Les interventions psychologiques reliées au domaine de l’anxiété
La prochaine section présentera les principales approches tirées de la psychologie traditionnelle et de la psychologie du sport conçues pour agir sur l’ anxiété. Notons aux [ms de cette section que, de façon générale, les deux principales options pour réduire l’anxiété sont du corps vers l’esprit ou de l’esprit vers le corps (Sellars, 2004). Dans le premier scénario, la présomption faite est qu’une fois le corps détendu, les pensées négatives diminueront, tandis que, dans le deuxième scénario, on croit qu’en modifiant le contenu des pensées, cela mènera à une diminution des symptômes physiques (Sellars, 2004). Les interventions employées en psychologie clinique L’article de recension des écrits d’Anthony (20 Il) permet de bien effectuer un survol des interventions existantes dans le domaine de la psychologie clinique. Parmi les approches employées en contexte clinique, les approches psychologiques qui se sont montrées efficaces incluent une exposition répétée du patient au sujet de sa peur ou de ses inquiétudes. Cette exposition est d’autant plus efficace lorsqu’elle est combinée à d’autres techniques cognitives, comme la restructuration cognitive, ayant pour but de modifier les croyances biaisées qui entretiennent l’anxiété de l’individu.
Le ré entraînement attentionnel aide aussi les personnes souffrant d’anxiété à réorienter leur attention vers des stimuli plus neutres, au lieu d’être constamment concentrées sur les stimuli représentant une menace. Anthony (2011) souligne également l’efficacité d’une intervention gagnant en popularité, soit la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT). Cette thérapie basée sur la pleine conscience a pour but de réduire l’anxiété en acceptant les pensées négatives au lieu de les combattre et en s’engageant de façon comportementale vers une vie riche correspondant aux valeurs du patient. L’ACT s’est d’ailleurs avéré efficace pour traiter le Troubles d’anxiété généralisée. Finalement, lorsque l’on souhaite modifier le comportement d’une personne anxieuse, l’entretien motivationnel apparaît comme une solution efficace. En effet, en augmentant le sentiment de compétence du patient, on augmente du même coup sa motivation intrinsèque envers le comportement souhaité, ce qui résulte en une hausse dudit comportement. À la lumière de cette brève synthèse de l’article d’Anthony (20 Il), on peut donc affirmer qu’un traitement complet de l’anxiété s’attarde principalement sur le contenu des pensées, sur l’engagement comportemental et sur la direction attentionnelle de la personne. Il est aussi à noter que la plupart des interventions présentées sont d’ordre cognitif, donc elles utilisent le chemin de l’esprit vers le corps.
Les interventions employées en psychologie du sport
Dans le domaine de la psychologie du sport, l’entraînement des habiletés mentales est l’approche préconisée pour améliorer la performance des athlètes, et ce, depuis les années 1980 (Weinberg & Gould, 2015). L’entraînement des habiletés mentales consiste à la pratique systématique et substantielle d’habiletés mentales ou psychologiques dans le but d’améliorer la performance, d’augmenter le plaisir ou d’atteindre une plus grande satisfaction personnelle dans le sport ou l’activité physique (Weinberg & Gould, 2015). Entre autres, Suinn (1983) propose un programme pour atteindre la performance optimale en sept étapes, c’est-à-dire en développant sept habiletés mentales, soit 1) la relaxation, 2) la gestion du stress, 3) le contrôle de la pensée positive, 4) l’autorégulation, 5) l’imagerie mentale, 6) la concentration et 7) le contrôle énergétique. En ce qui a trait à l’étape de la gestion du stress, l’athlète est amené à apprendre à reconnaître les situations stressantes en portant son attention au moment où il ressent du stress et comment celui-ci se manifeste dans son corps. Par la suite, dans le but de prévenir une baisse de performance causée par le stress, l’athlète apprend à se relaxer, à se centrer et à évaluer son niveau de stress.
Finalement, l’athlète apprend à contrôler son stress en ralentissant sa respiration, en contrôlant son attention, en se centrant et en prenant conscience du ralentissement de son corps. De plus, tout au long du programme proposé par SuÏnn (1983), la confiance en soi prend une place importante dans le but qu’elle remplace le doute dans les pensées des athlètes. Bien que plusieurs études aient confirmé l’efficacité de l’entraînement des habiletés mentales pour augmenter la performance sportive, Gardner et Moore (2006) stipulent que la majorité de ces études ne rencontrent pas les critères de support empirique basé sur les données probantes. Cette approche d’intervention serait donc reléguée au niveau expérimental. Ces auteurs suggèrent d’utiliser davantage les techniques de pleine conscience, reliant ainsi la psychologie traditionnelle et sportive. Par ailleurs, des interventions ont également été confectionnées pour prévenir et diminuer les effets de l’anxiété dans le sport, notamment en ciblant l’attention. En effet, la méthode de l’apprentissage implicite est employée pour amener les athlètes à apprendre leurs mouvements et techniques sans utiliser leurs connaissances explicites, c’est-à-dire en minimisant l’attention requise pour performer en apprenant davantage par observation. En ce sens, l’utilisation de l’apprentissage implicite servirait de facteur de protection contre les impacts de l’anxiété sur la performance, mais ne permet pas d’agir directement sur celle-ci (Farrow, Baker, & MacMahon, 2013).
