Les Metal-Organic Frameworks

Les Metal-Organic Frameworks

Les matériaux poreux

Les matériaux poreux désignent des matériaux présentant une porosité structurale, leurs structures tridimensionnelles laissant apparaître de nombreuses cavités appelées pores. Les réseaux poreux ainsi formés peuvent être de nature très différente avec une porosité plus ou moins homogène et régulière. L’existence de cette porosité offre à ces matériaux une grande surface spécifique définie comme la surface interne accessible par unité de masse du matériau. Cette grande surface spécifique confère aux matériaux poreux des propriétés d’adsorption et de catalyse très intéressantes. Leurs applications industrielles sont très nombreuses, notamment dans le domaine de la catalyse hétérogène et des technologies de séparation, purification et stockage de gaz d’intérêt industriel. Par exemple, les zéolithes sont très largement utilisées dans l’industrie pétrolière notamment pour le craquage catalytique du pétrole afin d’obtenir des hydrocarbures plus légers, et comme tamis moléculaire pour la séparation des alcanes linéaires et ramifiés. Elles sont également utilisées comme agents déshydratants du gaz naturel ou pour le piégeage et le stockage des ions radioactifs tels que le césium et le strontium, ou d’ions lourds (Pb, Hg,…). La classification de l’IUPAC distingue les matériaux poreux en trois catégories en fonction de la taille de leurs pores [1] : — les solides microporeux, dont le diamètre des pores est inférieur à 2 nm — les solides mésoporeux, dont le diamètre des pores est compris entre 2 et 50 nm — les solides macroporeux, dont le diamètre des pores est supérieur à 50 nm On regroupe sous le nom de matériaux nanoporeux, les matériaux microporeux et mésoporeux dont la taille de pores est inférieure à 50 nm. La figure 1.1 présente un exemple des trois types de matériaux poreux. Les matériaux poreux peuvent également être classés en fonction de leur régularité structurale (figure 1.2). On distingue alors : — les matériaux cristallins, tels que les zéolithes et les MOFs, présentant à l’échelle atomique un arrangement tridimensionnel périodique. — les matériaux poreux réguliers, comme les argiles ou les nanotubes de carbone, dont le réseau poreux est bien défini mais ne présente pas de régularité cristalline. — les matériaux poreux amorphes qui sont considérés comme des liquides qui ne coulent pas. En effet, ces matériaux présentent une structure atomique désordonnée à longue distance comme les liquides, mais qui comme les solides reste figée et garde sa forme. Ils ne présentent pas de périodicité cristalline, de forme irrégulière et la distribution de taille de leurs pores est assez large. Parmi les matériaux amorphes on peut citer l’exemple du verre de silice et d’une multitude d’autres matériaux d’origine très variée tels que les charbons actifs, le verre Vycor et les aérogels. On peut également distinguer les matériaux poreux en fonction de leur composition chimique, en deux grandes catégories : les matériaux organiques et les matériaux inorganiques. La première catégorie regroupe entre autres les systèmes à base de carbone, notamment les polymères tels que les COFs ou Covalent Organic Frameworks. Dans la classe des matériaux nanoporeux inorganiques, qui est historiquement la plus étendue, on trouvera entre autres les matériaux de type oxyde (à base de silice, titane ou zircone), les composés binaires tels que les sulfures ou les aluminophosphates (AlPO4). Depuis quelques années se développent des matériaux hybrides organo-minéraux tels que les organo-siliciques qui possèdent des structures et des fonctionnalités très variées. Une nouvelle classe de matériaux nanoporeux a également émergé : les matériaux hybrides organiquesinorganiques aussi appelés MOFs (Metal-Organic Frameworks). Ces matériaux constituent le — 6 — 1.2 — Les zéolithes sujet d’étude de ma thèse. J’introduirai donc plus en détail cette famille de matériaux dans la suite du manuscrit. Je présenterai brièvement au préalable la famille des zéolithes, car je prendrai tout au long de ce manuscrit ces matériaux pour comparaison.

