Politiques publiques et Plans Nationaux sur les maladies chroniques
Qu’est-ce que la santé publique ?
Définition
En 1952, L’OMS définit la santé publique comme « la science et l’art de prévenir les maladies, de prolonger la vie et d’améliorer la santé et la vitalité mentale et physique des individus, par le moyen d’une action collective concertée visant à assainir le milieu ; lutter contre les maladies ; enseigner les règles d’hygiène personnelle ; organiser des services médicaux et infirmiers en vue d’un diagnostic précoce et du traitement préventif des maladies ; mettre en œuvre des mesures sociales propres à assure à chaque membre de la collectivité un niveau de vie compatible avec le maintien de la santé ».
Le Ministère de la santé et autres institutions publiques participent à l’élaboration de plans nationaux de santé, avec l’aide des représentants des établissements de santé, des fédérations professionnelles, des sociétés savantes et des associations de patients.
Les Agences Régionales de Santé pilotes déclinent également les plans nationaux pour la région et les territoires, en les adaptant aux spécificités de la région et aux besoins de la population.
Au niveau mondial, c’est notamment l’Organisation Mondiale de la Santé qui participe à l’élaboration des plans de santé publique.
Exemples de plans nationaux pour les maladies chroniques
Des plans nationaux ont été mis en place pour améliorer notamment la prévention et la prise en charge des maladies chroniques. Les derniers principaux mis en place sont :
• Le plan 2007-2011 pour l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques
• Le plan Cancer 2014-2019
• Le plan maladies Neuro-Dégénératives 2014-2019
• Le plan d’action Accidents Vasculaires Cérébraux 2010-2014
Epidémiologie des maladies chroniques
Evolution de la prévalence et de l’incidence des maladies chroniques
Nous nous intéresserons ici plus particulièrement aux Maladies Non Transmissibles (MNT), puisque ce sont des maladies chroniques en constante évolution, liées au mode de vie de la population et résultant d’une association de facteurs génétiques, physiologiques, environnementaux et comportementaux.
En France, la population est chaque année plus nombreuse à souffrir d’une Affection Longue
Durée ou ALD. Le nombre est en progression constante depuis 2008 (Figure 2), reflétant la hausse de la prévalence des maladies chroniques (nombre de personnes atteintes par une maladie à un moment donné).
En effet, selon le dernier bilan établi par l’Assurance Maladie18, en 2016, 10,4 millions de personnes affiliées au régime général de l’Assurance Maladie bénéficient du dispositif des affections de longue durée (ALD) : 16,9% des Français affiliés au régime général seraient touchés.
Sur la seule année 2016, 300 000 personnes du régime général de l’Assurance Maladie ont été nouvellement affiliées au dispositif des affections de longue durée par rapport à 2015.
Cependant, on estime à environ 15 millions le nombre total de malades chroniques en France (non diagnostiqués, non pris en charge par l’assurance maladie, sans traitements…).
Taux de mortalité des différentes maladies chroniques
Selon l’OMS, les Maladies Non Transmissibles sont responsables chaque année du décès de plus de 41 millions de personnes, soit 71% des décès dans le monde. Les maladies cardiovasculaires sont responsables du plus grand nombre des décès dans le monde dus aux MNT, soit 17,9 millions par an, suivies des cancers (9 millions), des maladies respiratoires (3,9 millions) et du diabète (1,5 million).
Selon le dernier rapport de l’OMS portant sur le taux de mortalité des maladies non transmissibles par pays, les MNT sont responsables en France de 87% des décès en 2014 (Figure 3). De plus, la probabilité de mourir d’une MNT entre 30 et 70 ans est de 11%. Il est également estimé qu’en 2014, les MNT ont été à l’origine de 554 000 décès. (Annexe 2).
Essor des maladies chroniques, facteurs de risques etvhabitudes de vie des Français
Même si les Maladies Non Transmissibles résultent d’un certain nombre de facteurs, dont les facteurs génétiques et physiologiques, certains facteurs environnementaux ou liés au mode de vie de la population peuvent accroître le risque ou aggraver certaines pathologies.
