de nos hypothèses, l’état du foncier et sa propriété dans ces zones. L’étude thématique se fera à partir d’étude de cas choisi par ce même procédé méthodologique. En effet, quelle ville autre que Saint-Louis, dans l’exemple sénégalais, peut rendre compte de la patrimonialisation ? De même, quelle autre ville que Thiès peut rendre compte, aussi bien qu’elle peut le faire, de la question des infrastructures dans le développement urbain et ses incidences politiques et macro-économiques ? Et quelle autre ville que Touba peut illustrer la faible institutionnalisation du pouvoir local ? La sélection de ces villes pour répondre à ces questions n’en est donc que fort logique. Au final donc, on peut retenir que l’éventail des villes ainsi répertoriées, quelque soit son étendue, constitue un panel qui à défaut de garantir scientifiquement les résultats prévus pour une extrapolation à l’ensemble des villes sénégalaises, cautionne au moins méthodologiquement les résultats de l’analyse des thèmes et villes retenus, et que cette étude veut qu’ils soient représentatifs des évolutions constatées dans les villes sénégalaise en général.
La collecte de données
Les données statistiques officielles Sur le plan économique le Sénégal dispose désormais de statistiques réputées fiables et révisées pour ses comptes nationaux. Elles concernent les indicateurs macroéconomiques, les agrégats de la Comptabilité Nationale, ainsi que les secteurs qui ont le plus contribué à la création de la richesse nationale et leur affectation. C’est ainsi qu’en 1998, année où les comptes ont été stabilisés, le Sénégal a adopté un nouveau plan référentiel de comptabilité, Syscoa, repris sur la base de celui de 1993 recommandé par les Nations Unies112. C’est sur cette base que travaille l’Agence Nationale de la Démographie et des Statistique (ANDS) (ancienne Direction de la Prévision et de la Statistique (DPS), et que la Direction de la Prévision et des études économiques met des données à la disposition des chercheurs à travers. « Parmi les grands organismes internationaux, seul l’ONU publie régulièrement des données relativement détaillées sur les indicateurs de l’urbanisation. L’annuaire démographique (AD) propose une liste des villes de plus de 100000hab, mise à jour annuellement, mais avec un certain retard par rapport aux délais des publications nationales ». « vocabulaire de la ville notions et références» Dorier-Appril E., Ed. du Temps., 2001, 192 pages. 59 ses publications périodiques (notes de conjoncture) et ponctuelles (Etudes économiques, rapports sectoriels). Leur utilisation ne nous fait pas perdre de vue ce que Dorrier-Appril a dit propos des données officielles que fournissent les institutions habilitées à collecter et à diffuser les informations statistiques qui ne sont «généralement faites ni par les géographes ni pour les géographes » Dorrier- Appril, 2001, p123113. La plupart des statistiques liées à la population, à l’économie et à l’aménagement du territoire résultent donc principalement de ces organismes gouvernementaux et intergouvernementaux auxquels elle fait référence. Si leur fiabilité est plus avérée, il n’en est pas de même des statistiques ministérielles ou celles émanant des différents services qui leur sont rattachés. C’est ainsi qu’une certaine confusion enveloppe toujours les sources de financement, et le coût des infrastructures réalisées dans le cadre de la réunion de l’Organisation de la conférence Islamique (OCI)114, tenue à Dakar les 13 et 14 mars 2008. L’opacité envahit aussi le coût final du « Plan jaxxay » le nombre de personnes déplacées, le nombre de logements construits, les indemnisations des ayant droits, et les affectataires. Il en est de même des indemnisés et des indemnisations versées aux déplacés affectés par la construction de l’autoroute à péage Dakar Diamniadio, dans son parcours de la banlieue dakaroise. Qu’en est-t-il des coûts réels, (dans le budget de l’Etat), entraînés par les travaux réalisés dans la ville de Thiès en 2003/2004 du coût de la statue de la Renaissance Africaine et les parties prenantes du montage financier qui a permis sa construction ? Les exemples sont nombreux… Sachant qu’une constatation statistique ne saurait se substituer à un examen scientifique, l’imprécision de ces sources statistiques a rendu très difficile la théorisation et nous a dissuadés, en tant que chercheur, de nous engager sur certains terrains mal préparés (marchés publics et la notion de « moins disant », les surfacturations (affaire Bara Tall). Et, en même temps, l’insuffisance quantitative et qualitative des travaux scientifiques publiés dans ces domaines ne permet pas de clarifier les données floues115, préalable indispensable à l’amélioration de la collecte statistique. 113 Dorier-Appril Elisabeth, Dir. 2001, Vocabulaire de la ville notions et références, Editions du Temps, 191 pages. Voir aussi sur l’urbain, « la ville des démographes, par Hérvé Le Bras (pages 62-70) et la ville des géographes », M. Lusseault (pages 21-35). 