Les neuf défis du manager

Les conseils pour mieux manager

Se comprendre, juste une question de temps

La journée catastrophe de Duponcel illustre parfaitement un paradoxe de la société moderne… Le fait de posséder  de plus en plus de moyens pour communiquer, s’informer, se faire comprendre, ne garantit en aucun cas le fait d’être compris. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir tout essayé : séminaires de toutes sortes (de « Bien prendre la parole en public » à « Vaincre son trac », formations à la program-mation neurolinguistique, analyse transactionnelle, communication non verbale…). Force est de constater qu’il n’y a pas de formule miracle et que la mise en œuvre dans l’action reste toujours le point faible. À l’heure où le fax, le courrier électronique et le téléphone crachent leurs millions d’informations quotidiennes, il s’agit peut-être de revenir à un peu plus de bon sens et beaucoup d’humilité, à partir d’une question centrale : Quelles sont les raisons du décalage entre message et impact ou comment réduire les écarts entre l’intention de départ et l’impact obtenu ?

Tous des incompris

À force de confondre en permanence vitesse et précipitation, rien d’étonnant à ce que certaines données soient erronées, mal émises ou tout simplement mal reçues. Entre grignoter quelques secondes et perdre du temps à essayer d’en gagner, tout est question d’état d’esprit. L’incompréhension d’un message devient beaucoup plus chronophage et néfaste que les explications nécessaires pour bien se faire comprendre.
Bien sûr, tout ne se réduit pas à un simple problème de temps. Émission, réception, type d’information ou support de communication, l’important en fin de compte, c’est l’adéquation entre le message émis et le message reçu qui est primordiale. En la matière, de nombreux travers sont à éviter.

Reçu 5 sur 5, Roger…

Dans les annonces mal comprises, on a tendance à mettre systématiquement en cause l’émetteur du message, même si nos pratiques ne consistent plus à le mettre à mort en cas de mauvaises nouvelles… Quoique cette assimilation du communicant à son message soit régulièrement réactivée. Le conseil en communication d’un récent président des États-Unis n’avait-il pas basé toute sa stratégie sur l’assertion suivante : « MR President, YOU ARE THE MESSAGE ! ». Qu’en déduire aujourd’hui alors que ce « grand communicateur » est la malheureuse victime du stade ultime de la maladie d’Alzheimer ?

Les neuf défis du manager

Au-delà de cet exemple, il faut se rendre à une simple évidence, celle de ne pas trop vite oublier le récepteur. Car sans réelle écoute, une communication est très souvent inefficace. Nous ne répéterons jamais assez cette vérité incontournable :
L’efficacité d’une communication se mesure à l’effet produit.
Autrement dit, la véritable signification d’un message est le feed-back que l’on en obtient. Il est donc absolument indispensable de ne considérer qu’un message est « bien » passé que lorsque l’on a pu contrôler la réception et la compréhension de ce dernier. Combien de livres et de séminaires de formation ont développé ce principe de base : « aucune formulation ne peut être, à elle seule, parfaitement efficace » ? Il faut accepter ce fait, et donc le risque d’erreur associé, pour s’investir dans une plus grande qualité de vérification de l’assimilation de l’autre : froncement de sourcils, expression faciale interrogative, moue dubitative, sourire poli… Et surtout, écoutons l’autre avec nos yeux lorsque celui-ci nous écoute. Tous ces signes révélateurs (à condition que l’on veuille bien y prêter attention) permettront de répondre plus facilement aux questions suivantes : Ai-je bien été entendu ? A-t-il bien compris ce que je voulais lui dire ? Ai-je été suffisamment efficace par rapport à mon objectif de départ ?
Il est vraisemblable que certains interlocuteurs de Duponcel ont manifesté ce type de signes extérieurs, mais que ce dernier était trop préoccupé par son propre discours et les idées qu’il voulait véhiculer pour y être attentif. Les cinq principes de base d’efficacité d’une communication :
• Préparer son entretien,
• Clarifier son objectif,
• Adapter son message à son (ses) interlocuteur(s),
• Laisser le temps à l’autre d’être réceptif,
• Avoir la patience d’écouter en retour,
Ces principes tout simples ont pourtant de plus en plus de mal à être mis en pratique : multiplication des canaux de communication, développement exponentiel de la quantité d’informations à traiter, manque chronique de temps et difficulté à gérer volontairement et efficacement ses priorités.
Une boucle infernale se met facilement en place entre les interlocuteurs. Résultats : des échanges peu efficaces, une multiplication des déformations et trop souvent une perte de temps, source de stress.
Dans l’exemple de Duponcel, nous rencontrons trois grands types de dérives : l’illusion télépathique, le feed-back mal exprimé et l’inaptitude à formuler un compliment.