La pollution
Les concentrations dans l’air de nombreux polluants atmosphériques (notamment les particules, le NO2 et l’O3) restent stables dans la plupart des villes françaises, malgré les réductions nationales des principaux polluants, et dépassent généralement les valeurs réglementaires européennes et nationales.
Cette pollution atmosphérique peut avoir des conséquences sur la santé (respiratoires, cardiovasculaires, neurologiques, sur le fœtus…) et particulièrement chez les enfants.
L’alcool
Il y a une diminution de la consommation d’alcool en France assez rapide depuis 2000, mais qui a tendance à ralentir depuis 2005. En 2015, 8 adultes sur 10 déclarent avoir bu de l’alcool au cours de l’année écoulée : 43,9 % toutes les semaines et 8,0 % tous les jours. Cette consommation est plus importante chez les hommes que chez les femmes : respectivement 86,6 % et 75,5 % en consommation dans l’année ; 56,5 % et 32,3 % en consommation hebdomadaire ; 12,3 % et 3,9 % en consommation quotidienne25.
La consommation d’alcool régulière et excessive peut avoir d’autres graves conséquences sur la santé (apparition de cirrhoses, hépatites, neuropathies, pancréatites…).
De plus, une étude britannique publiée en avril 2018 par the Lancet a révélé que le niveau de consommation sans danger exagéré est de 100 g d’alcool pur par semaine (10 verres de bière (25cl), de vin (10cl) ou d’alcool fort (3cl)). Au delà de cette consommation, l’étude a estimé que l’espérance de vie diminuait de 15 min pour chaque verre26.
Le tabac
Malgré une proportion toujours très importante de fumeurs en France, la prévalence du tabagisme quotidien connaît en 2017 une diminution inédite depuis 10 ans: 26,9 % de fumeurs en 2017, contre 29,4 % en 2016 et 29,7% en 2010.
Cette consommation est toujours supérieure pour les hommes (29,8 % des hommes et 24,2 % des femmes de 18 à 75 ans).
Les jeunes hommes de 18-24 ans ne sont ainsi plus que 35,3 % à fumer leur paquet quotidien contre 44, 2 % en 2016). Pour les jeunes femmes, toujours plus d’un tiers fume quotidiennement.
Pour les adolescents (6 à 17 ans), même si les consommations observées en 2017 restent les plus faibles depuis 2000, encore 34,1 % disent avoir fumé au moins une cigarette au cours des 30 jours précédant le sondage, et 25,1% ont une consommation quotidienne.
Les conséquences du tabac sur la santé sont lourdes (cancers, maladies cardio-vasculaires, maladies respiratoires…) et le tabagisme actif constitue la première cause de mortalité prématurée évitable : chaque année, en France, il entraînerait le décès de plus de 73 000 personnes. Le tabagisme passif tue chaque année 3000 à 5000 personnes qui ne fument pas, dont 2/3 de maladies cardio-vasculaires.
De plus, 90% des cancers du poumon sont attribuables au tabagisme.
Le surpoids et l’obésité
Selon l’OMS, le surpoids et l’obésité constituent un des principaux facteurs de risque de morbidité (maladies cardio-vasculaires, arthrose, diabète, cancers de l’endomètre, du sein, des ovaires, de la prostate, du foie, de la vésicule biliaire, du rein et du colon) et de mortalité. En effet, 92% des diabétiques ont un diabète de type 2 touchant majoritairement les individus en surpoids ou obèses.
D’après une étude de Santé Publique France27, 54 % des hommes et 44 % des femmes (entre 18 et 74 ans) sont en surpoids ou obèses (IMC ≥25). Cette prévalence augmente avec l’âge. De plus, La prévalence de l’obésité (IMC ≥30) est estimée à 15 %, sans distinction entre hommes et femmes. Les prévalences de l’obésité et du surpoids restent plutôt stables bien qu’en légère augmentation par rapport au début des années 2000.
Chez les enfants entre 6 et 17 ans, la prévalence du surpoids est estimée à 17 % dont 4 % d’obèses. Cette prévalence reste également plutôt stable par rapport au début des années 2000.
Sédentarité
La sédentarité peut, au même titre que le tabagisme et les déséquilibres alimentaires, entraîner la survenue du surpoids et de l’obésité ainsi que des risques d’apparition de maladies chroniques comme les affections cardiovasculaires ou le diabète.