La composante visuelle de l’EMDR : efficace ou non?
Bien que l’EMDR soit jugé comme une approche légitime pour gérer plusieurs problématiques de santé mentale par différents organismes nationaux accréditant les intervenants dans ce secteur de la santé, il existe une controverse quant à l’ importance de l’ajout de la composante visuelle dans cette approche thérapeutique pour expliquer son effIcacité. Plusieurs chercheurs se sont d’ailleurs demandé si l’ajout d’un travail visuel des yeux de la part d’un client dans une relation thérapeutique est effIcace ou non et leurs travaux ont été résumés dans deux méta-analyses soit celle de Davidson et Parker (2001) et une plus récente de Lee et Cuijpers (2013). Ce qui est intéressant par rapport à ces deux méta-analyses est que les auteurs de celles-ci arrivent à des conclusions diamétralement opposées. En effet, Davidson et Parker en 2001 ont conclu, en utilisant 13 études qui comparaient les effets de l’EMDR avec et sans mouvement oculaire sur différentes problématiques de santé mentale, que l’EMDR avec ou sans mouvements oculaires était tout aussi effIcace. Il va sans dire qu’un tel résultat peut remettre sérieusement en question l’importance du processus oculaire dans le cas de l’EMDR est ainsi questionner la pertinence de son étude.
Cependant, Lee et Cuijpers (2013) dans leur méta-analyse ont indiqué que celle de Davidson et Parker (2001) présente une faille méthodologique importante à savoir que 36les auteurs ont comparé les études en les considérant toutes égales, et ce, sans tenir compte du nombre de participants. Lee et Cuijpers (2013) ont donc examiné à nouveau l’objet de cette controverse en tenant compte de cet aspect et en y ajoutant les études plus récentes. Quinze essais ont été employés pour réaliser cette comparaison avec des populations cliniques. Ces auteurs ont aussi vérifié, avec Il essais effectués en laboratoire avec des populations non cliniques, si la présence ou non de mouvements oculaires avait un impact sur les souvenirs perturbants. En comparant l’impact de séances d’EMDR avec et sans mouvement oculaire en contexte clinique sur les souvenirs perturbants, ces auteurs ont constaté un effet significatif de taille moyenne lorsque le mouvement oculaire était présent. Pour les études n’étant pas conduites en contexte clinique, ils trouvent un effet significatif de taille moyenne à élevée. Ces résultats démontrent donc que Davidson et Parker auraient commis une erreur de type 2 et confirment l’utilité du mouvement oculaire pour des populations cliniques et non cliniques.
EMDR et sport Tandis que son utilité pour les pensées perturbantes dans les cas de traumatismes et autres troubles anxieux s’est avérée efficace, dans le domaine du sport, il est désormais indiqué d’utiliser ‘l’EMDR dans un but d’optimisation de la performance (Augeraud, 2017; Lendl & Foster, 2009). À cet effet, il existe un protocole connu appelé l’EMDR Performance Enhancement Psychology Protocol (Lendl & Foster, 2009) Ce dernier s’applique à l’anxiété de performance, aux croyances contre-productives, à l’inhibition comportementale et aux traumatismes, mais aussi pour aider le retour au sport d’un athlète ayant subi une blessure (Lendl & Foster, 2009). Cependant, la recherche quant à l’efficacité du traitement dans ce contexte est encore jeune et est constituée de seulement quelques études à cas unique. Dans une de ces études (Gracheck, 2010), la performance d’un cycliste s’est améliorée à la suite d’un traitement d’EMDR, puis son anxiété de performance a diminué alors que sa motivation et son estime de soi ont augmenté. L’EMDR s’est également avéré efficace pour traiter un cas du Lost move syndrome (Bennett & Maynard, 2017).
De façon plus anecdotique, l’EMDR est aussi utilisé pour aider des joueurs de la ligue majeure de baseball (Grand & Goldberg, 2011) et des acrobates du Cirque du Soleil (Ménard & Hailé, 2014). Si l’EMDR a peu été étudié en contexte sportif, les études conduites auprès des gymnastes se font encore plus rares. En effet, une seule étude à ce sujet a été trouvée. Celle-ci a été conduite auprès de 42 gymnastes américaines âgées entre 10 et 17 ans, participant aux niveaux 6 et plus, mais la grande majorité évoluait au niveau 8 (Arnold, 1997). Toutes les participantes vivaient avec un traumatisme ou des pensées négatives reliées à une chute ou une blessure passée, à une chute dont elles ont été témoins ou encore à une peur imaginée. L’objectif de cette étude expérimentale était d’observer l’effet de trois séances d’EMDR sur l’anxiété d’état des gymnastes. Après les trois séances, on pouvait observer une diminution significative de l’anxiété cognitive et somatique, une augmentation de la confiance en soi envers un mouvement, une évaluation plus faible du niveau de détresse et une évaluation plus élevée de la validité des pensées chez les gymnastes du groupe expérimental (Arnold, 1997). Quatre-vingt38 dix jours après le dernier traitement, l’anxiété somatique était toujours plus basse et l’évaluation de la validité des pensées était toujours plus élevée qu’au début de l’étude (Arnold, 1997). Ces résultats encourageants ont probablement contribué à ce que l’auteure de cette étude introduise l’EMDR à son programme d’intervention présenté plus tôt.
RÉSUMÉ |