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La télépathie source d’asphyxie

Tu sais bien ce que je pense… Je sais bien ce que tu penses !
Pris dans la tourmente du quotidien, les managers auraient-ils développé une sorte de 6e sens : la télépathie ? Combien de dirigeants « zappent » d’une activité à une autre, d’un dossier à un autre, du coq à l’âne (sans d’ailleurs bien hiérarchiser ce qui est important ou non) ? Dans ses travaux les plus connus, Henry Mintzberg a démontré de manière irréfutable qu’un dirigeant ne consacrait que 7 minutes d’affilée à un même sujet, et ceci y compris dans des processus de prise de décision. Interruption, coup de téléphone, nouvelle idée… Des séquences saccadées qui ont une conséquence immédiate : nous ne prenons pas le temps de suffisamment bien communiquer et, surtout, nous avons l’illusion que les autres sont informés en permanence de nos activités quotidiennes et préoccupations du moment.
Erreur fatale, car si la télépathie est un phénomène paranormal qui peut être éventuellement démontré (dans certains cas très précis), il est certain que cela ne peut pas être un mode d’échange habituel dans l’entreprise.
En tout cas, à trop fonctionner sur ce mode, on ne fait qu’accumuler les incompréhensions et les mauvaises interprétations. Au lieu d’émettre à cent à l’heure des messages incomplets ou indécodables, nous ferions mieux de nous demander si le récepteur possède bien le « décodeur », c’est-à-dire tous les renseignements nécessaires à une bonne compréhension. Si ce n’est pas le cas, serait-il possible de le lui procurer avant toute autre chose ?
Ainsi, dans le couloir, en ne précisant ni le nom du dossier, ni celui du client à son collaborateur Michel, Duponcel fait une belle démonstration de télépathie. C’est tellement évident pour lui que ce doit l’être aussi et avec la même acuité pour Michel. Duponcel en est-il à quatre ou cinq secondes près ? On imagine aisément les dégâts potentiels qui peuvent résulter de cet épisode en apparence anodin :
– D’abord une inquiétude grandissante chez Michel, qui se rend compte que la pression monte sans pouvoir passer à l’action (quel client ?) et faire avancer ses dossiers ;
– Ensuite, la chute de la crédibilité de Duponcel auprès de Michel, pour son incapacité à préciser ses besoins ; ceci alors même que Duponcel peut commencer à douter de la capacité de Michel à pouvoir gérer efficacement les projets !

Feed-back, l’impact du management

Le feed-back tient une place très importante dans les relations professionnelles. C’est une des fonctions majeures du management, à la base de l’efficacité réelle de la relation entre un responsable et son collaborateur. Grâce au feed-back, la communication devient réellement interactive et source d’enrichissement mutuel. Un retour sur un dossier ou sur un travail qui s’est plus ou moins bien passé, toutes les raisons sont bonnes pour renvoyer une information très précieuse à l’autre.
Le feed-back peut prendre plusieurs formes : purement informatif, il sera objectif, mais il pourra également être « renforçateur » en incitant à poursuivre dans une direction précise ou au contraire « correctif » pour remettre sur le bon chemin. Sans ce feed-back, les personnes managées sont désorientées par manque de repères ou pire démotivées par des risques de malentendus en cascade. Elles auront beaucoup de difficultés à orienter leurs actions. Il est démontré qu’une des sources de stress professionnel est bien illustrée par la situation dans la quelle « Je ne sais pas précisément ce que l’on attend ou ce que l’on pense de moi ».
Ainsi, François investit le meilleur de lui-même pour obtenir l’approbation du client. Et Duponcel, par ses réflexions maladroites, ne lui manifeste aucun retour positif. Injuste, cette absence de message en devient vite démotivante : « À quoi bon se défoncer si cela ne suscite pas plus d’intérêt ? » Oui, à quoi bon ? « Était-ce si important que cela d’ailleurs ? »

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