En 2017, 46 % de la population Française ne pratique jamais de sport et 7h26 est le nombre d’heures en moyenne que les Français passent assis dans une journée. De plus, 67% des Français sous-estiment les risques pour la santé liés à la sédentarité28.
Alimentation
Le lien entre l’alimentation et le risque d’obésité et/ou d’apparition de maladies chroniques (diabète de type 2, maladies chroniques digestives, rénales, hépatiques, maladies cardiovasculaires, cancers…) est établi. Par exemple, la transition d’une alimentation traditionnelle vers une alimentation plus industrialisée riche en aliments raffinés et très énergétiques a conduit à des épidémies mondiales d’obésité et de diabète de type 2.
De même, il a été démontré dans beaucoup d’études qu’une consommation excessive de viande rouge peut avoir un effet délétère sur la santé et sur le risque d’apparition de maladies notamment cardio-vasculaires29.
De plus, les fruits et légumes, considérés comme des aliments protecteurs des maladies chroniques cités au-dessus, apparaissent comme insuffisamment consommés par les Français: seulement 40 % de la population a une consommation conforme aux recommandations de l’Etat30.
Vieillissement de la population
Le vieillissement de la population s’accélère fortement à l’échelle planétaire. En effet, selon l’OMS, aujourd’hui, 125 millions de personnes sont âgées de 80 ans et plus. En 2050, il est attendu que la population mondiale âgée de 60 ans et plus atteigne 2 milliards de personnes, contre 900 millions en 2015.
Si le vieillissement et donc l’allongement de la vie de la population ouvre d’abord de nouvelles possibilités pour les personnes âgées, leur famille et pour la société, il est aussi synonyme d’augmentation des malades liées à la vieillesse.
En effet, la recrudescence des maladies chroniques comme l’arthrose, la BPCO, le diabète, la dépression, la maladie d’Alzheimer et autres démences s’explique aussi par le vieillissement constant de la population mondiale et Française31.
Un coût majeur pour la sécurité sociale
L’augmentation du nombre de personnes en ALD a un coût de plus en plus lourd pour la sécurité sociale : en 2015, les dépenses liées à ces maladies atteignaient 89,3 milliards d’euros, tous régimes confondus, soit plus de 60,8% du total des remboursements de l’assurance maladie32.
En 2015, voici les dépenses des 5 maladies qui représentent le coût le plus important pour la sécurité sociale (Figure 4) :
– Les maladies psychiatriques ou psychotropes (19,3 milliards d’euros)
– Les cancers (14,1 milliards d’euros)
– Les maladies cardioneurovasculaires (13,2 milliards d’euros)
– Le diabète (6,8 milliards d’euros)
– Les maladies neurologiques ou dégénératives (5,5 milliards d’euros)
Le diagnostic des maladies chroniques : un enjeu majeur
Selon l’OMS, « Le dépistage consiste à identifier de manière présomptive à l’aide de tests, d’examens ou d’autres techniques susceptibles d’une application rapide, les sujets atteints d’une maladie ou d’une anomalie passée jusque-là inaperçue.
Les personnes pour lesquelles les résultats sont positifs ou douteux doivent être orientées vers leur médecin pour vérification du diagnostic et, si besoin est, pour la mise en place d’un traitement. » Le dépistage n’est donc qu’une étape avant le diagnostic. En effet, les patients dépistés seront ensuite référés aux médecins et soumis à d’autres tests avant que le diagnostic ne soit établi ou récusé par le médecin.
D’après une étude réalisée sur des personnes atteintes de diabète type II et d’hypercholestérolémie, 52% de ces patients ont découvert leur pathologie au cours d’un examen de routine.34
En effet, il existe une très forte méconnaissance de l’hypercholestérolémie familiale et sa gravité est souvent sous-estimée. En France, les études épidémiologiques les plus récentes estiment qu’entre 97 et 99 % des cas d’hypercholestérolémie familiale ne sont pas dépistés alors qu’1 personne sur 200 en serait atteinte. Dans la forme homozygote, la plus grave, quasiment 50% des enfants ont été diagnostiqués après des accidents qui ont de graves conséquences.