Les zéolithes

 On doit le nom zéolithe (du grec zeo : bouillir et lithos : pierre) à la curiosité du minéralogiste suédois Baron Crönstedt.[5] En 1756, afin d’étudier la stabilité en température d’un minéral naturel, la stilbite, il chauffa le matériau et observa que, vers 150 °C, la pierre se couvrait de bulles comme si elle se mettait à bouillir. Il baptisa alors cette famille de matériaux les zéolithes. Dans les décennies suivantes, une vingtaine de zéolithes naturelles furent découvertes. Il fallut néanmoins attendre environ un siècle pour que des applications prometteuses de ces matériaux se développent tirant ainsi avantage des propriétés très particulières de ces matériaux (structure poreuse et grande surface spécifique). En 1862, le chimiste Henry Sainte-Claire Deville prépara pour la première fois un homologue synthétique des zéolithes naturelles, la levinyte, ouvrant ainsi la voie à la synthèse de nouvelles zéolithes n’existant pas à l’état naturel. Aujourd’hui, on dénombre 206 types de structures zéolithiques dont 62 sont d’origine naturelle et 144 sont purement artificielles. 

Composition et structure 

Les zéolithes sont des aluminosilicates poreux cristallins (sous–groupe des tectosilicates) appartenant à la famille des matériaux nanoporeux. La nature cristalline de leur structure offre à ces matériaux une porosité de forme et de taille très homogène. Leur structure est constituée d’un assemblage régulier et tridimensionnel de tétraèdres SiO4 ou AlO4 reliés entre eux par leurs sommets comme représenté sur la figure 1.3. Le réseau poreux ainsi formé présente en fonction de l’arrangement dans l’espace des unités tétraèdriques, des cavités poreuses de forme et de taille très différentes d’une zéolithe à l’autre. Il en résulte une grande variété structurale et topologique de ces matériaux dont le diamètre de pores varie de quelques nanomètres à quelques angströms. Les pores peuvent par exemple être cylindriques, sphériques ou parallèles, et indépendants ou connectés entre eux par des fenêtres. L’International Zeolite Association attribue à chacune de ces différentes structures zéolithiques un code à trois lettres comme MFI, FAU ou LTA. La figure 1.4 présente deux types de structure cristalline parmi les plus étudiées, la zéolithe A (LTA) et la faujasite (FAU).La topologie définit une famille de zéolithes, au sein de laquelle la composition chimique peut varier. La composition générale d’une zéolithe est de type M𝑥/𝑚Al𝑥Si1−𝑥O2. Pour une structure donnée, le nombre d’atomes de silicium et d’aluminium, caractérisé par le rapport Si/Al, ainsi que la nature des cations M𝑚+ présents dans les pores peuvent varier. Le rapport Si/Al peut varier entre 1 (autant d’aluminium que de silicium) et l’infini pour lequel la zéolithe de formule chimique SiO2 est dite purement silicique. Chaque introduction d’un atome d’aluminium, de degré d’oxydation +III, conduit à l’apparition d’un défaut de charge négative qui est compensé par la présence de cations dits extra-charpentes assurant la neutralité du matériau. Ces cations mobiles sont généralement des cations monoatomiques, le plus répandu étant le Na+, mais on peut également trouver K+, Ba2+, Ca2+, etc. La présence de ces cations dans la structure contribue aux remarquables propriétés d’adsorption et de catalyse de ces matériaux. La grande versatilité de ces matériaux nanoporeux offre un large panel d’applications. Chaque application tire parti d’une caractéristique spécifique des zéolithes. Dans l’industrie, on les utilise notamment comme échangeurs d’ions (cations extra-charpentes), catalyseur (grande surface spécifique), pièges moléculaires et tamis moléculaires (taille de la porosité et propriétés physico-chimiques variables). 

Les MOFs : matériaux hybrides organiques-inorganiques

Les matériaux hybrides organiques-inorganiques poreux, Metal–Organic Frameworks, constituent une classe relativement récente de matériaux nanoporeux cristallins. Les travaux pionniers sur ces matériaux ont été menés par Robson et al. dans les années 90.[6, 7] L’utilisation du terme « Metal-Organic Framework » remonte à 1995, et l’étude systématique de ces matériaux comme une classe à part entière au début des années 2000. Le groupe de Omar Yaghi synthétisa, en 1999, une MOF de taille de pore très importante appelée MOF-5, suscitant ainsi la curiosité de toute la communauté scientifique travaillant sur les matériaux poreux (figure 1.5).[8] Depuis lors, le nombre de publications portant sur la synthèse, la caractérisation et l’étude des matériaux hybrides organiques-inorganiques connaît une croissance exponentielle. On dénombre aujourd’hui plus de 1000 publications par an sur le domaine, témoignant du fort engouement de la communauté pour ces nouveaux matériaux.

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