114 L’Agence Nationale pour l’Organisation de la Conférence Islamique a été créée par décret en 2004 ; Elle a travaillé « de concert avec le Ministère de l’urbanisme et de l’Aménagement du territoire, et le Ministère du Patrimoine Bâti, de l’Habitat et de la construction » Le livre d’Abdou Latif Coulibaly : Comptes et mécomptes de l’ANOCI…? ne peut pas, donc, être une source « au-dessus de tout soupçon » car revendiquant lui-même le statut « d’opposant » au pouvoir actuel. 60 Les données qualitatives résultant de nos recherches documentaires. Il s’agit des données que nous avons obtenues à partir de nos entretiens qualitatifs, par exemple, dans la zone péri urbaine de Saint-Louis, espace compris entre le village quartier communal de Ngallèle au sud et le village de Ndiawdoun au nord-ouest de la ville. Y compris, donc, toute la zone de Boudiouk-Sanaar-Diougop. Il s’agit d’y tester quelques variables liées à la périurbanisation. En réalité, le choix des enquêtés résulte de plusieurs études pilotes que nous avons nous même réalisées dans le cadre de recherches sectorielles répétitives dans le secteur concerné par les enquêtes. La question de du choix été résolue de manière empirique. Ce type d’enquêtes a été aussi mené dans l’île de Ndar, pour saisir (grosso modo) le niveau des revenus familiaux investi pour préserver, par exemple, le patrimoine, les propriétaires de leur logement, ce que représentent la location et les différentes variables qui sont liées. D’autres données résultent de nos propres comptages, par exemples le nombre d’autorisations de construire annuellement enregistrée dans des communes comme Saint-Louis. En ce qui concerne les lotissements, la rénovation et la restructuration urbaine les données spécifiques sur ces opérations utilisées dans ce travail ont été tirées de documents émanant des services maîtres d’œuvre de ces opérations urbaines : services régionaux ou départementaux de l’urbanisme et de l’habitat, Bureau d’architecture moderne, Direction du patrimoine bâti de l’Etat, l’ordre des architectes, bureaux d’études et d’architecture… Une difficulté tient à la profusion des sources disponibles. Dans le domaine de l’habitat d’importantes lacunes subsistent. Il y a plusieurs catégories de données sur le logement en fonction des services, organismes ou des sociétés qui les fournissent. Les données ministérielles, les données des sociétés immobilières publiques, les données des sociétés immobilières privées, les données qui résultent des projets de ces trois types de fournisseurs de chiffres seront utilisées dans l’étude en souhaitant faire la part des choses (ce qui est difficile à faire) entre ce qui est à l’état de projet et ce qui est effectivement réalisé. Cette démarche est valable pour les sources évoquées. I- Les entretiens que nous avons eus dans les quartiers au gré de nos rencontres ont porté sur les appréciations des nouvelles actions de l’Etat dans les villes. Nous n’avons pas mené d’enquêtes ménages ni soumis de questionnaires. 61 Notre étude est plutôt documentaire. Cette procédure essaye de coller aux « étapes d’une enquête qualitative » tel que les décrit Javeau, 1988116. Il s’agissait de discuter avec des personnes dans les quartiers ou dans les centres villes et de recueillir des informations sur les sujets de l’heure qui intéressaient les villes. Les limites de ce type d’enquête résident sur le constat que pendant cette période de crise, beaucoup d’enquêtés ont profité de notre passage pour se décharger de tous les problèmes qui les tracassaient. Réactions de prestige, et/ou repli face à la question personnalisée face à la variable « niveau de salaire ou de revenus» ou les «dépenses alimentaires», ont émaillé ces enquêtes. Nous n’avons pas dressé de tableau statistiques pour la raison simple que le travail que nous menons dans ce travail est plutôt interprétatif donc qualitatif. Les entretiens à bâtons rompus que j’ai eus avec les autorités de l’urbanisme à Saint-Louis et à Dakar : – directeurs de Sociétés immobilières publiques et privées ; – directeurs de banque et organisme de financement du logement ; – autorités de l’urbanisme (anciennes et nouvelles). Personnes ressources « 73% des marché de prestation intellectuelle » en 2009 remportées par des entreprises nationales117 . Une expertise avérée donc des sénégalais donc des personnes interrogées qui permet leur interrogation dans la recherche d’interprétation qualitative des situations urbaines. Il nous a néanmoins fallu faire la différence entre le discours idéologique de certains « Directeurs », quand il s’agit d’apprécier les interventions gouvernementales dans un domaine précis comme la pertinence et la localisation des infrastructures. Ma position d’enseignant chercheur depuis 22 ans à Saint-Louis m’a permis d’effectuer de nombreux travaux sur la ville que je compte valoriser dans le cadre de cette thèse. Ce travail a bénéficié de plusieurs séjours dans les universités sénégalaises, européennes et américaines.
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